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L'Ardente Chasse V ; Dernier combat.

Une ruelle exigüe, peut-être repaire de petites-frappes ou de pickpockets, mais aussi un raccourci pour esquiver cette foule étouffante. Pour cesser un instant d’être constamment à l’affut des gestes des charretiers révolutionnaires, un moyen de quitter le souk aux milles fragrances et à la chaleur meurtrière pour l’ombre d’un couloir nauséabond entre deux échoppes bruyantes.

Titubant, une main appuyé contre mon flanc sanguinolent, je m’engage dans la ruelle, jetant un dernier regard au convoi de trois véhicules qui poursuit son difficile parcourt à travers le grand boulevard congestionné par les étalages et les marcheurs en tout genre.
Il ne me suffit que de longer l’avenue depuis l’ombre. Devenir un de ces mendiants infréquentables qui infectent les rues de par leur omniprésence. Une simple silhouette à laquelle personne ne va accorder d’importance, pas même le plus consciencieux des révolutionnaires.

Ma respiration se fait rauque, pénible, mais je ne peux me permettre de cesser ma progression pour mes blessures. Non. Je ne peux me permettre de perdre ces criminels en plein milieu de Nanohana, les retrouver à l’odeur ou à l’ouïe deviendrait un défi insurmontable.

Le sang cogne contre mes tempes, sèche sur mon visage et coagule sur mes blessures tandis que le manque d’eau se fait cruellement sentir sur ma langue. Mais je ne peux pas laisser tomber, ni abandonner.

Je progresse entre les poubelles, les bennes à ordure et les alcooliques endormis à l’ombre des deux tours qui recouvrent l’étroit couloir. Ici, c’est l’odeur des déchets fermentés et de la putréfaction qui est maîtresse, terminant de créer un contraste si frappant entre l’exubérante et bruyante avenue bondée et sa voisine sombre et inhospitalière. Mais, pas le temps de s’y attarder, pas le temps de réfléchir, il faut poursuivre, s’assurer de ne pas perdre les charrettes de vue lorsque l’on ressurgira dans le souk.

Au fond de la ruelle qui fait un crochet pour déboucher sur la rue où une marrée d’enturbannés s’agglutine, trois hommes adossés à un mur posent des regards presque pervers sur moi. L’un caresse une bosse sous sa tunique jaune et crasseuse, l’autre ressert sa poigne sur la planche cloutée qu’il tient sur son épaule tout en lissant sa barbe. Le dernier, une balafre au menton, plisse les yeux et esquisse un sourire mauvais en se mettant au beau milieu de la ruelle déjà étroite.

Des racketteurs.

Mon esprit se fait vautour, charognard cherchant à se repaître de ma fatigue psychologique et physique. Ce même rapace me souffle d’un murmure alléchant ce que je me refuse obstinément. Ce à quoi je ne m’adonnerai pas aujourd’hui. Pour ne pas donner raison à Marx. Pour ne pas prouver à tous que je suis ce qu’ils pensent de moi. Un tueur sans pitié.

Alors, lorsque le balafré écarte le pan de son long manteau brun et poussiéreux pour découvrir un holster contenant un pistolet, je continue ma difficile démarche sans hésiter une seule seconde. Ils sont peut-être tout trois des criminels aguerris, des hommes craints ou des tueurs sans scrupules, je n’en ai cure. Eux ne savent pas ce que Double Face, une fois lancé, peut faire.

Alors, dans un effort presque pénible, je relève la tête, sous ma capuche, pour poser mon regard sur eux. Et dans les yeux du bougre qui s’oppose à mon passage, je perçois le reflet monstrueux de ces deux pupilles safran et brillantes de détermination qui n’ont rien d’humaines. Et au-delà de ce reflet, toujours au fond des globes du racketteur, je vois une peur paralysante. Une peur qui se transmet dans l’entièreté du corps de l’homme tandis qu’il se crispe en comprenant que ce qu’il croyait être une cible facile est en fait le plus dangereux prédateur d’Alabasta.

Contagion foudroyante, les trois hommes en viennent presque à gémir devant mon visage, et d’un seul élan, les trois prennent leurs jambes à leur cou et disparaissent dans le brouhaha de la grande avenue, sans demander leur reste.

