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[1616] Un indic' plutôt fiable ...

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Relève toi. Relève toi ! Ignore le sang, ignore les blessures et relève toi ! Ils ont besoin de toi, tu ne peux échouer : tu n'en as pas le droit. Avance ! Ne te laisse pas ralentir, ne laisse pas la douleur occulter ton but. Cesse d'être un homme, élève toi au dessus, perce le voile. Soit victorieux, soit méritant de leur confiance. Avance, relève toi. N'échoue pas.

"Mon existence n'a rien d'extraordinaire, et ma mort ne changera pas la face du monde."
Rafaelo Di Auditore.
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Les informations de Mad n'étaient pas erronées. Il avait mis la main sur la planque sans grande difficulté, il s'était emparé de ces informations sans grand mal. Si Goa était un royaume purulent, on ne pensait pas faire ses armes directement en cet endroit. Il fallait s'entraîner, mettre ses talents à l'application avant de s'y essayer. Mais la barmaid pouvait bien être à moitié dérangée, elle était une experte dans ce genre de pratiques. Penser que si loin de Goa, elle avait pu faire valoir ses informations et proposer à l'assassin de trancher le vrai du faux dans cette histoire, c'était tout bonnement incroyable. Elle possédait, malgré ses dires, un réseau étendu que la Marine ne suspectait pas. Plutôt un réseau qu'elle n'avait pas perdu. Elle arrosait régulièrement les sans abris, écoutait d'une oreille innocente tous les propos échangés à sa taverne. Chose qu'elle avait enseigné à l'assassin. Savoir écouter avant de parler, savoir se mettre à sa place et, la plus cruciale leçon, plus on était visible, mieux on était caché : montre toi, mais reste invisible. Une de ses leçons les plus sages. Elle s'était prise d'affection du gamin, trouvant en lui une lame émoussée qu'elle avait plaisir à polir, sans jeux de mots malvenus. Elle avait senti sa rage, sa colère et avait oeuvré à le glisser dans une meilleure pente. Une destination qui lui serait moins funeste, des choix qui pourraient alléger la face du monde de quelques âmes corrompues. Et elle avait fait ça non pas par conviction, mais par jeu. Et par pitié. Elle s'était retirée de ce monde, quant à savoir de quel côté elle était, Rafael n'en savait rien. Du bon, certainement. Mais elle ne se leurrait plus sur la face des hommes depuis longtemps. Cela faisait des années qu'elle n'avait aidé personne. Cela faisait des années qu'elle avait quitté tout ça. Mais l'enfant allait vers une mort inéluctable. Il n'était pas assez formé. Il était trop haineux, trop sûr de lui. Alors elle lui appris l'ombre, elle lui appris la valeur de l'information. Elle lui montra que la force ne servait à rien, elle lui montra qu'un homme seul ne pouvait pas changer la face du monde, mais qu'un grain de sable si. Alors il se fit le serment de devenir ce grain de sable, celui qui faisait sauter la roue du destin hors de son ornière, un catalyseur d'évènements qui le dépassaient. Des conséquences qui mèneraient le monde sur une pente meilleure. Tuer les pires, jusqu'à ce que les bons apparaissent. Nettoyer le monde, devenir plus qu'un glaive dans la nuit en somme. Choisir ses proies, méthodique. Et ça, toutes les leçons ne pouvaient pas l'expliquer. Seule la pratique vous aidait. Un plongeon dans les abysses, dans la fange et le désespoir. Un endroit que personne n'aimait visiter, après tout.

"Recule, sous race. Lâche les barreaux ou je te brise les doigts." grogna Douceur en frappant la cage de son nerf de boeuf.

Douceur, c'était le contremaître. Le type que tous craignaient et qui étaient le préféré du maître. Chaque écart, il le punissait d'un coup implacable. Les os de Rafael s'en souvenaient encore. Il avait le dos à vif et les zébrures qui constellaient son dos en étaient la preuve. Le fouet était un outil de choix pour restreindre les actes héroïques. Tiara était morte, et il n'avait rien pu y faire. Douceur l'avant tant et tant fouettée que la peau s'était décollée de son dos et elle s'était vidée de son sang. Les mains entravées par les chaînes, il n'avait rien pu faire, mis à part lancer une pierre sur Douceur. Oh, ça ne l'avait pas arrêté. Fatale erreur. Il avait frappé à force dédoublée, obligeant ses sbires à maintenir la tête de l'impudent pendant que la fillette hurlaient de douleur. Puis il l'avait frappé à son tour, le tournant et le dénudant. Rafael avait perdu le compte au bout du cinquième, son esprit l'avait abandonné à cet instant là. Il s'était réveillé au petit matin, le corps meurtri et les côtes endolories. Vêtu d'un seul pagne, et dans une cage avec les autres. Le temps était venu.

