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Les Brumes et la Chrysalide [1625 | Raf]


    Dire que Goa était un coin pittoresque, une destination idéale pour des vacances tranquilles reviendrait à dire que oui, le Gouvernement Mondial luttait pour le bonheur de chacun et celui surtout d'autrui, dans chacun de ses gestes depuis le balayage du mousse le plus lambda jusqu'aux cinq momies chevrotantes de Marie-Joie.

    Il allait m'entendre, le Rafaele. Me faire venir dans ce coin pourri en m'obligeant à poser des jours de congés. Ne pouvait-il pas faire la révolution dans un coin plus glamour? Ou avec un climat plus accueillant? Non, il avait trouvé un coin perdu noyé dans la pluie et la grisaille. Que m'importait que dans le coin, le "grand" Luffy avait vécu et que le "grand" Shanks y avait été un invité récurrent. Ils étaient désormais nourriture à vers de terre, et les vers de terre morts et ce depuis belle lurette. La seule chose que je retenais d'eux restait qu'ils avaient eu le pouvoir de faire changer les choses et qu'ils n'avaient juste rien fait. Se jeter tête baissée à Marine Ford pour sauver son frère, voilà un geste noble que je comprenais. Je pense que j'aurais fait de même. Ah, si, parfaitement. N'étais-je pas là, à l'autre bout du monde, pour répondre à un appel d'un type que j'avais vu peut-être une heure dans toute ma vie? Alors, pour mes frères ou un de mes amis proches.
    Mais toute cette puissance, tout ce débordement de bons sentiments... pour son plaisir, son ambition?

    Remontant le col de mon trench-coat, je descendis la passerelle du navire, mes stilettos clang-clangant sur le métal puis clip-clipant sur la pierre des pavés. Mon regard fendit la foule tout en avertissant quiconque de pénétrer dans mon espace personnel. Finalement, je l'aperçus.
    -  « Tu as pris un coup de vieux, et quiconque t'a dit que le cache oeil était à la mode t'a menti. Bon, on y va? J'ai envie d'une tasse de thé et si je ne me mets pas de la crème immédiatement, je vais finir par te ressembler... »
    Je serrai néanmoins son bras d'un geste fraternel, mon regard adouci contrebalançant ma langue de vipère. Ah ça, j'avais changé depuis notre rencontre de l'an passé.


Dernière édition par Shaïness Raven-Cooper le Jeu 7 Nov 2013 - 23:46, édité 1 fois
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Les Brumes et la Chrysalide [1625 | Raf] Zfegvz11
Musique:

L’assassin lui rendit le salut, avec un sourire non feint. Shaïness. Depuis quand ? South Blue ? Ah ah. C’était bon de revoir un visage amical. Plus acide, plus ferme. Sans oublier qu’elle avait pris du galon la demoiselle. Elle débarquait sur cette terre avec un rang équivalent au sien. Un point sur lequel il attendait, finalement, ses adversaires : deux As pour mener la révolution. Bien qu’il espérait trouver un rang plus adéquat pour la suite, afin de satisfaire sa propre ambition … Pour l’occasion, il avait revêtu un simple costume. Soignant ses blessures, Céline en avait profité pour lui donner une taille dans les cheveux et la barbe, histoire qu’il ressemble plus à un leader qu’à un pouilleux. Elle n’avait pas tord. Il avait remarqué avec surprise que se tempes grisonnaient à foison à présent, arborant une couleur propre à son fruit. Il avait ouïe dire que le précédent détenteur avait été marqué de manière similaire. Pourquoi pas, après tout. Le blanc était la marque de la sagesse. Ou alors, c’était une trace latente de ses blessures, rapidement comblées par son fruit et sa propre capacité de récupération.

« Nécessité oblige. Un petit accrochage avec une veille connaissance. » la gourmanda-t-il, ouvrant le parapluie qu’il lui destinait.

Il ne s’y trompa pas : les premières gouttes commencèrent à tomber pile à cet instant. Les nuages s’amoncelaient depuis sa nuit fatidique au palais. Et ce n’était pas près de terminer. Inconvénient et avantage à la fois. Le ciel s’ouvriraient en même temps que la foule exulterait, à n’en point douter.


« Je connais un petit salon très charmant non loin d’ici. Je pense qu’il serait sage pour moi de ne pas trop traîner à la vue de tout le monde non plus, hé hé. » poursuivit-il, lui faisant signe d’avancer d’un geste élégant de la main.

« Tu as fait bon voyage ? »
badina l’assassin, lui ouvrant la porte de l’échoppe, non sans un sourire amusé.

Il lui avait fait traverser de grandes distances sur un seul mot de sa part, elle ne devait pas autant apprécier la plaisanterie que lui, mais il lui réservait un beau rôle : il ne la laisserait pas s’ennuyer ici. C’était une occasion en or autant pour elle que pour lui, après tout. Et avec la présence d’Uther, c’était l’histoire qui se répétait en fin de compte. Yusuf, Uther … C’était drôle, les traîtres arrivaient toujours pour finir entre les mains de Shaïness. Uther n’aurait malheureusement pas le luxe d’y finir en vie. Il tira une chaise, lui donna la carte puis s’assit en face d’elle. Regard à droite, regard à gauche. Personne ne pourrait les écouter ici. Trop de monde, trop de brouhaha.


« Je suis content de te voir, sincèrement. Et en plus de ça, j’ai grandement besoin de toi. J’ai suivi de loin tes péripéties, jolie promotion. » ricana-t-il, lui servant le thé que le serveur venait d’approcher.

L’assassin déboucha une flasque qu’il tirait de l’intérieur de sa veste puis entreprit d’en vider la moitié du contenu dans son café. Il en proposa à la jeune femme sans grand espoir puis la reboucha et la rangea.


« Trêve de bavardages, je ne vais pas te faire plus perdre ton temps que cela. J’ai besoin de tes talents de négociatrice et de ta connaissance de la machinerie Gouvernementale. Il me faut convaincre la bourgeoisie de nous aider, et limiter les interventions de l’Etat Major. Je préfèrerais cependant t'expliquer le détail de la situation dans un lieu un peu plus intimiste, si possible. » cracha-t-il de but en blanc, juste assez fort pour que seule Shaïness ne l’entende.

Elle savait de quoi il parlait, pas besoin de s’étaler sur la Révolution naissante. N’importe qui aurait pu prendre cela pour une affaire tout autre, mais on n’était jamais trop prudent. Quand bien même Rafael pensait ne pas être écouté. Il savait de quoi lui-même était capable, et de ce fait estimait ce que quelqu’un de plus talentueux que lui pouvait réaliser. Mais Uther avait eu de la chance, il n’était pas plus fort. Il ne pouvait pas l’être. Il ne le serait jamais.


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    -  « Mon voyage a été exécrable, comme tu peux t'en douter. Je suis censée être en vacances, me reposer et guérir mon épaule. Je dois faire attention à mon épaule. »

    Délicatement, je bus mon thé à petites gorgées, dédiant une œillade blasée vers la flasque d'alcool. Du whisky, dans mon Darjeeling ? Barbare, hérétique. Enfin, il fallait de tout pour faire un monde.  
    -  « Il se peut que je te sois utile, dans ce cas, mon cher. Ne serait-ce pour donner un peu de... cachet... à tes entreprises... » Je continuais à boire mon infusion, surveillant les alentours avec mes sens entraînés de CP. Quant je fus certaine que personne ne nous suivait, de loin ou de près, j'indiquai à Raf de me guider. Tout en marchant, j’entrepris de le mettre au courant de mes dernières aventures.

    -  « Du coup, le navire est dans les eaux troubles, mais jamais bien loin. Penses-y... »
    On devrait faire ça plus souvent. Des réunions entre révolutionnaires. Comme les dentistes qui font des congrès, je nous vois bien avec nos petites plaques nominatives, nos petits packages de bienvenue et des conférences sur des sujets aussi divers que l'art de la suggestion, le choix des matières premières pour la confection d'une bombe.  Hum... ça, ça serait des vacances. Surtout si le tout était dans un hôtel de luxe, avec spa.
    Mais ma rêverie fut interrompue lorsque nous arrivâmes. Je déposai mon sac, me défis de mon manteau et rejetai mes cheveux en arrière.

    -  « Bon, et maintenant ? Reprendre Goa, je veux bien, mais après ? Si c'est pour se prendre un buster call dans le troufion dès qu'on se déclare gouvernement révolutionnaire. Bien entendu, tu as prévu un plan sûrement très intelligent pour pallier ce défaut, et tu as besoin de moi. Je suis toute ouïe. Tu as piqué ma curiosité, et pour le moment, je n'ai aucune information à me mettre sous la dent. Commence donc par le début... »


Dernière édition par Shaïness Raven-Cooper le Jeu 7 Nov 2013 - 23:47, édité 1 fois
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L’après. C’était ça le problème. Le pendant, aussi en un sens, mais l’après était la pierre angulaire de l’entreprise de Rafael. Un sourire amusé s’épancha sur ses traits, alors qu’il tirait à lui une chaise dans cette bicoque qui aurait pu passer pour crasseuse. Peu de lumière, une table, des armes cachées. Une planque en bon état, à l’abri des oreilles. Comme il y en avait des dizaines dans toutes les grandes villes du monde. Il s’alluma une nouvelle cigarette, laissant la fraise allumer son œil valide.

« L’après. C’est surtout pour cela que je me suis fortement intéressé à Goa. Autonome, puissant. Orgueilleux. Ce royaume ne réclamera pas l’aide du Gouvernement et celui-ci n’aura pas les mains libres pour oser appliquer le Buster Call. Surtout si le Prince héritier monte sur le trône et leur assure que tout va bien, hé hé. Ou à défaut d’un prince, un noble suffira. Pas n’importe lequel, bien entendu. » lui répondit-il, laissant durer le suspense.

Il tira une nouvelle bouffée, se donnant l’air dramatique. Dans son costume cintré, il pouvait ressembler à un Cipher Pol. Tout comme la délicate Shaïness exsudait sa condition aux yeux de l’assassin. Cocasse en vérité, lorsqu’on savait que les deux individus travaillaient exactement pour la faction opposée.


« Mais tu connais ces mécanismes bien mieux que moi. Tant que je ne vois pas le bout du nez d’un amiral ou d’un chef CP, je ne m’inquièterais pas. Quant au reste : j’ai Grey Terminal prêt à se soulever d’ici la fin de la semaine. Le Roi des ordures, le Valet local, et l’Homme-Chien, le chef des bandits du Terminal, me suivront. La cour royale est en deuil, cherchant l’aîné et la cadette de la famille, ce qui devrait semer le trouble assez longtemps pour les concentrer sur leurs petites affaires internes. » poursuivit-il, sur un ton un peu plus grave.

