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Chassez le naturel...

Dix-huit heures. Fin du service, et c'est pas trop tôt. Je suis sur le pont depuis huit heures pétantes. Si le Capitaine Hadoc m'avait tenu informé de ce léger détail au moment de m'engager, pas sûr que j'aurais topé. Mais j'avais pas des masses le choix, sur le moment; et la situation est ce qu'elle est maintenant, ça sert à rien de ressasser. Je suis pas tout à fait à l'aise dans ce nouvel environnement et dans mon nouveau costume, c'est pourquoi le Commodore a jugé bon de m'offrir un petit stage pratique sur l'une des bases d'East Blue avant d'embarquer à bord de son navire, Le Passeur. Et de m'accorder le droit d'arborer ma tenue de civil. Un chouette costard, faut dire, ça m'aurait coûté de le jeter au feu. Me voilà en probation, pourrait-on dire; ça fait grincer des dents le petit Commandant qui sera mon supérieur hiérarchique une fois dans le grand bain. Je sens qu'on va bien s'entendre lui et moi. Il fait le grincheux par principe, pour impressionner les criminels et les potentielles recrues, mais dans le fond, il doit être sympa. Je crois.

Un mois pour apprendre le b-a-ba de la conduite du bon marine. C'est peu. Mais qu'est ce que c'est long. Y'aurait un peu d'action, un peu d'intervention, je dis pas, mais là. Dix heures de boulot insipide, à saluer des gradés, à envoyer du "monsieur" au monde, à manier le tampon et l'agrafeuse comme un fichu gratte-papier. Jouer les messagers entre deux ailes du bâtiment, c'est la seule distraction, le seul moment de pause où je peux m'en griller une peinard en me faisant passer pour un civil auprès de ceux qui ont pas encore bien eu le temps d'enregistrer ma bouille. Bref, la vie d'ambassadeur de la Justice, elle est bien morne. Mais, heureusement, ça représente que dix heures. Ça en laisse encore un paquet pour rattraper le coup. Je suis pas officiellement rattaché à la base, je suis pas tenu de respecter le couvre-feu. Ça en fait saliver un ou deux, du dortoir, de savoir que je peux partir me divertir, arroser ma soirée comme je l'entends. Bien sûr, y'a aussi ceux qui me demandent si j'envisage sérieusement de partir au bar tous les soirs de la semaine, j'réponds que j'y compte bien. Même si c'est pas faire honneur à l'uniforme que je porte pas ? Absolument, et la bonne soirée à vous aussi. Et je sors.

Je m'en grille une, sitôt sorti de l'enceinte. Vrai qu'avec ça, ne pas fumer pendant les heures de boulot, ça fait drastiquement revoir à ma baisse ma consommation de clopes. Et de picole. Mais j'compte bien rattraper soigneusement tout ça ce soir. Y'a un bar, un peu kitch mais bien festif, où j'ai mes entrées. Pas le genre bar huppé et sur-côtoyé où je risque de tomber sur des supérieurs. Non, juste un petit établissement pas trop raccord avec ce qui est en vogue en ce moment, pas trop lumineux et pas bien cher niveau carte des alcools. La clientèle est du genre paisible et c'est tant mieux, aucune envie de devoir faire valoir mon nouveau statut de représentant de l'Ordre auprès de tel ou tel mec trop saoul et un peu turbulent. Y'a pas mal de vieux loups de mer au teint fané par les années sous le soleil et le sel, d'artistes ratés à la coiffure portée disparue, et de gars un peu crapuleux mais à peu près réglos aussi. Ça y joue parfois des vieux airs de jazz, quand un groupe itinérant négocie bien le coup et fait le fond sonore pour la soirée. Pas le cas aujourd'hui, mais y'a mieux. On est mercredi.

Et le mercredi, pour ceux qui connaissent le rendez-vous, c'est poker. Quinze ou vingt joueurs qui se retrouvent, dans l'arrière-boutique éclairée à la lanterne, répartis entre trois tables un peu old school et même pas de jetons pour les mises. Juste des biftons. Un cadre pareil, ça incite. Des jeux d'ombre et de bluff. Y'a toujours un bon joueur ou deux, parce que c'est ainsi, dans tout bon tournoi. Y'a aussi les habitués, qui viennent tant pour distiller de bonnes anecdotes et mettre l'ambiance que pour jouer. Et y'a le patron du rade qui en est parfois aussi; quand on gère un bar, on se tient jamais bien loin des jeux d'argent.

J'arrive, écrase ma clope par terre avant d'entrer. Petite porte de troquet à clochette. Ça tinte, un petit son clair qui met d'entrain. C'est déjà la quatre ou cinquième fois que je viens en vingt jours, on commence à me reconnaître au faciès. Pas loin de rentrer dans la catégorie habitués du coin, alors le serveur me lance un " Tiens bonjour " sympa. Y'a du monde, mais c'est pas complètement plein. Ça l'est rarement, faut dire. Mais là, c'est un peu trop vide.


