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Dix ans après [1625]

Salut lieutenant Corbeau.

Il est assis là sur son trône de sang et de pierre et de fer mêlés.

Pouf pouf.

Le vide abyssal de sa présence m’a attiré depuis l’autre bout de l’étage.

Salut agent Red.

Ses yeux perdus dans le néant de ce niveau ensablé ne sont pas surpris outre mesure.

Pouf pouf.

Les gens cools ne montrent pas leurs émotions.

Salut colonel.

Et puis l’ironie du monde l’a sans doute amené ici pour moi.

Tu en étais là dans les derniers journaux que j’ai lus.

Pas de fioritures entre hommes de bien.

C’est déjà le dixième anniversaire depuis la plage ?

Mais des souvenirs.

On t’envoie m’apporter les oranges en personne pour l’occasion ?

Si quelqu’un doit m’arrêter aujourd’hui ce sera lui ou ce ne sera pas.


Dix ans après [1625] 661875SignTahar
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Il surgit des sables comme un vieux souvenir enfoui ramené à la surface.

Salut Lieutenant Tahgel

Entre ses pieds nus et la lumière crue qui l'inonde, le tableau est presque christique. Belle réussite pour un survivant des enfers.

Salut Chien fou

Une prison d'un million d’âmes, la plus grande du monde, et on pourrait aussi bien être tout seul.

Salut Tahar. Je t'attendais.

Comme sur la plage.

Ouais dix ans. Putain de bail hein, ça méritait bien que je vienne marquer le coup moi même.

Et on a encore les pieds dans le sable. Qui est le con qui disait que tout était cyclique ?

J'avais pas franchement prévu les oranges.  

Non pas franchement. Plutôt de mettre à l'épreuve une nouvelle fois la mortalité de Tahar

Cela dit. J'avais pas franchement prévu de me retrouver assis sur un Vice amiral non plus.  

Putain d'euphémisme ça. Qu'il comprenne ce qu'il veut.

Tordant non ? Je venais t’arrêter et c'est moi qui ne sait plus ou aller.

Tiens au fait.

J'ai trouvé ça.

Narnak.
    Narnak…

    Un nom qui revient du passé comme d’autres l’ont fait depuis peu. Izya, Rimbau, Red. Tahar.

    La main passe sur la poignée offerte, les doigts glissent sur ce métal qui appelle.

    Qui appelle le passé, encore. Les cicatrices de Red toujours assis doivent le sentir aussi.

    Red ou… Comment c’était déjà ? Ce nom, cet autre nom…

    Et tu me le rends comme ça ? Tu dois être sacrément paumé en effet, Rossignol.

    Paumé comme je l’ai été après Pride ? Non, peut-être pas à ce point.

    Un vice-amiral, a-t-il dit. Les restes ne me parlent pas, il devait être discret dans son office.

    Il devait laisser la une des journaux à des gens plus du genre à aimer le feu des projecteurs.

    Un peu comme le Corbeau devait le faire en son temps. Et personne pour le regretter.

    Moi Flermet et toi ce valeureux trépassé, décidément l’ironie ne nous lâche pas…

    Reviennent des images de violence, de sang et de mort. Calm Belt, 1615, la fuite, Orange.

    Tel un écho, un futur proche apparaît aussi dans mon esprit. Flou mais violent et rouge encore.

    Si je dégainais Narnak et coupais maintenant, il se lèverait, son chapeau tomberait et tout recommencerait.

    Plus rien sous le chapeau ? Ces ravages du temps sur les êtres, je dois me méfier…

    J’allais en haut.

    Il y a du fracas derrière, dans la direction où j’ai laissé les autres.

    Autour le cyclone de l’échappée belle continue de tourner. Nous sommes dans l’œil où tout s’arrête.

    Comme une demande de permission pour continuer, sans doute pas.

    Comme une invitation, peut-être.


    Dix ans après [1625] 661875SignTahar


    Dernière édition par Tahar Tahgel le Mar 13 Aoû - 14:34, édité 1 fois
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    Surpris ?