Je soupire lorsqu’enfin les caresses mentales cessent enfin. Lorsque ces alléchantes contraintes se taisent enfin pour me laisser en paix avec ma douleur physique et les affres de mon combat contre Marx.

Et toujours de ce pas trainant, irrégulier, je m’enfonce à nouveau dans cette foule aux affluences incessantes pour me bercer au rythme de sa progression. Regard subtile un peu plus loin vers l’avant, les trois véhicules chargés d’armes sont toujours là.
J’esquisse un demi-sourire; je ne les ai pas perdus, je m’en suis même rapproché grâce au raccourci de la ruelle.

Je louvoie entre les passants, m’efface devant certains qui, les bras chargés, ne prennent pas la peine de regarder devant eux. L’avantage à être vêtu de simples loques, c’est qu’aucun marchand n’ose me proposer ses produits ou attirer mon attention d’une façon ou d’une autre. Il n’y a aucun profit dans la vente à des itinérants, c’est bien connu. C’en est presque si les gens, mal à l’aise parfois, font de leur mieux pour ne pas se trouver sur mon chemin.

Mais ça n’a pas d’importance, j’ai déjà vécu comme ça. Ça a toujours été ainsi, avec ou sans loques.
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Au bout d’un moment, enfin, les trois véhicules quittent la circulation complètement bloquée du souk pour s’engager dans une autre artère moins bondée. Dans celle-ci on peut mieux s’attarder aux couleurs toutes différentes des habitations et des magasins en pierres colorées. La beauté de l’architecture n’est pas à contredire, sur chaque façade on peut retrouver des motifs gravés dans la pierre ou des aspérités sculptées en d’intéressantes formes géométriques ou en des imitations coquasses de gargouilles. Les échoppes et les étalages y sont toujours présents, quoique moins remplis et bruyants tandis que l’on oublie peu à peu la rumeur sonore du souk énorme de tout à l’heure.

Toujours voûté, la démarche difficile, la respiration sifflante, je longe le mur d’une tannerie exhalant des odeurs piquantes et chimiques en restant tout de même à bonne distance du convoi qui prend de la vitesse en l’absence de la foule étouffante.

Ma tête me fait souffrir, en écho résonne douloureusement les cris des marchands et des badauds en plein marchandage. Me sciant le crâne, le son des déflagrations lors de mon combat contre Marx me martèle encore l’esprit, comme si au fond de ma tête se déroulait toujours le même affrontement. Mes paupières lourdes, mes côtes brisées et mes muscles en bouillie n’aident en rien à ma progression qui se fait pratiquement de façon inconsciente. La fatigue qui me prend ne me permet même plus de savoir si je suis endormi ou éveillé dans cette filature sous le soleil brûlant.

Je touche un instant ma tunique déchirée que j’ai bandée autour de ma blessure au flanc pour m’assurer qu’elle tient toujours, puis me faufile un instant entre deux étalages de bijoux pour éviter le regard d’un des chauffeurs révolutionnaires.

Je mets de côté la douleur qui me grille le cerveau et secoue vivement la tête pour me redonner du tonus avant de fouler d’un pas traînant la terre battue qui constitue l’allée. C’est un combat de chaque seconde que de rester à l’affût des faits et gestes des trois chauffeurs tout en combattant la fatigue et la déshydratation que me guettent toutes deux à la manière de charognards, attendant la mort à venir d’une bête esseulée.
Je dois même me résoudre à accélérer le pas pour ne pas perdre trop me faire distancer par le convoi qui gagne en vitesse, une fois le chemin libre. Les odeurs alentours m’assaillent le nez à un point où j’en viens même à oublier l’objectif de cette filature. J’ai faim, j’ai soif, j’ai sommeil. Aussi résistant puis-je être, il y a une limite de besoins primaires dont un homme peut se passer à la fois. Et cette limite commence à être dangereusement atteinte.

Des gobelets fumants de thé me font de l’œil à ma gauche, sur le trottoir, alors qu’un fumoir en plein air exhibe de larges tranches de jambon. Trop de distractions, trop de pièges tendus par la ville en elle-même.