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"Tu devras devenir l'un d'eux. Comment pourrais-tu comprendre la cause que tu défends sans jamais être à leur place ?"

~~~

Voilà qu'ils te font une marque sur l'épaule. Le fer rouge ne t'arrache aucun cri, tu tiens bon. Tu as peut-être deux côtes fêlées, et leurs mains ont réussi à t'arracher ce sourire insolent que tu arborais lorsqu'ils t'ont choppé. Tu étais à côté d'une cage, tu ouvrais le mécanisme. Quel meilleur châtiment pour une libérateur d'esclaves que de devenir l'un deux ? Sur l'épaule gauche, ils t'impriment la marque de ta servitude. Une humiliation cuisante, mais que tu supportes. Tu n'es pas ici par hasard, mais eux ils ne le savent pas. C'est ta lumière, ton espoir. Car depuis que tu as été capturé, tu te demandes comment ceux qui partagent ton quotidien peuvent continuer à regarder le ciel, l'horizon.Toi, tu as les reins rompus et tu aurais lâché depuis longtemps si tu n'avais pas un but. Mais ce petit cercle entourant la lettre V est à présent ancrée en toi. C'est une douleur, et une honte quelque part. Cela signifie qu'on enterre là ton statut d'homme libre, qu'on fait de toi un objet et qu'on te transforme en un simple outil. Comme on l'a fait de ceux qui partagent ton quotidien. Les jours se suivent ensuite. Que tu acceptes ou non, cela a peu d'importance. Tes actes de rébellion finissent souvent à l'étouffoir, entre quatre planches métalliques, dans de l'eau et sous le soleil. Alors tu apprends à courber l'échine et à travailler. Mais jamais tu ne perds de vue la raison pour laquelle tu es venu. Tu comprends alors ce que veut dire 'savoir écouter'. Tu découvres que même au fond du désespoir, il existe quelque chose qui te permet d'avancer. Cette mince lueur, celle qui ne disparaît jamais lorsque tu lèves les yeux. Quand tu vois un oiseau prendre son envol. Peu importe les privations, peu importe la douleur. Il y a cet espoir qui te nourri et te donne du courage jusqu'au jour propice. Puis l'évènement prédit par Mad se produit. Les choses se mettent en branle : tu quittes Edge Town. Tu es le seul à savoir où tu vas, tu es le seul à savoir ce qui se produira ensuite. Mais à cet instant, on vient chercher la petite fille. Celle qui a volé de la nourriture pour son grand-père qui vit en cage. Il est mort, on ne l'a pas enlevé de leur litière. Mais elle ne le sait pas. C'est l'odeur du vieillard qui traduit son état. Il ne bougeait déjà pas beaucoup de son vivant, mais là c'est insoutenable. Tu ne peux rien faire pour l'enfant. Vraiment ? Le contremaître agite son fouet. Suivre le plan, ou être celui que tu as décidé d'être ? Cruel dilemme.

~~~

"Allez, les hommes vers la gauche et les femmes on se met en rang. Dénudez-moi ces poitrines, le patron vient inspecter la marchandise." grogna Douceur, poussant un des esclaves mâles vers l'avant.


Le bruit des chaînes, claquant et tintant. Les hommes avançaient à vitesse réduite, les chaires meurtries par les chaînes qui les entravaient depuis plusieurs semaines à présent, du moins pour l'un d'eux. Ils étaient dociles. Douceur les avait bien dressés. Il était un homme libre à présent, sa marque était ornée, et révélait qu'il était l'un des pires hommes de main de celui à qui ils appartenaient. La nouvelle de la venue de cet homme était la lueur la plus persistante d'espoir aux yeux de l'assassin. Il allait voir l'homme qu'il était venu chercher, l'homme qu'il désirait plus que tout voir mort. Tout était sa faute, à commencer par la mort de Tiara. Et celle de tous les autres. Douceur arracha les tuniques des plus pudiques, puis alla frapper à la porte deux fois. L'assassin inspira profondément, ne pouvant se retenir d'esquisser une petite grimace de douleur lorsque la peau de son dos se tendit. Il avait passé combien de temps assoupi ? Un jour, deux ? Il ressentait encore les coups de Douceur au fond de ses os. Qu'il se vantât de décoller la chair des os à chacun des coups n'était pas tout à fait faux. Enfoiré de fils de pute. (ndlr : en français dans le texte)


"Saluez tous monsieur Kilmeure. Il est la raison de votre existence, la raison pour laquelle vous respirez encore, tas d'chiens galeux." fit Douceur, avant d'ouvrir la porte.

L'homme qui se révéla dans l'encadrement porta aussi tôt un mouchoir à son nez. Il portait un ensemble pourpre taillé impeccablement. De petits gants en soie et un chapeau arrondi qui plongeait le haut de son visage dans la pénombre. Il fit un pas, et la lumière de la lanterne suspendue au dessus de l'encadrement éclaira son visage juvénile. Il était blond, à la barbe rasée de près. Des petits yeux bleu électrique, des yeux de fouine. Froids et malsains. Rafael s'en souviendrait toujours de ceux-là. Il fit signe à Douceur de lui présenter les femmes. Le contremaître s'exécuta avec un sourire pauvre en dents. Une chose horrible que voilà. Il palpa les mamelons de chacune des pauvres femmes, dont la plupart étaient en larmes. Il leur ouvrit la bouche, montrant leurs dents et osa même jusqu'à aller fourrager leur intimité. Nul doute sur leur destination. Le poing de Rafael se serra de colère. Les autres esclaves gardaient la tête rivée vers la terre, mais il pouvait sentir la tension monter chez certains d'entre eux. Il fit de même, agir sur l'instant aurait été stupide et suicidaire. Mais Douceur serait le premier à crever, ça oui. Une fois les femmes dispatchées, ils passèrent en revu les hommes. Ils dénudèrent leur torse, mais n'allèrent pas plus loin. Ceux qui avaient la meilleure tête partaient dans un coin, les plus patibulaires dans l'autre. Inutile de se demander où iraient les plus musclés d'entre eux.


"Alors c'est lui ..." lâcha l'homme en costume à travers son mouchoir.

Surpris, l'assassin leva les yeux vers lui. Douceur lui assénât un coup sur le crâne pour le lui faire baisser, ce que Rafael fit au bout du deuxième coup. Il avait contempler sa cible avec toute la haine que sa condition pouvait lui inspirer. Il dut contracter tous les muscles de son corps pour ne pas lui sauter dessus là, sur le champ. Et la douleur fut efficace pour le contenir.


"Ouais, il a tenté de m'éborgner avec une caillasse m'sieur. Pour une gamine." répondit Douceur en grognant.

"Je ne te parle pas de ça crétin. C'est lui le 'libérateur' ?" demanda Kilmeure en ricanant.

"Ah ... ouais m'sieur. C'est lui. Vous le voulez pour vous ?" questionna Douceur, intrigué par la réaction de son supérieur.