    Qu'est ce que tu veux que j'en fasse ? C'est pas le mien. Et je me suis coupé avec.

    Paumé ? Même pas. Paumé c'est quand on ne sait pas ou on va. Et Red sait très bien qu'il ne va nul part. Piégé plutôt. Comme un rat dans un sac.

    Ou comme Tahar à l'époque ? Encore le cycle infernal qui recommence, bientot Red ne sera plus qu'un pauvre imitateur, coup dur suplémentaire sur un ego en berne.

    Être le second. Encore.

    -Lui c'était Tazzer. Pas assez souple pour plier au bon moment. Un peu comme le tien. Tordant je t'ai dit non ?  

    Tordant, la vie est une vieille salope avec un humour détestable. Ironie c'est sur. Grinçante comme un vieux dentier.

    Menace! Le regard de Tahar s'étrécit, Narnak trace une ligne imaginaire et tranchante jusqu'au visage de Red qui se couvre de noir.

    L'empathie fait voir des choses. Certaines sont vraies, d'autres non.

    Instant bref, souvenirs d'une scéne identique sur fond de soleil couchant et de mer infinie.

    Et le duel recommence une fois de plus.

    Mais non. J'emmerde le cycle. Pas de remake aujourd'hui.

    Si t'en remontes c'est que le fond doit pas être si bien que ça hein? Je m'en doutais.

    Permission ? Invitation ? Même chose.

    Et la aussi, un seul choix.

    Je te suis.

    Et pas seul. Derrière Tahar d'autres aussi s'en viennent. Et suivent. Une surtout.

    Sélindé.

    Izya ?

    Sa fille. Déjà retrouvé.

    Sa fille. Est ce qu'ils savent ?

      Têtue.

      Il est parti, comme ça, sans vraiment prévenir. Il a dévié du droit chemin dans cet enfer. Mauvaise idée.

      Il est fort, c’est vrai. Mais il est presque mort deux fois, seul.

      Personne ne doit être seul dans cet enfer. Alors je l’ai suivi, laissant les autres continuer.

      J’suis un dragon, je vous rattraperai.

      Un demi, certes. Mais le résultat sera le même. J’irai plus vite qu’eux et il ne sera pas seul.

      En fait, il n’est déjà pas seul.

      On… se connait ?

      Cet homme avec un chapeau rouge, je ne le connais pas. Et pourtant, il m’appelle Izya.

      Un autre prisonnier ? Il en a la tristesse, mais pas la tenue. Alors qui est-il ?

      Je dévisage Tahar, en quête de réponse.

      Hé mais ? D’où tu as ça toi ?!

      Ma main lui arrache l’objet de la sienne.

      J’avais pourtant laissé ce sabre à…

      Enzo.

      Tu m’avais pourtant promis Enzo. Tu m’avais promis de me le garder, alors que fait-il là ?

      Est-ce une nouvelle traîtrise de ta part ?

      Tu en serais bien capable…

      En serais-tu capable ?


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      Ne pas répondre, laisser le fond au fond.

      Tahar a vu pire mais pas cette fois.

      Et entamer la remontée, un œil devant et l’autre derrière.

      Même et surtout tordu par les chiens de la vie, le rossignol reste un corbeau.

      Izya ?

      L’empathie fait voir des choses. Certaines sont fausses, d’autres non.

      Dans son regard à elle il y a si peu et dans le regard so dark de Red il y a tellement.

      Il la connaît, mais elle non.

      Elle a reconnu Narnak, et lui aussi.

      Narnak la tolère, elle, tandis qu’elle le reprend de mes mains. Il l’a coupé, lui, quand il a essayé.

      Izya, dis bonjour à monsieur Red.

      Elle a des ailes, une autre avait des cicatrices.

      Et son sang résonne comme le mien.

      Comme le tien, Tahar.

      C’est un vieil ami, reste sur tes gardes.

      Un conseil de prudence pourquoi ? Par gratitude ?