J'suis en avance ?
Un peu. On lance dans une petite demi-heure.
Alors, une bière, pour patienter.
Une bière, ça marche.

Tirée au fût, s'il vous plait. Je m'installe sur mon tabouret, au bar, me retourne pour mirer un peu le beau monde. Deux-trois visages familiers, dans le lot; un signe de tête à l'un, avec qui j'ai tenu une de ses bonnes discussions de soirées qui mènent on sait jamais trop où la dernière fois.

Et voilà, ça fera vingt Berrys.

La monnaie transite, le serveur file. Y'a quelques autres gens que moi, au comptoir, faut les satisfaire aussi. Sur ma gauche, je l'entends prendre les commandes et glisser la remarque l'air de rien.

Bonjour, vous venez pour le tournoi ?
    Jeska découvrait une nouvelle mer. Elle qui officiait souvent sur South Blue, la voilà affectée momentanément à la base de Shell Town sur East Blue. Si ce n'était pas la première fois qu'elle visitait une autre base de la Marine, c'était bien la première fois que l'ange mettait les pieds sur un autre océan. Et quelle ne fut pas la déception de l'aveugle lorsqu'elle réalisa que la mer sentait l'iode quelque soit le lieu où l'ont se trouve. Enfin, vu qu'elle n'était pas là pour faire du tourisme, ce désappointement ne la marqua pas trop longtemps.

    En effet, l'ange aux ailes noires était là pour une bonne raison. Celle de la coopération entre forces de la Marine. Le truc très pénible que tous les soldats redoutaient de façon générale. On réunissait dans un même lieu plusieurs hauts-gradés. Qui, sans ouvertement parler de compétition, cherchaient tous à s'impressionner les uns les autres. Et donc, in extenso, faisaient trimer leurs hommes comme des bêtes pour de l’esbroufe. Tous, sauf un. L'iconoclaste Colonel Razor Ramon. Le Vale Turdo était propre, mais loin d'étinceler comme les autres navires dont on avait presque l'impression que les matelots avaient du cirer les coques pour qu'ils rutilent autant. Avec un capitaine qui s'en fichait et une seconde aveugle, il était clair que les Ramones n'étaient pas au point niveau "apparences".

    Ce fut donc sous les quolibets des autres marines que cet équipage posa un pied sur cette île. Ce qui vexa énormément l'ange. Ainsi, elle passa un savon carabiné à ses troupes, le capitaine compris. Le recadrage n'avait cependant pas eu l'effet escompté. Souvent ses "gars", comme elle les appelait tendrement, resquillaient, se cachaient, bref, déployaient énormément d'efforts pour tirer au flanc! Si seulement ils s'investissaient autant pour le prestige de l'équipage. De voir toute cette belle énergie gâchée sapait peu à peu le moral de l'aveugle. C'est pourquoi lorsqu'elle entendit un homme sortir des dortoirs (oui, elle veillait tard pour éviter que son équipage s'encanaille dans les bars), elle supposa qu'il s'agissait d'un des hommes dont elle avait la charge.

    Rik ne se douta pas qu'il était suivi. Premièrement parce que l'aveugle était particulièrement discrète lorsqu'elle marchait. Et puis surtout, dans un second temps, parce qu'elle n'avait pas besoin de garder de contact visuel avec sa cible. L'odeur de tabac que trainait ce petit coquin permettait à l'ange de ne pas perdre la trace de cet homme. C'était presque trop simple. Le fumet de la cigarette la guida jusque dans un bar. Lorsqu'elle entra, le sifflement que lui adressa un habitué lui indiqua que cet endroit ne voyait pas souvent la présence des dames. Un peu renfrognée, elle alla s'asseoir au bar. Elle avait perdu son homme, elle allait donc devoir se renseigner. Le meilleur endroit pour ça était donc de se diriger vers le copmptoir.

    Vous vous demandez certainement comment une personne à l'odorat aussi fin que Jeska avait pu perdre sa cible aussi facilement. C'était simple en fait. Tout le bar était imprégné de la fragrance qu'elle cherchait. L'odeur du tabac était tellement imprégnée dans ce lieu qu'elle semblait suinter des murs. Et voilà comment Rik était devenu invisible un court instant aux yeux de la jeune aveugle. Mais elle, elle était bien visible aux yeux des habitués, dans sa tenue blanche et immaculée, avec ses formes de femme et ses ailes. Elle aimantait littéralement les regards. Alors qu'elle avait les yeux clos. Le serveur lui demanda si elle était là pour le tournoi. De quoi, elle l'ignorait totalement. Mais elle posa sa question.


