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Une mémé qui fait son shopping

Une victime que diantre, donnez-lui une victime ! Quelque humain désœuvré, de préférence sans apparat. Un qui se rangerait naturellement sous sa bannière sans effort aucun. Ah, la belle créature ! L’humain dans sa plus resplendissante médiocrité. Un chat de caniveau, une bête à poil ras. Le museau racé, l’œil vif, une merveille. Holà, mon bon. Tout doux. T’aimes les gratouilles sur le cou ? Hein, t’aimes ça ?

« Humain, il me semble que tu es poilu de la mâchoire, tu dois être un homme. Suis-moi, tu auras l’insigne honneur de porter mes paquets en échange de quelques piécettes ! »

Sa main s’attardait sur le jeune homme afin de finir de lui ébouriffer des cheveux qui n’en avaient probablement nul besoin. Le message était passé sans aucun doute. Quelle raison avait-elle poussé cet inconnu à la suivre ? La perspective d’un salaire ? La curiosité ? Toujours était-il qu’il lui emboitait le pas. De son côté, elle regardait droit devant elle. Ce matin-là, elle portait une de ses robes quarantenaires celle qui était pourpre et brodée d’un fil doré. Au fil du temps, l’éclat de ce vêtement avait terni le rendant à peu près portable. Son sac, le fameux compagnon de ses jours, ne seyait aucunement à sa tenue puisqu’il était bleu pâle. Et comme elle avait des bigoudis coincés dans les cheveux, elle avait l’air d’une pionnière de la mode ou d’une attardée, ce qui était souvent équivalent. Elle arpentait les rues de…

Qu’il fait beau, ce matin ! Vraiment, magnifique ! Une fraîcheur vivifiante et une humidité réconfortante. Ces humains qui grelottent sont de parfaits idiots. Ils ne mesurent pas la chance qu’ils ont d’avoir ce temps en surface. Commençons par cette boutique.

… Loguetown fermement décidée à commencer une ère glacière. La plus grande part des gens avaient cloué leurs volets. Peu de gens avaient le courage de quitter le doux confort de leur foyer. Sauf bien sûr ceux qui ne peuvent pas se le permettre et ceux qui ne veulent pas se le permettre. Et parmi ces derniers, les marchands de la rue Le Compte. C’était cette rue en particulier qu’avait choisie le destin…

« Humain, nous sommes arrivés à notre destination. Nous allons devoir quitter ce paradis climatique pour entrer dans la poêle où tes pairs les plus idiots se rôtissent vifs. »

… pour l’affubler de la présence emmerdante de Jouvence.

« - Madame, que puis-je faire pour vous ?
- Ouvrir un volet, c’est un vrai four ici.
- Mais, madame n’y pense pas !
- Si, elle y pense. Et allez me chercher votre plus fine étoffe. »

Ah, ce faquin ! Ah, ce malotru ! Enfin, enfin, il se décide à laisser entrer une part de fraîcheur dans cet insoutenable enfer.

Se disait une partie d’elle pendant qu’elle suait à grosses gouttes. Elle répandait le poison de son odeur dans les confins de la boutique. La sueur et son hygiène déplorable faisaient que ça sentait, au mieux, le bouc en putréfaction. Le vieil homme drapé d’un costume marron avec une chemise rose, fort de ses principes, s’exécuta et eut la folie d’ouvrir une fenêtre vers le dehors. Puis, il lui rapporta l’article demandé. Bien que hors de prix, c’était hideux, de la soie bleue électrique bariolée de jaune criard. Tout à fait au goût de Jouvence. Le vieil homme s'excusa puis partit se couvrir d’un…

Quelle attente terrible ! Non, décidément je ne peux le laisser me manquer de respect de cette manière, je pars.

