Le deal à ne pas rater :
Code promo Nike : -25% dès 50€ d’achats sur tout le site Nike
Voir le deal

Triple double-jeu

Le lieutenant m'avait convoqué dans sa cabine. Nous voguions dans sa caravelle en direction de Sirup. J'appréhendais mais j'étais fier également. La porte était fermée, et jamais frapper à une porte ne me parut si compliqué. Qu'est ce qu'il me voulait ?
Je ne pouvais répondre à cette question sans avoir frapper à cette dite porte. Je cognerai, il me dira d'entrer et ...


- Entre Alexander.


Eh bien non, il m'avait surpris, il savait que j'appréhendais. Il fallait que je trouve quelque chose à dire ...

- Ah, vous ...
- Ou devrais-je dire Vice-Lieutenant Der Nacht. Mais tu sais toute l'attention que je vous porte et surtout, que je n'aime pas appeler mes hommes par leur grade et leur nom.
- C'est exact, vous préférez nous tutoyer et nous appelez par notre prénom.
- Haha, voilà quelqu'un qui me connait bien. Logique, pour un de mes hommes et qui plus est le numéro un. Mais tu te doutes que si je te convoque, ce n'est pas pour dire des banalités. Bien.


Il ne faisait plus les cents pas mais s'était assis. La raison de ma venue devait être plus sérieuse, ce qui ne calmait pas mon stresse.

- En tant que vice-lieutenant, je dois te mettre à l'épreuve, bien que tu l'aies déjà faites pour obtenir ton grade.
- Je comprends tout à fait, Lieutenant.
- Justement, la base nous envoie à Sirup pour des pirates qui dégradent la ville. Je veux te voir en tant que Vice-Lieutenant sur le terrain. Je veux voir si tu as la confiance de mes hommes comme je l'ai et je veux constater ton efficacité. C'est capital pour le bon ordre pendant la navigation. Je veux que tu me remplaces et remplaces mon pouvoir durant mes absences. Et comme une mère, il faudra bien qu'un jour tu quittes la caravelle familiale et tu voles de tes propres ailes.
- Bien sur, Lieutenant.
- C'est bien. J'ai une entière confiance en toi mais je t'accompagnerais sur le terrain. Au cas où il y ait des débordements. Mais je serai aussi muet qu'une tombe, tu feras le travail à ma place.


Je transpirais de fierté. Enfin je pouvais montrer de quoi j'étais capable. A ce moment là, mon double sanguinaire n'avait aucune place dans mon esprit quand je voyais mon Lieutenant rayonner radieusement.


- Terres ! Terres à vue !

C'était la sentinelle, l'île de Sirup était visible à l'horizon. Avec le lieutenant, nous nous échangeâmes un regard qui voulait tout dire. Mon évaluation allait débuter. Je sortis donc de la cabine en trombe non sans saluer mon lieutenant au passage.


- Bien ! Préparez vous à amarrer les gars ! Tout le monde à son poste !
- Allez les gars, c'est le Vice Lieutenant Der Nacht aux commandes, activez vous !


Alors que j'aidais ce qui allaient être mes hommes, j'imaginais très bien le Lieutenant Coldrim me regardant, un sourire en coin. Il fallait que je me montre digne de lui, digne du respect que lui apportait les civils.
    " Bon les gars, vous avez repéré des proies faciles ?
    - Tout plein boss !
    - Ouais, enfin... ils m'ont l'air bien vides moi, ces manoirs...
    - Bah tant mieux, y'aura pas de gardes comme ça ! Comme la dernière fois. Napnapnap !
    - Y'en avait pas tout plein, boss !
    - Ouais, enfin... Y'aura pas non plus de richesses, du coup... Les nobles ont surement tout emporté...
    - Tant pis. On cassera tout pour leur montrer qu'on est pas des rigolos !
    - Croaa ! Croaaaaaaaa !
    - Tiens, c'est pas Jim ? Qu'est-ce qu'il veut ce maudit piaf ? Traduis Tom.
    - Il dit que y'a tout plein de marines qui arrivent, boss ! Sur un bateau !
    - Des marines ? Tom, va aider Jack. On va les accueillir en beauté. Luc, viens avec moi, on va se défouler sur une villa ! Napnapnap !
    - Ouais, enfin... ça sent les problèmes, tout ça...