« Nous avons trois cellules sympathisantes à l’intérieur de la ville et tentons de nouer contact avec la bourgeoisie locale pour leur faire une offre qu’ils ne pourront refuser : aidez-nous ou la révolution vous engloutira. Pour cause, je n’ai donné aucune laisse aux bandits du Grey Terminal, pas tant que je n’aurais pas le soutien de la bourgeoisie. » termina-t-il, en se rasseyant dans son siège.

Voilà un résumé bref et concis de la situation, qui en disait assez long pour comprendre ce que l’assassin allait demander à la jeune femme. Il s’exprimait sans détour, il n’y avait aucun intérêt à lui cacher des informations. Elle avait prouvé son dévouement plus d’une fois. Il écrasa sa cigarette d’un geste négligent.


« C’est sur ce dernier point que j’ai besoin de toi. Je savais dès le départ que les négociations seraient ardues … mais pas à ce point. Un de mes anciens ennemis se trouve ici sur Goa, au service de la royauté : Uther Dol. Je suis certain que lui et ses hommes chercheront à me remettre des bâtons dans les roues d’ici la fin. J’avais gagé sur une réaction rapide du Roi, mais ça dépasse mes espoirs. » reprit-t-il, le ton de sa voix trahissant la rancœur qu’il vouait au Traître.

« Je ne peux approcher la bourgeoisie sans trop attirer l’attention. Les assassins de Vengeance, mon contact local, sont trop impliqués dans la suite du plan pour risquer qu’ils se fassent attraper … et ils n’ont pas ton pareil pour négocier. N’est-ce pas ma chère ? D’autant plus que je dois agir auprès de la flotte royale pour neutraliser cette dernière. Voilà pourquoi je voulais te voir : serais-tu capable d’apporter le soutien de la bourgeoisie à la Révolution, au nom de la Cause ? » fit-il, tirant de l’intérieur de sa veste une liasse de feuilles.

Des noms, des cibles. La toile d’araignée des influences se tissant entre ces hommes qui s’enrichissaient sur le dos des esclaves et des travailleurs d’Edge Town, de Grey Terminal. Des pourris pour la plupart. Des profiteurs pour les autres. Un tableau bien triste de la situation actuelle. La plupart de ces hommes, et femmes, jalousaient les pouvoirs des nobles et auraient pu tout faire pour leur nuire. Une piste ? Assurément … mais il s’agissait là d’une révolution éclair, si on pouvait parler ainsi.


« La Révolution commence dans 3 jours. » conclut-il, un petit sourire en coin.
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    Pour quiconque peu habitué à me voir jouer à la dame, j'aurais littéralement flotté jusqu'à une chaise branlante pour m'y poser comme s'il s'agissait d'un trône ou d'un fauteuil dans le salon littéraire à la mode. Délicatement, je croisai mes chevilles et dédiai à Rafaello une œillade de biche. Je voulais lui tirer un sourire, parce qu'il était déjà assez moche comme ça pour se payer une tête de babouin constipé en plus, et surtout, je voulais qu'il jugeât de ma capacité à m'intégrer dans « la bourgeoisie locale ». Quelque part, je me disais qu'un bourgeois de Goa, c'est comme un bourgeois de West Blue, mais autant s'en assurer avant.

    -  « Parle-moi de ce prince. Jusqu'à quel point lui fais-tu confiance ? Désires-tu réellement le mettre sur le trône ou préfères-tu passer directement la main à ton noble ? Ce « dauphin », prince ou noble... est-il aimé de la population ? De la bourgeoisie ? Ai-je déjà un terrain favorable à ma campagne électorale ? »


    Je toussotai, chassant de la main la fumée qui venait vers moi, mon regard se faisant promesse de mort : si jamais je devais sentir le tabac... il le sentira passer.
    -  « Je peux te confirmer : jusqu'à mon départ, il n'y avait aucun rapport sur Goa. Pour autant que je le sache, les CP et le GM pensent que tout va bien ici... » Mais il n'y avait pas que sa cigarette qui me faisait froncer les sourcils. « Si je peux te donner un conseil... si tu ne veux pas avoir de problème de « clans » après notre prise de pouvoir, évite de mentir aux uns et aux autres. Si tu promets à la bourgeoisie de les garder intact, eux et leurs possessions, autour de cette transition politique, il faudra que tu sois capable de tenir les émeutes loin. Sinon, ils se sentiront floués dans la manœuvre et trahiront ton prince ou ton noble à la première occasion, sous prétexte que son accession au trône est inique ou autre. Donc, quels sont les engagements que je peux proposer à ces bourgeois ? Quelles limites ? Que ne pourras-tu, ou ne voudras-tu pas accepter ou garantir ? »

    Je réfléchissais en même temps que je parlais et parcourais les feuilles données par mon frère de cœur. La situation était très délicate... Le moindre faux pas et tout partait en quenotte...
    -  « Ne peux-tu pas assassiner ce Dol ? Tout en gardant son cadavre, bien entendu. Sa mort renouvellerait l'ardeur royale à te tuer, alors que sa disparition le plongerait dans un abîme de doute, surtout si une rumeur de trahison venait à flotter dans l'air. » Puis je réalisai la portée de cette information. « Attends une seconde. Pourquoi Dol est ici ? Pourquoi travaille-t-il pour le Roi ? Es-tu certain que personne ne se doute de rien ? Parce que la coïncide me semble louche, très louche. »

    Je soupirai. Dans quoi m'étais-je encore engagée ? Ceci dit, si faire une révolution était facile, ça se saurait. Mais il m'apparaissait que j'avais le chic en ce moment pour me retrouver dans les pires imbroglio possibles. Devais-je trouver un réconfort dans cette constance ?

    -  « Tes bourgeois.... tu les veux réellement comme alliés, ou sont-ils juste des pions à manipuler que tu veux détruire plus tard ? Penses-tu qu'on puisse les convaincre réellement de rejoindre le mouvement, pour le bien de la population ? Ne serait-ce pas en leur indiquant que s'ils continuent à se conduire comme des pourris, ils auront tôt ou tard une révolution sur les bras ? Ou sont-ils une cause perdue, rongés par la haine et la cruauté jusqu'à la moelle... Que me conseilles-tu ? De me présenter comme une révo direct ? Ou me faire passer pour l'une d'entre eux ? Parce qu'en trois jours, pour parler à toutes ses personnes... Il n'y aurait pas un moyen de tous les réunir à un même endroit ? Genre, spectacle inédit en représentation unique, sur invitation seulement ? Soit ils acceptent de se ranger à nos côtés, soit ils restent dans cet endroit... pour toujours. Mais on ne le leur dira pas. As-tu les hommes pour les surveiller, quelque soit la méthode choisie ? Parce que si ne serait-ce qu'un d'entre eux court cafter dans l'oreille de la Garde... Hum, ton prince... ne pourrait-il pas se montrer à mes côtés ? Comme ça, et même si le Prince doit mourir, ces Messieurs-Dames pourraient être convaincus de suivre le futur roi qui prendra en considération leurs revendications... Mais quel dommage, les revers de la guerre, et le tout, et le pauvre prince meurt en héros, toute en noblesse et dignité, pendant l'assaut ? »

    Il exagérait. Je n'étais pas Marraine la Bonne Fée non plus. Le temps jouait contre nous, et lui m'imposait un tel délai, pour une telle tâche...

    -  « Hum, sur un sujet parallèle... Gouvernement autonome... Cela veut dire que Goa est représenté en ambassade à Marie-Joie. Si tout ceci réussit, il serait judicieux que le nouveau roi/noble envoie une nouvelle délégation à la capitale. Nous avons besoin d'information sur ce qui se passe dans le conseil des nations et dans les couloirs du palais politique. Sûrement que tu as un fin renard dans tes connaissances, un homme ou une femme qui pourrait être le Consul de Goa. Justement, un noble ou un bourgeois à la fidélité absolue, qui se verrait récompensé par cette nomination. Et même si lui ou elle-même ne sert à rien, glisser dans son escorte les espions nécessaires.  »


Dernière édition par Shaïness Raven-Cooper le Jeu 7 Nov 2013 - 23:48, édité 1 fois
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L’assassin hocha de la tête. Non sans un sourire. Il y avait tant d’inconnues, tant de choses en jeu. Mener une révolution, c’était pas comme planter des choux. Il se passa une main lasse sur le visage, rendant son regard à Shaïness. Tout était dangereux, affaire de mensonges et d’omissions. Lui-même se tenait au centre de sa toile, guettant avec méfiance les vibrations de ses compères arachnéens. Dol jouait sur la même fréquence, quant aux autres … il préférait ne pas se l’imaginer. Agir et réagir, point barre.

« Je ne lui fais pas un brin confiance, c’est pour ça qu’il est le candidat idéal. Il ira pleurer aux bottes du Gouvernement, par peur d’y passer. Mais je n’ai aucune sécurité quand à sa survie. Voilà pourquoi je garde un atout fatal dans ma manche. Sans mauvais jeu de mot. »
fit-il, ricanant à sa propre blague.

Il farfouilla dans les feuilles posées sur la table, sortant l’affichette mettant en avant Vengeance, la double identité assassine de Lord Vendetta.


« J’ai un allié de poids et de confiance, qui fera un parfait intermédiaire. Je ne sais pas encore comment amorcer les choses pour créer un régime suffisamment solide pour perdurer. Les nobles vont probablement tous y passer :je ne pourrais pas juguler la haine du peuple après tout ce que j’ai fait pour l’enflammer. Passer à une monarchie constitutionnelle dans un premier temps, cela me semble plus abordable. »
énonça-t-il, comme si la victoire lui était acquise.

« Dol travaillait pour le Prince Anthony, qui est … entre de bonnes mains. Il a fuit, me laissant avec sa cible, donc j’ignore encore ce qu’il se passe vraiment. Il a voulu nouer une sorte de pacte avec moi, une non agression et s’en est allé. Après avoir expressément cherché et acheté un fruit pour pouvoir me tenir tête. » commença-t-il, montrant son cache-œil.

« Il m’a avoué que la Confrérie n’était que le début, qu’il désirait quelque chose de plus grand et m’a fait garantir de ne pas chercher à reconquérir mes troupes. Tu n’es pas sans savoir que cet homme est un traître à la Confrérie qui a fédéré une partie de mes assassins en tuant les autres. Bref. Je ne sais pas ce qu’il veut, mais il reste une épée de Damoclès : si j’avais eu les moyens de le tuer, je l’aurais déjà fait. Et ça me coûte de le dire. » poursuivit-il, préférant ne pas révéler ce qu’il comptait faire de la promesse qu’il avait faite à Uther par peur des oreilles trop indiscrètes, malgré leurs talents respectifs.

L’assassin soupira, se passant les mains sur le visage. Son esprit était tant accaparé à sa révolution que la haine et la vengeance passaient presque au second plan.


