" Ah bon, ton père est connu ici ? Et c'est quoi son boulot ? "
" Il travaille pour la mafia ! "
D'un coup d'un seul, je recrachais tout mon verre au visage de la dévergondée me faisant face. Crier que son père est un salaud, devant tout le monde ! Je veux dire, normalement, la mafia, c'est planqué, tapis dans l'ombre, ça fait pas de bruit. Et elle, voilà qu'elle vend son père, des histoires en veux-tu en voilà.
D'un autre côté, je suis fasciné par la mafia. La vraie. Celle qui a un code d'honneur, un vrai. Celle qui rappelle robin des bois, sauf qu'elle redistribue pas forcément l'argent récolté. La famille, la mafia qui considère chacun de ses membres comme un frère, et où chacun a une place de privilégié. La pieuvre qui frappe, on sait, mais on ne peut pas le prouver.
Bref, THE mafia.
Et voilà que cette fille charmante, accostée par nécessité d'avoir de la bouffe gratuite, elle est la fille d'un mec qui peut me faire bouffer la tête de ma mère pour dîner ? Dangereux de m'engager sur ce terrain là. C'est plus du feu mais de la lave, des rayons gamma, des trucs qui font mal quoi. Pas des petits rayons X qui chatouillent.
C'est excitant à un si haut point.
Mais j'lui ai craché dessus. Sans mauvais jeu de mot. C'est un affront ça un peu. Heureusement j'ai de quoi rattraper le coup. Ou minimiser les dégâts. Je lui essuie la face. Et je lui sors une phrase de mon cru.
" Désolé, mais je me demandais depuis longtemps si ce visage était si doux qu'il ne paraissait, et même l'alcool craché ne le dégrade pas. "
C'est une technique de séduction comme une autre. Forcer le trait, lâcher des phrases toutes faites pour que c'en devienne comique. Et tout de suite après, on ajoute du réel pour que la pilule passe encore mieux, et que toute tentative d'engueulade soit avorté.
" Et puis bon, la mafia, c'est pas n'importe qui ! Je dois t'avouer que ça m'a toujours fasciné, alors que tu me dises que ton père l'est. Dis moi, c'est commun d'avouer ça en public ? J'suis arrivé par bateau il y a 2 jours, et depuis j'y comprends rien à cette ville. "
" Bah c'est d'ordre quasi-publique. Tout le monde est au courant. Disons que c'est avoué, ici. "
Je continuais mon petit jeu longtemps. J'écoutais ses histoires, et petit à petit, il semblait clair qu'elle ne me dépeignait pas la mafia que j'aimais. Impossible de lui avouer. De ce que je comprenais, son père s'était un peu isolé à cause de ses idées plutôt extrémistes. Il restait dangereux. Si j'fais une erreur, il va me traquer. Et plus j'y pense, plus je trouve que la poitrine de cette femme est volumineuse. C'est impressionnant. Esprit, doux esprit, pourquoi me fais-tu ça ?
Je vais y plonger la tête la première, tu le sais. Où ? Dans la gueule du loup.
Elle n'opposa aucune résistance; c'est devenu trop simple. Quelques artifices, tours de magies, un peu de parfum, et tout s'emballe.
Venons-en au fait du pourquoi je vous conte ça.
Le lendemain, je me réveille donc en sa présence. Et là, une lourde explosion, puis une autre, puis une autre. Des tirs commencent. Un bordel immense. Madame se réveille, piaille (c'est une femme), chouine un coup et dit que c'est sûrement la faute de papounet. Je dis ça avec cynisme, mais sur le coup j'ai été tout mielleux. Quel enfoiré je fais.
'Fin bref. Elle disparaît (c'est mon rôle de me barrer sans laisser de numéro) et je me retrouve seul.
Le soir même, voilà que je la retrouve, et que son père s'est fait buté. Même pas par la marine, mais par ses propres potes qui en ont profité, et qui l'ont utilisé comme monnaie pour un cessez-le-feu ! Bien joué les mecs, vous m'avez ôté une épine du pied. Sauf que voilà, elle est touchante, et elle a une poitrine volumineuse. Et quand elle me jure que ça peut pas être son père, parce que... j'ai pas écouté les raisons, bah je me décide à mener l'enquête.
La soirée venue, toujours rien. Au détour d'une ruelle, deux mecs qui paraissent vraiment pas normaux. Un mec avec un masque d'halloween, et l'autre j'sais pas, il me rappelle quelqu'un. Un jeu auquel j'ai joué dans l'enfance. Sauf qu'il était dans le rôle du méchant de service, donc pas dans le bon.
C'est ma chance, ils doivent forcément savoir quelque chose. J'ai passé la journée tel un imbécile, à demander à droite à gauche des informations, vu que personne me connaît, je passerai pas trop pour un con.
Petite précision, j'ai passé le plus clair de mon temps dans des bars, pour les récolter. Alors j'en ai profité pour... me faire payer un coup.
" Les gars, dîtes moi, vous sauriez pas qui a fait pété des trucs tout à l'heure... non parce que, il est gentil, je l'aime bien. J'veux dire, le mec qui a été vendu au marine, j'me suis tapé sa fille et j'voulais la délaisser, mais j'ai pas un sou. Maintenant qu'il est mort, je risque pas de me faire arracher la gueule... hein..; quoi vous êtes des mafieux ? Faut que je me barre d'ici, j'dois de l'argent à des types pas bien, vous sauriez pas où est la sortie de secours ? Hein ? Les gars ? "