    ~~ ~~

    L'île de Sirup est presque entièrement entourée de falaises impraticables qui la rendent impossible d'accès sauf en deux endroits : deux plages s'ouvrant aux exacts opposés l'une de l'autre et permettant un accostage facile. C'est vers l'une d'elle que se dirige la caravelle de la Marine.

    Les soldats les plus attentifs du navire peuvent remarquer un oiseau qui tourne dans les airs au niveau du sommet de l'une des falaises bordant la plage. Au-dessus de deux hommes, pour être précis, et... d'un canon ?

    Le premier boulet s'envole dans une détonation qui brise la tranquillité de cette belle journée et vient s'écraser dans l'eau, à quelques mètres seulement de la caravelle. Un message plutôt clair : les deux hommes postés en sureté tout en haut de la falaise ne semblent pas particulièrement ravis de l'arrivée de la Marine. Vraiment pas, puisqu'ils chargent déjà un deuxième tir. Et ils semblent avoir assez de munitions pour soutenir un tir nourri...
      Alors que nous nous rapprochions de la plage de Sirup, j'avais effectivement pu voir un oiseau rôder près des côtes, comme les mouettes le faisaient. Mais ça n'en était pas une. Je l'avais eu l'oeil, sans vraiment y prêter réellement plus d'intention, mais il avait éveillé ma curiosité et mon attention, sans que je n'en eus parlé à mes hommes. Mais peu de temps après, je le vis revenir en haut d'une falaise, décrivant des cercles dans le ciel. Quelqu'un était avec lui. Quelques secondes après, il me donna raison, il était accompagné de deux canonniers pirates.

      - Branle-bas de combat, on a un comité d'accueil !


      Plouf !

      Le premier boulet était mollement tombé à l'eau, tout près de notre caravelle. Ils ajustaient leur tirs. Leur stock était conséquent, il fallait manœuvrer avec prudence et riposter avec excellence. Ma voix se fit entendre sur tout le navire.


      - Canonniers pirates à 3h ! Navigateur et timonier à la barre, gardez l'ennemi à 3h, longez la côte puis demi tour. Je veux deux canonniers et quatre assistants, deux par canon. Quand nous changerons de bord, postez vous à 9h. Je veux aussi quatre hommes pour prendre les filets de pêche et amortir les boulets qui arriveraient sur le pont. Allez ! Carabiniers, en place !


      Je regardais les deux pirates réarmer leur canons, mes hommes étaient en effervescence quoi que fiers de me servir. Ils avaient ma pleine confiance, ils ne voulaient pas me décevoir. Je ne pris pas la peine de voir où était mon Lieutenant, j'étais prêt à parier qu'il serait accoudé au chambranle de la porte qui donnait sur les escaliers pour rallier sa cabine. Non, j'avais dans ma ligne de mire ses deux canailles.

      - Nous sommes prêts Vice Lieutenant !

      - Bien ! Canonniers, armez ! Carabiniers, en joug !

      Les deux crapules ajustaient leur tir, par pur réflexe, j'aboyai un ordre.

      - Sous Lieutenant Chen, occupez vous de l'assaut !
      - Entendu, Vice Lieutenant !


      A nouveau, ils me donnèrent raison : ils allaient faire feu. Nous également, par ailleurs. Nos premiers boulets s'écrasèrent dans la roche et la terre de la falaise, ce qui l'éclata en milliers de petites particules. Quant à leur boulet ...

      - Handgun !

      Boum ! Plouf !

      J'eus à peine le temps de me pencher par dessus bord, rapière à la main, pour éviter qu'il ne vienne briser notre coque. Ma lame avait morflé. Le boulet l'avait touché et mon bras était endoloris, mais ça n'était pas fini. Heureusement, l'estoc explosif avait amorti le boulet. La symphonie de la bataille navale n'en était qu'à son ouverture et déjà les explosions déchiraient la tranquillité silencieuse de cette petite île. Leur manœuvre s'était affinée, la rotation entre feu et réarmement était plus courte, leur feu plus précis. Le nôtre aussi. Mais leur canon prit en ligne de mire une nouvelle cible : notre mât. Alors que je courrais vers les caisses au pied de notre mat, le sous lieutenant que j'avais posté aux fonctions de l'assaut s'aperçut de la manœuvre ennemie et savait ce que j'avais en tête.