« Tu es dur de la feuille, humain ? Je t’ai dit que je pars. »

… lainage et revint une demi-heure plus tard pour constater l’absence de ses clients et de sa marchandise. Mais, surtout, l’absence d’argent dans sa poche. Il se rendit prestement à l’étage pour choisir un couvre-chef. Un gentilhomme comme lui ne sortait jamais sans lui. Toutefois, il ne pouvait se décider entre celui qui était vert pistache et cette autre orange dégueulis. Si seulement il pouvait faire son choix avant que la neige ne finisse d’ensevelir sa vitrine et que la femme-poisson ne s’éloigne trop.
    φ Sören... Pourquoi as-tu accepté de suivre cette horrible chose dans sa débauche d'achats superflus ? Est-ce la peur ? C'est vrai qu'elle est grande, qu'elle est grosse, et que son visage a tout pour figer d'horreur le plus vaillant des Don Juan. C'est aussi vrai qu'elle t'a promis un peu d'argent, mais te connaissant... chasseur miséreux ou pas, tu as ta dignité et tu y tiens ! Alors, pourquoi ? Pourquoi, mon ami ? Sans doute une de ces obscures raisons datant d'un temps ancien où moi, Morgan, je n'avais pas encore ma place auprès de toi. Toujours est-il que tu la suis avec résignation. Tout juste si tu grognes tandis qu'elle te prend de haut ; te reproche de ne pas avoir écouté une chose qu'elle a du penser très fort, et oublier de dire. Il faut qu'elle commette un vol pour que tu sortes enfin de ton mutisme pour t'interposer. Compagnon, tu fais peine à voir...

    -Eh, là, faudrait voir à pas me mêler à ces conneries ! C'est du vol !

    Mais en guise de réponse, la géante se retourne, les bigoudis tombants sur une chevelure si crasseuse que tu parais bon bourgeois en comparaison. Elle se retourne et t'adresse un regard si lourd de mépris qu'en moins de dix secondes, tu t'écrases. Comme si tu n'étais qu'un idiot, et que la science infuse résidait dans la caboche d'en face. Alors tu baisses la tête et tu marches. Ton regard n'a rien perdu de son absence. Tu es ailleurs, mais où ?

    La vérité, c'est qu'e' m'rappelle une vieille promesse un peu conne, un truc que j'ai pas pu t'nir faute de moyens, et faute de soutiens solides. Avec d'bons amis, p'têtre qu'j'aurais pu... mais le fait est qu'j'ai que l'Morgan. Rein qui puisse m'aider dans une lutte contre un de ceux d'Goa. Ouais, une femme-poisson. Pas vu souvent dans ma vie. Une fois quand j'étais môme, et ç'avait été un drame. Puis un aut' coup, un peu moins môme, tragique aussi, mais pas pareil. C'était la première fois que j'voyais un esclave. Oh, j'en avais entendu parler. Par Brom, qu'avait voyagé. Mais vu...

    Bref. A peine de r'tour sur East Blue... d'ailleurs, j'l'ai dit pourquoi j'suis pas trop resté à zoner sur North ? Non ? Eh. Ben c'pour ça, ni plus ni moins. Enquêter sur le Hollandais Voleur, r'prendre la traque dix ans plus tard. J'ai toujours pas les potes qui vont avec, mais j'ai l'contact facile. Et j'suis dev'nu un peu costaud. Rein à voir avec autrefois, où j'étais pas fichu d'assommer un bonhomme dans la minute. La mer forge, plus que tout. Si j'ai une chance, j'la saisirais.

    Et donc, là, j'venais d'arriver à Logue Town. Repos après un long voyage, on claque les derniers berrys avant d'repartir à la chasse. East Blue, c'est rempli d'étoiles montantes qui rêvent de vieilles idoles. Gold Roger, tout ça. Des étoiles pas forcément très puritaines, d'ailleurs. Ouais, vraiment, cette mer, c'est l'Eldorado des chasseurs qui débutent. Ou de ceux qui cherchent à s'refaire un peu sans prendre de risques. Indispensable, dans un premier temps. J'étais passé m'renseigner à la base, prendre des avis d'recherche, la routine. Et puis y'a eu l'incident. J'ai rencontré Jouvence.


