Manshon, 1625
A deux sur un bateau. Bon, le bateau est petit, mais quand on est deux quiches en navigation, qu'il soit petit ou non ça ne change pas grand chose. L'équipage de marchands auquel appartenait ce bateau est probablement sur une autre île maintenant, Sanzo et moi les avons relâchés sur une barque – fallait se serrer, à dix sur la barque – au large d'une petite île devant laquelle on est passé. Histoire qu'ils n'aillent pas balancer qu'un chasseur de prime aide un pirate à voler, j'ai du cacher mon visage avec un chapeau et un châle. Heureusement qu'on est sur North Blue sinon j'aurais fondu. Maintenant la question est :
« Euh... tu sais amarrer un bateau ? Ah c'est bien ce que je pensais... Du coup c'est un peu délicat parce que je t'avoue que moi non plus... ON SAUTE ! »
Le bateau que l'on a miraculeusement réussi à diriger vers le port de Manshon s'en approchait un peu trop vite. C'est dans un grand fracas que le navire heurte le port, des bouts de bois et de béton qui volent dans tous les sens, des gens qui hurlent sous l'effet de la surprise – et probablement par peur de se prendre un gros morceau de navire sur les dents -, un chaos total en somme, et nous deux compères qui sautons sur la terre ferme au milieu de tout ce bordel. Premier reflex, je chope mon nouvel équipier par la manche et le tire à l'abri. S'agirait de pas attirer trop l'attention dés notre arrivée sur l'île, donc il serait préférable qu'on ne sache pas que les responsables de cette agitation et de ces dégâts soient nous, surtout que la tignasse verte s'est déjà bien fait connaître sur la précédente île.
Je lui fait signe de nous éloigner de la scène, pour être sûrs. On arrive rapidement en ville, où on peut enfin se détendre et marcher naturellement. C'est ce qu'on appelle une entrée en scène fracassante si vous me permettez cette petite boutade. Maintenant le but premier est de se réapprovisionner, surtout en munitions. Car j'ai appris pendant le trajet que lui aussi manque de balles. Effectivement si on se retrouve dans une situation délicate, on ne survivra pas longtemps sans puissance de feu.
« J'espère que cette fois tu vas pas tabasser du marine, hein ? Tu as récupéré assez d'argent avant ça, et encore plus dans le coffre de l'équipage des marchands, avec ça on a largement de quoi acheter des munitions, de la bouffe, une chambre et pourquoi pas des femmes... Je plaisante hein... pour les femmes. »
Pas besoin de payer moi pour passer du temps avec une jolie demoiselle. Sur tout le trajet vers le centre ville, je tente de séduire quelques charmantes passantes, résultant souvent en moi me faisant ignorer royalement. Mais je ne perds pas espoir, elles sont juste intimidées par Sanzo je parie. On passe devant une auberge pendant notre recherche d'une armurerie, sur laquelle j'attire l'attention de Sanzo. « Les Trois Grenouilles », probablement l'auberge dans laquelle on passera la nuit. Je note dans ma tête l'emplacement du bâtiment avant de continuer notre route, trajet sur lequel on continue de parler de tout et de rien, de nos passés, de nos aventures jusque là, des informations qu'on a pu collecter sur l'ex-équipage de Sanzo – autant dire qu'il m'a fait part de toutes ses informations et moi presque aucune -.
« T'as remarqué qu'il y a des gars pas très nets dans le coin ? J'ai cru entendre que Manshon n'est pas une île particulièrement sûre mais quand même... »
J'en vois même armés, et les marines devant lesquels on passe – Sanzo tournant sa tête de l'autre côté ne sait-on jamais - ne semblent pas du tout choqués. Cet endroit me paraît étrange, j'espère qu'on finira vite ce qu'on a à faire et qu'on se barre d'ici rapidement sans rencontrer de problèmes. Cela dit avec Sanzo à mes côtés, je n'y compte pas trop. Si ce que j'ai vu sur l'île précédente n'est pas un incident isolé, alors il a une fâcheuse tendance à s'attirer des problèmes.
J'aperçois une armurerie dans le coin d'une rue. Un établissement assez impressionnant par sa taille, son style, sa façade ma foi on ne peut plus visible, qui semble fréquenté en partie par... des gens peu fréquentables. On entre tout de même, pas le temps de faire les chochottes. L'homme au comptoir semble avoir la trentaine, une belle moustache, un costume beige et un chapeau de la même couleur. Étrangement il ne m'inspire pas du tout confiance... Enfin, on point où j'en suis, personne ici, personne sur cette île je dirai même, ne m'inspire confiance. Mais quand il faut y aller, il faut y aller. On s'avance vers le comptoir ou le vendeur nous accueille.
« Benvenuto, messieurs. Vous cherchez quelque chose en particulier ? »