      - Filet au pied du mât, vite ! Canonniers, feu ! Carabiniers, feu !
      - Bien, sous Lieutenant !


      L'harmonie entre nous était parfaite pour le moment. Je pris le temps de prendre de la hauteur sur le mât, rattaché à des bouts. Nos boulet s'écrasèrent encore dans la falaise mais bien plus proche des pirates. D'ailleurs, ils tiraient !

      - Pas encore ... Pas encore ... Shotgun !

      A cause de ma position, mon geste n'était ni assuré ni précis, mais juste assez pour amortir le boulet sans qu'il ne touche ma lame et pour que mes hommes en dessous le réceptionne dans le filet. Avec la force, il y rebondit et vint rejoindre les fins marins.

      - Navigateur, timonier, demi tour ! Canonniers, carabiniers, à 9h !

      Un de mes hommes avait touché un des pirates à l'épaule, ce qui rendait leur manœuvre plus lente. Nos canonniers assistés et nos carabiniers se mirent très vite en place, prêt à faire feu. Et surtout, à faire mouche.
      En haut de la colline, plus personne. Quand mes hommes s'en assurèrent, ils exprimèrent leur joie. En redescendant du mât, je les ramenai à la réalité.

      - C'est pas fini ! On accoste, je veux trois hommes pour aller les cueillir, et vous Sous Lieutenant Chen.
      - Bien reçu, Vice Lieutenant !
      - Cuisinier, médecin, prenez quatre hommes et refaites le plein pour regagner la base quand nous aurons fini. Vous serez assistés du Sous Lieutenant Tetsuo.
      - Oui, Vice Lieutenant !
      - Je veux dix hommes pour garder notre navire et vous, Sous Lieutenant Grombez.
      - Entendu, Vice Lieutenant !
      - Le reste, vous venez avec moi. Deux personnes par sortie de la ville, deux hommes pour aller enquêter auprès des gardes des manoirs. Le reste vous patrouillez en ville à la recherche d'indices ou de pirates eux-mêmes. Pas de vague, faites attention aux civils. Trois escargophones, un pour le bateau, pour les portes, un sur moi. Allez, rompez, tous à vos postes !

      - Allez, allez les gars ! On s'active !

      Nous étions tous fiers. De nous, eux de moi et moi d'eux. Le Lieutenant prit son manteau et sa lame en silence et me suivit en direction de la taverne, lieu de tous les ragots. Le meilleur endroit pour commencer à enquêter.
        -Aieeeuh ! Ca fait super mal !
        - Ça va Jack ? T'as tout plein de sang.
        - Mais non, andouille, ça va pas ! Ils m'ont touché à l’épaule, ces crevards ! Et on a failli y passer avec leur dernière salve ! Si on avait pas joué les morts...
        - C'est vrai que y'avait tout plein de sifflements.
        - C'étaient les balles, andouille. Aide moi à me relever, j'vais leur montrer de quel bois je me chauffe.


        ~~ ~~

        Les hommes de la Marine se mettent rapidement en marche sous les ordres de leur supérieur. Il déchantent vite cependant en arrivant à sirup : ici, pas de murailles ou de portes séparant les maisons de la campagne, mais des plaines à perte de vue avec des manoirs éparpillés et quelques maisons agglomérées de ci de là. Pas moyen de bloquer tous les chemins, du coup, à moins de disposer de toute une armée. Les soldats ont en revanche plus de chance dans leur quête de renseignements.