J’entre dans une ruelle que la rue croise lorsqu’un des Gris se retourne nonchalamment pour se gratter l’omoplate à travers sa chemise de lin, malgré toutes ces tentations, il y a des réflexes qui ne se perdent pas. La vraie question est plutôt de savoir combien de temps continueront-ils de m’aider dans ma poursuite.

Trouver la base révolutionnaire. Oui, il faut la trouver. Ne pas oublier l’objectif.
Avec une fluidité plus que défaillante, j’esquive un homme sur un chameau qui passe à toute vitesse dans la rue, renversant un étalage complet de brochettes de viande odorantes. Un instant je m’arrête et observe. La plaque chauffante sur laquelle le marchand faisait cuire ses brochettes s’est renversée. Elle est au sol, comme tous les aliments du pauvre vendeur qui gît sous la toile qu’il avait installé au dessus de son étalage. Les brochettes sont là, dégoulinantes de jus et d’épices, à la portée de n’importe qui. Elles ne demandent qu’à être saisies et englouties, que l’on morde dans leur chair marronnasse pour en déchirer de juteuses bouchées salées…

Non. Se concentrer sur l’objectif. Trouver les révolutionnaires, leur empêcher d’entrer en possession des armes.

Effet domino oblige, l’étalage d’à côté aussi est victime de la chute du premier. Comble du comble, c’est un vendeur de glaces qui laisse toutes ses substances sucrées et colorées s’épandre sous le dur soleil du désert. En un instant, la crème fond et devient un liquide sucré et aromatisé. En un instant, un torrent de salive s’écoule dans ma bouche sèche alors que mon regard flou ne sait sur qui se fixer entre les brochettes, les glaces ou le convoi.

Non. Détourner le regard. Se concentrer sur l’objectif. Trouver les révolutionnaires, les empêcher d’entrer en possession des armes.  

Pour ma promesse faite à Lilou, pour prouver qu’aucun défi n’est insurmontable pour Double Face.

Faible, mais déterminé, je reprends d’un pas pénible mais décidé ma filature.
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Ils se sont tous arrêtés. Les trois carrioles sont à l’arrêt, les trois chauffeurs aux aguets.

Une rue déserte, une heure plus tard. Une rue déserte dans un quartier insoupçonnable où s’amoncèlent les maisons colorées, les échoppes peu fréquentées et les boutiques endormies. En ce milieu d’après-midi, rien ne pourrait laisser croire que ce quartier qui ressemble à n’importe quel autre quartier pourrait être le repaire d’une troupe révolutionnaire.

Du moins, pas le quartier en soit, mais plutôt ce qui se trouve sous ce dernier.
Au coin d’une rue adjacente à celle où se s’est arrêté le convoi, je suis dos au mur, éreinté par la filature, mais toujours invisible aux yeux des transporteurs d’armes. Je tends le coup, espionne brièvement les trois hommes qui quittent leurs chariots. L’un d’eux tire une clé de sa poche et s’approche de ce qui semble être l’entrée d’un grenier souterrain.

D’un grenier souterrain, ou d’une base révolutionnaire.

Et comme pour me donner raison, lorsque les portes s’ouvrent, d’autres Gris en sortent pour se saisir en silence des caisses sur les carrioles. Le manège se poursuit, longuement, jusqu’à ce que les trois véhicules soient complètement vides. Pour pouvoir stocker une telle quantité de munition, le grenier doit être de taille bien plus imposante qu’il ne le laisse soupçonner.

D’une main écorchée et éraflée par mon combat contre Marx, je cherche dans la poche de ma tunique déchirée pour en sortir mon escargophone bicéphale. Seul vestige toujours intact de mon accoutrement.

D’un coup d’œil, je mémorise le nom de la rue et file plus loin, toujours en titubant, toujours aussi faible, mais toujours déterminé.

Cette fois, pas d’embrouilles, on réussit une mission avec brio. Compris?


« Compris. »

***

Les autorités d’Alabasta sont prévenues. La garde est sur le chemin. Ça n’a pas été simple d’expliquer au commandant de la gendarmerie que je suis  responsable de la destruction d’un vieux quartier d’Erumalu ainsi que celui ayant vaincu Marx. Non seulement cela, mais aussi que j’ai besoin de son aide pour évacuer complètement un quartier de la ville. Un quartier résidentiel étant supposément le nid d’une cellule révolutionnaire assez consistante.