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      Non on se connait pas. Moi je te connais.

      Un vieil ami. Marrant, à sa place Red aurait plutôt dit vieil ennemi. Ou meilleur ennemi ?

      C'était quoi déjà ? Occupez vous de mes amis, mes ennemis je m'en charge ?

      C'est sur qu'avec des vieux potes comme Tahar, pas besoin d'ennemis...

      Tu deviens protecteur Tahar, j'aurais pas cru. C'est l'age ou l'instinct paternel ?

      Alors ils savaient ? Non. Ou alors juste un peu, des doutes, des impressions. Des trucs comme ce foutu sabre qui ne coupe que les gens qu'il n'aime pas. Et qui ne la coupe pas elle.

      Pistonnée.

      Enfin. Les deux se regardent, le regardent. Il est temps d'en dire un peu plus et pour un fois de lâcher des infos gratuitement. Croa Croa dit le corbeau.

      Dommage qu'il n'y ait pas de journaux à découper dans le coin, il va falloir se passer de lettres anonymes.

      West blue, 1603. Séléna, une ange. C'est sa mère. Et me demande pas comment je le sais, tu veux pas savoir.  

      Pourtant c'était fatal. Red se souvient très bien de ces pensées de l'époque, quand a chaque fois qu'il croisait Tahar avec une nouvelle égérie les yeux remplis d'amour il se demandait.

      Mais bon sang, qu'elles ce qu'elles ont toutes ?

      Signe de tête vers Izya qui commence à ressembler a une fille qui a mordu dans un fruit trop acide. Alors, ça fait quoi de retrouver son père en voisin de cellule ?

      D’être la digne fille de la plus infâme et dangereuse crapule du coin. Celle qui fait si peur au populo qu'on l'a enfermé dans une prison qui n'est même pas censé exister.

      Vive l'image du père.

      Et attention, rousse incendiaire.

      Héhé. Bon anniversaire Tahar...

      Et maintenant ?

      Eux deux, ils font quoi ?


      Dernière édition par Red le Mer 14 Aoû - 0:05, édité 2 fois

        Qu’est ce que… ?

        Qu’est ce qu’il a dit ?

        « Séléna, une ange. C’est sa mère. » Ma mère ?

        Ma

        Mère ?

        Comment… ?

        Que sais-tu exactement ?!

        La lame le menace, mon esprit est brouillé.

        Que sait-il de moi ?

        Que sait-il d’elle ?!

        Que se passe-t-il ?!

        Pourquoi regarde-t-il Tahar ainsi ? Pourquoi lui dit-il cela ?! Qu…

        « Instinct paternel. »

        Qu…

        Comment réagir lorsqu’on se tient pour la première fois devant son père après plus de vingt ans d’existence ? Du moins, première fois en sachant.

        Je ne sais pas. C’est surement pour ça que je ne bouge pas.

        Seule ma main a lâché, sous la surprise, et mon arme est tombée.

        Seule ma tête s’est tournée pour pouvoir le regarder, lui. Cet homme sans qui je ne serai pas ici.

        Cet homme sans qui je ne serai.

        Mon regard dans le sien, la surprise nous a pris de court. Un silence s’installe et les questions m’envahissent.

        Qui ? Quand ? Où ? Comment ?

        Mais surtout, tant de Pourquoi ? !

        Pourquoi m’avoir abandonnée ?

        Pourquoi n’avoir rien dit il y a des années ?

        Pourquoi n’être jamais revenu ?

        Pourquoi ?

        Ma voix est effacée, étranglée dans ma gorge trop serrée.

        Je me suis toujours demandée comment je réagirai le moment venu. Le jour où je saurai enfin qui je suis, de qui je viens.

        Nombreux sont les scénarios que j’avais imaginés, mais à chaque fois, la fin manquait.

        Les réponses restaient floues.

        Et aujourd’hui, c’est le vrai. Dans cet enfer de sable, j’apprends et j’attends. Toujours sans réponses, toujours dans le flou.

