Se promener dans les beaux quartiers est la partie la plus agréable du travail. Enfin, tout est relatif. Les gens nous regardent un peu de travers et marmonnent dans notre dos. En même temps, je les comprends. La mouflette a fait fort en se pendant à mon bras attifée comme pour son bal de promo. La scène doit être un peu glauque mais si je la lâche, elle va se ramasser par terre au bout de trois pas. Du coup, elle abîmera sa robe et qui c’est qui va prendre encore ? Les femmes me dévisagent comme si j’étais un pervers, les hommes un peu moins… J’en ai même croisé un qui m’a adressé des félicitations entendues comme si j’avais fait une belle prise. Je dois avoir fait vraiment quelque chose de très très moche dans une autre vie et c’est ma récompense. Rien que de penser que je m’affiche avec la nabote, ça me donne la nausée. Pourquoi Lisa n’aurait pas pu jouer la couverture d’abord ? Je ne me rappelle plus trop la raison fallacieuse qui est intervenue pendant le brainstorming à ce sujet…
Je sors rarement en civil, mais j’apprécie un costume bien taillé quand c’est le cas. C’est appréciable de pouvoir se fondre à peu près dans le paysage des quartiers classes de Goa. Une fois descendus sur Grey Terminal, on va être très rapidement repérés comme un pirate primé au milieu de Marijoa. Vu que c’est le but de la manœuvre, on aura réussi si les bons poissons mordent à l’appât. A mesure que l’argent se tarit, les quartiers deviennent de plus en plus populaires et au bout du chemin nous attend un ghetto de pauvres. Les riches ne supportent pas la pauvreté mais ils ne seraient pas ce qu’ils sont sans elle. Cela reviendrait à comparer sans référence, à vouloir améliorer sans standard. A l’approche du lieu tant attendu, je fais mes dernières recommandations à la gamine :
- Le quartier est plutôt instable, les dernières informations montrent une recrudescence des activités louches et crapuleuses. Ça ne m’étonne pas que les nobles aient voulu brûler le quartier au siècle dernier, c’était la solution radicale à leur problème. Je vais devoir me montrer en position de faiblesse relative durant l’opération, ce qui veut dire que tu devras essayer de te défendre et respecter par toi-même sous peine de griller notre couverture. La difficulté supplémentaire viendra de mon équilibre précaire pour parfaire mon incroyable jeu d’acteur alors sois à la hauteur et ne te vautre pas au milieu du caniveau comme une godiche à cause de tes péniches. Reste en éveil de tout ce qui se passe autour mais essaie de rester la plus naturelle possible…
J’ai distillé beaucoup d’informations d’un coup pour un si jeune cerveau mais je suis pressé par le temps pour entrer dans mon rôle. Je sors une flasque d’alcool fort et en siffle le contenu en quelques gorgées. Voilà qui devrait convenir pour l’haleine et me désinhiber un minimum pour la crédibilité du geste. Mes pas deviennent plus hésitants, lourds et amples faute à une synchronisation naturelle des membres qui se détraque. Jouer le type bourré n’est pas si difficile quand on a un minimum d’expérience après tout. Si j’étais resté un petit marin bien sage, je serais passé de beaucoup d’informations que l’on peut dégoter dans les lieux de plaisir et de débauche. Il se raconte beaucoup de choses dans ces affres et on peut y rencontrer à peu près tous les comportements humains possibles et inimaginables. Il existe sans doute autant de canailles érudites que de nobles sots après tout, si ce n’est plus dans certaines mers.
Je manque de trébucher sur un pavé déchaussé de la route pour donner le change. Une femme que je suppute être de petite vertu attend le chaland à quelques mètres sur notre gauche. Elle n’est pas du tout à mon goût et je crois deviner qu’elle cache son quota d’heures de vol sous un fond de teint platreux. Pour la forme, je me sens obligé de la siffler et de lui faire un salut vaporeux de la main. Tout au fond de moi, je sens comme un petit diable jouir d’un plaisir extrême à l’idée de faire éprouver une honte sans nom à la petite bourgeoise qui m’accompagne. L’endroit doit déjà la mettre assez mal à l’aise. Je n’ai pas vu beaucoup de bordels et de tripots sur son île. Cette atmosphère pesante et transpirante d’insécurité qui s’installe trouve naissance dans la misère et la pauvreté. Je n’ai pas vu de mendiants, ni la moindre personne mise au ban de la société sur Koneashima. C’est encore une bonne occasion de parfaire l’éducation si soignée de mademoiselle…
Quelques minutes à s’enfoncer dans les ruelles sombres et de plus en plus étroites de ce quartier malfamé, nous amènent à toucher le coeur de ce vaste dépotoir. Là, plus de pavés pour épargner nos beaux souliers de la fange. Les flaques de boue, les détritus et les excréments d’animaux sont le seul revêtement de sol imaginable en ces lieux. J’ai beau ne pas avoir un odorat développé, la puanteur me décape les narines aussi bien que des vapeurs d’éthanol. Des bâtisses en matériaux de récupération bordent les deux côtés du chemin, logis insalubres pour nous, toits au dessus de la tête de centaines ou milliers d’abandonnés ici. Malgré l’heure très avancée dans la nuit, des enfants s’amusent encore dehors… avec un rat pour compagnon de jeu. Itinéraire d’une soirée, Goa gloire et décadence…
Un homme emmitouflé dans un empilage improbable de vêtements rapiécés nous observe depuis un moment déjà sans se décider à nous aborder. Je ne saurais dire s’il est basané naturellement ou s’il est juste atrocement crasseux sous sa chapka. Les bras croisés sous ses aisselles comme pour les protéger du froid, il nous suit comme un escargot sous crack. Je ne compte pas m’attarder bien longtemps ici alors je me décide à faire un geste pour accélérer les choses. Les âmes qui contrôlent cette partie de l’île sont aussi noires qu’une nuit sans lune. Les habitants de Grey Terminal n’ont rien à gagner, rien à perdre, même pas la vie. Le pauvre qui se fait battre à mort pour un objet sans valeur et usé jusqu’à la moelle, est plus chanceux que celui qui lui a pris la vie. Au moins il échappe enfin au sordide destin qui l’a fait naître ici. Il est temps d’échanger quelques mots avec notre sangsue.