"Crétin." répondit-il, frappant le contremaître de sa main libre. "Non, lui, tu le gardes pour Mademoiselle ... elle lui trouvera bien emploi, elle aime bien les têtes brûlées, hé hé ..."

~~~

La salle était décorée avec soin. On sentait là la touche féminine. Un lit à baldaquin. Des ustensiles ... divers et variés. Lorsque Douceur l'avait mené là, lui avait enlevé les entravant ses bras et ses jambes, l'assassin s'était attendu à se retrouver dans une geôle mais il n'en était rien. Une chambre parfaitement soignée, mais c'était étrange. Pourquoi mener un esclave ici ? Tout ceci n'augurait rien de bon, à commencer par les quelques marques de sang retrouvées ça et là. Il s'avança dans la pièce, se massant les poignets, mis à vif par tant de jours de captivité. Il observa à droite et à gauche, cherchant le moindre objet pouvant l'aider pour la suite des événements. Il glissa ses doigts sur la boucle désolidarisée d'une lanière, qui pendait à un montant du lit. Pour attacher les proies de Mademoiselle certainement ... Un frisson parcourut l'échine de l'assassin. Et lui dans tout ça ? Il tira d'un coup sec sur le métal branlant et réussit à sectionner la branche sans grande difficulté. De ses doigts, encore gourds malgré tout, il parvint à dissimuler sa prise au moment où une silhouette rendue sombre par le manque de lumière se faisait percevoir de l'autre côté de la pièce.

"Oh, mon prochain repas ... mignon mignon." le gourmanda une étrange voix.

Rafael riva son regard vers la jeune femme au corset qui mettait ses formes bien en apparence. Elle venait d'allumer une bougie, ses lèvres pulpeuses soufflant sur l'allumette. Miss Double-Canon. Il avait bien fait ses classes. Connue pour ses talents de croqueuse d'homme et son appétit féroce. Il ne lui connaissait pas ce genre de penchants, mais c'était peut-être chose qu'il n'avait pas réussi à entendre. Chose bien gardée, comme beaucoup de secrets encombrants. C'était plaisant de voir que ses instincts ne disparaissaient pas aussi vite. Que le fait de voir ses fers ôtés lui redonnait force et courage. L'espoir, c'était ça. La chose qui animait les hommes et pouvait les rendre si puissants. Oui, il serait désormais un symbole d'espoir. Il se tint droit face à la veuve noire, qui tournait autour de lui, promenant ses doigts arachnéens sur sa peau meurtrier, échappant un rire cristallin. Elle appuya de son ongle sur les lacérations qui couraient le dos de Rafael, lui tirant un tressaillement de douleur. Elle n'en pouffa que de plus belle. D'un signe de la tête, elle intima à l'assassin de se diriger vers le lit. Elle caressa le manche d'un fouet, laissant courir ses phalanges sur les quelques objets de torture posés sur le meuble, puis alluma une lanterne, de façon à faire assez de lumière pour éclairer la scène. Tout cela ne sentait pas bon, mais alors pas bon du tout. Tout acte engendrait des conséquences, et Mad l'avait mis en garde contre sa pitié, cette forme d'innocence. Ce n'était pas une faiblesse comme on pouvait l'entendre, mais cela finirait toujours par le différencier de ceux qu'il traquait. Peut importait les conséquences, c'était une part de lui qu'il n'abandonnerait que le jour où il serait devenu pareil que ceux qu'il traquait. Triste constat que sa seule 'qualité' lui valut de se retrouver en pareille position. Mais peut-être qu'il pourrait tirer cela à partie. La femme aux formes plantureuses le poussa sur le lit, le menaçant d'un coutelas qu'elle venait de tirer de son corset. Elle l'appuya contre sa carotide, et lui serra les premières sangles autour des poignets.


"Vale m'a dit que tu avais été un méchant petit bonhomme. Tenter de libérer ses esclaves, tu dois être cinglé, non ? Hmmm ..." fit-elle, poussant un soupir de plaisir en posant sa main sur le torse de sa proie.

Mauvaise augure, très mauvaise augure. Elle glissa lentement jusqu'à son pantalon, du moins ce qui lui en faisait office. Il ne put réprimer un frisson, ce qui amusa d'autant plus la jeune femme. Elle s'attela alors à nouer sa jambe gauche, tout en laissant glisser sa lame non loin des parties génitales de Rafael. Dans quelle situation s'était-il mis ? Il tenait toujours dans son poing la petite écharde métallique, mais il ne savait pas s'il devait agir ou attendre.


"L'homme de mon coeur n'aime pas les téméraires comme toi. Il m'a demandé de t'ôter quelques petits mots pour t'apprendre ta place ... et crois-moi, y'en a plus d'un pour qui ça a marché. Tu nous feras un joli petit 'Schlingue'. Oui, ce sera ton nouveau nom ..." le gourmanda l'écorcheuse.

S'il se demandait quand il devait agir, il avait sa réponse. Lorsqu'elle s'approcha se lui pour lui sangler l'autre jambe, elle constata avec stupeur que la sangle ne se fixait pas. Elle éloigna son couteau une seconde de l'assassin, l'intervalle dont il avait besoin. Il la frappa du talon à la tempe, dégageant sa jambe. À moitié sonnée, la jeune femme tomba à terre, lâchant son couteau. Ne perdant pas un instant, Rafael se tourna et frappa la boucle qui lui entravait l'autre cheville de son talon. Au troisième coup, l'attache céda et lui permit de se rouler en arrière, tirant horriblement sur son dos. Il s'accroupit, posant ses pieds à plat sur le matelas, pendant que la jeune femme cherchait à tâtons son arme, insultant l'Auditore. Les semaines de travail forcé avaient, contre toute attente, sérieusement renforcé sa force. Il inspira profondément et, s'aidant de la prise qu'il avait gagné avec ses pieds, il tira sur son bras droit. Il échappa un gémissement de douleur, tandis que la lanière s'enfonçait dans sa chair meurtrie. Puis la boucle céda, le propulsant en arrière. Il roula hors du lit, toujours retenu par la main gauche. Il défit rapidement l'entrave, pour éviter in extremis le coup de couteau de Double-Canon. Un trait de feu lui barra la poitrine, répandant sur sa poitrine glabre un flot de sang. Il réprima un juron, puis attrapa son agresseur par le poignet à son second coup. Il lui retourna le bras et la ramena contre lui. Dans le même mouvement, il s'empara de son arme et la plaqua contre la carotide. Une fraction de seconde avant que la jeune femme ne glisse sa main libre vers l'une des deux armes à feu pendues à ses côtés.