        Mais peut être est-ce mieux ainsi ? Peut être n’ai-je pas besoin de tout savoir ?

        Ou peut être pas.

        C'est peut être juste pas le bon moment...

        Y aura-t-il seulement un bon moment ?


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        Hin…

        Alors c’était bien ça.

        Hinhin…

        Ce que je sentais, ce que je pouvais effleurer mais non comprendre.

        Ce que je refusais sans doute de comprendre.

        Ce qui m’a peut-être fait la porter contre moi quand elle s’est effondrée dans le froid, ce qui probablement me fait la conseiller. La gratitude ? Une blague. Le sang… Beaucoup moins, même pour moi. Surtout pour moi.

        HAHAHA.

        Mais quand même. Là, maintenant, ici ?

        Sans déconner.

        Alors c’était Séléna son nom ?

        Badinons. Crânons. Impel Down, terre d’instincts réveillés. Bas, vils instincts, instincts de conservation.

        Son nom qu’elle n’avait même pas lâché.

        Des contours flous, une tignasse rouge.

        La vie est une grande gouge toujours là pour remettre les pendules à l’heure quand leurs rouages se sont désaxés. Toujours là pour décompter au moment le moins propice les grains de sable qui s’y sont incrustés.

        L’instinct paternel ? Sans doute.

        Paternel, c’est pas faux.

        De qui je le tiens si je l’ai vraiment, je l’ignore.

        Il y a deux écoles en matière de pères.

        Celle de Mundan Tahgel, et celle des autres.

        Je ne pourrais affirmer avoir connu ni l’une ni l’autre.

        Séléna, hein…

        Une des premières rencontrées, vingt ans de carrière auprès d’elles toutes, jamais un accroc jusque-là.

        Des contours flous, une tristesse dans son regard dont j’ai profité, un vide dans le mien dont elle a profité.

        Et Izya maintenant. Au milieu et à côté du vide, au milieu et à côté du sang, au milieu et à côté d’elle-même.

        Sans doute la première née. Ironie…

        Bon anniversaire, sûr.

        Bon anniversaire Tahar.

        Première et dernière ? Lilou court devant nous dans le désert, avec un Jempa sans visage dans les bras.

        Il n’existe pas, lui, il n’existe sans doute pas mais quand même. Combien ?

        Combien de cadeaux comme ça il me reste, Red ? Combien tu en as dans ta manche encore ? Et…

        Izya. Elle attend. Des paroles sûrement. De moi, pour elle.

        Euh.

        Continuons.


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        Je les regarde, l’un après l’autre.

        Je les regarde, et je ne comprends pas.

        Ces deux hommes parlent de moi, et pourtant, je ne comprends pas. Tout est toujours flou.

        Ils parlent de moi, mais ne me parlent pas. Comme si je n’étais pas là.

        Et lorsqu’enfin j’apparais, c’est pour faire comme s’il ne s’était rien passé.

        Alors merde.

        NON.

        Je veux comprendre.

        Je suis partie de chez moi pour comprendre. Et maintenant que les informations sont là, je devrai juste ignorer ?

        Non. Juste non.

        Que croyez vous faire là, tous les deux !

        J’existe. Encore un peu.

        Vous croyez pourvoir balancer ces mots, sur moi, sans rien m’expliquer ?!

        J’ai vécu jusqu’ici juste pour ce moment.

        VOUS PENSEZ POUVOIR M’IGNORER LONGTEMPS ?!

        Il est hors de question que je le laisse filer sans savoir.

        Vous savez de moi ce que j’ai toujours voulu savoir ! Vous me narguez sans même vous en souciez !

        Et il faudrait que je me taise simplement et que j’avance ?! Alors que vous agitez devant moi le but que je me suis fixée ?!


        Les larmes sont venues, et mon regard perce les yeux de ce chapeauté.

        Qui es tu, toi, pour ainsi te ramener et balancer tant de chose sur le passé que je cherche sans même te soucier des conséquences ?!

        Tu es arrivé en ce lieu pour le voir, LUI, pour le plomber, Lui !