    Non, je cherche un homme plutôt.


    Silence. L'ange n'était certainement pas le genre de femme à aller chercher l'aventure dans un bar miteux. Ni même le coup d'un soir. Mais c'est bien pour une fille facile qu'elle venait de passer. Pour certains hommes, elle paraissait même être demandeuse.




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    Balancer ce genre de remarque dans un bar, c'est aller droit au but. Ça manque pas de faire mouche, forcément. Les tympans frétillent à droite à gauche, on lâche le fond de sa pinte pour lorgner plus attentivement en direction du nouveau centre d'intérêt de la salle. Manière de vérifier si la demoiselle qui a jugé bon de se mettre sur le marché vaut vraiment la peine d'être abordée. Ben ouais, l'ambiance est encore un peu trop sobre pour que tous les mâles hurlants se déchainent à la moindre voix féminine appétissante. Coup d'œil amusé vers la donzelle, c'est pas tous les jours aussi simple de lever une fille au bar. Elle est joliment roulée mais aurait plutôt l'air d'une sainte n'y touche. Les ailes en prime, le petit détail croustillant bien en accord avec l'impression générale dégagée. Comme quoi, juger sur les apparences, c'est mal. Héhé.

    Commence ensuite la valse des prétendants, aussi délicats et astucieux qu'un troupeau de buffles. Mais y'a bien des chances que ça marche avec la p'tite dame, vu l'entrée en matière qu'elle a proposée. C'est elle, la première, qui a donné le ton, c'est pas pour faire volte-face dans la foulée. Alors, jme plante bien dans mon tabouret et je mire le spectacle; on échange un sourire entendu avec deux ou trois clients, l'air de dire, elle sait ce qu'elle veut la minette. J'suis même à peu près certains que les plaisantins dans le fond qui discutent à messe-basse s'en donnent à cœur-joie dans les blagues salaces ou les remarques misogynes. Ptetre même les deux. Mahf' ... on va pas les blâmer pour si peu, qui n'en a jamais balancé ? Et puis, cette situation pas banale est des plus divertissantes avant le tournoi. Ça pose une bonne humeur générale, c'est bien.

    Seulement en fait, en pas moins d'une minute, l'ambiance retombe d'un ton, toute l'affaire ne serait qu'un lamentable malentendu. L'entrante ne cherchait pas un homme, mais Un homme. Mehf, on s'est tous emballés pour pas grand chose. Fausse-joie. Elle n'avait qu'à retrouver son gusse de suite, aussi.  Et c'est là que j'vise ses yeux. Aveugle ? Ceci explique cela. Elle risque pas de retrouver grand monde dans le décor, effectivement. Allez, on a bien ri, un peu trop d'elle même, ça mérite de faire un pti effort. Ma bière encore à moitié remplie glisse le long du bar dans sa direction pour s'arrêter pile devant le tabouret voisin au sien où je me cale. Les chasseurs refroidis par la tournure de la situation se dispersent, elle remarque vite qu'il y a toujours une présence.

    Hm, vous avez un indice pour aider à retrouver celui que vous cherchez ? Un nom, un signe distinctif par exemple ?

    Petit signe au serveur, j'suis bientôt à sec. Hochement de tête, il amène le ravitaillo' avant que je tombe en panne.

    J'ai un gros quart-d'heure devant moi, avant le début du tournoi. On va tâcher de retrouver votre type avant. Si jamais, Lloyd pourra sûrement vous aider aussi. Pas vrai Lloyd ?
    Sûr, j'ai le coup pour me souvenir des clients. Vla vot' bière... Et sinon, vous, vous buvez quoi ? C'est un bar ici.

    Le brave commerçant. M'étonnerait qu'elle tourne au sky pur, mais sait-on jamais. La sonnette retentit une nouvelle fois dans notre dos. Nouveaux clients. Des joueurs, ça se lit sur leur trombine. Des qui viennent pour gagner. Bien, une bonne partie en perspective. Plus qu'à retrouver le gars-mystère avant, et ce sera parfait.
      Si la jeune femme s'attendait à ce genre de de réaction! Un peu naïve, elle croyait que les hommes qui s'approchaient d'elle souhaitaient galamment l'assister dans sa recherche de tire-au-flanc. Il faut dire que si son nez pouvait sentir les regards graveleux que certains laissaient glisser sur elle, elle ne se serait pas sentie autant enthousiaste. Enfin, il fallait rajouter à ça qu'elle ne pouvait se voir dans une glace et donc que toutes les notions de beauté physique lui passaient tellement au dessus de la tête qu'elles culminaient bien au delà des mers blanches. Elle ne réalisa son erreur que lorsqu’elle sentit une main se hasarder un peu trop vaillamment sur le bas de ses reins et surtout lorsque son ouïe, bien plus fine que la moyenne, perçut la discussion des plus explicite des deux habituée au fond du bar.