« S’il avait voulu ruiner mes plans, il m’aurait empêché de kidnapper son employeur. Et la seconde fois, il n’aura pas l’effet de surprise. » conclut-il, rassemblant les papiers pour occuper ses mains.

« Bref. Si tu le vois, sauve-toi avant qu’il n’évente ta couverture. Quant à mes bourgeois, j’attends de sa voir qu’en faire pour donner mes consignes aux bandits. J’ai bien peur que le fruit ne soit cependant pas tombé loin de l’arbre de la noblesse. Ils s’enrichissent par l’esclavage et les trafics et très peu d’entre eux n’ont pas traîné dans de sordides affaires. Ceux qui sont cleans sont consignés dans ces papiers. À en voir la taille, ça ne sera pas long. Quant aux autres, autant leur faire passer le message et leur dire qu’ils n’ont pas vraiment le choix.

Tu proposes de les menacer ? Tous autant qu’ils sont ? Hm. Pourquoi pas, mais comment les réunir si rapidement dans un lieu clos ? Une invitation secrète, la plupart se méfieront. Certains viendraient avec hommes et armes. J’ai trop peur de laisser le temps s’étaler, à cause du Gouvernement. Et le fait qu’ils aillent cafter … c’est la raison pour laquelle je n’ai pas voulu m’en occuper trop vite. L’avantage d’avoir ces quelques noms ‘honnêtes’ c’est qu’ils ne seront pas nombreux et plus aisés à surveiller de ce fait. Je pensais plus à une méthode directe pour les approcher. Un genre de ‘vous n’avez pas nui à cette cité’ et on leur demande de se joindre où de se taire à jamais. Brutal, mais peut-être efficace. Enfin, tu connais mes méthodes. Une visite nocturne, quelques mots … et pas besoin de montrer ta frimousse. C’est comme ça que je m’y prendrais, mais tu as certainement des méthodes plus raffinées. »
énonça-t-il d’une traite.

Plus raffinées, peut être pas. Plus efficaces, certainement. Elle avait été formée par les maîtres ès manipulation après tout, et était capable de les prendre à leur propre jeu. Un talent formidable que l’assassin n’était pas sûr de posséder. Homme d’action, de violence et de bataille. Menteur émérite, mais combien de temps aurait-il tenu parmi tous ces clowns sans les mettre à mal ? Ah, en voilà une bonne question.
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    - « Il me semble donc que la première chose à faire serait de s'assurer que ton prince est de notre côté, qu'il acceptera une monarchie constitutionnelle. Ou qu'à défaut, on peut facilement le manipuler. Notamment sur le fait qu'il n'aille pas voir le Gouvernement Mondial. Je les connais, et au moindre signe de gémissement, surtout qu'on parle de Goa, il n'en faudra pas plus pour la Marine débarque avec trois colonels et deux contre-amiraux. »

    Au fur et à mesure qu'il parlait, les stratégies et les mises en scène se superposaient dans mon esprit, certaines s'effaçant quand un élément mettait trop à mal leur crédibilité, d'autres déboulant du fin fond de mon imagination, ou s'affinant. Le nombre de possibilités était proportionnel au nombre d'inconnus, et je me devais de les identifier, de les traiter. Ah, qui aurait cru que le BAN formerait « sa pire ennemie », moi qui retournais contre le Gouvernement l'enseignement prodigué aux bons et loyaux Marines....  

    Mais une information vint perturber mon état de réflexion zen.
    - « Dol a un fruit du Démon ? Lequel ? Que je sache à quoi m'attendre ? »
    Ce qui était hypocrite de ma part, puisque personne, pas même Rafaello ou Raven, était au courant de ma propre ingestion du zoan. Peut-être un jour une lumière atteindrait les quelques neurones encore en activité non sexuelle de Pludbus et qu'il réaliserait ce qu'il s'était passé cette nuit-là... En attendant, je gardais dans ma manche ce secret.
    - « Es-tu certain qu'on ne puisse établir une alliance temporaire, ou une trêve, avec ce type ? Puisqu'il ne semble pas contre toi, autant s'assurer qu'il ne reste pas au milieu. Libre à vous de conclure un accord qui ne tiendrait que pour quelques jours... »
    Et j'acquiesçai au poids du non-dit. Pas besoin d'être télépathe pour savoir ce que Raf ferait à Dol une fois son œuvre parfaite ici. Je ne connaissais que trop bien sa haine envers les traîtres. D'autant que plus Uther avait touché à son « bébé », la Confrérie. Plutôt la détruire de ses propres mains que la laisser tomber dans les magouilles de bas étage. Enfin, ce serait ainsi que réagirait le Raf que je pensais connaître. Non seulement avait-il changé depuis notre dernière – et  première – rencontre, mais aussi devais-je convenir que je ne connaissais pas vraiment l'homme.
    Pourtant, je lui faisais confiance. Il était de ses liens forgés dans la peur et le sang qui valaient tous les serments.



    - « Les bourgeois... tu sais, peut-être sont-ils tout simplement craintifs. La noblesse et la royauté locales ne semblent pas être commodes à vivre. Parfois, être un sycophante détruit tout honneur, mais permet de rester en vie. L'instinct de survie contre la grandeur de l'âme, l'éternel dilemme. Si tu me dis que ça ne faut pas le coup, je te crois. Mais prends cette décision en toute connaissance de cause. Je suis naïve, je veux croire en l'Homme. Et puis, moins il y aura de sang qui coule, moins il y aura de risque de contestation par après.

    Les capturer, les enfermer et les faire subir un procès pourrait aussi être une solution envisageable. Pour montrer que ton Lord ou ton Prince respectent le sens de la Justice, et non l’exécution sommaire souvent menée par une main vengeresse. Et plutôt que d'avoir des proches abritant du ressentiment pour la mort des leurs, tu auras des proches reconnaissants d'avoir eu leur « honneur » prouvé, et prêts à tout pour ne plus revivre ça. Charge au prochain dirigeant de surveiller que la reconnaissance ne cache pas de complot, ceci dit. »


    S'il y avait une chose que j'avais compris, c'était que le recours à la force ne devait être qu'en cas d'ultime nécessité. A quoi bon aplatir une orange quand on peut la triturer pendant des minutes entières, et en tirer le jus, jusqu'à la dernière goutte?
    Etre révolutionnaire, ce n'était pas mettre le monde à feu et à sang. C'était construire un monde meilleur. Or commencer par détruire, ça revenait à manquer de cohérence dans son action.
    Etre révolutionnaire, c'était viser le futur, toujours le futur, le présent n'étant qu'un moyen d'y arriver. Raf semblait ne pas arriver à penser en quatre dimensions, à imaginer les conséquences et les agissements à venir. Mais après tout, n'avait-il pas l'âme du guerrier, et moi de l'espion ? A l'un le présent des guerres, à la seconde les ombres du futur.

    - « Soit, j'irai parler à ces contacts plus éclairés. Mais tu te trompes. Une voix dans la nuit, ça revient à les menacer. Une menace sans visage, sans rien, est encore plus angoissante que quelques vérités bien présentées et la proposition honnête d'un échappatoire. »
    Je souris, avec tristesse mais aussi un zeste d'autosuffisance. Ah, manipulation, manipulation, ma chère amie. Ma pire ennemie aussi, capable comme je l'étais à me perdre toute seule dans mes propres masques et rôles...

    - « On pourrait aussi imaginer une invitation de ton « ami » le Lord. Une sorte de récompense du meilleur citoyen, remis en main propre par ton prince... Quel parvenu ou nouveau-riche pourrait résister à ce signe de « reconnaissance » de la haute? N'oublie jamais une chose : les bourgeois critiquent les nobles, mais rêvent d'être l'un des leurs. On ne pourra pas les flatter en disant « vous êtes dignes de la noblesse », tout en leur martelant la tête que « la noblesse, ils ont tous été finis à la pisse d'âne et bercé trop près du mur. » On peut les appâter, mais il faut leur donner ce qu'ils veulent s'ils mordent. Ou alors, se dire qu'on les tire sur la barque et on les finit d'un bon coup de maillet. »
    Pour un peu, je me ferais peur. En savoir aussi sur la psychologie des groupes et « voir » distinctement surs quels boutons appuyer. A croire que le temps et les distances n'y faisaient rien. Dans ce monde, un être anobli par les actions d'un obscure ancêtre devait-il forcément être mauvais, cruel, et tirer son plaisir de l'exploitation d'autrui ? Faudrait-il que toujours, cette distinction non méritée si ce n'était le hasard d'être né de ces parents plus que d'autres, éveillât la convoitise de ceux qui avaient les mêmes richesses ? Ne pouvaient-ils pas rêver de devenir autre chose ? N'y avait-il pas quelqu'un ou quelque chose qui pouvait inverser cette fatalité ?

    -  « Me présenter à eux à visage découvert.... Voyons voir ? Tu connais l'île de Herdonien ? Une petite principauté sur les eaux de... North Blue. Un point de terre minuscule. Non ? Tu es sûr ? C'est normal. Vois-tu, Herdonien a été entièrement ravagée par une guerre civile menée par des esclaves.

    Je suis la Marquise de Nitylis. Enfin, l'ex Marquise, qui a donc tout perdu, et je viens chez ton noble, un obscur cousin, chercher asile, et j'en profite pour mettre en garde la caste dominante de Goa des dangers que font danser sur leur tête les dévoiements des nobles. Oui, j'ai compris à quel point mes semblables avaient erré loin dans la forêt et j'implorerai leur pardon au nom des nobles de Goa, leur demandant de m’absoudre de mes pêchés, en m'aidant à faire ce que j'aurais dû faire, quand j'aurai pu le faire.

    Ou alors, je suis Miss Nitylis, fille d'un riche armateur qui ne doit son salut qu'à un voyage au moment de cette tragédie. Et Mère est morte de chagrin, me laissant seule, ne devant ma survie qu'à la générosité d'un commanditaire de feu mon père. Ton Lord machin. Et ça sera en tant qu'égale que je les exhorterai à faire preuve de toute la grandeur d'âme, du courage, qu'ils se doivent de posséder, en tant que leader de Goa, eux qui ont mérité leur place, à la sueur de leur front, en menant la révolte, en s'imposant auprès des masses et des esclaves comme... des héros...

    Qu'en penses-tu ? Qui serait mieux ? Bien entendu, Miss ou Marquise, je disparaîtrai, les laissant profiter de leur victoire... Je ne serais que l'âtre  de leur feu ardent, le graal de leur foi. S'il faut que je m'éteigne de joie, mais minée par le chagrin, par la suite, s'il faut faire de « moi » un symbole... Allez-y. J'avoue qu'une statue à mon effigie, ça me plairait bien...  »


    Oui, j'avais choisi un ensemble d'options. Tout dépendait des derniers choix de Raf, et des indications qu'il pourrait me fournir. Ça, et le hasard. Cette fois, je serais prudente : j'avais un plan, dans les grandes masses. Et je m'adapterai au fur et à mesure et tant pis si tout va de travers.