Il est vrai, néanmoins, qu’il est évident qu’établir un site d’influence de la Révolution est bien plus facile dans un pays non-contrôlé par le Gouvernement. Mais certes, j’ai tout de même réussi à déloger une petite troupe des casernes de gendarmerie pour me venir en aide. Une petite troupe qui ne devrait pas tarder à arriver dans les environs.

Depuis, je veille. Je surveille les allées et venues des révolutionnaires qui entrent et sortent du repaire comme si rien n’était, tous vêtus comme des civils normaux. Ils sont hommes, femmes, vieillards, adolescents, adultes. Peu importe, ils se battent tous pour un même objectif qu’on ne peut leur soupçonner de soutenir en ce pays. C’est pourquoi je dois tuer cette cellule dans l’œuf. C’est pourquoi je dois mettre sous les verrous les alliés de Marx et de Lénine.

Entre-temps, j’ai aussi pu prévenir Salem de l’état de ma mission. On m’a apprit que Wallace avait pu sauver Lilou, que Lénine était derrière les barreaux et qu’une troupe était en route pour s’occuper de Marx. Il ne me reste donc plus qu’à donner le coup final, qu’à m’assurer qu’aucun révolutionnaire ne touche à ces armes et ces munitions et qu’il ne reste plus aucune trace de ces derniers sur Alabasta. Le camp du désert d’Erumalu et la base de Nanohana détruite, les Gris n’auraient dès lors plus aucune attache sur l’île, et tout serait à recommencer du début.

Juché au sommet d’une tour au toit sphérique, reprenant des forces de mon mieux en observant un jeune homme qui vient tout juste de quitter le repaire, je soupire un bon coup tandis que le soleil gagne en teintes orangées et rosées.


-C’est presque terminé.

Je saute sur un autre toit, plat cette fois-ci, pour suivre du regard l’homme dans la trentaine qui s’engage dans une nouvelle rue. Longeant cette même avenue en sautant de sommet en sommet, je détaille l’homme d’un œil que ma fatigue moins pesante rend plus avisé.

Il a un turban rouge, une barbe courte mais pointue au menton, des yeux bleus clairs, un nez retroussé et un teint bronzé. Un homme frais ayant toujours un petit sourire en coin à qui personne ne penserait reprocher d’appartenir à une organisation criminelle.
Un homme qui s’arrête devant une porte, du côté de la rue me permettant de voir parfaitement l’intérieur de l’habitation à la porte de laquelle il cogne. C’est une petite fille d’à peine cinq ans qui lui répond, une gamine aux boucles brunes et aux yeux clairs comme les siens. Une gamine qui lui saute au cou avec un sourire radieux.

Derrière la gamine, une femme, probablement du même âge que l’homme, ressemblant à s’y méprendre à la fillette, vient embrasser le révolutionnaire en le serrant contre elle.
La porte se referme sur cette scène comme l’homme rentre chez lui, me laissant seul sur mon toit. Seul avec le soleil couchant qui continue de faire darder ses chauds rayons.

…C’est donc contre ça que je dois me battre? Contre un père de famille aimé et heureux? Contre un homme qui vient de recevoir plus d’amour en une minute que j’en ai reçu dans toute mon existence?


« Mais c’est aussi un criminel. »

Un criminel, ou un homme qui a des convictions et œuvre dans un futur heureux pour les siens…?

Troublé et ébranlé, je reviens sur mes pas, le regard vide.

La nuit tombe, le quartier est vidé par les gardes d’Alabasta.
Double Face s’éveille et, déboussolé, entre dans le repaire des révolutionnaires. Malgré la fin, la soif et la fatigue…
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C’est un immense sous-sol. Un improbable réseau de tunnels et de salles directement sous un quartier résidentiel de Nanohana. Un endroit insoupçonnable pour n’importe quel passant ou même pour le plus aguerri des inspecteurs. En fait, c’est comme si on avait relié l’entièreté des sous-sols de l’avenue pour en faire une véritable base où on retrouve des dortoirs, des salles d’eau, des cuisines et des entrepôts, mais aussi des salles d’entraînement et de communications.

