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Loin de sa meute.

Loin de sa meute. Jabkar10

Le Commodore est un homme de parole. Vaincu, il a obtempéré. Son ravisseur l'a mené jusqu'à leur embarcation, où on lui a bandé les yeux. Un individu de sa trempe, qui sait l'importance de cultiver son esprit et de savoir lire en eux, saurait également décrypter les étoiles, comprendre leur langage pour savoir se repérer. Et sa destination doit lui rester inconnue. Un des kidnappeurs fait mine de le ligoter, également, par sécurité; la voix grave du capitaine de mission intervient pour signifier que c'est inutile. Ce serait une insulte, non une marque de sagesse. Personne ne remet en cause cette décision. De l'individu taciturne émane une force sombre et tranquille que personne ne veut contester. On ne réveille pas un monstre qui dort. Un mot, un cap, une répartition des quarts, et c'est tout.

Pendant plusieurs heures, silencieuses, le navire suit les courants marins favorables. Parfois, on entend la mélodie du vent, tout autour, qui vient caresser et faire onduler les voiles. Au dessus d'eux, un ciel sans nuages, une lune plus brillante que jamais; son l'éclat d'argent vient se refléter sur la houle. S'il peut deviner la majesté du décor, Hadoc ne voit rien de tout cela. On lui a intimé de s'asseoir, adossé au grand mât, et de ne plus en bouger. Il peut ressentir, tout près de lui, la présence de celui qui l'a défait lors de leur duel. Lui aussi, immobile, muet. Peut-être songe t-il à leur combat.

Puis, l'aurore vient percer, timidement, à travers le tissu noir qui masque la vue de Hadoc. Une pâle chaleur vient caresser sa peau. Quelqu'un vient déposer un verre d'eau à ses pieds. Six heures de navigation se sont écoulées. Le pont reprend vie. Les vas et viens se font plus nombreux, on échange quelques paroles. Et très vite, l'astre flamboyant atteint le zénith. C'est le moment que choisit la vigie pour signaler la présence d'un navire. La nouvelle n'émeut personne, ils avaient rendez-vous.

Préparez-vous à accoster.

Chacun regagne sa place pour la manœuvre, les navires se rangent bord à bord au beau milieu de l'immensité bleue. Il suffit d'une enjambée pour passer d'un pont à l'autre, ce que ne se privent pas de faire plusieurs matelots de chacun des deux bateaux. Parmi les nouveaux arrivants, l'un a la voix perçante, malsaine. C'est celui qui donne les ordres. Ses ricanements tranchent avec l'impassibilité de l'autre capitaine. Les deux hommes échangent quelques bribes de phrases. Hadoc peut discerner un " Fais selon le plan ", lancé plus haut que le reste de l'échange. L'aura désormais familière de celui qui l'a vaincu se fait plus forte. Il est juste devant lui.

Gharr Hadoc. Ce fut un honneur de vous combattre. Je me souviendrai de vous.




Loin de sa meute. Kihal12

Très vite, on a relevé le prisonnier sans ménagement, pour le conduire à niveau d'épaule vers le rebord du navire. On lui a intimé de sauter. Non pas dans le grand vide, mais vers l'autre pont. Un simple changement de transport. Il a atterri sur un autre sol de bois, où on l'a bousculé, puis ligoté au niveau des poignets, sous la menace d'une lame froide pointée sur sa gorge. La corde, elle, est nouée au mât contre lequel on l'a poussé, à hauteur de la nuque du bretteur, de sorte que ses bras soient maintenus derrière sa tête. Une main nerveuse est venue lui arracher le bandeau qui le privait de la lumière du jour. Et la première chose qu'aperçut le Commodore, son regard enfin libéré de toute entrave, ce fut un visage. Agité, malsain. Définitivement malsain. Un homme entouré d'une atmosphère instable et nauséabonde. Un homme qui l'a toisé dans un sourire dérangé.

Gya-yaya, c'est donc toi ! L'homme que je vais conduire à notre Maître. Un conseil, ne tente rien. Ça me chagrinerait d'avoir à te faire du mal. Gya-yayaya .... Allez, vous autres, on rentre au bercail !

Loin dans l'azur, la silhouette du navire de ses précédents captifs disparait. Et le Commodore n'a rien gagné au change.