    -Tu traines, humain !
    -C'est que quand vous faites un pas, j'en fais dix, moi ! Eh !
    -Je veux pas le savoir, tu traines, c'est tout.
    -J'vous ai rein d'mandé ! Vous m'prenez pour quoi, au juste ?
    - Encore une chance. Quel toupet ! Quel ingrat ! Je fais tous les efforts du monde pour vous sortir de la misère et vous me parlez sur ce ton !
    -Hein ?
    - Mais, regardez vous, tout fout le camp chez vous. Ce n'est que grâce à mon aide que vous faites quelque chose de votre journée. Autrement, vous la passeriez à vous affaler dans les ordures et boire de l'alcool jusqu'à en vomir vos tripes.
    -Parc'que j'ai l'air d'vomir mes tripes, p'têtre ? 'Faudrait voir à r'garder un peu c'qui s'passe en bas, eh !
    - Humain, quand je me regarde dans un miroir, je ne vois qu'élégance et raffinement. J'aime autant dire que ce n'est pas le cas de tout le monde ici. Et je ne vois que vous dans les parages.
    -Sans êt' méchant, j'aim'rais voir la gueule du miroir avant d'aller m'aventurer à juger. Et j'm'appelle Sören, j'vous l'ai déjà dit !
    - On a son petit caractère, hein ?
    -Hey, virez vos pattes de là !
    -Sören, c'est ça ? La seule chose qui vous rend un tantinet sympathique sont ces non-poissons-chats qui vous accompagnent.
    -Mon chapeau ! Mais... c'est qu'elle marche dessus, en plus !
    -En d'autres temps, je vous aurais congédié. Mais là, où trouver un autre porteur par ce temps. Vous avez bien de la chance. Maintenant, il suffit. Au trot.
    -Morbleu...

    Et la v'là qui trace. Moi, j'pensais qu'e'm'guiderait vers ses pairs, ou que'qu'chose de c'genre là. Des gars qui s'raient réceptifs à mon histoire de Hollandais Voleur, et d'homme-poisson captif. Mais non. On fait les boutiques, j'porte ses paquets. Jusqu'à c'que j'en puisse plus et que j'décide qu'la piste, elle était pas bonne. Tant pis pour l'aubaine. J'la laisse 'vec son barda, j'ramasse mon chapeau, et on s'arrache. Pas vrai, Morgan ?

    φ Miaw ! Tu as repris tes esprits, Sören. Sans un mot, tu poses les paquets au sol, et tu te détournes. Mais tu te heurtes à un commerçant qui a l'air aussi colérique qu'il est bariolé. Tu recules. L'homme serre les poings autour de sa canne. Ses jointures blanchissent, il tire sur le pommeau. Sort une lame. Tu tentes de t'excuser, de faire comprendre que tu n'y es pour rien, que c'est elle, sauf qu'elle est déjà une lieue devant, et en train de piller une autre boutique. Puis une autre. Elle n'a même pas remarqué ton absence, et tu es contraint de fuir. Sauf qu'une masse terriblement puante et molle te coupe la route, tandis que tu t'enfonces dans sa graisse. Fsshhhhh ! Elle est revenue ! Et elle a repéré une robe qui lui plaisait, en face. Sauf que désormais, une dizaine de personnes brandissent des poings et des insultes, et menacent de passer à l'attaque. Ou d'appeler les autorités compétentes, plutôt. Parce qu'encore une fois, Jouvence est effrayante. Vraiment, vraiment effrayante...

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    Il traînait, il se traînait pour être plus exact, le froid l'atteignait un peu tout de même. Lorsqu'un air commençait à venir à son esprit, un chant doux et terrible à la fois, il se mit à chuchoter...

    -Taaaam tiiiiiim taaaaaaaaam..taam taam taam taam taam taam taam tooooooom....

    Oui ! Il l'avait, il l'avait sur le bout de la langue ! Il ne fallait surtout pas qu'il le perde, ce petit bout de morceau de musique qu'il avait entre les dents.