Et c’est plein d’un peu plus que cinquante révos.

Me fondant dans la pénombre de la première salle à peine éclairée, je longe un mur de pierre taillée tandis que deux hommes jouent aux cartes dans ce hall aménagé sommairement. Un tapis au centre de la petite pièce, un porte-manteau, une table, deux chaises, deux hommes et un long couloir plongeant dans la base que l’on devine achalandée de par les bruits qui s’en échappent.

Ignorant la douleur que provoque chez moi chaque mouvement, je longe en silence le mur le plus loin des deux veilleurs d’une démarche qui se veut le plus feutrée possible malgré le déséquilibre auquel m’oblige mon faible état.

C’est après avoir traversé le long couloir suivant le hall que je réalise amèrement la risibilité d’entrer sans se faire voir.

Il n’y a qu’un accès possible, le couloir de l’autre côté de la pièce. Mais cette pièce, elle est invraisemblablement grande… et pleine de révos assis autour de tables à discuter joyeusement de tout et de rien…

Le fumet des plats que mangent les Gris habillés en civil indique qu’ils commencent tout juste le dîner après avoir bu de chaleureux gobelets de thé. La pièce est parfaitement éclairée et bondée à souhait. Aucun moyen de traverser sans passer inaperçu, aucun moyen de rejoindre les armements qui doivent se trouver plus loin.

…De toute façon, depuis quand je fais dans le silencieux moi…
Et qui oserait stopper Double Face.


***

Au centre de la salle à manger, un homme bigarré surgit, à la grande surprise des dineurs. Certains le reconnaissent car ils manœuvraient les bateaux transporteurs d’armes lorsque ce premier affrontait Marx. D’autres comprennent qu’ils se sont fait filer toute la journée par ce monstre vêtu de loques. D’autres hurlent de surprise à la vue de son visage. Mais tous se lèvent d’un seul homme pour se jeter sur l’indéniable intrus.
Et dès lors, malgré les blessures et la fatigue de l’homme, c’est l’hécatombe chez les gris.


***

Blade Mode 1

Devenu tempête d’acier, je virevolte sur moi-même, tranchant, lacérant et coupant tout ce qui passe à ma portée.

J’avance. Je progresse. Malgré les hommes qui me martèlent de leurs ustensiles, malgré ceux qui tirent des poignards, des matraques et des instruments de cuisines.
Je ne souffre plus, je ne ressens même plus mon corps. Je ne suis qu’un esprit propulsé par une simple volonté, celle d’écraser ceux qui m’empêcheront d’avancer dans ce foutu couloir.

Un pied devant, un autre, puis encore un. Ils sont comme une marrée tentant de me repousser sans cesse, ils sont un mistral repoussant l’oiseau migrateur.

Ils sont le Monde qui repousse Double Face.

Il s’ouvre à moi, ce couloir, il s’ouvre à moi lorsque je cours en titubant pour le traverser. Lorsque je me défais de l’étreinte des malheureux qui veulent me voir mourir. Je les enchaîne ces couloirs, je les enchaîne en me trouvant une force renouvelée, en courant de plus belle, en bandant mes muscles que je ne sens plus pour faire valoir ma force face à celle de ces hommes et ces femmes unies.

Cette fois ils sont près, ont des armes de valeur. Ils tirent, font feu, me mitraillent, mais rien n’y fait. Ma volonté est plus puissante que leurs balles, mon esprit est plus solide que le métal dans lequel elles sont coulées.

Alors je progresse, encore et toujours, toujours à travers ces sous-sols interminables. Et derrière moi, les Gris qui me poursuivent et tentent de m’abattre par tout les moyens possibles. De la sommation à la menace, du coup de sabre au tir de mousquet.
Mais il est trop tard, j’ai trop combattu et souffert pour m’arrêter maintenant. Je ne peux pas me laisser vaincre après Lénine et Marx. Pas après de telles épreuves.

