La cité change de visage. Il est l’heure. J’enfonce mon bonnet de docker sur l’crâne, enfile ma veste et file dans la nuit. La ville est endormie, plus un bruit ne la secoue, on dirait qu’une couche de feutre s’est déposé sur les pavés, les murs, la vie. Téquila Wolf. J’hume ton air dégeulasse et tes formes crasseuse. J’observe tes allures catines, tes monts criminel et ton fond de crévoir. A chaque port son vice et son lot de violence. Le sel des pères des aïeules de ton putain de père y est pour rien, l’homme est féroce de nature.
On s’leurre pas, la guerre et l’embrouille c’est dans le sang qu’on la charrie, et c’est dans le sang qu’on la règle. Ici comme pas ailleurs : On vient y faire mourir des gens à petit feu.
J’préfèrerai encore qu’on m’ descende plutôt que d’crever de vieillesse à construire un putain de pont. Si j’te parle de ça, c’que mon contact aujourd’hui, c’est Gregas le ferrailleur, un vieux Bagneux bien au fait. Faut dire que diriger toutes les p’tites souris, touts les voleurs et touts les orphelins du coins, ça lui donnait un certain avantage sur ces concurrents. C’lui qu’on vient voir pour connaître l’passif de tel ou tel lieutenant ; Pour savoir qui t’as piqué ton marteau ? Un coup de bigo’ à Gregas, et tout s’éclair. Enfin c’que m’a dit un mec vachement plus au fait que moi, donc j’le crois. Pas de raison de me méfier, au pire en tapant dans la fourmilière j’retrouverai sans doute mon chemin vers la reine.
le bagne, c’est la galère. Non, sans rire. De hauts murs cernent des maisons toutes pareilles. Des boites ? Plutôt des cellules ; La cage à beau être spacieuse, les barreaux aux fenêtres, les sentinelles et les barbelés rayent touts doutes de l’équation. On y entre, on y sort plus. Et pourtant c’la que se cache mon contact. Il a bien réussit son coup. J’souris en voyant un gamin aux blanches pattes crapahuter vers moi. Lui il a ses entrées et ses sorties sans difficultés du bagne. Une chance pour lui d’bosser avec Gregas. Si on peut parler de chance dans cet enfer.
Le p’tit brun soutient la même allure sans problème. Ses yeux bleus sont pleins d’intelligence. Une intelligence qui le laisse coi. C’est bien, tu as rapidement compris les règles de notre jeu. J’te donnerais ni nom, ni informations, ni même un mot. Tu sais que je suis ici pour un truc précis qui n’concerne que l’mec qui te permet de te vêtir, de te nourrir et d’survivre.
Et la colère qui me gronde crispe mes traits, inclinant à m’laisser ruminer mon pétrole. Toutes ses maisons sont des prisons. Une petite étincelle. Des visages d’enfants qui m’devisagent, à moitiés masqués par la pénomre des vieux lampadaire. La ville est silence. Tout est recouvert, entièrement masqué par la neige. Mais pas la misère du bagne. Elle est là, bien visible.
Et personne ne fait rien, personne ne voit rien, personne. Il me faut une bonne dose de volonté pour me contrôler. Mon sang est de glace, et touts mes muscles se crispent. C’est comme une infection. Elle rampe là, dans votre corps, grossit puis explose. J’suis au bords de la rupture quand l’ptit garçon me montre une vieille porte cochère à moitié dans la terre.
- On est arrivé, c’est ici. Descendez les marches et frappez trois puis deux puis trois coups.
- Merci bonhomme.
J’lui pose un gros billet dans la paluche et ses yeux s’égosillent. Il a des étoiles qui pétillent et la bouche qui se décroche. Doit pas voir ça touts les jours. Et franchement, par une journée aussi merdique, rien ne vaut le sourire d’un gosse devant la monnaie. J’peux pas plus pour lui aujourd’hui, mais j’ai hâte de le voir faire face au prix de la liberté.
***
- Eh mec, tu croiras jamais ce qui m’est arrivé hier soir !
- C’est sûr que si tu commence comme ça …
- Faux frère ! J’savais que t’étais juste interessé par mes réduction à la cantine ! Escroc ! Moi qui te prenais pour mon pote quoi.