        " Des pirates ? Oui, il y a un groupe de gredins qui rodent dans les environs ces derniers temps. Nous autres, villageois, ils nous laissent tranquilles. C'est après les manoirs qu'ils en ont. Des vols ? Peut-être bien quelques uns... Mais les bâtisses des nobles sont presque vides, alors ils ont pas dû récolter grand chose. Ils saccagent tout, la plupart du temps. A quoi ressemblent ces pirates ? Eh bien... "


        Triple double-jeu Pirate02_imagesia-com_9nfn

        Dans la taverne, les villageois accueillent les marines avec plaisir et font de leur mieux pour les aider.

        " Ces gredins choisissent les manoirs les moins gardés. Ils restent prudents. Attendez, voici une carte. "

        Quelques coups de feutres plus tard, voilà la marine avec une liste des cibles potentielles des pirates. Soient 5 manoirs à vérifier.

        ~~ ~~

        " Han... Han... Qu'est-ce qu'il est lourd ce canon... Tiens, c'est quoi ça ? Des marines ! Tom, y'a trois gus qui grimpent nous voir. Occupe-t'en !
        - J'vais faire tout plein de tonneaux ! "

        En relevant la tête, les trois marines envoyés pour récupérer ce qu'ils pensent être des blessés ou des morts peuvent apercevoir un pirate rondouillard rouler dans leur direction tel un boulet de canon humain. Encore un peu plus haut, un autre pirate déplace péniblement un canon pour le positionner sur un point de la falaise où il pourra attaquer les marines restés sur la plage.
           En arrivant enfin sur l'île, je fus déçu. La ville n'était que clairsemée sur l'île, laissant des pâtures et des plaines pousser entre les bâtiments. Au moins, nous aurions vu les pirates arriver de loin.

          - Comme il n'y a pas moyen de boucler la ville, patrouillez. Il y a une plage à l'opposé, ils ont bien du y accoster. Allez me la surveiller de près. Au moindre signe de pirates, vous m'appelez.
          - Oui, Vice Lieutenant.


          Nous entrâmes donc à l'auberge recueillir des informations.


          - Bonjour, Vice Lieutenant Der Nacht. Nous avons été appelé pour la présence de pirates et dégradation de biens publics.
          -
          Des pirates ? Oui, il y a un groupe de gredins qui rodent dans les environs ces derniers temps. Nous autres, villageois, ils nous laissent tranquilles. C'est après les manoirs qu'ils en ont. Des vols ? Peut-être bien quelques uns... Mais les bâtisses des nobles sont presque vides, alors ils ont pas dû récolter grand chose. Ils saccagent tout, la plupart du temps. A quoi ressemblent ces pirates ? Eh bien...

          L'aubergiste me griffonnait un portrait robot. Ce qui me laissa le temps de réfléchir.
          Ils en avaient après les manoirs ? C'était tout à fait autre chose. L'on dit qu'ils appartiennent à des nobles ou à des dragons célestes ...


          - Ces gredins choisissent les manoirs les moins gardés. Ils restent prudents. Attendez, voici une carte.

          - Je vous remercie. Passez une bonne journée et n'hésitez pas à faire appel à mes hommes au moindre souci.

          D'après la carte, cela nous faisait cinq manoirs à vérifier. Nous nous mimes donc en route.

          - Je veux que vous vous mettiez par cinq par manoir. Cachez vous dedans. J'en avertirais les gardes. Dès qu'il y a un pirate dans votre manoir, donnez l'alerte.



          ~~~


          Le Sous Lieutenant Chen grimpait la colline qui accédait à la falaise avec trois de ses hommes. Ils allaient cueillir les victimes des coups de canon qu'ils avaient donné pour les emprisonner.
          C'était un homme déconcertant mais fiable, fidèle, fort et original. En effet, c'était un okama typé asiatique, d'une carrure étrange mais monumentale. Le haut de son corps était rond couvert de gros bourrelets, et ses jambes fines et musclées. Il portait un tutu, des collants et des ballerines à la pointe acérée et au talon tout aussi piquant, ce qui lui assurait une montée aisée.


          - Sous Lieutenant ! Quelque chose dévale la colline en notre direction ... C-C'est humain !
          - Q-Q-Quoi~ ? M-M-Mais allez l'arrêter~ !