Spoiler:
    Le captif se passe et repasse la projection du bretteur qui l'a défait. Il faut tout enregistré tant que c'est frais et se battre à nouveau contre lui jusqu'à parvenir à le vaincre. De nombreuses simulations parcourent l'état méditatif de Gharr et, pour le moment, aucune ne conclut à un résultat décisif. L'autre est une arme froide, comme lui. Et comme lui il a composé son style de combat en recréant sa propre technique à partir d'autres. Mais qui a pu les lui enseigner ? Les véritables manieurs de katanas sont rares et un tel guerrier sévissant à Shimotsuki aurait forcément été repéré. Un maître indépendant ? Comme Hadoc en a lui-même profité via son père du temps où il s'appelait Hadoku ? Cette étrange impression d'avoir près de soi une sorte de clone est déconcertant et, puisqu'il concerne le domaine martial, désagréable.

    Bien sot celui qui pense qu'il a l'expérience pour considérer Grandline comme une promenade. Ce boyau chaotique achemine tout et son contraire, on peut y croiser son maître à chaque changement de temps. Et les temps changent. La réflexion donne suite à une considération de son propre niveau. Des mois qu'il n'a plus croisé le fer avec un autre bushi, et l'occasion en aura fait un perdant. Si c'était son premier voyage sur la route de tous les périls, Gharr se penserait prince des mendiant réalisant qu'il était bien pauvre au milieu des rois. Mais cette impression amère n'est qu'un relent du passé où elle se révélait à lui pour la première fois. On ne finit jamais de s'entraîner pour ne plus jamais avoir à subir ce choc. Mais il revient, toujours.

    Fort heureusement, les Ghost Dogs n'ont pas besoin de lui et les seuls membres du civil sont partis. Sorën a passé plus de temps en dehors qu'à l'intérieur de l'équipage. Lou suivra la procédure, Rik est débrouillard, Yamamoto forgera et rien d'autre n'aura d'importance, Pludbus a trop fricoté avec la chance pour qu'elle l'abandonne maintenant. Ils ont tous un passé ailleurs et une flopée d'aventures avant leur venue. Celle-ci n'est pas la fin, mais le tournant d'un nouveau chapitre. Qu'importe qu'il puisse les rejoindre ou non, ils ont été accueillis parce qu'ils n'avaient pas besoin de servir, mais qu'ils le voulaient. Alors oui, inutile de s'en faire pour eux, pas plus que pour soit.

    Le ronin pose un verre d'eau au lever du jour. Gharr s'en saisit et le bois par petites gorgées, ignorant quand serait le suivant. Eh puis montrer sa soif n'est pas élégant. Le compte des auras qu'il avait fait est faussé par la venue et le départ de nouveaux et anciens membres. Il faudra recommencer. Le ronin fait partie des ceux qui repartent et Hadoc le salue de la tête au moment des adieux. Il le retrouvera. Le change marque une profonde perte tant en valeur humaine qu'en bonnes manières. ligoté comme si ses bras étaient du saucisson à conserver en cave, le nouveau capitaine des lieux contraste tant avec son prédécesseur que l'idée de mercenaires se fait de plus en plus pertinente. Sitôt immobilisé au mât, une main touche le linceul du Commodore. Là,  la mécanique se met en marche.

    Fermer un oeil pour ne pas subir l'aveuglement de la lumière. Laisser le voile s'ôter. Détourner la tête en feintant une agression du soleil levant. Vérifier la distance du précédent navire et le nombre de gardes s'en séparant. Faire revenir l'oeil sur l'équipement du Capitaine. Plisser les yeux pour tenter de l'identifier. Lui demander qui il est. Ne pas attendre la réponse, sauter en agrippant son sabre d'un pied et s'appuyer sur son ventre de l'autre. l'éjecter en capturant son arme dans la manoeuvre, puis monter le pied pour couper la corde. Se délier les mains en coupant le grand mât du pied armé. Courir le long du grand mât plongeant vers la mer. S'en servir comme tremplin pour sauter sur le navire filant. Retrouver le ronin. l'affronter. Prendre possession du navire et donner le choix aux occupants entre la coopération ou la mort.

    Non, mauvais plan. Le nouvel hôte pourrait organiser ses hommes ou lancer des ordres à l'équipage envahit pour éviter l'obéissance. Pour se faire obéir, il faudrait supprimer les deux capitaines. Impossible, le ronin est déjà très fort seul. Aidé d'un autre gradé ou même du simple équipage, les chances de vaincre sont trop nulles, surtout si le duel voudrait maintenir en vie le ronin pour l'interroger et se rendre comme promis jusqu'à son chef, mais sans liens et en sachant d'avance qui l'attend. Meilleur plan.

