C'est piégeux. Ça grince, ça craque puis ça casse aussi. Mais surtout, c'est grandiose. Ces épaves encastrés de force les une dans les autres ont, au fil du temps, prises une allure organique. Les restants de coque se trouent de mats brisé, le tout formant un entrelacement chaotique mais d'où émane en fin de compte une certaine harmonie. Les amas de mousse aux couleurs changeantes ni sont probablement pas étrangers, où sont-ce les poutres gigantesques qui dans les hauteurs semblent soutenir l'endroit, couvertes de restes vaporeux d'anciennes voiles maintenant presque inexistante? Toujours est-il que le spectacle est grandiose et unique, malgré les dangers certains qu'il cache. De ci de là, on peut deviner les restes du mobilier de qualité, dont les morceaux ponctuent le paysage. Parfois aussi, on découvre les restes d'un squelette encore habillé, souvent dans une position peut confortable. Etrangement, il y a de la lumière. Des sortes de lucioles intestinales illuminent les "airs", tandis que les flacs d'eau, aux proportions parfois impressionnantes, sont le lieu de résidence de poissons luisant.
Difficile dès lors de garder les yeux là où ils doivent être, à savoir là où Hopper met les pieds. Difficile aussi de suivre Foxy, toujours aussi volatile et souple. Ensemble, il grimpe sur ce qui doit être le milieu d'un navire fendu net. Les cales et cabines, à la verticale, son devenue des crevasses sans fonds, prêtes à vous avaler. Les sauts sont obligatoires pour outrepasser les pièges, alors que les appuis possibles sont eux glissants et friables. De façon récurrentes, Hopper doit rebondir directement après avoir atterri, sous peine de suivre la plateforme qui s'effondre sous son poids. Il se surprend néanmoins à être de plus en plus à l'aise dans cet exercice périlleux, et parvient même à rattraper la commandante. Ils débarque ensemble sur ce qui devait être une proue gigantesque, tant elle s'étend sur encore une vingtaine de mètres. Foxy se fige.
Vous entendez?
Hopper tend l'oreille. Il écoute. L'humidité ambiante, les tintements des gouttes, la mousse qui respire, les craquements du bois mouillé. Quelques gargouillis de sucs, comme une rumeur. Rien de particulier.
...ha ...ha ..aha...
Il entend! C'est très lointain. Diffus. Mais ça revient, périodiquement. Hopper se concentre, il cherche la source... Impossible à localiser. Trop de parasites, trop d'échos. Comme pour s'excuser, il cherche le regard de sa Commandante. Mais il est broucouille: elle n'est plus là. Elle ne l'a pas attendue. Foxy caracole déjà en tête, progresse vers las hauteurs. Hopper n'a d'autre choix que de la suivre, et il fait bien. A quelques encablures, une niche est animée d'étranges reflets. Des reflets qui en rappellent d'autres à Hopper, qu'il a vue avant d'entré dans les carcasses. Des reflets d'or.
Toujours derrière sa commandante, Hopper n'ose réellement y croire. Vont-ils réellement mettre la main sur un trésor légendaire, un mythe? On entend souvent parler d'exploits divers et variés, haut en couleurs, dignes d'être conté, mais leur réalité ne nous effleure que très peu. Pourtant, ici, Hopper est en pleine réalité. Mais elle goute comme un songe. Plus que quelques mètres. Un dernier saut, Hopper entre dans la niche. Alors qu'il passe dans l'ouverture, il constate deux choses: d'abord, la niche a des dimensions de hangar, et ensuite, ils ne s'était pas trompés. Les reflets qu'ont aperçu Foxy et Hopper son bien là, ils tapissent les parois. Ils dansent, au gré d'un feu. Et le bruit se fait entendre plus clairement.
Grahahahaha!
Hopper s'enfonce, doucement, sans faire de bruit, sur les talons de miss James. Elle lève la main, il s'arrête et observe. Dans un premier temps, il lui est difficile de distinguer. Il voit un feu, en effet, une trentaine de mètres devant lui, mais ses yeux ont du mal à s'habituer à cette nouvelle luminosité. Mais petit à petit, il commence à distinguer le tableau. Derrière le feu, des coffres. Après un bref regard au sol, Hopper comprend qu'ils ont été trainés, rassemblés là: le bois en porte encore les traces. Et devant les coffres, deux silhouettes, qui se détachent, et gesticulent. Le sergent ne cherche pas midi à quatorze heure. Il sait qui ils sont. Quand à vous, vous vous en doutez surement.
Miss Lane, le monde nous sourit!
Kihéhé le monde nous sourit!
Avec tout cet or, ce sont des flottes entières que nous nous procurerons!
Des flottes entières, oui!
Une armada de bateaux, armés jusqu'aux mâts, qui nous mèneront à la conquête de Grand Line!
Des mâts armés qui nous armaderont sur Grand Line oui!