      La voilà donc obligée de dissiper un malentendu. Rouge de honte, elle expliqua qu'elle ne cherchait pas une aventure, mais bien une personne. Aussitôt, elle réalisa que ce qu'elle avait de prime abord pris pour de la gentillesse n'était en fait que l'expression des intentions libidineuses des habitués de ce bar. Elle se sentit alors pas très bien. Où avait-elle mis les pieds? Certainement dans un rade miteux et très mal fréquenté de surcroît. Sans même avoir besoin de ses yeux, elle savait qu'elle était la seule nana à bord. Pour faire court, elle était dans une situation peu enviable. Mais, elle n'allait pas se dégonfler. Prenant une longue inspiration, elle gonfla ses poumons et son moral par la même occasion. Puis elle mit toutes ces incertitudes dans l'air qu'elle expira. Elle se sentait mieux à présent.

      Soudain, le bruit inimitable d'une choppe qui glisse sur un comptoir en bois laqué. Un homme vient de se caler auprès d'elle. Il allait lui adresser la parole, sinon, pour quelle autre raison se serait-il rapproché? Lentement, elle tourne son visage vers l'inconnu. Non pas que ça fasse une grande différence pour elle, mais elle avait remarqué que ses interlocuteurs préféraient faire face à la personne à laquelle ils s'adressaient. L'homme lui propose de l'aider. Elle lui sourit. Même le serveur au bar pourrait donner un coup de main. Il semblait que les choses tournaient bien pour l'ange. Elle baissa alors la voix de façon à n'être entendue que de Ric et du jeune barman.

      Bonsoir, je suis Jeska Kamahlsson. Je suis à la recherche un homme qui s'est tiré en douce des dortoirs de la base Marine. Je l'ai suivi à l'odeur de sa cigarette, mais, vu qu'ici tout le monde fume, j'ai perdu sa trace. Il doit être habillé en civil je pense car ses chaussures ne faisaient pas le même bruit sur le sol que celles des soldats. Ce doit être grand gaillard d'après moi, mais il est sans doute assez mince.... hum... j'oublie un détail important... hum... oui, voilà! C'est la personne qui est rentrée dans le bar juste avant moi!

      Le serveur tapotait le bar d'impatience. Oui, elle avait oublié de commander. Sur un ton d'excuse, elle demanda une vodka-fraise avec une paille. Remerciant le serveur et lui donnant les cinquante berrys qu'il lui demandait (soit dix de plus que le prix affiché), elle demanda.

      Vous parlez tous d'un tournoi, de quoi s'agit-il?


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      Récapitulons. Un homme de grande taille. Check. Fumeur. Check. Marine, mais habillé en civil. Check. Et qui vient d'arriver dans ce bar. Hmm. C'est intéressant. À chaque nouvel indice dispensé par Jeska, les yeux du barman rivés sur moi pour vérifier si la description correspond bien en tout point font clik, clik. Et y'a un gros sourire plein de dents qui vient illuminer son visage. Semblerait bien que ce soit moi, on est bien d'accord. Un index passe subrepticement sur mes lèvres, manière de signifier à l'ami Lloyd qu'il faut clore son bec sur ce coup. La demoiselle, si elle se permet de courir après ceux qui font le mur ainsi, elle est au moins officier. Et si elle pense que je me paye sa tronche, elle peut tranquillement exercer ses représailles sous l'égide de ses épaulettes. Ce ne serait pas me rendre service que de l'aiguiller vers moi. Il me semblait pourtant être détaché de toute obligation envers le QG à la fin de mon service et libre de me vautrer dans le premier troquet venu après ça. Je me serais trompé ? Mah. Fâcheux. ... Limite, je pourrais faire amende honorable maintenant, mettre en avant mon statut de bleusaille pour m'en tirer à bon compte. Un petit discours poignant, de plates et jolies excuses. Un chapelet sur l'amour de l'uniforme et hop, le tour est joué. Moé...

      Mais ça veut dire, retour au bercail, et adios le poker. Et ça, hors de question. Je veux bien être sympa, mais faut avoir des principes dans la vie. Risquer de me faire sucrer mes permissions pour une partie de cartes ? Je signe. Et puis, c'est l'affaire d'un quart d'heure avant le début des festivités. Abandonner maintenant, c'est un véritable crève-cœur. Pire, c'est inhumain. Et j'ai foi en l'être humain. Je me dois de participer à ce tournoi pour défendre le droit de tout homme à vivre sa vie comme il l'entend. ... Ok, c'est bon, je me suis convaincu. Ce serait décidément trop con de louper la partie. Faut voir à se mettre la demoiselle dans la poche une bonne fois pour toute, et on sera peinard. Allez, c'est parti pour le show.