Dernière édition par Shaïness Raven-Cooper le Jeu 7 Nov 2013 - 23:50, édité 1 fois
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« Une sorte de fruit qui le transforme en cyborg. Capable de générer des armes à l’envie, les substituant à son corps. D’autant plus qu’il maîtrise le haki de l’armement. Et certainement le mantra, comme moi. » répliqua-t-il, mettant sur table sa nouvelle aptitude.

« J’ai déjà établi une trêve, je ne suis pas vindicatif au point de condamner un peuple par mon propre égoïsme. Mais je ne lui fais pas confiance. » trancha-t-il, tout en se faisant craquer les phalanges.

Shaïness semblait penser qu’il n’avait pas envisagé l’avenir, comme s’il pensait juste mener sa révolution et s’en aller après. La vérité était que c’était aller trop loin, même pour lui. Les possibilités s’enchevêtraient à lui en donner la migraine, et il les voyait toutes ou presque. Pourquoi aurait-il agi dans un laps de temps aussi rapide ? Certainement parce qu’il se savait traqué et que la force de Goa ne permettrait pas de faire face bien longtemps sans l’effet de surprise.  En clair, beaucoup de chemins pour encore plus de souffrance. Et, à terme, une libération de ce peuple martyrisé. Quant à savoir comment cela se terminerait, il n’y avait qu’une seule chose de certaine : le sang coulerait.


« Craintifs … Ils peuvent l’être, bien que l’argent achète à peu près tout ici. J’ai grandi pas très loin, je le sais. Tout comme j’ai pu goûter à la haine qui ronge le cœur des esclaves et des bandits. Si je ne trouve pas un moyen de juguler cela, ils passeront tout par le fil de l’épée. Sans exception. Alors ce n’est pas une menace à mes yeux, juste une promesse de salut pour la majorité d’entre eux. Autrefois, je tuais sur le constat de preuves. Aujourd’hui, je tue par association hasardeuse. Ces hommes n’ont rien fait pour améliorer les choses. Sauf ceux sur qui mes hommes ont enquêté. » fit-il, en tapant du doigt sur la pile de papiers.

« Et encore, c’est le moins pire. Le moindre mal. Si je m’écoutais, je ne leur laisserai aucune chance. Pas plus qu’on nous en a laissé. Mais ce serait une affaire de vengeance, de récidive. Et c’est à cent lieues de ce qu’il faudrait faire pour sauver ce peuple. Par contre, l’invitation … Cela permettrait de mettre en lumière le fait que le noble en question nous a aidé dès le départ. Bonne chose aux yeux du Gouvernement ? Cela pourrait passer pour une querelle de pouvoir … je ne sais pas. L’EMM en profiterait, comme d’habitude. » poursuivit-il, autant pour lui-même que pour Shaïness.

Il y avait des nobles progressistes à Goa, tout comme des bourgeois qui soutenaient discrètement le peuple. Ceux-là étaient déjà en lien avec le Roi des ordures, certainement. Mais de là à ce qu’ils se proclament révolutionnaires … il y avait tout un monde. L’assassin réfléchissait trop abruptement pour leur laisser l’ombre d’une chance, cependant. La touche charme, si on pouvait dire, de Shaïness était plus que bienvenue mais il n’était pas un adepte de ce genre de manipulations. Un assassin, c’était bien plus simple comme métier. Tirer les cordes, faire porter le chapeau. En somme, affaires de manipulations et de vices. Retourner les armes des adversaires contre eux, non pas les amadouer.


« Miss ou marquise … Trois jours suffiront ? Parce que dans la noblesse, la situation est tendue : la famille royale est en deuil comme jamais. Mon allié est certainement menacé et préfèrera faire profil bas un temps. Chez les bourgeois, ça sera autant compliqué : grâce à moi ils ont tous peur. Les travailleurs et les esclaves se rendent compte que les enfoirés qui les gouvernent ne sont pas intouchables. Forcément, ça secoue un peu partout dans la ville, en ce moment. C’est le chaos, et tout est étrangement calme. En deuil, apeuré. La tempête gronde. Je ne sais pas si les appâter marcherait avec un tel climat. Lorsque je parle d’ombre et de voix, je ne dis pas forcément menaces : leur dire qu’ils ont réussi à attirer notre attention et qu’ils peuvent survivre car ils se sont bien comportés. Qu’ils peuvent nous aider à faire de Goa un monde meilleur et que nous pouvons leur garantir de survivre à cette révolution : je ne vois pas pourquoi ils se sentiraient menacés. Certes, le choix sera limité et on leur forcera un peu la main. Je doute qu’ils refusent en sachant ce qu’il vient de se passer.

Mais si tu penses mener à bien ton plan en à peine trois jours … pourquoi pas. Je doute que mon allié accord crédit à ton rôle cependant, trop occupé à maquiller tous ses liens avec moi, pour ne pas attirer le courroux du Roi. »
fit l’assassin, avec une moue un peu sceptique.

« Mais la violence et la peur sont mes armes plus que les tiennes. Ce pourquoi je reconnais mon inaptitude à mener ce genre de raisonnement et de plan. La touche charme, comme on dit. Hé hé. » ricana l’assassin, souriant à Shaïness.
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J'eus un sifflement aspiré à la description de cet Uther Dol. Oui, ça n'avait pas l'air d'être un petit joueur, et si Raf, alors qu'il possédait autant de puissance, se disait incapable de lui faire face, ce n'était certainement pas moi qui allait faire le poids. Mais je ne pus m'empêcher de sourire en entendant parler de mantra. Apparemment, je n'étais pas la seule à avoir développé cette capacité. Bon, pour moi, c'était encore un « truc » bien flou. Depuis la bataille de Bois-Noir, je n'avais plus eu ces « flash ».... il fallait dire que l'occasion ne s'était pas présentée...
- « Il faudra que cette histoire se règle, et au plus vite. Si ce type est au courant de tes plans, qui te dit qu'il n'est pas déjà en train de faire voile vers la caserne Marine la plus proche ? Je n'ai pas confiance en sa soit-disante trêve. Est-il surveillé ? Connais-tu sa position et ses gestes ? »
Je ne cherchais pas à culpabiliser Rafaelo, mais bien à renforcer sa détermination à régler ce problème. Il n'y avait pas que le départ comme moyen de communiquer. Et si Dol avait un den-den ? Pour avoir voyagé sur l'Exodus, je savais à quel point le Gouvernement avait les moyens de répondre rapidement à une menace.

Mais voilà que mon compagnon s'enflammait. Naître et grandir sur Goa. Voilà bien un destin bien peu enviable. J'avais eu une enfance dorée, je le savais maintenant. Comment avais-je réussi à me défaire de mes liens et de mon bandeau, de l'hypnotique cécité provoquée par les rubans et les dorures. Mystère.
Lui continuait à déverser ses craintes et ses certitudes, et quelque part, je ressentis toute son angoisse.
- « Oh la, oh la. Paix mon ami. Ce n'est pas comme ça que le commandant en chef d'une révolution doit se conduire. Chasse-moi donc toute cette fumée et ces mauvaises pensées. » Encore une fois, j'agitai la main. « S'il y a bien une chose que j'ai dû apprendre, c'est bien qu'il ne sert à rien de prévoir. Et puisqu'on ne peut pas prévoir, ça ne sert à rien de s'angoisser. » Je lui serai la main en signe de réconfort. « Tu as déjà la population derrière toi. Tu ne peux que réussir. Même si cette tentative échoue, la graine est plantée, et elle fleurira, même dans deux ans, douze ans, vingt ans. Même si tous devaient tomber dans trois jours, au moins seront-ils délivrés de leur condition. Et imagine l'embarras de ta noblesse s'il se retrouvaient seuls avec des corps et des débris, et personne d'autre que eux pour s'en occuper. C'est terrible à dire, mais mieux vaut la mort que cette vie. »

Ce fut un sourire froid, à la fois tristesse et triomphe caustique, qui accompagna mon geste. Nous savions tous les deux que notre idéal passerait forcément par des pertes. Lui avait déjà souffert dans sa chair, et son âme. Moi ? J'avais tendance à dire que je n'avais plus d'âme. A peine l'écho d'une. Une mémoire fragmentaire, avant que tout ne fut que doute et douleur.
- « Tes élus de bourgeois, je m'en occuperai. Fais-moi confiance, ils seront là à tes côtés quand le jour viendra. Peut-être même te surprendront-ils. Pour le reste, je te laisse décider. Si tu penses qu'ils sont incapables de changer, ou qu'ils posent un trop grosse risque, alors oui, tuez-les, jugez-les après, au nom des crimes commis. Faire d'eux un symbole de justice, en épargnant les plus faibles ou les moins coupables. Tu es le présent, je suis l'avenir, tu es la lame qui tranche, je suis le crochet qui tournicote : nous ne savons rien de demain, si ce n'est que ça sera douloureux et que nous mourrons un jour. Tu es l'épicurien, et je suis ce salopard d'espoir, qui fait rêver et qui déçoit tellement souvent. »

Tout en parlant, je m'étais levée et profitant de l'intimité d'une porte entrebâillée, je m'étais changée en une tenue plus appropriée. Plus « confortables » plus le terrain, mes habits n'en avaient pas moins cette griffe que donne un bon couturier. Si mes bottes avaient toujours un talon, elles me prenaient bien la cheville, m'assurant une stabilité à toute épreuve. Pour parfaire la touche, je ramassais mes cheveux en une lourde natte pour la coiffer en chignon. Il y avait encore de nombreuses traces de la teinture noire que j'avais dû subir.

Prise d'une soudaine inspiration, je le regardai et fis ce que je me pensais pas capable de faire :
- « Amène-moi à la première adresse, et fais-toi remplacer après. Je n'ai pas envie d'être vue. »
Et là, je me transformai en papillon, un petit papillon tout ce qu'il y avait de plus banal, si ce n'était sa couleur rose assez inédite. Je voletai jusqu'à son épaule et je m'y posai.
Avait-il conscience que je voulais de lui avouer un secret jusqu'alors gardé jalousement ? Que de ce fait, je m'en remettais à sa loyauté, que nous étions à partir de ce moment réellement frère et sœur de cœur ? Je n'en sus rien.