          Souvent, quand il parlait, il se mettait à faire des pointes et à tourner sur lui-même. Gras, mais très agile. Alors ses hommes grimpèrent davantage pour stopper le pirate dans ses roulades.

          Tom, le gros pirate, dévalait la colline en tonneaux. Il gagnait de la vitesse si bien que les marins n'eurent pas le temps de lui dire de s'arrêter ni même de le faire. Il les percuta violemment dans un ricanement idiot, une boule dans un jeu de quille. Les marins étaient sonnés, et ne se relevaient pas. Désormais, Tom fonçait sur le Sous Lieutenant Chen.

          - Tu es une honte pour les gens enveloppés ! On se moque bien assez de nous pour qu'en plus tu joues de tes rondeurs ! Sois gracieux ! La rondeur n'empêche pas la grâce ! Et tu vas bien vite le comprendre ...

          Il s'était mis en colère. Il n'aimait pas que l'on dénigre les rondeurs ou qu'on en rit, car pour lui, c'est une source de grâce, de féminité, et c'est ce qu'il aimait particulièrement chez les gens. Il guettait Tom comme un chat guette sa proie et attendait le bon moment pour ...

          - 38e technique de la danse de l'okama : ARABESTYAL ! (mélange entre un "arabesque", la posture en "Y" et d'un coup bestial)

          En l'attendant, il s'était mis en position d'arabesque, jambe relevé, de profil, bras en équerre. Au moment où il savait qu'il allait faire mouche, il lança son pied levé en pivotant légèrement, ce qui asséna au pirate un violent coup de pied dans le ventre. Le bout de la ballerine du Sous Lieutenant étant acéré, il le perfora. Tom cessa sa course net, mais ne semblait pas pour autant s'envoler comme le Marine l'espérait. Alors tous deux forcèrent. Chen pour le faire décoller, Tom pour continuer de rouler. Finalement, le Marine prit le dessus et le pirate s'envola quelques mètres dans les airs, ce qui lui permit de ramener sa jambe vers sa tête, tel un "Y" difforme. Le pirate retomba brusquement à ses pieds.

          - 4e technique de la danse de l'okama : Assemblé !

          Chen saute avec sa jambe libre et atterrit des deux pieds sur le visage de Tom, qui s'évanouit sous la douleur.

          - Et de un~ !

          A nouveau il faisait une pirouette avant de rejoindre ses hommes.


          - Technique cachée de la danse de l'okama : Réveil du petit rat !

          Il prit de l'élan avec son bras pour les gifler sur la joue, pour les réveiller.

          - Bien, maintenant que vous êtes réveillés, vous allez m'emporter ce gros pigeon là bas.
          - Oh ! Bien joué Sous Lieutenant !
          - Oui, oui, oui, je ne peux pas en dire autant de vous, contentez vous de le ramener au bateau. A l'autre zozo maintenant !
          27e technique de la danse de l'okama : Rushing Butterfly !

          Chen partit gravir la colline en grands jetés. Il sautait sur un pied, faisait le grand écart en vol, atterrissait sur l'autre pied qui redécollait de suite avec l'élan. En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, il serait arrivé.




          ~~~


          Blblblbl ... Blblblbl ... Blbl-Katcha !



          - Vice Lieutenant Der Nacht, j'écoute.
          - Sous Lieutenant Grombez à l'appareil, un des deux hommes qui nous avait attaqué est revenu à la charge avec son canon. Mais il a l'air blessé.
          - Le navigateur et le timoniers sont là ? Faites le tour l'île, ou trouvez vous un coin à l'abri.
          - Bien, Vice Lieutenant !


          Je raccrochais et rangeais l'escargophone à mon éphigie, avec une longue tigasse brune et ordonnais à un de mes hommes d'aller prévenir le cuisinier et le docteur qui étaient en ville. Nous autre, direction les manoirs.
            " Napnapnapnap ! Tu vois Luc, j't'avais bien dit que ça valait le coup, ces manoirs ! Deux gardes tout pourris et une montagne de berrys ! Napnapnapnap !
            - Ouais, enfin, on a eu du pot quand même. Y'a bien que des nobles pour laisser une telle fortune sans surveillance...
            - Croaa ! Croaaaaaaaa !
            - Jim ? Qu'est ce qu'il fout là ce maudit piaf ? Hum, j'aime pas ça, y'a dû y avoir un problème avec les autres. Luc, prends un max de sacs de Berrys et retourne au bateau avant que les Marines n'aient l'idée de faire le tour de l'île pour aller voir la deuxième plage !