      Le tournoi ? Il s'agit d'une partie de poker, rien de moins. Le plus renommé et meilleur jeu de cartes qui existe. Toute personne se doit de savoir y jouer. Peut-être votre marine est-il justement venu dans l'intention de participer à ce tournoi ? Ce n'est pas une certitude, mais il ne faut pas exclure cette éventualité. Hm, comment savoir ...

      Petit silence, se tâter le menton dans un signe de profonde incertitude. Et se hasarder à suggérer ...

      À la rigueur ... je sais bien que cela ne répond pas à vos accréditations mais ... voilà ce que je vous propose : inscrivez-vous au tournoi, nous profiterons de la partie pour tenter de démasquer le coquin de fugueur. Personne ne vous soupçonnera. Mieux, votre cécité pourrait même se révéler être un avantage puisque personne ne vous prendra véritablement au sérieux. En outre, vous avez là une opportunité en or d'apprendre le Poker auprès d'un vrai pro.

      Le petit détail qui fait plaisir, y'a pas de mal à vanter ses mérites. Troisième du dernier Blues Poker Tour, le Rik, ça ne s'invente pas.

      Si vous êtes partante, il ne nous reste plus qu'à trouver un moyen pour vous permettre d'identifier les cartes.

      Et le tour est joué. Me voilà assuré de participer au tournoi, l'esprit tranquille et lavé de tout soupçon. Perfecto, ça se fête. Hep, Lloyd, une bière !

        L'ange écoutait la réponse de l'homme. Alors il s'agissait de poker. Un jeu de cartes et d'argent. Toujours selon son voisin, il y avait de fortes chances pour que celui qu'elle recherche ne soit venu ici uniquement dans le but de s'encanailler et de taper le carton. Elle était loin de partager l'enthousiasme de son partenaire. Pour lui, ça semblait être le meilleur jeu au monde. Pour la marine ailée, il s'agissait juste du moyen le plus stupide de dépenser sa solde. Enfin, ce n'est pas comme si on la forçait à y jouer. Sirotant sa vodka-fraise à la paille, elle écouta alors la suite qu'avait Rik dans ses idées.

        Elle faillit s'étouffer lorsqu'elle l'entendit suggérer qu'il pensait que ce serait une bonne idée pour elle de participer au tournoi. Elle jouer aux cartes? Et pourquoi pas aux échecs tant qu'il y était? L'ange commençait à douter du sérieux de l'homme assis à coté d'elle. Même s'ils avaient des cartes en braille, ça ne changerait rien à l'affaire. Elle n'avait jamais joué au poker de sa vie, et elle ne croyait pas pouvoir pouvoir se hisser au niveau de ce tournoi. En fait, elle était persuadée que si elle s'y inscrivait, elle serait le pigeon de la tablée.

        Toujours silencieuse, elle se posait aussi la question de l'argent. Elle avait bien quelques berrys sur elle, mais généralement, elle n'était pas très dépensière. Il faut dire que tout les économies qu'il lui restait en fin de mois, elle l'envoyait à l'orphelinat que l'avait élevée. Elle vivait même très chichement, profitant de tout ce que la Marine pouvait lui offrir pour donner un maximum. Alors, sacrifier et argent pour débusquer un tire-au-flanc. Elle devait y réfléchir. En proie à un débat intérieur, seuls de légères mouvements de ses lèvres montrait qu'elle réfléchissait. Puis soudain, elle claqua son verre sur la table, comme pour montrer sa résolution.

        Je vais le faire! Je vais m'inscrire à ce tournoi et démasquer ce vil faquin! Rha... sacrifier mes économies pour ce sale type, il va m'entendre celui-là! Sa punition sera sévère, c'est moi qui vous le dis!

        L'ange était gonflée à bloc à présent. Elle allait jouer, avec la ferme détermination de gagner. Elle se tourna alors vers celui qui allait lui apprendre les subtilités de ce jeu.

        Apprenez-moi à jouer, s'il vous plait... heu...Monsieur.

        Elle réalisa alors qu'ils n'avaient pas été présentés.

        Oh, navrée, je ne connais pas votre nom. Et je ne me suis même pas présentée. Désolée... Je suis Jeska Kamahlsson, enchantée!

