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« L'inconscience a parfois des audaces que la sagesse n'a pas le pouvoir de réprimer. » [Quête]

« Fuaaa.. Ah ! »
Le long bâillement d'Elio s'interrompit dans un petit cri de douleur lorsque sa main heurta la caisse qui le dominait. Retenant quelques jurons et frottant la zone douloureuse, il tendit l'oreille. C'était toujours le moment le plus risqué, où il devait rester silencieux. Lorsqu'il se réveillait entre ses caisses et guettait l'éventuelle présence de marine. Mais personne ne réagit à son cri, personne ne vint. Il n'y avait rien d'autre à entendre que le bruit des vagues contre la coque. Allant et venant, les vagues... Les vagues. Émergeant brusquement des vapeurs de son esprit jusqu'alors endormit, le jeune homme se redressa d'un coup. Ou du moins tenta-t-il puisqu'il fut très rapidement renvoyé au sol par la collision avec sa caisse soit disant protectrice.

Rangeant la prudence au placard – et ignorant sa douleur – il la dégagea rapidement pour sortir de sa cachette et courir jusqu'à la coque. Oui, elles étaient bien là ! Ils avaient enfin passé cette mer d'ennui qu'était Calm Belt. Finit les jours à s’inquiéter du passage d'un marine n'ayant rien de mieux à faire entre deux coups de rame. Finit la solitude et l'attente désespérée ! Il allait enfin revoir le jour et la nuit ! Bientôt, bientôt...

Tempérant son ardeur, il retourna en vitesse dans sa cachette. Il fallait rester calme et attentif. Il ignorait encore où il se trouvait et quelle heure il pouvait être. D'après ce qu'il avait pu recueillir comme information durant le voyage et lors des jours qui avaient précédé, le navire voguait vers Bulgemore. S'il avait bel et bien atteint Grand Line, la route risquait d'être encore longue... et mouvementé. Cette pensée l’inquiéta fortement. La mer de tous les périls n'était pas réputée pour son calme. Pour autant les vagues frappaient la coque en douceur... Était-ce du à la chance ou... Non, il ne pouvait pas avoir rejoint les Blues, n'est-ce pas ? Avoir fait demi-tour.

Sa respiration s'emballa, il voulait atteindre Grand Line et n'était pas sur de supporter une deuxième traversé clandestine... Peut être aurait-il du renoncer ? S'engager dans la marine et passer légalement ? Ou tenter sa chance sur la dangereuse reverse mountain ? Mais qu'est ce qui lui avait pris de tenter un pari pareil ! Se mêler au bagage sans être certain de sa destination, passer inaperçu durant le temps de la traversé... Sur le papier cela sonnait bien mais... Il fallait qu'il vérifie ! Qu'il sache s'ils avaient bel et bien atteint son but ou si... Si quoi ? Qu'y avait-il à faire s'il était de retour sur East Blue ? Honnêtement ? Rien.

Un rire nerveux le parcourut et il se détendit. Le voyage était éprouvant, bien plus qu'il ne l'aurait imaginé. Mais il n'avait rien à craindre, rien à faire, il devait s'accrocher à ce « advienne que pourra » qu'il avait lâché en se glissant dans sa caisse. Jusqu'à présent tout allait bien, personne ne semblait l'avoir repéré. Il restait caché, enfermé, inconscient du temps passant, inconscient du temps restant. C'était sans doute cela le pire. Bien plus que la solitude, que les restrictions pour conserver ses vivres le plus longtemps. Ne pas savoir au réveil s'il faisait jour ou nuit... Le vent lui manquait, la lumière lui manquait et les discussions aussi.
Mais il ne pouvait se permettre de se laisser aller à la panique. Il avait déjà franchit un obstacle, non ? Et si ce n'était pas le cas, il avait au moins survécu, il était resté caché...

Pas qu'il craignit qu'on l'envoya au piloris pour avoir jouer les clandestins – même si, la fatigue aidant, les scénario catastrophiques se développaient à merveilles dans son esprit -, non. La marine n'était pas de ce genre. Oh, elle n'accepterait pas avec un sourire, ni même se contenterait de le gronder comme un enfant. Nul doute que s'il était pris il aurait à assumer les conséquences de ses actes et sans doutes un séjour en prison mais... Pour le moment tout allait bien, il fallait qu'il s'accroche à cela.
Tendant la main vers son sac – qui commençait à se vider dangereusement – il empoigna une pomme et croqua dedans. Il tiendrait, quoi qu'il arrive, il tiendrait...

Il passa peut être une heure, ou deux, ou moins, voir plus, avant qu'Elio ne fut prit d'une nouvelle envie de sauter de joie.
Mais la situation réelle n'était pas à la réjouissance. Le bateau tanguait furieusement, les coups contre la coque se faisaient plus brutaux et le contenu de la cale était secoué avec violence. Tout ce qui n'était pas solidement attaché roulait d'un coté à un autre, quand ça ne volait pas. Le jeune homme se tenait à ce qu'il pouvait. Son corps recevait régulièrement les coups d'objets en vadrouille mais il s'en moquait. Il jubilait.
La mer se déchaînait et pour lui, c'était là la meilleure des nouvelles.

Il ne tarda pas à déchanter.