"Non." réussit à articuler l'assassin.

La tête lui tourna légèrement, des lustres qu'il n'avait bougé ainsi. Mais s'il avait l'impression d'avoir perdu ses aptitudes, son corps s'en souvenait pour lui. Tout s'était fait par un automatisme. La jeune femme devait se demander ce qu'il venait de se passer. Rafael avait la gorge sèche à cause des mauvais traitements réservés aux esclaves. Si sèche qu'il eut du mal à prononcer ce simple mot. Il attendit que Double-Canon se calme avant de la faire avancer vers la porte. Elle tenta de le frapper du coude, mais il lui tordit le bras avant qu'elle n'ose seulement le toucher. Il appliqua le fil de la lame contre sa gorge, faisant perler son sang. Mais il ne put l'empêcher de hurler, ce qui allait immanquablement alerter les personnes environnantes. Il la força à reculer dans la pièce, se ravisant au dernier moment, lorsque deux hommes armés entrèrent en trombe.


"Lâchez vos armes où je la bute." grogna Rafael, tirant sur le bras de la jeune femme, histoire de montrer qu'il ne rigolait pas.

Il ne fallut pas longtemps pour que les types le mettent en joue puis se mettent à hésiter. Puis ce fut au tour de Douceur d'arriver dans l'encadrement de la porte. Il s'effaça pour laisser un homme en costume rouge, et au chapeau rond. Il posa la main sur sa propre arme, sans s'avancer. Les deux gardes et Douceur étaient dans la pièce, mais Kilmeure se méfiait. Un petit sourire se peignit sur son visage, alors qu'il se détournait de la scène, agitant négligemment la main. La prédateur devenu proie entre les mains de Rafael tressaillit. Mauvaise augure.


"Tuez-le." ordonna-t-il, avant de quitter l'encadrement de la pièce.

Ses hommes étaient des pions pour lui, de simples objets : qu'attendre de plus de la part d'un trafiquant d'esclaves ? Il préférait les sacrifier que de risquer une défaite. C'était un raisonnement implacable, inhumain. Mais Rafael n'avait pas le temps d'y penser, déjà les sbires de Vale armaient leurs armes, et Douceur affichait un sourire satisfait. Pensait-il devenir le chien de Kilmeure après cela ? Il tira un fouet de sa ceinture. Bordel, comment imaginer donner une leçon à des types de ce genre ?! La seule chose qui pouvait leur faire cesser leurs odieuses action était ... la mort. Il y avait des hommes qui le méritaient, et ce type en faisait plus que partie ! Tout comme ceux qui se prêtaient à son trafic. Tenant fermement sa proie, l'assassin avait cependant un avantage. Lorsque les deux gardes ouvrirent le feu, il bascula sur le côté, évitant une première balle. La seconde cueillit sa captive en pleine poitrine, qui laissa échapper une gerbe de sang. Coeur touché ? Peu importait. Il la garda contre lui mais lâcha sa lame. Il glissa jusqu'à la gaine qui maintenait son premier canon. Sans prendre le temps de le dégainer, il appuya sur la crosse et releva le canon vers le premier garde. Armant le butoir, il fit feu et perfora le crâne de l'homme sans sourciller. Sa boîte crânienne explosa en une gerbe d'os et de cervelle, qui maculèrent Douceur. L'inattendu de l'attaque de Rafael le gêna, ainsi que l'autre tireur. Profitant de cette diversion peu ragoûtante, l'assassin laissa tomber Double Canon en s'emparant de son autre arme. Il assassina l'autre garde de la même manière. Une balle, un mort. Puis il ramassa le couteau et se rua vers Douceur dans le même mouvement. L'adrénaline semblait lui donner des ailes, oubliant un instant sa douleur. Il sauta par dessus le lit et asséna un coup dans la poitrine de son adversaire, de ses deux talons. Se réceptionnant à terre, coutelas en main, Rafael se releva d'un saut de main. Le contremaître gisait toujours à terre, le torse hors de la chambre. L'assassin ne se fit pas prier. Il lui sauta dessus et enfonça sa lame profondément dans son thorax. Y imprimant tout son poids, il le tourna sur la droite, tirant un cri muet de douleur à Douceur. L'homme tenta de se redresser, levant tête et jambes mais mourut avant d'avoir réussi.


"Re-pose ... en paix. Bastardo." articula Rafael, les bras et les jambes à présent maculés de sang.

Une balle vint alors exploser le crâne de Douceur. Une balle destinée à l'esclave qu'il était. La gerbe de sang le fit se reculer un peu précipitamment, à son tour recouvert des restes de cervelle et d'os. Il n'eut que le temps de voir trois hommes courir dans sa direction, certainement les hommes que Kilmeure avait envoyé là pour prêter main forte, au cas où ... D'une roulade arrière, l'assassin se redressa. Il eut un regard pour la lame qu'il laissait là, plantée en pleine poitrine de celui qui fut sa Némésis un temps. Il se baissa sur les gardes et récupéra leurs couteaux, assez effilés pour trancher dans le lard de quelques imprudents. Il s'empara alors de la lanterne allumée plus tôt par Double-Canon, qui était en train d'agoniser dans des crises de spasmes à l'autre bout de la chambre. Il risqua la tête par l'encablure de la porte. Trois balles