    Sacha s'empressa donc de sortir son violon, l'accrocha à son menton, sortit l'archet, le frotta d'un coup vif sur la colophane, et joua ces quelques notes en prenant le soin d'ajouter quelques fioritures pour le spectacle car, il n'était pas seul : Il y avait des personnes dans la rue, des personnes donc un public ! Le froid commençait a disparaître sous l'échauffement de ses doigts vifs et précis.

    Les gens frappaient dans les mains en rythme, oups pardon, « en rythme », vu qu'il y a toujours un attardé pour frapper une double croche trop tard ou d'inverser les temps forts pour le mettre en l'air, pendant que le violoniste dévalait les rues de la ville pour arriver vers la galerie marchande ou il y avait beaucoup de personnes qui grelottaient plus ou moins sous la lourdeur du temps, mais au fur et à mesure qu'il avançait, Sacha se rendit compte qu'il y avait quelque chose d'inhabituel, un manque, comme si la foule s'était dispersée vers quelque chose de plus intéressant ou de plus... odorant !

    Quelle était cette odeur ?!  Une quelconque dépouille d'un chat de bourgeois serait dans le coin et susciterait la vive attention de tout ce bon petit peuple ? Sans pour autant lâcher son morceau du bout des doigts, mais en baissant decrescendo le volume de sa musique, il se hissa sur quelques caisses pour voir une bande de personne d'agiter, poings levés vers...

    Un tas...

    Une énorme tas...

    ...de truc...dégueulasse !


    *Et c'est ça qui me vole la vedette, non mais attends ! Tu va voir espéce de....mais c'est quoi ce truc de toute façon ?*

    Il joua très fort sur la corde grave de sol, laissant un son grésillant comme de l'éléctricité dans l'air, ce qui annonça une tension non moindre.

    -HEY ! LE TRUC !

    La foule se dispersait entre les cris de Sacha et la présence du truc

    -Comment oses-tu prendre mon public juste parce que ta présence est aussi pestiféré qu'un rat ayant crevé dans la bouche d'un gros poisson puant? Tu sais ce que tu es ?

    *Vite, un mot-valise, ça pourrait le faire*

    Une petite seconde de répit pour trouver le mot...

    -Un poirat pourri !

    L'hésitation se fit sentir dans l'assistance, quelques rires éclata mais sans plus.

    -Admires l'art de ma musique, mécréant !

    Il commença l'air qu'il avait commencé tout a l'heure tout en le chantant de ces quelques paroles inventés sur le moment :

    - Gros Poiraaaaat !
    Que viens tu donc faire ici baaaas ?
    Ne vois tu donc pas que tu déranges la populace de ton odeur infâme
    Vil créature qui ne mérite qu'infortune et désespoir dans ta vie et dans ton âme

    Gros Poiraaaaat !
    Qu'est t-il donc arrivé mon cher ?
    Tu t'es perdu mon pauvre ami, mais regarde autour de toi, c'n'est pas la mer !
    T'es tu égaré dans le couloir du tournant d'un détroit ? Mais bon sang que je n'arrive pas a te cerner tellement tu empestes, abandonné de la nature, horrible loi !

    Gros Poiraaaat !
    Tu subis ma magnificence
    Accroché a ton désespoir je ne peux que me moquer de ta différence !
    Ainsi soit sublimé de ma lumière incroyable que je te procure là-bas!

    GROS POIRAAAAT !
    Essaye donc de venir pour voir
    Les cloportes puants dans ton genre ne me font pas bien peur, oh que non pas plus que de choir !


    Il continua le reste au violon car il était en manque d'idée, mais il espéra que cela aura fait bonne impression sur le public. Tendis que la dernière note du violon résonnait et frappait sur touts les murs du quartier, Sacha décrocha un léger sourire, et tira la révérence.