        Et moi alors ?! Moi je dois tout deviner parce que moi, tout le monde s’en fou. Moi je suis obligée de déduire que Lui c’est mon Père parce que personne est capable de me le dire en face !

        Des années que je me pose des questions sur qui je suis ! D’où je viens ! Et le jour où je dois l’apprendre, je suis comme invisible ! Je…


        Je deviens moins que rien.


        Mon corps redevient humain, mes jambes lâchent sous mon poids, ma force m'abandonne. Et me voilà à genoux face à eux.

        L’un qui sait, l’autre qui est.

        Et Narnak est là, pas loin. Souvenir proche, et aussi lointain.

        Et avec lui en main, je trouve la force de le regarder.

        Une question me brûle les lèvres. Cette question, référence au passé.  Cette question, dont je crois avoir compris la réponse, mais que je refuse encore d’accepter…

        Suis-je réellement rien ?

        Le reflet de cette lame qui nous unit brille dans mes yeux. Cette lame grâce à laquelle tout a commencé.

        Pourquoi ne m’as-tu rien dit ?


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        Pourquoi ?

        Les choses sont soudain allées vite, trop vite.

        Et je commence à oublier les vies que j’ai volées plus tôt. Le sang que j’ai volé plus bas.

        Grosse fatigue, j’aurais envie de rester debout mais à mon tour de m’asseoir près des restes de Tazzer.

        Pourquoi…

        Non, je me relève.

        Je pensais à l’ironie de tout ça pour moi, je ne ressens pas sa douleur.

        Elle est là, elle est là à deux pas, agenouillée dans ses larmes avec son sang qui bout.

        Ca je peux le sentir.

        Elle est là comme tant d’autres avant sans doute.

        Un regard au choucas messager des basses œuvres et je vois dans son œil noir Ela, tout juste dégradée dans la cour de Marie-Joa, en pleurs sous la pluie et lui donnant l’écharpe qu’il m’a par la suite tendue à Orange.

        Et je vois les autres, beaucoup des autres.

        Mais je n’étais pas là devant elles. J’étais parti, c’est pour ça qu’elles pleuraient.

        Toujours pour ça. Plus ou moins directement pour ça.

        Cette fois que je suis devant elle, c’est pour ça qu’elle pleure.

        Allez comprendre.

        Sans doute parce que je n’étais pas au courant.

        Je ne ressens pas sa douleur s’il y en a, pas ses émotions quelles qu’elles soient.

        Alors je ne bouge pas, je n’approche pas, je reste aussi stoïque que Red. Plus. Assurément plus.

        Un bon père ferait sans doute quelque chose. Je ne suis pas un bon père.

        Celui que j’ai eu, il n’était pas là, il n’était pas bon quand il l’était.

        Je ne suis pas un père, je ne l’ai jamais été.

        Je savais qui il était néanmoins. Et je savais qui était ma mère.

        Elle, elle était bonne. Sans doute. Peut-être. Elle m’a laissé partir.

        Je savais qui elle était aussi. Au moins ce vide-là, j’y ai échappé.

        Et je n’ai jamais vécu avec l’idée que j’avais une descendance. Alors je suis surpris, oui. Surpris. Je débarque. Il faudra que je fasse avec et que je décide comment je ferai. C’est inévitable. Mais ça n’a rien à voir avec la certitude d’avoir une ascendance sans la connaître. Elle, il a fallu qu’elle fasse sans. Je ne peux pas comprendre.

        Elle est partie comme elle est venue. Unique. Sans rien confier.

        Unique, oui. Peu cachaient leur dos. Peu m’ont fait le coup de partir les premières.

        Dur à entendre. Probable.

        Vrai. Je me défausse parce que c’est vrai. Moi aussi je dois digérer. Moi non plus je ne sais pas.

        C’est toutes les infos que tu as ?

        Red, il sait peut-être.


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        Il sait il sait... Oui il sait un peu.

        Mais Red lui n'a pas abandonné une môme derriére lui et perdu sa mère.