            ~~ ~~

            Jack tire toujours son canon, ahanant sous l'effort et tachant d'oublier la douleur qui lui vrille l'épaule. Il parvient finalement à se positionner où il le désire, observe la plage en contrebas pour viser. C'est alors qu'il remarque que quelque chose cloche.

            " Ah mais... ils se sont barrés, ces andouilles ! J'me suis tapé toute la montée et, et... et ils mettent les voiles ! "

            Effectivement, la caravelle de la Marine est déjà assez loin sur les flots, voguant visiblement vers l'autre côté de l'île. Jack trépigne littéralement, lançant vainement des cailloux de son bras valide en direction du navire qui s'éloigne. Puis, soudain, il entend comme un trottinement derrière lui, se retourne pour remarquer la venue d'un drôle d’énergumène en ballerines et tutu. Ce type louche se déplace si vite qu'il ne va pas tarder à tomber sur le lard du pirate. Vite, Jack utilise la première parade qui lui passe par la tête : il tourne la gueule du canon vers le chemin, se prépare à allumer la mèche. Avec son épaule blessée, il n'a plus la force de recharger, aussi ne pourra-t-il tirer que le boulet déjà dans le canon. Pour ne pas manquer ce dernier coup, il patiente et se tient près à faire feu au dernier moment, lorsque sa cible aura le plus de mal à esquiver.

            ~~ ~~

            Un groupe de cinq marines arrive à la porte d'un des manoirs indiqués par les villageois. Immense bâtisse de six étages à coup sûr pleine de cachettes et de recoins, elle est la preuve de l'exubérance et de la richesse des nobles. Comme pas un garde ne se pointe, les soldats frappent docilement à la porte.
            Pour toute réponse, une fenêtre du second s'ouvre et laisse passer un piano qui chute dans le vide, donnant juste le temps aux hommes du gouvernement de bondir au sol avant d'être écrasé par la masse de l'instrument.
            A la fenêtre, un homme avec une fine moustache, un cache œil et un chapeau de pirate leur adresse un sourire narquois avant de disparaître.

            " Napnapnapnap ! Même tout seul, je sais me défendre. Avec ma taille, je peux me planquer partout. Ils n'arriveront pas à me retrouver, dans cette immense baraque, et j'vais pouvoir m'occuper d'eux ! Napnapnapnap ! "
               
              Le Sous-Lieutenant Grombez et ses hommes sur la bateau décidèrent d'accoster sur la plage opposée, étant donné que l'homme au canon ne s'affairait plus à les couler. Il se dit que c'était normal après tout, son collègue le Sous-Lieutenant Chen devait les avoir capturé.

              Le petit groupe initialement chargé de boucler la ville relia comme prévu la plage opposée à celle sur laquelle ils avaient accostés. Ces deux groupes tomberaient nez à nez avec Luc, le pirate chargé de ramener l'or au bateau pirate.


              ~~~

              Mais pendant ce temps là, le Sous Lieutenant Chen découvrait un tout autre spectacle, bien moins tranquille que celui d'un bateau naviguant sur les flots ou d'une plage avec vue sur la mer. Non non, il tomba nez à nez avec le gouffre béant d'un canon, prêt à lui cracher un visage un boulet rouge lancé à pleine vitesse et derrière, un homme au rictus malsain gravé sur son visage hideux prêt à mettre le feu aux poudres.


              Mais heureusement, la vitesse et l'intelligence du Sous Lieutenant Chen n'ont égal que son obésité. Alors, à la seconde où il vit que la bombarde était braquée sur sa pomme, il prit son envol.

              -15e technique de la danse de l'okama : Pas de cheval géant !