Alors toujours j’avance, sans cesse, sans arrêt, sans obstacle. Et désormais, ce sera ainsi aussi dans ma vie. Toujours j’avancerai, toujours je progresserai, comme je l’ai fais par le passé. Comme je le ferai par le futur, car Double Face est éternel, et les révolutionnaires vont l’apprendre durement aujourd’hui.

Il est là, enfin, l’entrepôt. Ce grenier où toutes les armes et les munitions ont été stockées. Cet objectif que je désespérais à atteindre. Mais il est là, et d’un coup, derrière moi, les Gris se mettent à paniquer, à me hurler de ne pas faire ce que j’ai prévu depuis un moment déjà.

Je recule à l’orée de l’entrepôt, jusque dans le couloir, tout en chargeant minutieusement le fusil accroché à mon poignet, fidèle arme qui fait défaut à celui qui a trop confiance en ses pouvoirs. Les révos aussi reculent, mais braquent aussi sur moi leurs armes pour m’ordonner de ne pas mettre le feu à l’endroit, de ne pas détruire complètement leur entreprise. Mais l’écho de leur voix se perd avant d’atteindre mes oreilles. Leurs suppliques ne valent plus rien devant l’ampleur de ce que j’ai déjà accompli et de ce travail que je veux définitivement terminer.

Alors, je tourne la tête vers eux, et leur adresse un sourire amer à la signification plus que délétère.

Et une détonation plus tard, l’entièreté des armes et des munitions explose dans une déflagration monstrueuse qui arrache le plafond de l’entrepôt souterrain et qui me propulse comme le reste des révolutionnaires une bonne vingtaine de mètres plus loin à travers les couloirs et les pièces.

Une véritable vague de flammes et de son ravage complètement le couloir et les pièces qu’elle traverse tout en emportant toute âme vivante dans son sillage.

Barrière invisible réduisant de façon drastique les affres de l’explosion, mon haki me permet de me réceptionner péniblement, mais en un morceau, après avoir roulé sur moi-même sur plus de cinq mètres.

Debout au milieu du feu et de la suie, je sers fortement ma blessure au flanc qui s’est remise à saigner tout en courant vers la sortie, esquivant de mon mieux les débris et les flammes qui ravagent l’endroit. Lorsque je m’apprête à escalader les escaliers vers l’air libre, j’aperçois du coin de l’œil un homme piégé sous les décombres d’une paroi effondrée.

C’est cet homme qui, plus tôt, revenait chez lui et était accueilli par sa femme et sa fille. Ce même homme, qui, maintenant à l’article de la mort, affichait un sourire jovial et frais. Ce même homme au regard bleu et clair qui désormais est aveuglé par le sang qui lui coule d’une plaie au front.

Un pincement effroyable me tétanise le cœur. Puis, cessant d’oppresser ma blessure béante au flanc, je m’approche de l’homme enturbanné et le tire des décombres de mon mieux…


***

Et à l’extérieur, c’est un immense pilier de feu et  fumée qui crève une maison au complet avant de s’attaquer à ses voisines. Mais les gardes ont vidé l’endroit, la population est en lieu sûr. Et comme les révolutionnaires non-touchés par l’impact se sauvent à toutes jambes par la porte de sortie donnant sur la rue, ils sont accueillis par un mur de hallebardes. Les gardes de la ville qui les attendent de pied ferme pour leur passer les menottes.

En moins d’une heure, les habitants du quartier, armés de sceaux d’eau, éteignent complètement l’incendie et sont ensuite pris en charge par les autorités.

Lorsque Double Face sort enfin de sous les décombres, c’est en titubant et en marchant de peine et de misère, mais aussi en tenant dans ses bras un homme au regard bleu clair et au turban rouge qui a le visage couvert de sang. Un homme qu’il confie aux autorités en leur expliquant que c’était un prisonnier des révolutionnaires, non l’un d’eux.

Ce sont les dernières paroles qu’il profère avant de s’évanouir, victime d’une vile déshydratation et d’une crise de fatigue insoutenable. Lorsque, plus tard, il est ausculté par le Docteur Wallace Johnson, ce dernier explique avec étonnement que l’heure à laquelle le lieutenant-colonel s’est évanoui dépasse de plusieurs heures le temps moyen durant lequel on peut survivre sans boire ni manger en plein désert…

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