Il marcha dans la pluie fine et je filai me protéger dans les replis de sa capuche. Lorsque nous arrivâmes à destination, il me chuchota le nom de ma cible, et je m'envolai. Avec cette pluie, la plupart des fenêtres étaient fermées, sauf celles entrouvertes pour l'aération nécessaire, pour chasser l'humidité qui formait de la condensation sur les vitres. Plongeant d'ombre en ombre, faisant attention aux toiles d'araignées et aux regards des servantes paresseuses qui contemplaient les moulures plus que leur ouvrage, je finis par repérer Monsieur de Janvillier, tisserand de son état. Il était enfermé dans son bureau, et à ma plus grande frustration, la porte de bois lourd était hermétique. Hermétique au passage de l'air comme des sons, et me voilà bloquée dans le couloir.
Je pris mon mal en patience. M'installant sur le haut d'un bibelot quelconque accroché au mur, je m'occupai en passant en revue toutes les informations à ma disposition... tout en devant résister à l'attrait que le foyer où crépitait une belle flambée constituait. Plusieurs fois, je me pris à voleter vers le linteau de pierre, et plusieurs fois, je me repris ; à un moment donné, un bambin aussi joufflu que quelconque m'aperçut et babilla en me montrant du doigt. Sa nurse le reprit – bien fait, le morveux – et j'allai squatter une statue du plus immonde quelque temps.
Enfin, la porte s'ouvrit et sortit un homme. Je glissai sur le courant d'air et me voilà dans la place forte, le cœur sacré...

Monsieur de Janvillier était assis à son bureau et contemplait l'ambré de sa boisson. Devant lui, des livres de comptes abondamment raturés et modifiés. Si je fus intriguée pour le coup, je me repris et décidai que ce moment en valait bien un autre. Me faufilant derrière lui, je repris ma forme humaine, pour immédiatement plaquer une main sur sa bouche.
- « Ne criez pas, je ne vous veux aucun mal. Sinon, vous seriez déjà mort. Je dois vous parler. Juste vous parler. » Pris totalement au dépourvu, il acquiesça. Après tout, il ne sentait aucune lame ou menace immédiate à son encontre, et je sus, avec une certitude absolue, que j'étais tranquille de ce côté. « Bien. »
Je fis le tour de son bureau, m'asseyant sans qu'il m'en priât, mais avec toute l'élégance dont je pouvais faire preuve.
- « Veuillez me pardonner cette intrusion, mais je ne pouvais être vue. J'espère que vous comprendrez, tout comme vous comprendrez que je ne me présente pas. Mais vous savez déjà plus ou moins qui je suis. J'étais comme vous, Monsieur de Janvillier, pensant que le monde m'appartenait parce que j'avais de l'argent – ou dans mon cas, que ma famille en avait. Je pensais qu'il n'y avait que par l'accumulation des richesses que nous ne pouvions que grandir ou nous distinguer.

Vous comme moi savez à quel point c'est faux, et à quel point cette route peut-être mortelle. L'argent aide à faire le bonheur, sans nul doute, mais il n'aide pas à faire face à son miroir et voir l'image que notre âme nous renvoie. Vous savez de quoi je parle. Ces doutes qui nous font veiller tard, ce dégoût de soi-même, en s'en arracher la peau. »


Il ne disait rien, se contentant de déglutir difficilement, et parfois de porter une main tremblante à son front.
- « Vous avez fait un choix, il n'y a pas longtemps. Je suis le résultat de ce choix, et je viens vous dire que vous avez fait le bon choix. Je suis ici pour vous convaincre de continuer avec nous, bien que la pente à venir semble dure, tortueuse à l'aplomb d'un a-pic. Mais pensez à l'autre côté, à quel point tout sera meilleur, quand vous aurez quitté la vallée de l'ombre pour le plateau des printemps inespéré.

Je viens vous dire que vous avez été un meneur, un des premiers à ouvrir les yeux.
Je viens aussi vous dire que nous sommes avec vous, pour vous aider à continuer à avancer. Demain, ce royaume aura besoin d'hommes comme vous, capables de prendre position en dépit de ce que la peur peut dicter, quelqu'un qui écoute le meilleur sens, et pas simplement le bon sens.
Vous pouvez être fier de ce que vous avez fait.

Et nous vous demandons d'être là une fois de plus. De ne pas abandonner face à la difficulté, de ne pas abandonner en pensant que votre part est faite. Demain VOUS appartient, et c'est l'occasion unique pour VOUS de faire cette terre ce que VOUS voulez. Comment voulez-vous que vos petits-enfants et arrière-petit-enfants se souviennent de vous ? Comme celui qui a participé et même mené, la construction d'un monde considérablement meilleur, ou comme celui qui a suivi la foule, ou pire, celui qui est arrivé en retard ? »


Dernière édition par Shaïness Raven-Cooper le Jeu 7 Nov 2013 - 23:51, édité 1 fois
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"Parce que ce n'est que le début pour lui ... qu'un moyen pour arriver à ses fins : nous nous rencontrerons certainement avant la fin. L'un de nous deux ira nourrir les vers." trancha l'assassin, simplement, purement.

Que dire de plus ? Shaïness ne lui apprenait rien qu'il ne savait déjà. Rien qu'il ne redoutait déjà. Mais au moins il pouvait lui confier en toute liberté ses doutes. C'était ... libérateur. Un poids qui s'envolait de ses épaules, à tel point qu'il se risqua à un sourire.


"Il est criminel avant tout, et du chemin se fera avant que la Marine ne lui fasse confiance. Et même si il les prévient, nous agirons assez vite pour qu'ils ne puissent bouger à temps. Ces deux aspects jouent en notre faveur sur ce point. S'il est aussi doué que je le crois, je ne le trouverais pas en trois jours." grommela Rafaelo, se passant la main sur le menton.

Pour le reste, ce fut comme un baume sur le coeur. Toujours avec ce petit air taquin qui l'irritait et l'amusait à la fois. Il en savait suffisamment sur elle pour ne pas s'en offusquer. Tout comme elle en savait assez sur lui. Bien qu'il n'ait pas grand chose à cacher au final, autre que ses machinations sordides qui trônaient au fond de son crâne. Le moindre mal, encore et toujours. Puis les choses entrèrent directement dans leur phase critique : rapide et efficace comme il les aimait. Ils se levèrent, quittèrent la planque sur un dernier évènement toutefois. Papillon. Hé hé. Non, il ne savait pas tout d'elle à vrai dire. Il lui adressa un regard lourd de sens, accompagné d'un petit ricanement amusé.


"Tu voulais savoir à quoi t'attendre avec Uther, hein ... hé hé. M'est avis que c'est plutôt lui qui devrait se méfier." la railla-t-il en l'accueillant sur son épaule.

Joignant le geste à la parole, il revêtit sa tenue d'un simple geste de la main, contenue dans une fiole comme à son habitude. Ainsi, ils étaient tous deux dans leur rôle jusqu'au bout des ongles. Les pouvoirs octroyés par les fruits du démon étaient choses bien mystérieuses. Et tout autant utiles.