sifflèrent autour de lui, le temps qu'il recula. Ce fut pourtant suffisant. Il attendit quelques secondes, le temps que tout bruit cesse. Les gardes avaient visiblement rechargé. Passant de l'autre côté de l'encadrement de la porte, il envoya la lanterne s'écraser contre le mur du couloir. L'explosion généra une gerbe de flammes. Puis quatre coups de fusil se firent entendre. Prenant son élan, Rafael se rua dans le couloir, sautant par dessus les restes de la lanterne, protégeant la plante de ses pieds. Il exécuta une roulade puis envoya son premier couteau sur l'un des gardes qui le para de sa crosse. Glissant sous l'estocade de la baïonnette d'un autre, il l'éventra jusqu'à l'aine, y laissant son arme. Il attrapa le fusil d'un troisième et le retourna contre lui en lui claquant la crosse contre la tempe. Le premier se retourna vers lui. Rafael fit un pas de côté pour éviter l'attaque du garde restant. De sa main libre, il tira sur le canon de son arme et l'envoya empaler son camarade. Puis il lui enfonça la lame de baïonnette du fusil qu'il avait dérobé au troisième larron. En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, les quatre hommes se retrouvaient à terre, se répandant de leur sang. Il se colla contre le mur, guettant le moindre bruit. N'entendant pas âme qui vive, il dépouilla rapidement l'un des gardes de ses bottines et de son veston blanchâtre. Tirant sur le tissus, il fit craquer quelques coutures de façon à pouvoir redresser ce dernier sur son occiput, faisant office de capuche. Il dégrafa deux ceinturons et se les passa en diagonale sur son torse, y insérant les six couteaux qu'il possédait à présent. Il s'empara de l'épée de l'un d'eux et la glissa à un autre ceinturon, qu'il serra à sa taille. Il ressemblait presque à un véritable assassin ainsi accoutré. Ses affaires étaient maculés de sang, mais c'était le moindre de ses soucis en cet instant.

Un cri se fit entendre de l'autre côté du couloir. Quelqu'un était venu voir et avait découvert le spectacle. Rafael ne se fit pas prier. Il arma le fusil qu'il avait récupéré, puis se dirigea vers l'endroit où il supposait que Kilmeure avait fuit. Il boitillait un peu et se tenait voûté. La douleur était toujours là, mais tenue en sourdine par l'adrénaline du moment. Il avança sans faillir, se défaisant des pauvres hères qui débouchaient sur sa route, désorganisés. Il ne prit pas la peine de fouiller les pièces d'où déboulaient les gardes, sa proie devait avoir fuit sans se retourner, entendant les coups de feu succédant ses ordres. L'homme n'était pas imbécile. Et quelque part, sans son acte inconsidéré pour sauver Tiara, il n'aurait jamais pu réussir cela. Mais à quel prix ? Sa fureur décupla ses forces et il augmenta son allure. Les corps commençaient à s'entasser derrière lui, l'effet de surprise y jouant pour beaucoup. Ils ne s'attendaient pas à trouver ce genre d'individu sur leur passage. Si bien qu'ils n'eurent pas le temps de s'organiser. Un véritable boucherie, ils venaient là à l'abattoir. Engagés pour la solde, et pour savoir se taire certainement. Mais c'était chacun pour soi. Aucun remord. Rapidement, Rafael se retrouva devant une porte close. Le sang qui maculait ses habits lui donnait un air sinistre. Un messager moribond, porteur d'un destin fatal. Il posa la main sur la poignée puis la tourna, gardant la main sur la gâchette de son fusil. Il ouvrit la porte à la volée, puis pointa l'homme assit sur une chaise, au bout de la table qui se dressait devant lui. Il avait les mains jointes, et une arme à feu posée devant lui. Mais il ne fit aucun geste envers Rafael. L'assassin s'avança, ne décelant aucune autre présence au fond de la salle. Il épaula son fusil, tenant sa cible en joue.


"Voyons, voyons, inutile d'en venir à de telles extrémités." commença Kilmeure.

"Je vois que tu as mis à mal au moins une quinzaine de mes hommes, ça fait de toi un guerrier hors pair jeune homme. Surtout dans un état tel que le tien." poursuivit-il, invitant Rafael à s'asseoir en face de lui.

Le jeune homme leva un sourcil perplexe. Qu'est ce que ça voulait dire cette mise en scène ? Il était seul, et osait encore se la ramener ? Tout cela sentait le coup fourré, ou alors le gusse jouait sa dernière carte. Une des portes du fond s'ouvrit alors. Un homme qui trainait derrière lui une femme enchaînée, tenant une arme rivée sur sa tempe. L'assassin plissa les yeux, et baissa légèrement son canon. Là, c'était un peu plus logique. Et fourbe. Diablement fourbe. Il aurait tout donné pour effacer le sourire satisfait qui se dessina sur la gueule du blondinet à ce moment là. Un frisson de pure rage coula le long de son échine.


"Hé hé hé. Je m'en doutais." fit-il en applaudissant.

"Je me doutais que tu essaierais de les sauver, encore. Ah, ne faut-il pas être stupide. Dès que j'ai entendu plus de tirs qu'il n'en fallait, je me suis attelé à ce petit imprévu. Tu n'es pas le premier, ni le dernier. Et si Mademoiselle a réussi à te laisser échapper, elle ne me devient plus utile, tu saisi ?" poursuivit-il, un grand sourire sur les lèvres.

L'assassin fronça les sourcils. Où voulait-il en venir ? C'était un gars qui aimait parler visiblement, et qui n'accordait aucune valeur à la vie humaine. C'était intolérable. Il paierait son crime dans le sang. Il n'y aurait pas d'autres échappatoires. Il ne pouvait pas y en avoir d'autre.


"Mais avant de te tuer, j'ai une petite demande, tout de même. Je suppose que tu n'as aucune envie de travailler pour moi, hmm ? Non ? Je m'en doutais. Enfin bon, tu es acculé, tu n'oseras jamais tirer et je gagne sur tous les tableaux. Finalement ..." reprit-il, se faisant craquer les doigts, joignant ses mains.