- J’le suis j’le suis … Mais tu commences toujours tes histoires d’la même manière, un peu d'originalité que diable !
- Ouai mais c'est le genre d'histoire qu'à pas besoin de ça, c'est un faits d'hivers tu vois …
- Bah raconte et paye un verre, vrais que ça caille.
- Hmprfgh... Et si tu m'avais couper l'envie tiens ?
- Bah j’aurais perdu cinq minutes de pause syndicale. Et tu sais à quel point j’ai horreur de ça …
- Non mais … Attends ! Attends Marcosh’tap sh’tap sh’tap Pose toi là, j’vais tout te raconter : Tu te souviens d'la vieille baraque abandonnée sur Mainstreet ?
- Oh… tu titille ma curiosité … *
La mienne aussi, tiens. J’tends l’oreille à la rumeur. Sur la p’tit place, la terrasse est à l’ombre de plusieurs bâtiments imposants. Le soleil m’tape pourtant dans l’œil et j’ai du mal à distinguer les deux types. Des fonctionnaires ou des banquiers, l’genre à se faire une vie sur celle des autres. J’ai faillis me retourner d’un bloc quand j’ai entendu l’adresse, mais j’feins de suite l’indifférence total pour contempler la vasque de la place. Un truc basique, en argile, à peine plus grosse que ma cruche journalière. Classique, on sent tout de même une force partriculière, une sorte de vieillesse séculaire te renvoyant sur les bancs de l’école, ou dans tes langes. L’impression que le monde est beaucoup plus grand et trop vieux pour toi.
Pendant ce temps là, mon bonhomme me raconte une drôle d’histoire … Des porte-flingue en costard dans l’obscurité ; Il se presse … Il voit des camions décharger de longues caisses en silence… Un éclair zèbre la nuit…
BANG.
Le silence succède à la fureur du coup de feu. La place est remplie de témoins, pourtant le tireur n’a pas eu peur de crier : Pour la Taupe, toquard ! Avant que le plomb ne crache son intention meurtrière. Un. Mes instincts reprennent le dessus, l’adrénaline me porte. Ma vue est brouillée, la place noire de touristes et de marchands dont la panique monte à la bouche. Deux. Tous se touchent pour savoir s’ils ne sont pas blessés quelque part, bien malgré eux, ce réflexe est conditionné depuis que la poudre à été inventée. Tous sauf deux personnes : Une petite fille plus intéressée par sa glace que par les armes à feu et un homme à la face patibulaire, entièrement rasé. Pas de sourcils, ni de chaume et encore moins de cheveux. Trois.
La terreur dévaste la place à la vasque. Les corps se heurtent et se pressent à terre ou encore vers les rues adjacentes. Tous essayent de fuir, sauf mon client. Pendant que le cahos s’installe, j’bondis, profitant de la confusion. Il est là, à dix mètres de moi. Trois pas, et j’réduis la distance de moitié, me ramassant un maximum : Je charge ce fil de pute ; L’assassin se retourne vers moi, un truc froid touche mon pied et la fille m’insulte de touts les noms. Drôles de Jurons pour une gamine. J’fais pas attention à la brunette. Ni au cris du tireur. J’dois m’en débarrasser vite fait ; S’il est aussi mauvais – va pas m’dire qu’un pro de la gâchette rate sa cible à dix mètres- c’est que d’autres tireurs embusqués se cachent quelques part. Mon poing armé transperce sa garde qu’il avait voulue optimale ; Il ne suffit pas de savoir ou va frapper ton persécuteur, mais plutôt comment éviter de se la prendre. Brra-ko.
J’rejoins en courant mon indic’ bien malgré lui. Son pote l’a quitté, trop apeuré pour s’occuper d’un collègue de bureau. Il a du sang sur lui, mais c’est pas le sien. Ses cheveux bruns sont en désordes, sa paire de lunettes glisse de son nez rond et il se tords d’un grimace mi-figue mi-raisin. Inconsciemment son corps rase les murs.
J’attrape son bras et le regarde dans le fond des yeux.
- Cours et suis moi si tu veux vivre.