"Nous y voilà." lâcha-t-il, avant de la laisser à son office, se fondant dans les ombres.

~~~

« De … de quoi parlez-vous ? » fit l’homme, tentant de cacher qu’il tremblait face à une femme.

Il porta son verre à sa bouche, pensa au poison, se demanda si ce n’était pas mieux s’il y en avait puis laissa trop de pensées obscurcir son jugement.


« L’or ? Mon argent … prenez tout ce qu’il y a ici ! Je vous en prie, ne me tuez pas … ma famille a besoin de moi ! » supplia-t-il, posant son verre sur son bureau.

La famille, le bouclier habituel des lâches. Sauf que là, il y avait dans sa façon de bouger une chose étrange. Notamment sa façon de se mettre entre la porte et la jeune femme.


« Ou tuez moi, mais laissez les en paix. » poursuivit-il, avant de se rendre compte qu’il se méprenait du tout au tout.

Il s’arrêta quelques secondes, la dévisagea puis laissa le temps aux informations de se faire un chemin dans son cerveau apeuré. La précipitation, la peur. Mauvais choix, bon choix il n’y comprenait pas grand-chose. Il se contentait de camoufler des trajets d’esclaves vers leur liberté, et redoutait un jour qu’on apprenne que sa femme en fut une autrefois. Un riche marchand d’art tombant amoureux d’une esclave, histoire ridicule qui faillit lui coûter bien plus que la vie. Et qui lui vouait une dette envers le Roi des ordures, dette qu'il honorait en sauvant quelques lots d'esclaves de temps à autre.


« Vous êtes une révolutionnaire, c’est ça ? Vous travaillez avec ceux qui ont tué le prince et la princesse. Savez-vous combien d’argent a été placé sur votre tête, sur la moindre information quant à votre leader ? » la menaça-t-il en pointant son doigt vers elle.

Il reprenait couleur et contenance. Ce n’était pas une menace, pas en sa bouche. Elle le savait de toute manière, elle n’était pas là par hasard. Il était un altruiste, et il n’avait de ce fait pas sa place à Goa. Du moins, pas aux yeux de tout le monde. La Révolution ne serait pas venu le voir sans raison, et s’il avait été assez intelligent pour se masquer aux yeux de tous quant à sa femme, il l’était tout autant pour comprendre que cette femme était venu le recruter. Ou du moins cela y ressemblait.


« Je ne suis en rien un meneur, je ne suis qu’un homme qui essaie de faire ce qui est le mieux. Ma seule qualité est d’avoir de quoi graisser les pattes, rien de plus. Vos discours moralisateurs ne m’intéressent pas, je ne me saignerais pas aux quatre vents pour vos idéaux : je l’ai déjà dit au Roi des ordures. » continua-t-il, baissant tout de même la voix pour n’alerter personne.

Croyait-elle que personne n’avait déjà tenté de le recruter ? Le Roi des ordures avait déjà tenté de … Oh. Le Roi, oui mais s’il ne s’agissait pas de lui ? Un doute s’insinua dans son esprit. Les rumeurs sur la présence d’un As révolutionnaire, les rumeurs sur le fait qu’il était le meurtrier qui avait tué le prince et la princesse. Et si tout cela était vrai ? Si les rumeurs se confirmaient, que ferait-il à la place des révolutionnaires ? Trouver des alliés, se préparer à la révolution ? Rien que l’idée l’en fit frémir. La révolution, ici à Goa ? C’était une chose insensée, le Roi des ordures y travaillait depuis trop longtemps et tous le savaient.


« Vous n’êtes pas sérieuse. Vous voulez mener la révolution à Goa ? La mort des … ce n’était que le début, c’est ça ? Et maintenant, quoi ? Hein ? C’est voué à l’échec, je ne mettrais pas ma famille en danger pour si peu, vous n’imaginez pas le châtiment que nous réserveront les nobles si jamais … » fit-il, ne terminant pas sa phrase, ce qui était déjà assez éloquent.
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    - « Sans la morale, nous serions des bêtes, Monsieur de Janvillier. Sans la morale, nous serions comme le roi actuel, comme les propriétaires des arènes de mises à mort. Je ne vous parle pas d’idéaux, je ne parle pas de monde parfait ». répliquai-je d'un ton doux. « Idéalement, nous vivrions tous dans l'amour et la bonne humeur, et pas dans cette crasse misérable où certains profitent du sang et de la mort de leurs semblables. »

    Je regardais autour de moi, comme appréciant le bon goût subtile avec un reste d'ostentatoire du bureau. Bien entendu, je voulais le piquer au vif, l'insulter en laissant entendre qu'il devrait avoir honte d'être si bien logé et nourri trois voire quatre fois par jour, alors qu'à moins d'un kilomètre de là, ses semblables mourraient.
    - « La révolution aura lieu, que vous le vouliez ou non. C'est dans la nature de l'homme que de vouloir redresser le dos et être maître de son destin. Vous n'avez aucune honte face à votre réussite, et c'est bien normal : vous avez travaillé dur pour avoir cette maison, offrir ce confort aux vôtres. Vous ne vous êtes jamais posé la question de savoir si c'était bien ou mal, car pour vous, c'était quelque chose de naturel. Et c'est exactement la même chose pour toutes ces personnes. Elles ne veulent pas plus, pas moins que vous. Après, la vie, la chance et l'intelligence sépareront ceux qui font fortune d'argent et de bonheur comme vous, de ceux qui se contentent de vivoter, mais uniquement parce qu'ils l'ont choisi. »

    Je croisai les jambes, posai les coudes sur le bout des accoudoirs pour venir croiser mes mains devant moi, sur mon ventre.
    - « La révolution aura lieu, et vous, votre famille, votre vie, seront pris entre les combats. Vous pouvez bien entendu ne rien faire, et vous calfeutrer chez vous. C'est une possibilité, et c'est bien pour cela que je suis ici. Eu égard à votre aide vis à vis de vos malheureux cocitoyens, vous avez le droit de savoir et de vous préparer. Vous nous avez aidé, et c'est à notre tour de vous protéger. En guise de remerciements, peut-être... » Je lui souris, gentiment... avant de reprendre, aussi sérieuse que la hache du bourreau. « Bien entendu, il est hors de question que cet avertissement sorte des murs de cette maison. Chacun doit faire face aux conséquences de ces actions. »

    Était-ce une menace ? Totalement. S'il venait à l'esprit de ce travailleur éclairé de prévenir ses amis, son frère ou tout autre personne extérieure, les choses tourneraient courts, et il le savait.
    - « Quant à rejoindre ou non « la cause »... Vous et moi savons déjà que vous l'avez déjà rejointe. A partir du moment où vous avez compris que l'esclavage était 'mal', vous êtes devenu un ennemi public pour ces vermisseaux qui se nomment roi, reine et cour. Mais vous étiez seul, et vous ne pouviez pas faire autrement... pas plus... mais pas moins. Vous avez toujours aidé dès que vous le pouviez. Penser à sa sécurité, ce n'est pas être égoïste ou peureux. C'est la sagesse même. A quoi sert un héros qui charge seul face aux hordes ennemis ? A quoi sert un cadavre se balançant au bout d'une corde, en exemple au reste du « monde » ? A rien. Mieux vaut faire plusieurs petits gestes pendant des années, qu'un geste symbolique sur dix minutes. Autant ne rien faire alors... C'est que nous, nous chérissons la vie. C'est bien pour ça que nous nous battons.

    Mais vous n'êtes plus seul. Nous sommes là, et nous allons faire plus que vous ne l'auriez jamais imaginé.
    Avec nous, à partir de maintenant, vous avez la possibilité de finir ce que vous avez commencé, de mettre fin à ces peurs qui vous tordent les entrailles, de pouvoir enfin laisser vos enfants jouer dans la rue sans peur qu'ils commettent un impair et ne se retrouvent entre les mains d'un noble... »


    Il m'avait sans le vouloir donner la clé pour le persuader, m'avait indiquer les boutons sur lesquels pousser : sa famille. Cet homme était profondément attaché aux siens, une attitude louable, mais qui allait lui desservir. Ou plutôt le transcender, l'amener à voir, à croire, à faire.
    Avais-je honte de me servir d'innocents gamins ou épouse pour assurer son concours ? Aucunement. Honte était un mot que j'avais évacué de ma vie depuis déjà quelques années. De plus, je ne voyais pas mon action comme étant « mauvaise ». Je ne cherchais qu'à allumer une étincelle, ou si elle existait déjà, l'attiser pour en faire une belle torche, claire et flamboyante, pour purifier l'air et éclairer les ténèbres.

    - « Imaginez l'espace d'un instant un retour de fortune, un investissement malheureux ou... que sais-je, l'incendie de vos entrepôts.... Les accidents arrivent, mais ils sont rares. Enfin, naturellement rares. Mais dans un royaume gouverné par le bien-être de quelques uns... Pour eux, et rien que pour eux.
    Imaginez juste un rival jaloux qui négocie dans l'ombre une fausse accusation à votre encontre. Imaginez-vous ruiné, incapable de payer pour votre maison, votre nourriture.
    Imaginez vos enfants vendus au marché aux esclaves en guise de paiement. Imaginez-les aux mains d'une de ces familles qui dont vous connaissez les... mœurs, dirons-nous ? Vous connaissez certainement les rumeurs. Mais il ne s'agit pas de rumeurs, enfin, pas toutes. Imaginez vos enfants dans les chantiers ou dans les mines, ou envoyés sur une île, peut-être même sur Grande Line ?

    Pire encore, et beaucoup plus probable.... Imaginez un mot glissé dans l'oreille d'un noble... Imaginez un noble que vous contrariez, parce que vous n'avez pas un objet qu'il recherche, parce que la tête de votre femme ne lui plaît pas, ou au contraire, qu'elle lui plaît de trop. Parce que vos enfants ont éternué en sa présence, depuis l'autre bout de la place de la ville.
    Encore plus probable... Imaginez qu'un noble décide de vous tuer, là, comme ça, pour nulle autre raison qu'il en avait envie. Imaginez que son envie, c'est de voir la cervelle de vos petits repeindre les pavés. Vous savez parfaitement qu'ils le peuvent.

    Il va arriver, ce drame. Ne pensez pas que votre destin sera toujours doré. Au contraire, plus il est doré, plus il attire l'attention et la convoitise. Et vous avez été particulièrement bien doté ces derniers temps. Tôt ou tard, vous aurez à faire face aux conséquences de votre succès.

    Qu'êtes-vous prêt à faire pour éviter ce drame ?
    Fuir ? Prier ? Ou peut-être décider que vous en avez assez d'endurer, de vous sentir honteux parce que vous avez durement travaillé, ou peureux parce que votre persévérance va faire des jaloux ? Décider qu'il est temps de rendre à Goa ses lettres de noblesse... la vraie noblesse.
    Celle dont vous avez fait preuve tant de fois déjà.

    Nous ne voulons pas faire couler le sang inutilement, mais ça serait mentir de dire qu'il est inutile de le faire couler à Goa. Nous allons libérer Goa, par la force des bras puisque nos discours n'ont jamais réussi. Vous avez le choix : être parmi nous, pour ne pas avoir de remord si nous devions échouer, en vous disant que vous étiez peut-être le millième bras dont nous avions besoin. Être parmi ceux qui s'assureront que cette action débouchera sur une réelle époque de bonté et de paix. Ou vous pouvez laisser les choses se faire, courber la tête, détourner le regard et tenter d'apaiser votre regret d'avoir été lâche, en continuant à aider quelques individus. Continuer à être un chien pouilleux à la solde de maîtres iniques... »

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"Quelle voix aies-je au chapitre, vraiment ? Le couteau sous la gorge, vos paroles fleuries. Soit je lutte pour ma famille, soit je fini écrasé avec eux sous la marche implacable de votre révolution. Et même là, je risque ma vie. La meilleure option serait la fuite, vous le savez. Et encore une fois, rien ne me garantie que vous me laisserez faire. Vous faites semblant de me laisser le choix, mademoiselle, mais il n'en est rien.

Il s'agit là du même choix que celui qui étreignait mon quotidien : la peur. De la mort, la mienne et celle de ma famille. Vous voulez me plier par la peur ? Vous avez trouvé le levier pour me faire rejoindre votre cause ? Parlez à tous les non-nobles de cette ville, ils vous diront la même chose : ces privilèges devraient être abolis. Mais de là à renier la raison de leur richesse ... non. Ils ne voudront jamais. Je suis né ici, j'ai fait honneur à mon père et au père de mon père. J'ai conservé le nom, je l'ai déshonoré. Tout cela à la fois font que Goa n'est qu'une épée de Damoclès suspendue au dessus la tête de chacun Et ne vous y trompez pas, vous en êtes autant le tranchant que la noblesse."


Bien que Monsieur de Janvillier s'essayait à contrer chacun des points énoncés, et encore, il était évident qu'il ne croyait pas vraiment à tout ce qu'il disait. Du moins qu'il répétait là quelque chose. Il prouvait par là qu'il n'était pas seul à penser ainsi, à vouloir à tout prix éviter le sang. Bien entendu, le mouvement de révolte qui grondait était en partie animé par les bourgeois qui payaient crieurs publics et favorisaient les rebelles - car révolution et rébellion n'étaient qu'une question de point de vue - sous leur manche. Dans les papiers fournis par Auditore, il y avait cela. Les bourgeois qui au lieu de lutter efficacement contre la noblesse se contentait de coups à leur niveau. Jalousie, mesquinerie. Très peu étaient animés par un véritable esprit révolutionnaire, entendre par là un peu plus altruiste. Ce royaume avait corrompu jusqu'à la moelle la majorité de ses habitants. Faisant des moutons et des loups à tous les étages. Mais certains gardaient leur identité et se révélaient être ni l'un ni l'autre. C'était le début de leur chute, le début de la fin. Lors qu'un régime totalitaire d'une telle violence était mis en place, il venait un jour ou la contestation s'émargeait de la répression et lorsque cette dernière devenait inopérante, le changement était proche. Pas forcément pour le mieux.

"Que voulez-vous que je vous dise ? Oui, je vous aiderai ? Non, tuez nous tous. Car c'est de ça qu'il s'agit. Soit j'agis pour le meilleur à vos yeux et je met en jeu la vie de tous ceux qui me sont cher, soit je refuse votre offre et leur vie sera encore plus mise en danger. Alors épargnez-moi vos belles paroles, mademoiselle. Vous ne faites là que me confirmer mes craintes. Je n'ai aucune honte à protéger ma famille, c'est la peur qui nous jugule tous et vous le savez. J'aimerais vous y voir, avec le sang de vos propres enfants sur vos mains. Je ne remets pas en cause votre motivation, ni votre vécu mais vous ne sauverez pas une cité qui refuse de l'être. Vous allez faire quoi ? Soulever le Grey Terminal et foncer à l'assaut ? Allier bandits et révolutionnaires ? C'est irréalisable, Grey Terminal n'est qu'un ramassis de gens perclus par la peur, rongés par l'amertume. Comme tout ce qui n'est pas né avec une cuillère en argent dans la bouche ici.

Alors que voulez-vous entendre ? Oui, je vous suis ? Je n'ai pas le choix, mais je ne vous trahirais pas. Vous apportez peut-être de l'espoir. Je veux seulement la garantie que ma famille survivra, je veux qu'ils soient mis en sécurité. Car si vous échouez, notre sort à tous sera pire que la mort."
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    Je levai un sourcil, d'un air à la fois supérieur et interrogateur.
    - « Vous avez parfaitement le choix. Si vous voulez fuir, nous serons prêt à vous aider à quitter l'île, votre famille et vous, avec un minimum de bagages, bien entendu. Nous pouvons aussi protéger votre famille pendant que nous passons à l'action. Vous serez tous amenés dans un endroit sûr pendant les combats. Après, comment se passera le reste de votre vie, ça je ne peux pas le dire. »

    Je regardai, m'amusant de son trouble qui le faisait osciller entre le rouge de la colère et le violacé de la peur, suant et tremblant, alors que je restais calme, impassible même.
    - « Vous n'avez pas déshonoré le nom de votre famille, Monsieur de Janvillier. Je ne vois pas en quoi se comporter en être humain peut être source de ridicule. Vous avez le cœur à la bonne place. Et c'est pour ça que nous avons besoin de vous. Que nous vous demandons de nous aider. Vous avez le choix de décider de votre action face à la révolution. Mais encore une fois, et quels que soient vos doutes sur la manière, la révolution aura lieu... Ce qui se passera après... C'est justement là que vous interviendrez. Pour éviter les abus de colère ou de violence, pour éviter que l’abolition des privilèges ne devienne pas la spoliation des biens obtenus par le mérite et le travail. Pour éviter que Goa ne recommence à pourrir sur pied. ''Une cité qui refuse d'être sauvée'', c'est ce que vous avez dit. Croyez-moi, vous n'êtes pas le seul dans cette ville à avoir honte du système en place et à désirer le changement. Mais vous êtes tous disséminés, éparpillés, seuls. Nous n'avons fait que réunir toutes ses mains et ses âmes. Certaines, vous avez raison, sont pleines de rage et d'envie, et seront dangereuses pour l'avenir. Avenir que je propose de remettre entre vos mains. Mais pour faire partie de l'avenir, il faut faire partie du présent. Parce que personne ne se souciera d'un homme qui est resté blotti à l'abri chez lui.

    Vous avez le choix : premièrement, ne rien faire. Personne ne fait rien, et cette vie d'horreur continue. Deuxièmement, comprendre que les choses sont en marche, mais que le succès n'est pas certain. Alors vous choisissez de lutter avec nous, risquer votre vie, et prendre le risque de pouvoir donner à votre famille une vie meilleure. Cela veut aussi dire qu'en cas d'échec, vous serez tous mis à mort. Troisièmement, nous exécutons notre plan, et vous n'en faites pas partie. Si nous gagnons, vous serez soumis à la loi des gagnants, et vous n'aurez pas votre mot à dire. Si nous perdons, la noblesse reste en place, vous n'êtes accusé de rien, vous continuez de vivre comme maintenant, si tant est qu'on puisse appeler ça vivre, et en vous exposant à une traîtrise quelconque. On vous devez l'un des leur.
    Vous n'êtes pas une victime sans ressource, Monsieur de Janvillier. Vous n'avez peut-être pas toutes les cartes en main, mais vous en avez suffisamment pour être maître d'une partie de votre destin.

    Je sais déjà que vous ne nous trahirez pas, et je vous en remercie. Mais là, maintenant, je veux votre réponse : comptons-nous sur vous pour être des nôtres et protéger votre famille, ou devons-nous prendre nos dispositions pour vous protéger tous ? »


    Je me levai et tout en moi indiquait que j'allais partir. Il avait deux, peut-être trois secondes pour se décider.
    - « Avant de parler, fermez les yeux. Et ne trichez pas ! Respirez à fond, et choisissez. »
    Et alors qu'il parlait, je me transformai, pour repartir exactement comme j'étais arrivée. Le bourgeois, après avoir attendu une réplique à sa décision, était resté immobile pendant un moment, avant d'ouvrir précautionneusement un œil, puis le second. Rien, vide, plus personne. A croire qu'il avait rêvé, si ce n'était pour le message posé sur son bureau « nous vous
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Choisir ? C'était évident ... Cela allait se passer, avec ou sans lui. S'il était avec, il aurait une chance de s'en sortir. Quant à fuir ... il n'avait confiance ni en l'un ni en l'autre pour l'épargner. Cette femme lui offrait une chance de protéger sa famille et de faire parler cette petite voix qui lui disait que rien n'allait. Cette femme lui offrait l'occasion qui gonflait son coeur d'espoir. Après tout, n'en avait-il pas assez de ce monde décadent ? De ce Royaume corrompu, de cette peur incessante pour lui et les siens ? Il inspira profondément.

"Oui."

C'était son coeur, sa volonté. Les risques étaient incommensurables, certes. Mais il voulait partir la tête haute. Pouvoir targuer les autorités divines du juste choix qu'il avait fait. Se racheter dans cette bataille, peut-être. Et avant tout protéger ceux qu'il aimait. En élargissant le champ des possibles, ils pourraient gagner. Ils pourraient changer ce monde. Arrêter de se demander quand la mort viendrait les cueillir. Aujourdh'ui, il choisissait son destin. Qu'il fut funeste ou non, ce n'était qu'une histoire de victoire.

"Je vous aiderai. Je mettrais mes hommes et mes moyens à votre disposition si tôt que mes proches seront protégés des conséquences de ma décision." fit-il, rouvrant alors les yeux pour se retrouver face au vide

Les révolutionnaires ...