"Le monologue est-il vraiment nécessaire ?" répliqua Rafael, relevant son canon vers l'odieux personnage.

Vale éclata de rire, s'en essuyant presque le coin des yeux. Il faisait partie de cette espèces d'hommes dont le comportement était hasardeux à prédire. Il ne réfléchissait pas comme Rafael, c'était une chose absurde que d'oser comprendre la façon dont fonctionnait cet homme. Il appartenait à un autre monde, un monde dans lequel il valait mieux ne pas se plonger. Mais c'était le devoir d'un assassin que d'être à même de prédire tous les actes de sa cible, de prévoir toutes les manigances qu'il avait pu mettre en place. Mais se mettre à essayer de penser comme un pourri de cette espèce ne pouvait être que délétère. Comment ne pas se perdre ? Tant qu'il garderait cette pitié, cette faiblesse qui faisait de lui un homme meilleur. Il pressa son doigt sur la détente, redirigeant son canon vers le garde qui menaçait l'esclave. La pauvre femme était terrifiée et pleurait à chaudes larmes. Elle avait peur pour sa vie, certainement, mais il n'aurais su dire si elle flanchait devant son destin ou pour être la cause de la déchéance de l'assassin, pour une seconde fois. L'homme au costume pourpre soupira longuement, puis posa la main sur son arme. Rafael ramena le canon vers lui, n'attendant qu'un prétexte pour lui tirer dessus. Il ne mourrait pas seul, il ne mourrait pas sans emporter ce type. Mais cet enfoiré lui laissait délibérément le choix, et il se savait hors de danger. Pensait-il avoir cerné le personnage ? Se pensait-il gagnant sur tous les tableaux ? Cette simple idée tirait des nausées à l'assassin. Un type comme lui ne pouvait pas l'emporter. Et lui ne pouvait pas mourir. Mais comment se tirer de cette situation insoluble. Le destin se moquait de lui. Soulignant le côté sordide de la situation, la douleur de son dos et de ses articulations revenait peu à peu, pulsative. Merde. C'était pas le moment. Il ne devait pas flancher.


"Bon. J'en ai assez. Mastoc, tue-le." trancha Kilmeure, dirigeant son canon vers l'assassin.

Puis un mouvement derrière lui attira son attention. Puis un coup de feu. Rafael esquissa un retrait, mais il sentit le métal fourrager ses chairs. Il sentit le feu lui brûler le flan puis l'abdomen, ressortant en une gerbe de sang sur la table. Le temps se ralentit, il se tourna, ses jambes flanchant sous son poids. Il vit un type colossal émerger de l'ombre, aux galons de la Marine. Il avait un sourire goguenard sur la face, et son pistolet fumait. Comment avait-il pu louper un tel gabarit ? Comment ... Un autre coup de feu retentit. Suivi d'un cri de femme. Rafael tomba à genoux, lâcha son arme. Il se sentit partir en arrière, et vit le corps sans vie de l'esclave tomber à terre. Vale l'avait tuée. Par simple plaisir, par pur défi. L'assassin tenta d'endiguer le flot de sang qui s'échappait de sa blessure. Il posa les deux mains dessus, mais la fatigue et la douleur commençaient à avoir raison de lui. Le Marine s'avança vers lui et lui attrapa la capuche, tirant sa tête vers l'arrière. Ne pouvant lutter, Rafael tomba sur le dos, gémissant de douleur, ne pouvant proférer un mot. Il reconnut le capitaine de la Marine. Il était en service à Town Center, et à Edge Town. Il l'avait vu plusieurs fois, entouré de ses hommes. On lui avait décrit comme violent et stupide, mais son regard trahissait autre chose. Une aura néfaste se dégageait de lui, mais il ne le comprenait que trop tard. Ce type était un vendu. C'était par là qu'il aurait du commencer : tous les trafics naissaient de par la négligence d'un tiers. Et les négligences venaient toujours de l'ordre établi. C'était une leçon qu'il apprenait dans le sang, trop tard. Tournant la tête, Rafael vit les chaussures cirées de Kilmeure se rapprocher de lui. Puis ce fut une main gantée qui lui attrapa la mâchoire, et un canon encore fumant qui lui tapa la joue.


"Hey, encore vivant ? Bordel, vraiment dommage que t'aies résisté, t'aurais fait un chic type sous mes ordres. Mastoc, tu veux bien t'en débarrasser ? Comme les autres. Mais lui, faut qu'il agonise longtemps, qu'il souffre pour l'argent que ses conneries vont me coûter." ordonna l'esclavagiste, se relevant, évitant de se retrouver tâché par le sang de l'assassin.

Le Marine protesta, grommelant qu'il n'était pas un faire-valoir, mais le regard furibond de Vale le fit terre. Il lui rappela qu'il ne l'arrosait pas pour rien et qu'il avait de quoi le faire plonger pour perpétuité. Alors le ripoux baissa la tête et attrapa Rafael par la tunique, ne semblant pas forcer un poil pour le soulever à sa hauteur. Le jeune homme ne put se retenir de laisser échapper un gémissement de douleur, mais le colosse n'y fit pas garde. Puisant dans ses dernières force, il envoya son genou cogner les parties intimes de Mastoc, qui le lâcha sous la surprise. Il recula sous la douleur, se tenant l'entrejambe, ce qui provoqua l'hilarité de Kilmeure. Il frappa Rafael d'un revers de la main, l'envoyant à terre. Un goût de sang lui envahit la bouche, et le monde se mit à tourner autour de lui. La fin était proche, mais il ne leur ferait pas l'honneur de s'avouer vaincu si facilement ! Sa dernière pensée alla aux hommes et femmes enchaînés dans les cages de cette demeure. Au destin sans espoir de ces gens, à dame fortune qui lui tournait le dos. L'injustice de la situation en était presque assourdissante. La preuve que se battre pour une juste cause ne suffisait pas toujours, la preuve que ...