J’lui laisse pas le temps de réfléchir qu’on s’élance déjà dans un dédale de rue, une balle frôlant nos têtes et des bandits aux talons. La seule solution pour contrer le numéraire c’est de donner dans la bonne cage.
On s’leurre pas, la guerre et l’embrouille c’est dans le sang qu’on la charrie, et c’est dans le sang qu’on la règle. Ici comme pas ailleurs : On vient y faire mourir des gens à petit feu.
J’préfèrerai encore qu’on m’ descende plutôt que d’crever de vieillesse à construire un putain de pont. Si j’te parle de ça, c’que mon contact aujourd’hui, c’est Gregas le ferrailleur, un vieux Bagneux bien au fait. Faut dire que diriger toutes les p’tites souris, touts les voleurs et touts les orphelins du coins, ça lui donnait un certain avantage sur ces concurrents. C’lui qu’on vient voir pour connaître l’passif de tel ou tel lieutenant ; Pour savoir qui t’as piqué ton marteau ? Un coup de bigo’ à Gregas, et tout s’éclair. Enfin c’que m’a dit un mec vachement plus au fait que moi, donc j’le crois. Pas de raison de me méfier, au pire en tapant dans la fourmilière j’retrouverai sans doute mon chemin vers la reine.
le bagne, c’est la galère. Non, sans rire. De hauts murs cernent des maisons toutes pareilles. Des boites ? Plutôt des cellules ; La cage à beau être spacieuse, les barreaux aux fenêtres, les sentinelles et les barbelés rayent touts doutes de l’équation. On y entre, on y sort plus. Et pourtant c’la que se cache mon contact. Il a bien réussit son coup. J’souris en voyant un gamin aux blanches pattes crapahuter vers moi. Lui il a ses entrées et ses sorties sans difficultés du bagne. Une chance pour lui d’bosser avec Gregas. Si on peut parler de chance dans cet enfer.
Le p’tit brun soutient la même allure sans problème. Ses yeux bleus sont pleins d’intelligence. Une intelligence qui le laisse coi. C’est bien, tu as rapidement compris les règles de notre jeu. J’te donnerais ni nom, ni informations, ni même un mot. Tu sais que je suis ici pour un truc précis qui n’concerne que l’mec qui te permet de te vêtir, de te nourrir et d’survivre.
Et la colère qui me gronde crispe mes traits, inclinant à m’laisser ruminer mon pétrole. Toutes ses maisons sont des prisons. Une petite étincelle. Des visages d’enfants qui m’devisagent, à moitiés masqués par la pénomre des vieux lampadaire. La ville est silence. Tout est recouvert, entièrement masqué par la neige. Mais pas la misère du bagne. Elle est là, bien visible.
Et personne ne fait rien, personne ne voit rien, personne. Il me faut une bonne dose de volonté pour me contrôler. Mon sang est de glace, et touts mes muscles se crispent. C’est comme une infection. Elle rampe là, dans votre corps, grossit puis explose. J’suis au bords de la rupture quand l’ptit garçon me montre une vieille porte cochère à moitié dans la terre.
- On est arrivé, c’est ici. Descendez les marches et frappez trois puis deux puis trois coups.
- Merci bonhomme.
J’lui pose un gros billet dans la paluche et ses yeux s’égosillent. Il a des étoiles qui pétillent et la bouche qui se décroche. Doit pas voir ça touts les jours. Et franchement, par une journée aussi merdique, rien ne vaut le sourire d’un gosse devant la monnaie. J’peux pas plus pour lui aujourd’hui, mais j’ai hâte de le voir faire face au prix de la liberté.
***
- Eh mec, tu croiras jamais ce qui m’est arrivé hier soir !
- C’est sûr que si tu commence comme ça …
- Faux frère ! J’savais que t’étais juste interessé par mes réduction à la cantine ! Escroc ! Moi qui te prenais pour mon pote quoi.
- J’le suis j’le suis … Mais tu commences toujours tes histoires d’la même manière, un peu d'originalité que diable !
- Ouai mais c'est le genre d'histoire qu'à pas besoin de ça, c'est un faits d'hivers tu vois …
- Bah raconte et paye un verre, vrais que ça caille.