    (hrp : La chanson du Poirat est tirée de la mélodie de : https://www.youtube.com/watch?v=pVadl4ocX0M, les paroles sont superposée a la mélodie la plus grave de la musique.)
      « À l’assassin ! Au viol !
      Ah bande de traîtres !
      Vendeurs de savates !
      Et dire que je vous ai payé rubis sur angle chaque Berry dû !
      Ongle, même !
      Bande malfrats !
      Je vous maudis, traîtres, ingrats !
      Et toi, tu ne dis rien ?
      Bien sûr, vil individu. Tu gardes le silence complice de leur méfait. Comme il est facile de se liguer contre une vieille personne sans défense. Une inoffensive victime traînée dans la boue par cette haine, cette xénofolie ! »

      Se faisant, elle se mit à pleurer bruyamment et à souffler dans un mouchoir trop fin pour tout absorber une grande quantité d’un mucus verdâtre. Elle en arrosa le premier rang des marchands et quelques individus choisis de la foule derrière.

      L’attroupement eut un mouvement de recul, toutefois la réaction ne fut pas assez rapide pour leur éviter le second tir de rafale, plus terrible que son précédent. La panique envahit le groupe de personnes. Se bousculant dans un mouvement chaotique, ils n’aboutirent qu’à une mêlée de coups de coude et d’écrasements podaux.

      Et puis, arriva un jeune poète aux prétentions artistiques et à la dégaine terrible. Il était habillé en patchwork, un assemblage de fort mauvais goût. Pourtant, son art avait du bon. Jouvence se sentit émue par sa création quand bien même elle avait une certaine agressivité.

      « Je te l’ai bien dit, Chölen qu’il faut que tu prennes soin de ton physique. L’humain a tout de même raison dans le fond. »

      Et pour souligner son approbation, elle posa sa main lourdement sur l’épaule du nouveau venu. Par simple coïncidence, c’était la main qui contenait le dernier mouchoir, imbibé comme le dernier des soiffards. Elle retira sa patte lui laissant un nouveau collage dans son habit. Les marchands se remirent tous à gueuler, en canon. Ils proposèrent de la lyncher en place publique elle et son laquais. Complice pour certains, il serait l’instigateur de cette démarche selon d’autres.

      La rumeur enflait menaçant d’étouffer le clochard, l’élégante et le chanteur. Celui-ci était devenu étrangement coupable des mêmes crimes grâce au téléphone arabe. Bien qu’il ne fût pas là lors des méfaits, sa connivence avec la femme-cachalot avait fait hurler au scandale. Ce mystérieux personnage venu soutenir la criminelle ne pouvait que compter parmi ses plus proches collaborateurs. En cela, il méritait le fouet voire la potence.

      Jusqu’à ce que l’éminent Griswald Finebarbe, chef du syndicat des commerçants de la rue Le Compte, fasse taire l’assistance. C’était un homme fort âgé et très instruit. Cette qualité faisait de lui un homme sensible aux problématiques du racisme. Il voulait user de son autorité pour lui venir en aide tout en profitant pour rappeler aux autres de bien fermer leur gueule quand il parle. Aussi, il lui retira ses sacs pour commencer. Jouvence, ayant totalement oublié son shopping, était fière de donner autant de ses vieux vêtements à une œuvre caritative. Elle proposa même de faire un concert pour soutenir la cause des « humains nés sans branchies ». Griswald ne broncha pas et décida de profiter de l’occasion pour presser ses ouailles. Il approuva en se disant que les contributions feraient toujours du bien à la caisse étant donné qu’il avait besoin d’une nouvelle piscine avant la venue de l’été.

      Il fut donc décidé que tous les marchands allaient volontairement payer leur place à un concert animé par nos trois protagonistes le soir même. Ceci étant fait, ils furent tous logés chez un volontaire désigné, un emmerdeur qui payait sa cotisation en retard en attendant la nuit.
        Okay, temps mort, on reprend.