"Alors petit frère, on s'avoue vaincu ?" se moqua une voix dans la pénombre.

Une déflagration retentit, et le Marine recula, titubant. Un flot de sang commença à s'échapper hors de sa poitrine, alors qu'il s'affalait contre le mur. Les points noirs qui tournaient autour de l'assassin se dissipèrent l'espace d'un instant. Le temps de sentir une main se glisser sous son bras et l'aider à se relever. Rafael regarda son jumeau avec surprise. Le sourire malicieux de Cesare atteignait des sommets. Il semblait fringuant ainsi vêtu, et insolent. Kilmeure leva son arme vers l'intrus, mais il avait déjà tiré son coup. Son regard paniqué trahissait son état. L'espoir changeait de camp. Se tenant l'abdomen, Rafael se redressa. Cesare laissa tomber son arme et sortit l'un de ses couteaux papillons, l'envoyant se planter dans le dos du garde qui tentait de s'enfuir. Comment son frère était-il arrivé ici ? Il ... il lui avait sauvé la vie, une fois de plus. Sa dette s'alourdissait, mais il n'était qu'une extension de son être après tout. Il savait que la mort de Cesare lui coûterait son âme, et que l'inverse était d'autant plus vrai. Son frère le lâcha, le laissa avancer vers Kilmeure avec un sourire ésotérique. Peu importait comment il l'avait retrouvé, il lui raconterait plus tard. L'important était ce qu'il allait faire de cet enfoiré. Titubant, se tenant le ventre d'une main, Rafael avança vers l'esclavagiste. L'homme tentait de recharger son arme en tremblant, reculant vers le fond de la salle. Il laissa échapper la balle, en sortit une autre. Leva le canon vers Rafael.


"Ton ... ta destinée s'arrête ici morveux, tu vas mourir !"
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"Comment m'as-tu retrouvé, mi fratello ?" grommela l'assassin, appliquant sur sa blessure une compresse imbibée d'alcool.

"En passant par là où tu aurais du commencer : tous les problèmes viennent de la Marine. Une fois que j'ai su que tu voulais cibler Kilmeure, je n'ai eu qu'à chercher qui lui octroyait ses passe-droits." répondit Cesare, jouant négligemment avec l'un de ses couteaux.

"J'ai voulu raffermir ma détermination. Raffermir ma détermination à me battre. Savoir pourquoi je devais sauver ces gens plus que tout." répliqua Rafael, laissant échapper un gémissement de douleur.

"Toujours du sentimentalisme frérot. Fais gaffe à ne pas t'émousser avec le temps. Si Mastoc n'était pas aussi crétin, je n'aurais jamais pu le suivre. Enfin, ça et autre chose. J'ai trouvé ce que je cherchais, le fruit. Estime-toi heureux que je t'ai retrouvé à temps." le coupa son frère, légèrement acide.

"Et comment as-tu su pour Goa ?" lui demanda Rafael.

"Elle m'a appelé et m'a dit que tu aurais besoin d'aide." répondit-il, malicieux.

"Elle ?" s'étonna l'Auditore.

"Mad." rétorqua son frère, rangeant son couteau.

L'assassin sourit. Qui cela pouvait-il être d'autre ? Elle tirait toutes les ficelles la bougresse et en savait beaucoup plus qu'elle ne le lui avait laissé l'entendre. Elle l'avait protégé, envoyant le seul homme par qui il aurait accepté d'être aidé. Maintenant qu'il y pensait, elle ne lui avait jamais dit pourquoi elle avait décidé de l'aider lui et pas un autre. Pourquoi elle avait rompu son serment pour lui. Mais il avait sa petite idée sur ça. Cette simple pensée lui tira un sourire amusé.


"Pourquoi tu souris, crétin ?" lâcha son frère, le tirant de ses pensées.

"Elle me fait penser à balia." répondit l'assassin, sans cesser de sourire.

"Imbecille." fit Cesare, avant de quitter la pièce, ricanant.
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Poussé par une volonté implacable, Rafael écarta le canon de l'arme d'un geste négligent. Le coup partit et se perdit dans un mur. Il s'empara d'une des lames pendues à un des ceinturons barrant sa poitrine, puis l'enfonça dans la poitrine de l'esclavagiste. L'homme glissa à terre. L'assassin ne ferait pas l'erreur de louper son coup. Ignorant la douleur, à deux doigts de défaillir, Rafael puisa dans ses ultimes forces pour l'accompagner à terre.

"Le destin pourrait vouloir que je meure avant que je trouve les réponses, mais un assassin ne reçoit d'ordre de personne." répliqua-t-il, tournant le couteau dans sa chair.

"Requiescat in pace." l'acheva-t-il, pensant inutile de lui conter ses crimes : cet homme ne le savait que trop bien.

Kilmeure rendit l'âme sans un bruit, et Rafael commença à flancher, glissant sur le côté. Son frère le rattrapa et l'aida à se relever une fois de plus. L'assassin lui renvoya un sourire puis grimaça de douleur. Malheureusement, son tourment n'était pas terminé.


"Partons d'ici." fit Cesare lui indiquant la porte de la tête.

"Il y a encore des gens qui ont besoin de nous, des esclaves à conduire hors de la ville." répliqua Rafael, s'arrêtant.

Son frère secoua la tête et l'assit sur une chaise. Il était autant borné que lui, inutile d'insister.


"Je t'apporte de quoi te soigner et on s'en occupe. Inutile que tu te vides de ton sang pour eux."