D'où il est, Hopper a une vue imprenable sur la gestuelle folle qui anime Von John. Et sur son accoutrement. Lui et sa seconde ont dû en baver, en témoigne les guenilles qu'ils portent. Quant aux mouvements saccadés de Von John et la loghorée limité de Lane, ils démontrent d'une folie profonde, probablement née de la trouvaille. Car ces plans de grandeurs ne sont rien si on les confronte à la situation: deux pirates médiocres mettent la main sur le plus gros magot probablement existant, mais pour en profiter, ils devront le sortir d'un monstre marin gigantesque. En aucun cas, ils ne pourront profiter de leurs gains, et cette idée à dû leur apparaitre. Ils se cachent donc derrière des rêves fantasques. Non, pas derrière. Dedans.
Ah ça non.
murmure Foxy, à la gauche d'Hopper, tout en se relevant.
Ça il n'en est pas question.
clame-t-elle plus fort, en s'avançant vers les deux énergumènes.
Il est hors de question que je vous laisse profiter d'une once de cette fortune! Sur ma vie jamais!
Bien qu'il ne comprenne pas à quoi elle joue, Hopper se lève et part à la suite de la commandante, marchant juste en retrait d'elle, à son rythme, tandis que les deux pirates tournent la tête vers eux, visiblement éberlués.
Regardez Miss Lane! Déjà, les premiers pillards!
Les premiers pillards!
Vous allez ôter immédiatement vos sales pattes de ces coffres et gentiment vous rendre. Vous n'aurez pas une pièce car...
Nous sommes la just...
C'est MON trésor!
Ah oui. C'est vrai. Hopper avait presque oublié. Les pirates ne sont pas les seuls obsédés des coffres pleins, loin de là. Miss James, il semble, lorsqu'on parle de butin enfoui, à la palme de l'obsession.
Venez donc le prendre!
Les deux pirates bondissent, tout en sortant sabre et pistolet! Avec une vitesse étonnante pour un homme de sa corpulence, Vin John fond sur Foxy! Miss Lane pour sa part prend Hopper pour cible, poignards aux poings! Le Jo raidit ses muscles, sert sa garde. L'oeil précis, sans perdre sa cible de vue, il scrute. Il trouve: à quelques pas de lui, une barre métallique pourra faire office d'arme. D'un bond il la rejoint, pour s'en saisir et la brandir vers Miss Lane. Sa garde est infaillible, il analyse déjà la position de la pirate aux dents d'or, cherchant à deviner d'où viendra son attaque! D'une impulsion sèche, Miss Lane se tend.
*Elle va visé le ventr...*
Miss Lane ne va rien viser du tout: dans un grand fracas, le bois en dessous d'elle cède, l'emportant vers les tréfonds. Hopper le ne voit pas, mais le cri de la femme résonne longtemps, avant de finir dans un bruit sec et mou, ce genre de dernier bruit. Miss Lane n'est plus, Hopper est un peu déçu. Mais qu'à cela ne tienne, il se tourne, prêt à aller aider la commandante avec son ennemi! Il voit Von John en train de vider se barillet de poudre en direction de Foxy James, qui se protège derrière ce qui devait être un canot de sauvetage. Hopper sert son arme, s'apprête à se lancer sur Von John, mais ce dernier tombe à court de poudre. Foxy en profite pour sortir de sa cachette. Le pirate tire deux sabres de sa ceinture et se précipite sur la miss. Puis... il s'arrête. La Commandante a disparu. Ébahi, il la cherche du regard, à gauche, à droite, en haut... C'est Hopper qui la retrouve en premier. Sans trop comprendre comment elle est arrivé là, il voit sa Commandante apparaitre dans le dos du pirate... qui s'effondre. Hopper cligne des yeux, il lui a semblé voir un mouvement de la part de la rousse. Mais il n'est pas sur. ... Effrayante Foxy James.
Hopper court la rejoindre, mais elle est déjà devant les coffres, elle trépigne. Alors que le sergent passe à coté du pirate au sol, ce dernier laisse échapper, comme un souffle:
Mon... mon ... mon trésor....
VLAM
Hopper, un brin frustré par ce qui devait être son premier grand combat, assomme définitivement Von John. C'est mal Hopper, tu le sais. Mais tu en avais besoin. Tu es pardonné. Sur ces sorties de narration, Hopper se dit qu'il est enfin temps de confirmer. Le pas rapide mais prudent, il n'aimerait pas finir maintenant comme Miss Lane, il rejoint Foxy et surtout... les coffres. Ils sont des dizaines. Peut-être une centaine même. Hopper en ouvre un... Il le referme. Prend une grande inspiration. Il l'ouvre à nouveau. Pas de doute. Ces pièces d'or, l'effigie qui les marquent. C'est bien le trésor de Crésus. Enfin, le trésor de Foxy.