              Il s'envola dans les airs sa jambe droite tendue en direction du canon, sa jambe gauche repliée mais dans la même direction. Le pirate ne pouvait plus viser convenablement et préféra tirer juste après l'envol. D'ailleurs, le boulet frôla son pied gauche, le meurtrissant au passage. Son pied droit se posa sur le canon encore chaud et le brûla aussitôt, le forçant à reprendre son envol dans un nouveau saut.

              -16e technique de la danse de l'okama : Ruade !

              Il fit rejoindre ses deux pieds en pointe horizontale directement dans la trogne du pirate qui, par la violence du coup, se mit à dévaler la falaise. Le sous lieutenant Chen, lui se roulait au sol.

              -Mes pieds ! Mes pauvres petits pieds ! Mes bijoux ! Mes précieux ! Il va me le payer ! Technique cachée de la danse de l'okama : bisou magique !

              Il retira ses ballerines pointues et se mit à … oui, à embrasser ses pieds. Et, comme revitalisé, il se releva d'un coup, ne pouvant plus poser ses pieds à terre, marchant par petits appuis jusqu'au bord de la falaise et pleura d'avance, sachant que ce saut final lui scierait les nerfs :

              -46e technique de la danse de l'okama : Éternel soubresaut !

              Il plongea à pic en prenant élan avec ses deux pieds et chuta le long de la falaise pour atterrir debout, prêt du corps inerte du pirate. Il tomba droit comme un piquet, ses deux pieds encrés profondément dans le sable. Ses yeux se révulsèrent et il s'évanouit de douleur sur le pirate qui à son tour, s'enfonça dans le sable, écrasé par le poids du Sous-lieutenant.


              ~~~

              Ses hommes qui ramenaient le gros Tom entendirent la détonation du canon et les deux bruits sourds des chutes.

              -C'est le Sous-Lieutenant ! Je vais voir !

              Il n'était plus que deux pour traîner le gros Tom évanoui et attaché. Ce qui leur compliqua davantage la tâche, leur échine croulant sous le poids du pirate.



              ~~~

              Pendant ce temps là, j'avais enfin mis la main sur le chef de l'équipage. Il était encore plus petit qu'un nain, il courrait partout, se cacher dans les plus petites cachettes qu'une maison pouvait receler mais surtout, il avait une force démesurée pour une si petite taille.


              Enfin, « mis la main », ce n'était pas vraiment le cas. Je l'avais enfin trouvé, et même « trouvé » c'était beaucoup dire tant il apparaissait et disparaissait.

              -Bon, l'instant qu'on monte il aura le temps de se cacher. Il y a six étages, je veux que vous surveillez toutes les vitres, toutes les portes. Donc je veux des hommes dehors, prêts à nous signaler toute fuite. Aussi, je veux un homme par porte. Le reste, vous fouillez le premier étage. S'il vous êtes certain qu'il n'y a rien, vous montez en scellant les portes. Il finira bien par être coincé et son espace de jeu ne sera que trop restreint. Surtout, évitez la casse.

              Ce jeu du chat et de la souris prit des plombes. Il durait et le pirate ne s'en laissait pas, retournant sans dessus dessous la maison, emprisonnant certains de mes hommes bêtement, leur envoyant des objets improbables pour pouvoir se cacher ailleurs. Personne ne le voyait, il n'y avait que son rire qui courrait sur les murs. Ma patience avait des limites.

              -Bon, montre toi ! Tu vois bien que tu es cerné ! Tu ne peux plus t'enfuir ! Tu ne pourras que continuer à te cacher et bientôt ce petit jeu prendra fin. Tu devrais te rendre pendant que ma clémence m'éclaire encore. Simple conseil.
                Perché en haut d'une armoire, le capitaine des pirates observe un soldat à sa recherche, juste sous lui. Au moment où l'homme ouvre les portes du meuble pour le fouiller le malfrat donne une impulsion de ses jambes dans le mur, renversant l'armoire sur la tête du pauvre marine avant de s'enfuir en courant. S'éloignant des appels d'Alexander dont la patience arrive à bout, il grimpe rapidement les escaliers pour se planquer dans une petite pièce du dernier étage. Là, il s'approche d'une fenêtre et claque rapidement des doigts.