        Elle lui tendit alors sa main droite. Une paluche fine à la peau aussi claire que douce. Mais avec la poigne des personnes qui ont déjà tenu une arme.
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        Les gens entiers et innocents sont vraiment les meilleurs. Y'a cette délicate touche de naïveté dans leur réaction qui fait qu'on se sent malin, sûr de soi et sournoisement fier à les duper. Tout ça à la fois, ouaip. La petite demoiselle marche pas dans mon jeu, elle court. Mais j'vais pas m'en plaindre, je profite du spectacle. Ça a une saveur tellement croustillante de posséder quelqu'un. Diablotin, ça doit vraiment être une bonne situation. Bien sûr, le commun des gens intègres et fades, donc un peu simplets, dirait que c'est mal. Et je peux pas leur donner totalement tort sur le principe. Vrai que se jouer d'une personne aussi candide et de son handicap, ce n'est pas fondamentalement bien intentionné. Je vois où peut se situer le malaise vis à vis de mon attitude. Ce serait même à se demander si je n'éprouve pas des remords à agir ainsi. Et là, ma réponse serait simple : c'est beaucoup trop marrant pour que quelques principes rigoristes m'arrêtent. Y'a pas mort d'homme, alors on se détend et on voit où la farce nous mène. En plus, y'a un côté défi pas déplaisant; les aveugles ressentent les choses, puisqu'ils ne peuvent pas les voir. C'est un vrai challenge de ne pas se trahir. Un bon moyen de mettre à l'épreuve mes qualités innées de joueur.

        Elle m'envoie du monsieur, maintenant. Sympathique sourire d'autosatisfaction comblée. Puis, elle se présente. Vrai que l'on a pas encore pris le temps pour les civilités d'usage. Une main tendue, délicatement serrée au niveau des doigts, comme un pianiste caresserait les notes de son instruments. Une façon globalement subtile de se distinguer de la masse des rustres.


        Enchantée Miss Kamahlsson, c'est un plaisir de vous rencontrer. Pour ma part, je suis le Lord Rikiardo Ombre Paolo Cantona de Hore. Célèbre agent de publicité. Je suis le cousin direct du petit neveu par alliance du côté de l'oncle Albert après son remariage auprès de sa troisième épouse Meredith, du grand inventeur de cette boisson géniale - dont je tairais le nom pour des raison marketing - l'homme que nous connaissons tous aujourd'hui : Lord Rikoré. Mais, vous pouvez m'appeler Rik. Et je tiens à vous dire que je suis ravi de votre décision, nous allons confondre l'infâme personnage qui se joue de vous. Faites confiance à l'ami du petit déjeuner, l'ami Rik Hore.

        Premier speech, pour rentrer dans le personnage. Je suis un commercial, un vrai. Avec le petit côté gentlemen des origines bourgeoises. Ben oui, tant qu'à faire, autant s'amuser jusqu'au bout. Au pire, si je me fais coincer, j'suis que de passage et j'ai déjà une position assurée à bord du Passeur, je ne crains rien ou presque. Oui, c'est pas très sport de se protéger derrière un Officier encore plus haut gradé pour couvrir ses enfantillages; c'est même un petit peu lâche sur le coup. C'est vrai. M'enfin...

        Un raclement de gorge, et on repart.

        Pour apprendre à jouer, il vous suffit de garder ce principe en tête : Le plus important au poker, ce ne sont pas les cartes, c'est ce que vous en faites. Chaque joueur a pour objectif de masquer son jeu aux autres. Vous n'aurez pas ce désavantage, puisque dans l'incapacité de voir vos cartes. Vous resterez donc toujours impassible sans effort. Au contraire de vos adversaires. Il vous faudra essayer de décrypter leur comportement, d'être attentive à leurs moindres mouvements, ou aux signaux qu'ils enverront, pour en déduire s'ils se sentent confiants, s'ils sont nerveux, agités, ou encore en difficulté sur une main. Tout ce que vous avez à faire, c'est de feindre d'être une joueuse expérimentée. Parlez peu, bougez peu. Appuyez vous simplement sur les réactions des autres joueurs pour donner le change de votre mieux. Dès que vous tenez une proie, ne la lâchez plus, misez lourd et faites la abandonner la main. De cette façon, vous gagnerez sans jamais avoir à montrer votre jeu et les gens ne découvriront pas la supercherie. Vous pensez pouvoir faire ça ?

        Ça fait beaucoup d'un coup, c'est un peu voulu. Manière d'être là pour la rassurer et l'encourager. Quel maître coup. Autour, le bouge se remplit. On va plus tarder à lancer le tournoi. Il y aura entre vingt et trente participants, grand max. Jme demande lequel va servir de coupable. Lui, là ? Hm, trop petit. Ou bien, lui, là ... Mah, j'ai encore un moment pour cogiter la question.

        Ne vous en faites pas, ça va bien se passer. Et souvenez-vous. Pour devenir un winner, suivez mes directives. Rik Hore, l'ami des malins.

        Prendre la pause, regard caméra, sourire colgate eeeet coupez !