    Tourner la tête un oeil fermé. Vérifier que l'autre navire est bien assez loin. Repérer les canaux de sauvetage. observer l'équipement cu Capitaine. Le ver les jambes. Prendre et dégainer son arme avec l'une, donner un coup de l'intérieur de la plant dans le tibia avec l'autre. le tibia est un os incurvé vers l'arrière, il ne se brise que par des coups frontaux. Déséquilibrer la cible et couper les liens. Se libérer les mains en replantant le sabre dans sa gorge. Tourner la lame, pour que la plaie reste ouverte. Couper la barre et envoyer une lame d'air sur la vigie ainsi que chaque membre sur le pont. Sécuriser la zone en silence. Voler un canaux et fuir le premier navire en profitant de l'obstacle du second.

    Jouable, mais l'accord de rencontrer le supérieur est brisé. Parole d'honneur violée, samouraï déchu de son rang jusqu'à rachat de la faute. Aucun rachat pour une fuite volontaire et dispensable. Faute lavée par le suicide ou prise de la Voie du ronin. Nouveau plan, définitif.

    Le linceul de Gharr s'ôte et la lumière lui fait tourner de l'oeil. Le temps qu'il s'habitue, il replonge ses yeux sombres dans ceux du nouveau Capitaine et repense à ce qu'il a vu au moment de balayer la zone. Le sabre blanc, il le connait. Ou plutôt, il en connaît l'ancien propriétaire. Harold B. Jenkings, pirate primé à 110 millions de berries. Mort en s'entretuant avec le Commodore Sagara quand Hadoc venait d'être promu Commandant et de créer les Ghost Dogs. Jenkings a été le premier corps ayant reçu les hommages militaires sur le Passeur, parce qu'il s'était rangé et avait passé la fin de sa vie à affronter les marines corrompus. Il avait confié à Gharr que sa conversion n'était pas de son fait, mais de celle de l'influence d'un sabre maudit prenant peu à peu le pas sur son désir de tuer.

    Izanagi ?

    L'homme ne répond pas, il sort son laïus sur les conseils de se tenir tranquille. Si cela n'avait pas été le cas, Hadoc serait déjà passé à l'action. Personne n'a cru bon de lui attacher les pieds. Avoir appris à s'en servir dans le secret à Shimotsuki est un atout qui ne cessera de le servir, d'autant qu'il fait attention à ne jamais l'employer en combat si ce n'est pas nécessaire. Ses entraves ne changent rien. Gharr est capable d'occire à peu près tout ce qui s'approchera de lui et le préférera mort. En outre, il garde sous la langue un microescargophone qui n'est distribué qu'aux forces spéciales du QG d'East Blue mais qu'il possède et utilise en oreillette depuis des années. Utile quand il sera en mesure d'appeler les siens et de leur transmettre sa position. Autant que ce soit depuis les quartiers ennemis. Il aura forcément du temps à tuer si on le confie à une prison. En attendant, il se tait et observe le navire, l'équipage, les consignes de rondes, l'éventuelle présence de volatiles et leur localisation géographique, ainsi que toute indication sur des tonneaux, sacs de provisions, vêtements de passants. Tout ce qui peut stimuler son apprentissage de l'autre est à prendre avant la rencontre.

    Spoiler:


    Dernière édition par Gharr Hadoc le Sam 6 Juil 2013 - 2:56, édité 1 fois
    • https://www.onepiece-requiem.net/t1985-le-set-samourai
    • https://www.onepiece-requiem.net/t1888-le-capitaine-hadoc-a-emherge
    Un temps, le Commodore a été le sujet de toutes les attentions, de la curiosité de l'équipage entier. On l'a dévisagé sans délicatesse, mais toujours de loin, une certaine prudence enjoignant les matelots à ne pas trop jouer avec leur fortune. Rares sont ceux qui osent s'approcher d'un individu dont on devine aisément qu'il a acquis son Grade au fil de son katana. Si leur maître a jugé bon d'envoyer Jabkar le défier, lui et personne d'autre, pour être assuré de voir la mission couronnée de succès, c'est que le samouraï est forcément un guerrier redoutable. Dangereux. Seul, leur chef de mission, au caractère changeant, passant du morne à l'hystérie au gré des rafales de vent, ne partage pas le point de vue général. Hadoc, en prêtant l'oreille, l'a entendu cracher sur son nom, sur ses capacités arme en main. Il est aisé de deviner la frustration de celui qui n'a pas été choisi pour défier le Capitaine marine. Lui qui rêve de faire goutter à ses armes le sang d'adversaires toujours plus distingués a été privé de la plus belle opportunité à jamais s'être offert à lui.