                " Jim ! Viens ici maudit piaf. Jim ! "

                L'oiseau descend du toit et se pose sur le rebord de la fenêtre.

                " Écoute bien, maudit piaf ! "

                L'oiseau penche la tête et écoute avec attention les instructions du petit pirate. Puis, sur un coassement vindicatif, il déploie ses ailes et s'envole.
                Le capitaine l'observe un instant avant de se reculer vivement un entendant un coup de feu claquer en contre-bas. L'un des marines à l'extérieur l'a repéré et lui tire dessus. Il repart donc se planquer dans la maison avant que quelqu'un ne le trouve.

                ~~ ~~

                " Ouais, enfin... j'le savais moi que c'était pas une bonne idée, cette histoire... "

                Planqué derrière un arbre, Luc observe la caravelle de la Marine s'approcher de la plage où est déjà amarré le petit bateau pirate. Ce n'est qu'une question de secondes avant que les soldats ne le remarquent. Un délai trop court pour que Luc n'ait le temps de rejoindre son navire. Il pousse un soupir, cache ses sacs de berrys volés dans un buisson avant repartir chercher son capitaine. Puisqu'il ne peut plus fuir, autant se regrouper pour se défendre.

                ~~ ~~

                Les deux derniers marines portant le gros Tom peinent tellement sous l'effort qu'ils finissent par s'arrêter un instant, histoire de prendre une pause. C'est alors qu'ils aperçoivent un oiseau piquer dans leur direction.
                Avant qu'ils ne puissent réagir, le volatil se pose pile sur la tête du malfrat assommé et ferme les yeux. L'instant suivant, le pirate et l'oiseau ouvrent les yeux dans un ensemble parfait, comme s'ils étaient à présent une même entité.
                Deux baffes plus tard, la créature ainsi créée fonce vers le centre de l'île, laissant sur place deux marines dans les vapes.

                ~~ ~~

                " Napnapnapnapnap ! Je suis ici marines ! "

                Les soldats aux fenêtres et à l'extérieur tournent la tête vers le chemin conduisant au manoir, écarquillent les yeux de surprise en voyant le chef pirate à l'extérieur. Comment est-il parvenu à sortir sans être remarqué ? Mystère mais il semble très fier de son petit tour et n'hésite pas à le montrer.

                " Alors, chef des marines ? Tu croyais m'arrêter, pas vrai ? Pendant que "ta clémence t'éclaire encore". Eh bien, à mon tour de t'éclairer : je vais devenir le plus célèbre des forbans d'East Blue et ce n'est pas un soldat de bas-étage comme toi qui va m'arrêter ! Alors abandonne maintenant si tu ne veux pas que je te ridiculise encore plus. Simple conseil !"

                Et sur un dernier rire provoquant, il s'enfuit en courant.

                ~~ ~~

                Toujours planqué mais cette fois derrière un rocher, Luc commence à regretter son choix de carrière. Alors que derrière lui se trouvent la plage avec la caravelle de la Marine surement en train de débarquer des troupes, devant lui arrive une nouvelle division de soldats. Soupir, il sort un long bâton et s’apprête à y attacher un drapeau blanc.
                C'est alors que deux événements le font changer d'avis.

                Tout d'abord, légèrement précédé par son rire reconnaissable entre tous, son petit capitaine surgit sur le chemin, dans le dos de la division de soldats et, sabre d'abordage en main, bondit sur la tête d'un marine. Là, telle une puce rageuse, il se met à sauter de victime en victime tout en frappant de son arme.

                Presque au même moment apparait sur le côté Tom et Jim qui, dans un grognement assourdissant, rejoignent la mêlée pour distribuer coups de poings et d'ailes.

                Luc, donc, change d'avis, attache plutôt à son bâton une longue tresse de cuir pour former un fouet. A son tour, il rallie le combat pendant que son capitaine continue de provoquer ses adversaires même en se battant.

                " Napnapnap ! Vous êtes peut-être plus nombreux, mais je suis super fort ! Et j'ai mes hommes avec moi, dont un monstre. Ce n'est plus un Tom, plus un Jim, savourez la force de mon Jim Tomic ! "