        Dernière édition par Rik Achilia le Dim 25 Aoû 2013 - 16:18, édité 1 fois

          L'aveugle récupéra sa main après avoir serrée celle de Rik. L'homme ne lui avait pas broyé les doigts, mais, elle sentait que s'il l'avait voulu, il aurait aisément pu. Les phalanges de l'ange appréciaient l'attention de l'homme à son égard. Seulement, Jeska allait se demander si cette poignée de main était une marque de la bonne éducation de son interlocuteur, ou de sa délicatesse. Mais elle n'en eut pas le temps d'approfondir la question. Le discours du fameux Rik Hore laissait tomber les informations comme s'il en pleuvait. Premièrement, c'était un noble. Le titre de Lord n'étant pas réservé aux pécores.  Deuxièmement, il se dit célèbre dans le domaine de la publicité. Cela renforce l'idée qu'il ne s'agit pas de n'importe qui. Pourtant, quelque chose cloche. Certainement la présence incognito d'un noble connu dans un rade aussi miteux. Non pas que les aristocrates n'aiment pas s'encanailler dans ce genre d'endroits, mais... s'il était si célèbre que ça, pourquoi personne ne semblait faire attention à lui? Serait-il déguisé? N'ayant aucun moyen de remettre en cause le bien fondé des affirmations de Rik, Jeska se résolut donc à accepter tout ce qu'il disait. Cependant, elle restait sur la défensive. La vitesse avec laquelle il semblait avoir changé de personnage rendait plus que perplexe l'ange de la Marine. Elle se contenta de froncer un sourcil.

          Puis vinrent les explications sur le jeu. Si Jeska avait su jouer au poker, elle aurait compris que Rik lui demandait de tout jouer au bluff. Seulement pour la jeune femme qui était ce qu'on pouvait appeler une totale novice en la matière, c'était comme si son compagnon lui causait en chinois. Elle n'y pigeait goutte. Un peu honteuse, elle dut avouer son ignorance totale sur le fonctionnement même du jeu de poker.

          Sire, je suis navrée, mais, je ne sais rien du tout du poker. Comment on joue? Quand peut-on miser? Rik, vos conseils, bien qu'excellents, ne sont peut-être pas assez étoffés pour une novice totale comme moi... Sauf votre respect, auriez-vous l'aimable obligeance de m'expliquer aussi les bases de ce jeu?

          Jeska forçait un peu son langage et essayait de ne pas froisser la susceptibilité du noble qu'elle présumait avoir en face d'elle. Elle avait entendu moult histoires sur le pouvoir des gens au sang bleu. Elle craignait qu'il n'use de son pouvoir pour la faire virer de la Marine si elle lui disait quelque chose qui lui déplaisait. Sur le coup, elle usait de beaucoup de précautions de façon à ne pas froisser son interlocuteur.

          Fort heureusement, il n'en fut rien. Rik expliqua à l'ange le principe du jeu. Le but était de faire des combinaisons avec cinq cartes. Bien évidemment, certaines étaient plus fortes que d'autres. On avait, dans l'ordre croissant, la paire (deux cartes identiques), la double paire, le brelan (trois cartes identiques), la quinte (cinq cartes qui se suivent), la couleur (cinq cartes du même signe), le full (brelan et paire), le carré (quatre cartes identiques) et enfin, la quinte flush (quinte et couleur). Jeska comprit aussi les mécanismes du flop (les trois premières cartes révélées après le premier tour de mise), de la turn (la quatrième carte, dévoilée après un second tour de mise) et de la river (cinquième carte que l'on montrait après un troisième tour de mise). Le gentleman expliqua à l'aveugle le principe des mises. En fait, ça faisait énormément de choses à assimiler dans un temps relativement court.

          De ce fait, la jeune femme était de moins en moins rassurée à l'idée de disputer une partie et de miser ses précieux berrys là dedans. Mais le nobliau trouva les mots pour dissiper les doutes de l'ange. C'était donc avec un plein de confiance que l'aveugle s'assit à la première table. Il y avait cinq tables de cinq personnes. Celui qui remportait la partie se retrouvait qualifié pour le tour final. Si Jeska voulait démasquer le tire-au-flanc, elle se devait d'aller le plus loin possible dans le tournoi. Et donc, elle était dans l'obligation de gagner la partie. Le tout sans jamais savoir ce qu'elle avait en main. Elle devait tout jouer au bluff, et être capable de lire le jeu de ses adversaires. C'était très délicat. Et la jeune soldate ne tarda pas à réaliser la difficulté de la tâche. En effet, en tant que novice, il lui fallut un certain nombre de parties avant de bien comprendre les règles que Rik lui avait expliquées.