~~~

Horace Fitz. C'était le second nom. Bâtard de sang noble, qui avait parcourut le monde pour se détacher du nom de son père. Il avait alors pris mesure de la déchéance de Goa avant d'y revenir. Il avait hérité d'une fortune colossale d'un donateur anonyme, dans des circonstances louches, et tirait profit de la vente d'esclaves. Du moins, c'était ainsi qu'il paraissait. Adepte du moindre mal, il faisait fonctionner sa machine et personne n'avait su y déceler les trous qu'elle cachait, personne sauf les assassins. Dans les esclaves qui rentraient, à peine la moitié en ressortait. Ce qu'il maquillait en trafic négrier, n'était autre qu'un acte altruiste : il acheminait certains esclaves vers différentes parties du monde afin de leur rendre leur liberté. Cela expliquait pourquoi il ne faisait pas autant fortune que ses autres camarades esclavagistes, qui le prenaient simplement pour un mauvais meneur d'esclaves, les condamnant à mourir sous sa poigne de fer ou un homme qui faisait simplement de mauvaises transactions. Pour maintenir cette façade, il se trimballait toujours aux côtés d'esclaves mutilés. Hommes qui en réalité le servaient allègrement pour masquer ses trafics.

Horace Fitz était ainsi un homme bon, et qui risquait gros. Il essayait à sa manière de déstabiliser le marché des esclaves, mais c'était peine perdue. Un être qu'il serait plus facile de convaincre que le premier, à n'en pas douter. Le rapport fourni par Rafaelo indiquait tout ces aspects, ainsi que les différentes manières qu'ils avaient employé pour le mettre en évidence. À noter qu'il s'agissait d'une mission d'assassinat qui avait finalement tourné court. Un assassin avait été envoyé chez Horace pour le tuer, se faisant passer pour un esclave en s'infiltrant dans un groupe destinés à être rapidement vendus. Fitz l'avait ainsi libéré, ignorant qu'il venait de sauver la vie par ce geste.
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    Pénétrer chez ce Fitz avait été beaucoup plus facile, mais le coincer seul à seule par contre, avait été tout sauf une mince affaire. Ce bonhomme frisait sûrement la paranoïa, à être constamment entouré d' « esclaves ». Je veux bien qu'on soit méfiant, et qu'on joue le jeu du pantomime jusqu'au bout, mais vint un moment où je m'agaçais de ce déploiement de sécurité. J'en comprenais parfaitement la raison, et je ne pouvais qu'approuver, mais c'était rageant quand on était de l'autre côté. Ah, ceci dit, si cela voulait dire que mon propre numéro provoquait la même frustration chez d'éventuels agents en surveillance, cela me consolait un peu.
    Pendant un instant, j'envisageai de me manifester à lui alors qu'il était dans sa salle de bains. Assurément, voilà bien un lieu où nous étions seuls... mais la position de faiblesse dans laquelle Fitz serait alors, démuni, dénudé, ne me semblait pas propice à la discussion que je souhaitais entamer. Je dus donc prendre mon mal en patience, jusqu'à son coucher, tard dans la nuit, presque tôt dans le matin. La chance voulut qu'il n'eut pas de compagne – ou compagnon – de lit. Ça, ça m'aurait bien embêté. Mais le hasard voulut que notre sympathisant se glissa seul entre les draps... ou tenta de se glisser .

    Profitant du moment où il tapotait son oreiller, je me laissais glisser du coin de pénombre dans lequel je m'étais dissimulée jusqu'à présent et repris forme humaine. Aïe, mes jointures ! A pas de velours, j'approchais et tout comme avec de Janvillier, je posai ma main sur sa bouche.
    - « Ne bougez pas, je ne vous veux aucun mal. Je désire simplement vous parler, sans être vue ou entendue par autre que vous....  »
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Mouvement simple, souple. Fitz s'empara de la lame dissimulée sous son oreiller et frappa dans le vide, là où l'intrus se trouvait une fraction de seconde auparavant. S'il était paranoïaque, il n'était pas fou au point de ne pas se protéger dans sa propre chambre. Il avait parcourut le monde, avait survécu à Grand Line : il n'était pas le premier des incapables à Goa. Il roula sur son lit et se mit à scruter l'obscurité en plissant les yeux. Il n'avait pas le niveau d'un agent du Cipher Pol et encore moins d'un assassin révolutionnaire, mais il fallait lui concéder qu'il avait de bons réflexes.

"Une lettre aurait suffit ..." se moqua-t-il, d'un ton indéniablement sûr de lui.

Il était bien plus jeune que le précédent contact, et plus assuré aussi. Nul doute que ses opposants connaissaient des fins diverses et variées. Il avait le regard de ceux qui ne reculaient devant rien pour assurer leur propre sens de la justice. Il lança son arme dans la direction qu'il pensait être celle de l'intrus puis dégaina le mousquet qui pendait à sa table de nuit.


"Le coup de feu attirera tout le monde dans la baraque. Je te conseille de te rendre avant que ce soit mes hommes qui te tombent dessus ..." grogna-t-il, fronçant les sourcils.