Le voyage se poursuivit en alternant calme et tempête, chaleur et glace. D'un certain point, il était plutôt à l'abri de ce genre d'inconvénient là où il se trouvait. Pour autant, il lui tardait que cela cesse. Le bateau était pourtant devenu bien plus vivant depuis qu'il avait quitté Calm Belt, les hommes y criaient et courraient – en ordre certes, mais de façon bien plus précipité qu'avant – et les bruits divers se faisaient plus nombreux. Mais après l'ennui et la monotonie, Elio ne parvenait plus à dormir dans ce qui lui apparaissait comme un capharnaüm... Sans compter le roulis de la mer. Pas qu'il fut malade, il n'avait jamais eu de souci à ce sujet, mais l'excitation était trop forte. Il voulait être certain, il voulait poser pied à terre et qu'on lui annonce qu'il était parvenu à destination. En bref, il voulait savoir où il était.

Lorsqu'il avait quitté les blues pour Grand Line, tout ceci paraissait irréel, il n'évaluait pas les conséquences de sa décision. Ce n'était qu'un coup de tête de plus, un choix étrange de se lancer vers les risques avant d'être trop vieux pour le faire. Un choix idiot aussi. Parce qu'à présent qu'il avait le temps d'y songer, l'endroit lui paraissait bien au dessus de ses capacités. Mais il n'en démordait pas, il voyagerait encore et encore et ce sur toutes les mers existantes. Et même si la décision était précipitée, si elle n'avait pas bénéficié d'une longue et intense réflexion, il voulait croire qu'elle était bonne. Car là où il en était, il ne pouvait plus reculer.
Il avait renoncé à avoir le contrôle dès lors où il avait profité d'un moment inattention pour remplacer le contenu d'une caisse. Ou peut être avant ? Lorsqu'il avait questionné le précédent navire pour savoir s'il pouvait monter à bord ? Ou entre deux, occupé à peaufiner son plan qui ne tenait qu'à la chance...

Et jusqu'à présent, il en avait eu. Car si l'on excluait son état de santé légèrement inquiétant, il avait vraisemblablement atteint Grand Line sauf et caché. Dans le fond de sa cale, entre ses caisses bien trop familières. Il sourit. Tout allait bien , tout irait bien. Entre deux coups contre la coque, il ferma les yeux et la fatigue l'emporta sur le bruit ambiant... Et le temps passa durant son sommeil, lui qui ne connaissait ni l'arrêt ni la clémence, insensible et constant, le temps s'écoula.

Pourtant, pour Elio, il ne reprit son cours que lorsqu'il ouvrit les yeux et alors il en eu bien trop peu.

Les pas des marines étaient précipités, le bruit différent de l'habitude et le bateau ne tanguait plus. Il ne bougeait plus du tout en fait. Mal réveillé, le jeune homme se leva et regarda par dessus les caisses devant lui. La cale ne lui avait jamais paru aussi grande et il l'observa quelques secondes calmement avant que l'idée ne fasse son chemin et que la panique le prenne. Le déchargement avait commencé, et depuis un certain temps au vu de son avancement.
Jurant entre ses dents, il chercha de yeux la caisse qu'il avait emprunté à l'aller. Elle était toujours là, tant mieux, la marine ignorait toujours sa présence, il avait encore le temps...

Des pas se firent entendre et le blondinet sursauta avant de se glisser dans l'ombre. L'homme qui en était à l'origine parla à un autre, son ton était joyeux. Arrivé à bon port. Ils rirent à une blague qu'Elio n'avait pas saisit. Il calma sa respiration et attendit qu'ils prennent une caisse avant de partir... Ils ne le firent pas. Ils demeurèrent là et d'autres vinrent décharger et la cale se vida un peu plus devant les yeux effrayés du blondinet.
Il ne savait que faire et la panique le prit. Normalement, il aurait du pouvoir reprendre son calme rapidement, trouver une solution, détourner leur attention le temps de rejoindre sa cachette où de filer. Mais il avait faim, il avait soif et son esprit était plus qu'embrumé. Par conséquent, il était terrifié.

Alors il céda. Après ces jours interminables et dont il était incapable de déterminer le nombre, après avoir résisté aux angoisses et au désespoir qui avait tenté de le prendre, il céda. Il se saisit de son sac et courut.
Sortit de nul part comme un diable fou, il fonça devant les marines qui prit par surprise sursautèrent avant de réaliser et de le prendre en chasse. Quelques secondes de réaction, quelques secondes qui permirent à Elio de quitter le navire, le quart d'un équipage à ses trousses. Dans le froid de Bulgemore, il courut, bien plus porté par l'adrénaline et la peur que par le peu de force qui lui restait.
Il courut sans savoir où aller, il courut sans même surveiller ses arrière. Il s'en moquait, il avait été repéré, il était foutu. C'est tout ce qu'il voyait. Il avait peur alors il courrait.

Grand Line... Tout cela, c'était stupide, il n'était pas près. Il n'était qu'un idiot, un gamin inconscient du danger qui cédait à ses envies à peine sortit de son îles. A peine sortit du berceau.
Dans la neige, ses pas ralentir enfin et avant qu'il n'ait pu se retourner pour voir si les marines l'avait rattrapé, avant qu'il n'ait pu penser à quoi que ce soit d'autre qu'à courir et à pleurer, il tomba. Son corps trop peu vêtu s'étala dans la neige et les yeux déjà clos, il sombra dans l'inconscience.
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