          Cependant, la gamine était vive d'esprit. Elle ne tarda pas à comprendre que de jouer de façon agressive quand on était under the gun (premier de parole), ou dernier de parole dans certains cas lui permettait de remporter des pots aisément. Mais ce n'était pas tout, afin que les autres joueurs ne puissent lire sa façon de jouer, elle ne misait pas systématiquement dès que l'occasion se présentait. Comme elle ne savait pas ce qu'elle avait en main, il lui était facile de ne pas montrer d'émotions quand elle jouait. Ce qui la rendait encore plus illisible pour ses adversaires. Ainsi, elle réussit à rester à flot tant bien que mal durant une majeure partie du jeu. Mais, maintenant, elle n'avait plus qu'un adversaire. Et celui-ci était assez bon. Elle n'arrivait pas à saisir son jeu à chaque fois.

          C'est alors qu'elle réalisa que les cartes avaient été légèrement gaufrées lors de leur impression. Pour la plupart des gens, la surface des cartes était parfaitement lisse, mais Jeska sentit que grâce à ce défaut imperceptible pour le commun des mortels, elle pourrait enfin jouer, et ne pas se contenter uniquement de bluffer. Et c'est ainsi qu'elle comprit les deux dernières subtilités du jeu de poker. Premièrement, elle pouvait déterminer la force de son jeu en calculant les probabilités que son adversaire ait une main meilleure que la sienne. Deuxièmement, elle pouvait aussi user de ces possibilités afin d'affiner son bluff. C'est ainsi qu'elle vainquit son adversaire et se qualifia pour la table finale. En fait, bluffer, c'est comme mentir. Le tout c'est de raconter une histoire qui soit crédible. Par exemple, si elle voulait représenter une main forte, il fallait qu'elle mise fort dès le départ. Mais pas seulement. Enfin, l'ange venait de comprendre que le poker était bien plus qu'un simple jeu de cartes et d'argent. Il y avait des mathématiques, de la stratégie, et une bonne part d'improvisation. Et de frissons.

          Elle se laissa alors prendre au jeu.

          La dernière table était donc composée des cinq vainqueurs des tables de qualification. Il y avait Rik, Jeska et trois autres joueurs, dont deux qui était connus pour vivre de ce sport. C'était donc une table assez relevée. Et l'ange n'y faisait pas pâle figure, même si, elle avait vraiment du mal à lire le jeu de ses adversaires. Plus la partie avançait, et plus elle savourait le frisson d'excitation lors de ses bluffs ou des pots qu'elle remportait. Malheureusement, les meilleures choses ont une fin, et déjà deux participants avaient quitté la table quand elle se résolut à tenter le tout pour le tout. Elle sentait que son tas de jeton s'amenuisait comme une peau de chagrin. Il lui fallait donc absolument remporter des pots. Elle tenta un all in (miser tous ses jetons d'un coup). Malheureusement pour elle, Rik avait un meilleur jeu. Et voilà l'ange plumée. Elle avait perdu. Une expression terrible de déception sur le visage, elle quitta la table. L'aveugle du donc se résoudre à assister donc à la fin de la partie comme simple spectatrice.

          Finalement, Rik l'emporta. Mais... prise dans la frénésie du jeu, elle avait complètement oublié de pister le soldat qui faisait le mur. Son ami récupéra son prix, et celui de l'ange par la même occasion (il y avait un lot pour les participants à la table finale). Lorsque son compagnon lui ramena son prix, il sembla à l'ange que la soirée n'était pas totalement perdue, même si l'argent qu'elle venait de récolter n'apaisait qu'une moitié de son double échec. En effet, pour l'aveugle, laisser échapper la victoire et le déserteur étaient bien deux ratés bien distincts. Ainsi, l'argent ne passait de la pommade que sur son chagrin d'avoir perdu la partie. Et ce, même si, au départ, elle ne pensait même pas passer la première table.

          Elle avait laissé filer cet homme. La déception que ressentait Jeska était immense. La nuit était plus que bien avancée, et la voilà dehors. le bar avait fermé peu de temps après la partie. Il devait bien se faire dans les quatre heures du matin, et si elle voulait dormir un peu avant le clairon de six heures du matin, elle devait se hâter de rentrer. Galamment, Rik faisait le chemin avec elle. Et c'est là que le jeune homme fit une erreur. Au lieu de rester cohérent dans son mensonge, il s'en alla vers le baraquement des hommes après avoir souhaité une bonne nuit à l'ange. Alors l'aveugle réalisa le bobard que lui avait fait avaler son prétendu ami durant toute la soirée.

          Inutile de dire que la jeune soldate ne se priva pas de passer un bon savon au tire-au-flanc. D'autant plus que de ce dernier avait abusé sans vergogne de sa crédulité. Seulement, la leçon de morale ne dura pas plus d'une grosse minute. En effet, elle ne pouvait nier qu'elle aussi avait passé un bon moment. Ainsi, après s'être mutuellement promis de garder les événements de cette nuit secrets, chacun alla se coucher, pour essayer de voler à Morphée quelques minutes de sommeil bien mérité.
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