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La porte coulissa sans soucis, grinçant sur ses gonds. S'emparant des clefs, l'assassin ouvrit les fers des captifs, dont les murmures allaient croissants. Ils n'en revenaient pas, ils ne comprenaient pas d'où était cet homme vêtu de blanc, sorti de nulle part. Ils s'ordonnèrent hors des geôles, sous le regard perplexe de Cesare. Il croisait les bras, contemplait son frère qui dépassait sa propre douleur pour libérer les autres de la leur. Il était pâle, ce qui trahissait son grand état de faiblesse. Mais il ne semblait pas s'en soucier. Contre toute attente, il voyait son frère changer, grandir. Enfin. Il n'était plus le gamin qui se battait pour sa vengeance, il avait perdu quelque chose au fond de ces geôles, mais avait gagné un feu qui ne cesserait jamais de l'animer. Quelque chose qui allait au delà de sa propre personne, de sa propre vengeance. Les hommes étaient entassés là comme du bétail, dans une quinzaine de geôles, où seuls deux hommes pouvaient espérer demeurer couchés. Ils s'y trouvaient souvent à plus de huit, dans des conditions de vie intolérables. C'était là la marchandise en attente de passage vers High Town, pour les nobles et leur folie décadente. Jamais Rafael n'aurait pensé trouver autant de personnes victimes des affres de Vale. Une vision cauchemardesque de ce que l'on pouvait attendre de pire de la part de l'espèce humaine. Mais celui-ci mort, ses camps d'approvisionnement tomberaient un à un, et son histoire ne saurait plus qu'un mauvais souvenir ... jusqu'à ce qu'un autre prenne sa place. C'était toujours la même et triste histoire. Une fois toutes les geôles vidées, l'assassin se retourna vers son frère, avec un regard compatissant envers les pauvres hères emprisonnés par Deval. Nombre d'entre eux n'étaient que des pauvres du royaume, enchaînés pour ne pas avoir pu payer leurs dettes. La mort d'un des esclavagistes ne suffirait peut être pas à enrayer ce marché, mais le coup résonnerait longtemps. Une vieille femme lui prit alors les mains, les larmes aux yeux, implorante.

"Quel est votre nom, monseigneur ? Qui devons-nous remercier ?"

L'assassin se retourna vers son frère, ne sachant que dire. Qui était-il ? Qu'est-ce qui le définissait ? Il resta coi, cherchant quoi répondre. Son nom ? Impossible, il ne pouvait trahir sa réelle identité, ni son visage. Mais comment se décrire, sinon par une évidence ? La réponse coulait de source, si simple qu'elle lui tira un sourire amusé.

"Appelez-moi 'Il Assassino'." lui répondit-il, lui enserrant les mains à son tour.

Cesare eut un petit éclat de rire sarcastique puis il se redressa, faisant signe à son frère de le suivre.


"Tu vas les faire sortir mon frère, j'ai une autre chose à faire ici. Il y a des endroits qu'on ne peut purifier que d'une seul manière." murmura-t-il, attrapant la lanterne qui illuminait la pièce.

Son jumeau secoua la tête, puis il fit signe aux esclaves de le suivre. Il les mènerait par les chemins que Rafael lui avait décrit, ceux qui passaient par les souterrains de la ville. Il leur rendrait leur liberté loin d'ici, là où ils pourraient reconstruire leur vie. L'assassin les rejoindrait à l'orée de la cité, puis s'occuperait d'eux avant d'aller retrouver Mad. Cette petite centaine de femmes, d'enfants et d'hommes resterait à jamais marquée par ces tourments et leur vie en serait changée à jamais. Il s'empresseraient de quitter l'endroit, et qui sait, peut-être rejoindraient-ils la cause un de ces jours. Quant à Cesare, il reprendrait certainement sa route, ou le suivrait. Peu importait la distance pour les deux frères. Rafael se déroba par une porte à moitié caché puis gagna les étages supérieurs. Il s'empressa de mettre le feu aux rideaux et à la plupart des matériaux inflammables, jusqu'à gravir le dernier étage. Il émergea sur le toit, palpant sa blessure couturée. Il se sentait légèrement mieux, mais ce n'était pas encore ça. Il avait failli tourner de l'oeil quelques dizaines de minutes plus tôt. Et mieux valait ne pas trop tirer dessus. L'assassin émergea au sommet du bâtiment au moment où les flammes perçaient les premiers étages. La fumée montée et l'auréolait, comme un tableau qui se projetait sur les années à venir. Les sirènes retentirent, et on le pointa bien vite du doigt. Il se tenait sur le haut d'une demeure majestueuse de Town Center, lanterne en main. Il leva bien haut cette dernière et inspira profondément. Il fallait détourner l'attention des souterrains, combler le passage et, surtout, leur faire savoir qu'on ne pouvait traiter le peuple ainsi sans en recevoir de coup de bâton en retour.


"Voici le sort qui attend ceux qui traitent de la chair humaine comme d'un objet. Voici le sort qui attend tous ceux qui abusent le peuple. Craignez le courroux d'Il Assassino. Craignez les flammes de la justice : aujourd'hui Vale Kilmeure est mort pour ses péchés. Demain, ce sera leur tour." hurla-t-il, pointant du doigt les hauts bâtiments de la noblesse de High Town.

Puis il disparut dans les ombres, au moment même où les forces armées arrivaient sur les lieux. Il laissa tomber la lanterne qui alla s'écraser sur le parvis de la demeure, dans une gerbe de flammes. On hurla au meurtrier, au pyromane, mais parmi les bourgeois rassemblés là, il y avait d'autres individus, pour qui l'espoir naissait. Rafael, gagna les toits voisins au moment où les flammes atteignaient les réserves d'armes de Kilmeure. Au moment où l'explosion balaya les restes de sa demeure et la fit s'effondrer sur elle-même. Il ne se retourna pas, même lorsque la chaleur des flammes lui fut insoutenable dans son dos. La main sur sa blessure, il avançait sans faillir vers les murailles de Town Center, profitant de la panique pour se frayer un chemin à travers toute cette cohue. Un léger sourire se peignait sur son visage, malgré toutes les horreurs traversées. Montre toi, mais reste invisible. Une légende venait de commencer aujourd'hui, Il Assassino était né. Le destin d'une vie. Puisse-t-elle continuer aussi glorieusement qu'elle avait commencé. Dans le sang et les flammes. Louée soit la cause. Pour le peuple !

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