    Désormais, plus personne ne se soucie vraiment du captif. Il est là, contre le mât principal, prisonnier de ses entraves de corde. Les hommes sur le pont ont trop à faire à manœuvrer sur une mer désormais hostile pour lui accorder quelque attention. L'un, même, a manqué de passer par dessus bord lorsque la houle soudainement plus puissante est venue bousculer la coque. Cet épisode, annonciateur de conditions de navigation plus difficile, a rappelé chacun à une vigilance sans faille. Car Grand Line dévoile maintenant à ces marins pourtant aguerris l'étendue de ses dangers, de son vice. Sans crier gare, de lourds nuages noirs chargés de pluie sont venus plonger le navire, réduit désormais au statut de coquille ballotée de tout bord par les éléments, dans une obscurité quasi totale.

    Seul un homme semble apprécier la tornade qui s'abat. Kihal. Il harangue ses troupes, bouscule ou gifle même parfois ceux qui se retrouvent renversés ou éjectés de leur poste d'un raffut par la mer furieuse. Il vient toiser Hadoc, toutes dents en dehors, lui assure qu'il n'a rien à craindre de cette petite intempérie. Lui vient alors une idée, qu'il dévoile ouvertement au marine. Il pourrait profiter de cet incident pour " abimer" un peu son voyageur, rejetant la faute sur les éléments déchainés. Comme s'il était besoin de plus d'eau, et bien décidé à mettre son idée en application, il jette un seau rempli au visage de l'Officier qui reste de marbre. Comportement prompt à faire exploser l'instable meneur en face de lui. Il sort de son étui un coutelas qui dormait à sa ceinture pour faire venir danser la lame devant leurs yeux.

    Tu veux jouer avec moi ? On va jouer ! Yahaha !

    Un matelot tente un timide " est-ce une bonne idée ? " qui lui vaut de s'attirer les foudres de son supérieur. Son humeur extatique, douchée, se meut en un froid regard réprobateur. Sans crier gare, il bondit, reporte toute son envie sadique sur le malheureux en train déjà de se repentir. Les gémissements de sa victime ne font qu'attiser sa transe meurtrière. Un rire mauvais à moitié englouti par les flots s'échappe de ses lèvres. Une première entaille vient faire perler une goutte de sang au niveau de la joue gauche du matelot. Une seule goutte. Pour commencer. Personne n'ose interrompre Kihal, de peur de devenir son prochain exutoire. Tous les hommes de bord regardent ailleurs, ou ferment les yeux. La dague s'élève à nouveau bien haut

    ... quand une main délicate vient caresser le poignet armé et interrompt le mouvement descendant qui promettait de répandre à nouveau chair et douleur.





    Loin de sa meute. Flaca10

    Cela suffit, Kihal.

    La lame retombe sur le pont. Kihal se relève, libère le marin et hoche la tête calmement. Hadoc n'a pas perdu une miette de cet étonnant spectacle. Il voit cette femme à la longue chevelure brune, vêtue d'une simple tunique mauve, visage doux, voix fluette, et peut se demander quel prodige lui a permis d'atteindre l'âme dérangée de sa cible pour le dissuader de continuer. Elle l'a à peine effleuré. Mais cela a suffi. A suspendre le geste meurtrier. A apaiser un temps la furie. Un temps seulement.

    Car déjà, le charme se brise. Des yeux injectés de sang fusillent littéralement l'unique femme à bord.

    Flaca ... '

    Une main crispée menace déjà de gifler le visage serein qui tranche avec le sien, défiguré par la colère. Mais au lieu de frapper, Kihal se mord les lèvres. Jusqu'au sang. Et se contente de maudire la chance de celle qu'il épargne.


    Mais ça ne sera pas toujours ainsi, ajoute t-il, mauvais, avant de disparaitre en cabine.

    Aussi soudainement qu'elle avait surgi, la tempête se dissipe. Un timide rayon perce déjà, vient réchauffer le bois et la peau. Sur le pont noyé par l'orage, chacun reprend difficilement son souffle. On redonne un peu plus de voilure, s'autorise à laisser les muscles endoloris respirer. La mystérieuse inconnue pose une main sur le front du pauvre infortuné qui a cru sa dernière heure venue. Comme pour l'apaiser. Ses paroles sont chaudes, rassurantes. Puis, elle se retourne, s'approche de Hadoc et lui lance un regard cristallin, troublant. Son index, délicatement, vient glisser contre le front du guerrier. Ses traits s'adoucissent alors, imperceptiblement.

    Faites la paix avec votre conscience, maître samouraï. Embrassez la Vérité. Un esprit serein sait retrouver le chemin de la Vertu et affronter tranquillement l'heure du Jugement.