- Hmprfgh... Et si tu m'avais couper l'envie tiens ?
- Bah j’aurais perdu cinq minutes de pause syndicale. Et tu sais à quel point j’ai horreur de ça …
- Non mais … Attends ! Attends Marcosh’tap sh’tap sh’tap Pose toi là, j’vais tout te raconter : Tu te souviens d'la vieille baraque abandonnée sur Mainstreet ?
- Oh… tu titille ma curiosité … *
La mienne aussi, tiens. J’tends l’oreille à la rumeur. Sur la p’tit place, la terrasse est à l’ombre de plusieurs bâtiments imposants. Le soleil m’tape pourtant dans l’œil et j’ai du mal à distinguer les deux types. Des fonctionnaires ou des banquiers, l’genre à se faire une vie sur celle des autres. J’ai faillis me retourner d’un bloc quand j’ai entendu l’adresse, mais j’feins de suite l’indifférence total pour contempler la vasque de la place. Un truc basique, en argile, à peine plus grosse que ma cruche journalière. Classique, on sent tout de même une force partriculière, une sorte de vieillesse séculaire te renvoyant sur les bancs de l’école, ou dans tes langes. L’impression que le monde est beaucoup plus grand et trop vieux pour toi.
Pendant ce temps là, mon bonhomme me raconte une drôle d’histoire … Des porte-flingue en costard dans l’obscurité ; Il se presse … Il voit des camions décharger de longues caisses en silence… Un éclair zèbre la nuit…
BANG.
Le silence succède à la fureur du coup de feu. La place est remplie de témoins, pourtant le tireur n’a pas eu peur de crier : Pour la Taupe, toquard ! Avant que le plomb ne crache son intention meurtrière. Un. Mes instincts reprennent le dessus, l’adrénaline me porte. Ma vue est brouillée, la place noire de touristes et de marchands dont la panique monte à la bouche. Deux. Tous se touchent pour savoir s’ils ne sont pas blessés quelque part, bien malgré eux, ce réflexe est conditionné depuis que la poudre à été inventée. Tous sauf deux personnes : Une petite fille plus intéressée par sa glace que par les armes à feu et un homme à la face patibulaire, entièrement rasé. Pas de sourcils, ni de chaume et encore moins de cheveux. Trois.
La terreur dévaste la place à la vasque. Les corps se heurtent et se pressent à terre ou encore vers les rues adjacentes. Tous essayent de fuir, sauf mon client. Pendant que le cahos s’installe, j’bondis, profitant de la confusion. Il est là, à dix mètres de moi. Trois pas, et j’réduis la distance de moitié, me ramassant un maximum : Je charge ce fil de pute ; L’assassin se retourne vers moi, un truc froid touche mon pied et la fille m’insulte de touts les noms. Drôles de Jurons pour une gamine. J’fais pas attention à la brunette. Ni au cris du tireur. J’dois m’en débarrasser vite fait ; S’il est aussi mauvais – va pas m’dire qu’un pro de la gâchette rate sa cible à dix mètres- c’est que d’autres tireurs embusqués se cachent quelques part. Mon poing armé transperce sa garde qu’il avait voulue optimale ; Il ne suffit pas de savoir ou va frapper ton persécuteur, mais plutôt comment éviter de se la prendre. Brra-ko.
J’rejoins en courant mon indic’ bien malgré lui. Son pote l’a quitté, trop apeuré pour s’occuper d’un collègue de bureau. Il a du sang sur lui, mais c’est pas le sien. Ses cheveux bruns sont en désordes, sa paire de lunettes glisse de son nez rond et il se tords d’un grimace mi-figue mi-raisin. Inconsciemment son corps rase les murs.
J’attrape son bras et le regarde dans le fond des yeux.
- Cours et suis moi si tu veux vivre.
J’lui laisse pas le temps de réfléchir qu’on s’élance déjà dans un dédale de rue, une balle frôlant nos têtes et des bandits aux talons. La seule solution pour contrer le numéraire c’est de donner dans la bonne cage.
Dernière édition par Judas le Sam 17 Jan 2015 - 16:05, édité 1 fois