        Enfin si. Mais c'était pas la sienne. Ce qui fait quand même une sacré différence non ?

        Cela dit. Tahar lui au moins n'a pas liquidé Séléna...

        Des infos sur elle? Je sais ou elle est parti après toi. Et je sais ou elle est morte après Izya. C'est tout. Mais je sais ou tu peux en trouver plus. Le Cipher Pol a fait une longue enquête sur Tahar. Et sur tous ceux qui l'ont approchés. Y compris toi Izya. Et ta mère.

        Ouaip merci aux annalistes.

        Et merci au brave Red qui a fait transférer tout ça dans un hangar facile d’accès plutôt que dans le département archives secrètes du CP.

        A Logue Town, au Centre d'archives Trovahechnik.

        Voila Izya on ne t'ignore plus. Bienvenue dans la famille.

        Même si c'est la pire.

        Et si Red reste presque aussi laconique que le chien fou juste à coté c'est que la rencontre familiale le laisse comme Izya avec un gout désagréable dans la bouche.

        Un gout de sang.

        Ou le souvenir d'une autre scéne comme celle la? Encore

        Qu'est ce qu'elle attend de son père ?

        Qu'est ce qu'il peut dire de plus que ce Tahar ne lui a pas dit ?

        Rien. Ou alors juste,

        Allez debout. C'est toujours mieux qu'avant non ? C'est ton père. Vous êtes vivants. Vous aurez le temps de vous faire à l'idée.

        La haut, dans l'encadrement du trou percé par feu Tazzer, une poignée de têtes primés viennent d'apparaitre. Lorgnant les retardataires en bas.

        Des têtes de Saigneurs fraichement libérés qui cherchent leur chien fou.

        Et d'autres.

        Bon, on bouge de ce trou ? Qui ne sait pas voler ?

        Red lui. Il sait.

          Morte…

          Ce mot résonne dans le vide qui vient de se creuser en moi.

          J’avais souhaité la voir, la connaître, lui parler.

          Mais la vérité est plus froide que je ne l’imaginais.

          Et le peu d’espoir qui me restait s’en est allé.

          Mon corps ne tremble plus. Mes larmes ne coulent plus. Rien, il ne reste plus rien.

          Jamais je ne la verrai. Jamais je ne l’entendrai. Jamais je ne saurai…

          Je ne suis ni née d’amour, ni même d’un arrangement. Mon père n’est qu’une victime et ma mère, détentrice des réponses à mes questions, est morte.

          Suis-je condamnée à rester dans l’ignorance ?

          Peut être. Ou peut être pas.

          Logue Town...

          Mon dernier espoir.

          J’ai toujours pensé que les réponses que je cherchais se trouvaient dans le ciel, chez les anges. Mais finalement, c’est ici, sous la mer, que je les ais. En partie.

          Et le reste se trouve là bas, sur une simple île d’East Blue… Si j’avais su…

          Et les mots de l’homme en rouge résonnent à mes oreilles et raniment mon cœur affaibli par le chagrin.

          Nous sommes vivants, ensembles et au courant. Cela ne peut pas être si mal.

          Mais nous sommes aussi dans le pire endroit au monde. Et nous devons en sortir. Et pour cela, je dois me réveiller.

          Bon nombre de choses se seront passées depuis mon arrivé ici. Et mes rêves ont été accomplis et anéantis.

          Mais l’espoir perdure. Encore un peu.

          Je sais ce que je dois faire et je n’ai plus peur.

          Je me relève, tandis qu’ils attendent en haut. Je me relève, sans dire un mot.

          Mes yeux plantés dans ceux de mon père. Narnak planté entre nos deux chairs, je le lui laisse.

          Et sous le regard de tous, je change une nouvelle fois de forme et attends les cavaliers.

          Cette fois, je sais.

          Sortons d’ici.


          Dix ans après [1625] 1425067977-izya-sflagopr Dix ans après [1625] Zps1 Dix ans après [1625] 1lmh
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