Son coeur battait la chamade, démentant son air assuré. Il pointa tour à tour les coins de sa chambre, se passant la langue sur les lèvres.


"Qui es-tu ? Que me veux-tu ?" fit-il, cherchant ostensiblement à gagner du temps.

Ce n'était pas un assassinat, peut-être quelqu'un qui voulait marchander. Ce ne pouvait être qu'un ennemi pour venir ainsi le chercher dans l'intimité de sa chambre. Et doué, pour avoir passé toutes les protections mises en place ...
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Une envie de lui répondre par un rire issu des ténèbres des plus noires me prit. Il y avait quelque chose de suréel dans cette nuit. Pour une fois que je faisais exactement ce pour quoi j'étais faite, je me sentais comme étrangère à moi-même, comme une comédienne, dans un ancien mauvais nanard qui plus est.
Au moins pouvais-je louer les réflexes de notre homme : la révolution n'engageait pas des demi-portions. Mais si Fitz était bon, moi, j'étais meilleure. Après tout, qu'était-il, si ce n'était un petit marchand dans un coin d'océan ? Moi, j'étais agent de plein droits depuis deux ans, j'étais formée au pire, et avant ça, et pour cela même, j'avais tué. Le baptême du sang, comme ils appelaient ça. Peut-être était-ce la raison pour laquelle j'avais survécu au BAN, parce que j'avais déjà appris à déconnecter mon cœur de mes bras, à enfermer ma culpabilité à double tour et à noyer dans l'hémoglobine mon sens de l'honneur.

Fizt se dégagea de ma poigne et attaqua avec une arme peu faite pour le jet. Je me contentai de me pencher sur le côté, pour éviter le coup, amorçant ainsi une pirouette rapide, me permettant non seulement de capturer la lame entre mes deux doigts – et éviter ainsi un impact qui aurait pu attirer l'attention – mais aussi de prendre l'impulsion nécessaire à un soru. Ainsi, je revins encore une fois derrière lui, mais cette fois, je le saucissonnai avec mes fils puis posai sa propre lame sur son cou.

- « Une lettre peut s'intercepter. Quant à tes hommes, si j'ai pu arriver jusque dans votre chambre, je doute qu'ils arriveraient ici avec vite pour éviter à la fois votre mort et ma disparition. Dernier point, il est assez idiot de donner à l'ennemi une arme. D'autres que moi n'auraient pas hésité à s'en servir contre vous.  »

Je baissai la lame puis la jetai avec nonchalance sur le lit. Ce n'était pas comme si j'étais désarmée de mon côté. Par contre, hors de question de le libérer de mes fils, pas tant qu'il ne m'avait donné la certitude de bien se comporter.
- « Quelle chance pour vous, j'ai besoin de vous en vie. Comme je l'ai dit, je voudrais vous parler. En fait non. La Révolution, avec un grand « r », veut vous parler. Êtes-vous prêt à écouter ou dois-je vous laisser ainsi ? Sachez que si vous me demandez – poliment, je l'espère – de partir, je le ferai. Mais pas sans conséquences pour vous... et je ne reviendrai pas. Personne ne reviendra jamais...  »
Bon oui, d'accord, je donnais dans le mélodramatique. Mais faut dire que j'étais pas aidé, avec Fitz...
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"Gnnn..." fit-il en essayant de se débarrasser des fils qui le maintenaient.

Même si les paroles de Shaïness résonnaient à ses oreilles, il ne pouvait s'empêcher de paniquer, de se sentir comme une mouche face aux chélicères d'une mortelle araignée. Cette voix douce et féminine n'arrangeait en rien les choses. Puis, au bout de quelques secondes, il commença à revenir à la raison, à penser à autre chose qu'à se défaire de ses liens. Révolution ... Ce mot avait fait écho, et le faisait toujours. C'était la première fois que la Révolution l'approchait, la première fois qu'ils franchissaient le mirage qu'il avait créé pour se protéger. Il en frissonna. Depuis quand savaient-ils ? Depuis quand avaient-ils vent de ses activités ? Pourquoi seulement maintenant ? Si eux étaient au courant, d'autres pouvaient l'être ! L'esclavagiste se mordit la lèvre, sentant le souffle froid de la faucheuse sur sa nuque. Etait-ce ainsi que tout cela se terminait ? Sa récompense pour avoir essayé de faire au mieux dans ce monde corrompu ? Quant à prendre contact avec la Révolution, cela avait toujours été risqué et il ne leur faisait pas plus confiance, ils n'étaient qu'un ramassis de bandits fédérés par le Roi des ordures ...


"Que me voulez-vous, hein ? Je ne peux rien pour vous, je n'ai presque plus d'argent !" gémit-il.

Ce qui était malheureusement vrai. Mais il avait une ressource que les autres personnes évoquées sur la liste n'avait pas, ou peu. Plusieurs centaines d'esclaves prêts à partir aux différents coins du monde. Des hommes qu'il pourrait libérer lors du grand jour pour prendre leurs armes et attaquer la cité de l'intérieur. Une force invisible qui était censée émerger aux points présentés par Rafaelo plus tôt dans la journée. Et si quelques poignées d'esclaves prenaient les armes, ils risquaient forcément d'entraîner les autres. Une aubaine que ce 'recéleur' d'esclaves fut si facile à débusquer. Par moment, la chance était du côté de la révolution. Par moment, seulement ...
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    - « Tout n'est pas une question d'argent, Monsieur Fitz. Certaines choses n'ont pas de prix, tel l'honneur ou la vie... bien que sur ce point, Goa a clairement démontré que la question pouvait être soumise à interprétation. Bref... »

    D'un mouvement de poignet je relâchai mes fils autour de lui, mais d'un autre, je tissai immédiatement un nouveau piège prêt à fondre sur lui à la moindre tentative de coup fourré. Puis je fis un pas en arrière, me dissimulant dans le contre-jour que la nuit et de la lanterne de rue dessinaient dans la pièce. Il pouvait voir ma silhouette, mais aucunement mes traits. Je resterai pour lui l'énigmatique femme de l'ombre.

    - « Il serait temps que vous réaliseriez qu'il n'y a pas de « vous » et de « nous ». Vos actions, vos aspirations font de vous un homme à part, un juste parmi les justes, un frère. Vous le savez, même si vous ne vouliez pas l'avouer. Si vous aviez dû être repéré et capturé par les « dirigeants » de Goa...  » et le dédain dans ma voix était tellement palpable qu'un couteau en aurait été émoussé en voulant s'y couper une tranche. « … nul doute que vous auriez hérité de l'étiquette « révolutionnaire ». Alors, quitte à en être un en tout sauf en nom, je vous propose d'en devenir un. Avec tout ce que cela implique...  »

    S'il était encore sur ses gardes, je le sentais réceptif. En tous les cas, disposé à en savoir plus. Je poussai donc mon pion en avant.
    - « Vos actions sont louables, mais vous êtes seul à agir dans votre coin. Une goutte d'eau dans l'océan. Mais cela a suffit. Depuis longtemps nous travaillons dans l'ombre à vouloir délivrer Goa de cette lèpre. Depuis longtemps nous savons vos souffrances et vos tentatives d'agir. Cela a pris du temps, que de nous préparer, méticuleusement, prudemment, mais aussi... infailliblement. Nous sommes à l'aube d'un jour nouveau, et nous avons besoin de toutes les forces en présence, pour porter un coup décisif à la monarchie de la décadence. Nous avons besoin de vous. Pour mener l'attaque, et pour construire le futur.  »

    Je reculai encore d'un pas, pour venir m'appuyer contre l'assise de la fenêtre. Penchant la tête sur le côté, je l'examinai un instant, cherchant le meilleur angle d'attaque. Dire « ce n'est pas votre argent que nous voulons, mais vous, corps et âme » me semblait pour le coup un peu trop... lyrique. Mais je savais confusément que je n'avais pas encore suffisamment appâter ce petit bourgeois.

    - « Nous avons besoin que vos hommes prennent les armes et deviennent les meneurs, le symbole. Qu'ils poussent les autres esclaves à se redresser et à se battre pour eux-mêmes, qu'ils attisent la flamme de la liberté qui brille en chacun d'eux. Nous voulons que vos hommes infiltrent les « caves aet entrepôts » de vos chers collègues, pour parler aux autres malheureux. Et nous voulons que quelqu'un comme vous, avec un sens moral prouvé, fasse partie de l'après. Il faudra guider la population de Goa, et ne pas laisser le vent de liberté devenir tornade qui emporte tout. Que la liesse ne devienne pas joie vengeresse. Vous habitez ici, vous en connaissez les us, coutumes et manières d'être. Vous auriez une place bien légitime dans un conseil politique et économique.

    Voilà ce que nous vous voulons....
    Ou ce que nous NOUS voulons... »
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« Marche ou crève ... je connais ces paroles. » répondit-il d’un ton dédaigneux.

Il se massa les poignets, regarda ta posture et tes fils. Se faire avoir par une femme ... On avait beau être un bourgeois magouilleur progressiste, on avait toujours un certain égo. Surtout dans cette société machiste.


« La Révolution passe donc enfin à l’action ? Et elle veut que je sois prêt à l’aider ? Avec quoi ? Mes esclaves ? Peuh. » fit-il, sur le même ton peu convaincu.

Il ne semblait pas croire que les révolutionnaires puissent réellement se mettre en marche après tant de temps passé à demeurer dans leurs tunnels et à se cacher des autorités de Goa. Ils n’étaient que des pleutres et des magouilleurs, identiques à ceux qu’il ‘combattait’ mais son avis n’importait que peu en réalité. Ils avaient mis à jour la vérité. Du moins elle. Et elle le tenait à sa merci. S’il n’était pas homme à se plier facilement, il savait reconnaître là un avantage certain. Si les révolutionnaires partaient à l’attaque ...


« Laissez moi résumer. Vous voulez que je me jette dans la gueule du loup parce que vous compter donner un coup de pied dans la fourmilière ? Et dites moi, que se passera-t-il après, quand la monarchie répliquera et vous écrasera tous sous son talon de fer, hein ? Nous mourrons tous, le Grey Terminal sera purgé. Encore une fois ... et tout ça pour une poignée d’idéalistes. C’est pour cela qu’il faut agir dans l’ombre, mademoiselle. Pour n’impliquer personne et en sauver le plus possible. » railla-t-il, comme si le simple fait d’avoir mené sa vie lui donnait la science infuse à ce sujet.

Mais plus que la raison, c’était la peur qui parlait. C’était visible. On ne savait quel chemin cet homme avait pu prendre, mais cela l’avait très certainement marqué. Assez pour lui faire garder l’ombre seul et à jamais. Pour s’entourer d’esclaves mutilés et de protecteurs jusqu’à la fin de ses jours.
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