        La première chose à retenir de la situation, c'est que Sören était bien évidemment innocent de toutes les choses dont on l'accusait. La seule responsable, c'était la grosse Jouvence. Point barre. Sauf que ça n'était clair pour personne, et que dans la cohue, il était bien difficile au jeune barde de se faire entendre. Malgré sa voix forte d'ancien viticulteur habitué aux chansons et aux rappels à l'ordre dans les vignes. De toutes manières, foule qui hurle n'a d'oreilles que pour elle-même. C'est bien connu.

        La seconde, c'est que le nouveau venu avait choisi un drôle d'endroit pour mettre son talent à profit. Car talent il y avait, c'était clair. La musique, il connaissait le bougre, sans doute bien mieux que le rimailleurs instinctif qu'était Sören. Dommage, vraiment dommage que le public n'ait pas été concentré sur le sujet, et que la destinatrice légitime du message n'y ait visiblement rien compris. A ses larmes de colère s'étaient substituées de petits soupirs (proportionnels à la bête, cela s'entend... disons plutôt, de copieux ronflements) remplis d'une émotion sincère. Le chasseur riait sous cape. Il avait vraiment dégoté deux drôles de phénomènes. Avec un peu de chances, il les marierait dans la journée et en profiterait pour se faire la malle. Ce ne serait pas ici qu'il se trouverait des alliés pour renverser Goa.

        Mais la rumeur de la foule enflait encore et encore, et il fût bientôt très clair pour Sören que Jouvence n'était pas la seule à ne rien avoir compris à la chanson... On accusait le nouveau venu d'être pire que les autres, à-présent, alors même que tout son attention était concentrée sur la façon dont il allait devoir s'y prendre pour virer l'horrible mouchoir qui lui engluait l'épaule. La vie est dure, parfois.

        Jusque là, c'était plutôt clair, non ? Tant mieux, parce que la suite est bien pire.

        Jouvence s'était penché sur un grand barbu à chevelure d'argent qui en imposait à ses congénères. Elle lui avait fait don de tous ses larcins, et avec le sourire, encore. Elle parlait de « vieillerie » à propos du corsage très grande taille qu'elle venait d'arracher à un mannequin disproportionné, quelques minutes plus tôt. Sören avait beau ne pas être tout à fait crétin, il devait bien s'avouer que le fil logique, cela faisait déjà longtemps qu'il ne le voyait plus. Enfin, si, il était là, entre deux eaux : la vieille décabannait, et salement.

        Elle décabannait, et c'est tous les non-concernés qui s'étaient retrouvés encabanés ensemble avec elle dans la demeure d'un homme qui n'avait pas franchement l'air ravi de l'aubaine. De toutes manières, il était trop occupé à allumer de gigantesques tas d'encens en grains pour discuter. Le malheureux craignait déjà les odeurs de cuisine, et passait son temps à pester contre sa femme qui ne laissait jamais assez longtemps les fenêtres ouvertes. Alors là... c'était trop pour lui.

        Le pire dans tout ça ? Le plus absurde ? Sans doute le fait qu'ils étaient en train de discuter ensemble de l'allure que prendrait le concert qu'ils étaient supposés donner ensemble le soir même. Le fond du problème concernait Jouvence. Car s'il était clair que Sacha, le troubadour bariolé, possédait de belles et nobles aptitudes à la musique, les choses devenaient nettement plus douteuses lorsque la question portait sur les talents de cette dernière. Qui lâcha au passage un énorme rot, avant de s'éventer avec un palmier en pot qui criait à l'aide dans son silence de végétal innocent.


        -Bon, Jouvence, t'sais faire quoi, au juste ?

        Sauf que la Jouvence, du haut de ses trois mètres de hauteur, elle n'écoutait pas son ex-commis du jour. Elle avait reposé le palmier un peu trop brutalement pour que le pot n'explose pas au contact du sol. Répandant autour de lui de belles gerbes de terre humide, dont la simple vue eut le don de mettre le propriétaire des lieux au désespoir. Heureusement que la responsable du carnage avait entreprit de le sermonner sur la solidité de son matériel, et sur le danger qu'elle avait couru à manipuler une chose aussi friable.

        Alors en attendant, ce fût un Sören un peu blasé qui se retourne vers le troubadour. Heureusement, celui-ci avait l'air à la fois plus sensé, et mieux disposé à discuter.
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        Sacha descend de son estrade de fortune, et se faufila rapidement entre les personnes de la foule pour pouvoir voir ce qui se passait de plus près, mais de lourds personnages bloquait le passage, et sur le coté il voyait La personne qui accompagnait le gros poirat

        -Mon concert vous a plu? Si vous voulez subventionner, c'est à votre bon cœur

        -Yep, pour sûr t'es inspiré mon gars. Mais j'crains qu'tu trompes de bonhomme, j'roule pas sur l'or non plus.

        - Dommage, votre bariole ambulante, elle a point finir de choir et chialer tout le temps?

        -Nom de Dieu, qu'on m'foute la paix avec ça ! Moi, j'la connais pas. Ou pas des masses. mais juste assez pour savoir qu'on en a encore pour un moment. Et qu'y'a guère de moyens d'échapper à la petite fête de ce soir.

        -Une....Fête?

        Les oreilles de Sacha se dressèrent, comme si toute son intention était focalisé sur le bonhomme et sa fête

        -Ah, ouais. C'est vrai qu'fallait suivre. Bon, pose ton cul sur le divan, mon gars. On va jouer tous ensemble 'vec la grosse Jouvence, ce soir, et devant une foule hostile. Si on l'fait pas, on aura des emmerdes. C'est tout. c'est la vie. Dur, hein ?

        -Un divan? On ? Jouer? une foule....

        - Un divan est un canapé. On est un article indéfini. Jouer est un verbe qui veut dire faire de la musique dans le contexte, ce que tu as lamentablement échoué à faire, au passage. Foule est un groupe de personne, en l'occurrence venus pour admirer mon art et ne pas t'entendre t'égosiller en maltraitant ton crincrin pourri

        Sacha regarda le poirat qui venait de déblatérer cela d'une traite et sans bafouiller.... Comment avait t-il fait pour se débarrasser des autres...)

        -Chose que je savais déjà, pfeuh ! Ce n'étais qu'avec insistance que j'aime ces choses

        -J'crois que j'vais pas rentrer dans l'débat.

        -Minute mais c'est le bon gros poirat qui me dit cela !

        Un rire ricaneur éclata

        -T'as le vocabulaire vite limité, dis c'est pas avec ça que tu vas pouvoir sortir ton petit oiseau

        Le rire ricaneur s’arrêta, l'ennemi est plus coriace que prévu

        -Vocabulaire limité, mais précis, je ne m'étale pas en confiture

        -Tu étales déjà éhontément le peu de substance grise que tu as

        Sacha éclata a nouveau de rire.

        -Eh, on est pas sensés faire l'spectacle ensemble ce soir ?

        Sacha tourne la tête en direction de l'autre

        -HEY ! Je parlois !

        - Attends, mais le mec trouve deux strophes, il fait une entorse du cerveau, ne va pas le surmener il va nous faire un claquage on va devoir le remplacer et Dieu sait qu'il est compliqué de trouver un clodo vivant avec ce gel

        -J'en ai marre, j'vais boire un café.

        S'en était de trop, cet affreux personnage s'était décidé à l'attaquer en surprise et d'en profiter, qu'il en soit ainsi alors ! Alea Jacta est ! Les dés sont jetés ! Tempora mori tempora mundis recorda ! Ça ne veut rien dire mais c'est pas grave !Il allait devoir en découdre avec lui pour se départager!

        -Je n'affectionne point votre personnage certes, mais je ne vous permet pas de vous venger secrètement tel un rat vicieux qui a la peste dans son sang, et son haleine dégageant le danger sordide qui l'accompagne, je vous prierais au moins de vouloir me remettre en place en public comme je l'ai fait comme un honorable chevalier, et avec les même armes que je vous ai combattu