- Hé toi là-bas ! Oui toi là ! Non pas toi, ton jumeau à côté ! Raaaah mais arrêtez de bouger autant !
Goa’s trap, épisode II, le retour du mec bourré.
- Je crois qu’on s’est un peu perdus avec madame. J’te donne 100 berries si tu nous indiques la sortie vers le port. Oooooh finalement nan, 200 berries si tu me dis où je peux trouver le meilleur cabaret de toute l’île !
Un petit sourire pour la gamine en lui pinçant la joue pour la dérider. J’avoue prendre un certain plaisir à lui infliger cette mise en scène.
- Oh allez, fais pas cette tête voyons… C’est une sortie pour que t’apprennes ce que c’est qu’une vraie femme. T’as pas ça dans ta campagne !
J’y vais doucement pour ne pas affoler le gaillard. Il faut dire que je ne peux pas non plus appâter avec du lourd sans risquer d’ameuter toutes les bandes à portée d’oreille et là ce serait notre fête. J’espère qu’on n’aura pas à trouver un autre pigeon si celui-ci s’envole en tout cas…
Je sors rarement en civil, mais j’apprécie un costume bien taillé quand c’est le cas. C’est appréciable de pouvoir se fondre à peu près dans le paysage des quartiers classes de Goa. Une fois descendus sur Grey Terminal, on va être très rapidement repérés comme un pirate primé au milieu de Marijoa. Vu que c’est le but de la manœuvre, on aura réussi si les bons poissons mordent à l’appât. A mesure que l’argent se tarit, les quartiers deviennent de plus en plus populaires et au bout du chemin nous attend un ghetto de pauvres. Les riches ne supportent pas la pauvreté mais ils ne seraient pas ce qu’ils sont sans elle. Cela reviendrait à comparer sans référence, à vouloir améliorer sans standard. A l’approche du lieu tant attendu, je fais mes dernières recommandations à la gamine :
- Le quartier est plutôt instable, les dernières informations montrent une recrudescence des activités louches et crapuleuses. Ça ne m’étonne pas que les nobles aient voulu brûler le quartier au siècle dernier, c’était la solution radicale à leur problème. Je vais devoir me montrer en position de faiblesse relative durant l’opération, ce qui veut dire que tu devras essayer de te défendre et respecter par toi-même sous peine de griller notre couverture. La difficulté supplémentaire viendra de mon équilibre précaire pour parfaire mon incroyable jeu d’acteur alors sois à la hauteur et ne te vautre pas au milieu du caniveau comme une godiche à cause de tes péniches. Reste en éveil de tout ce qui se passe autour mais essaie de rester la plus naturelle possible…
J’ai distillé beaucoup d’informations d’un coup pour un si jeune cerveau mais je suis pressé par le temps pour entrer dans mon rôle. Je sors une flasque d’alcool fort et en siffle le contenu en quelques gorgées. Voilà qui devrait convenir pour l’haleine et me désinhiber un minimum pour la crédibilité du geste. Mes pas deviennent plus hésitants, lourds et amples faute à une synchronisation naturelle des membres qui se détraque. Jouer le type bourré n’est pas si difficile quand on a un minimum d’expérience après tout. Si j’étais resté un petit marin bien sage, je serais passé de beaucoup d’informations que l’on peut dégoter dans les lieux de plaisir et de débauche. Il se raconte beaucoup de choses dans ces affres et on peut y rencontrer à peu près tous les comportements humains possibles et inimaginables. Il existe sans doute autant de canailles érudites que de nobles sots après tout, si ce n’est plus dans certaines mers.
Je manque de trébucher sur un pavé déchaussé de la route pour donner le change. Une femme que je suppute être de petite vertu attend le chaland à quelques mètres sur notre gauche. Elle n’est pas du tout à mon goût et je crois deviner qu’elle cache son quota d’heures de vol sous un fond de teint platreux. Pour la forme, je me sens obligé de la siffler et de lui faire un salut vaporeux de la main. Tout au fond de moi, je sens comme un petit diable jouir d’un plaisir extrême à l’idée de faire éprouver une honte sans nom à la petite bourgeoise qui m’accompagne. L’endroit doit déjà la mettre assez mal à l’aise. Je n’ai pas vu beaucoup de bordels et de tripots sur son île. Cette atmosphère pesante et transpirante d’insécurité qui s’installe trouve naissance dans la misère et la pauvreté. Je n’ai pas vu de mendiants, ni la moindre personne mise au ban de la société sur Koneashima. C’est encore une bonne occasion de parfaire l’éducation si soignée de mademoiselle…
Quelques minutes à s’enfoncer dans les ruelles sombres et de plus en plus étroites de ce quartier malfamé, nous amènent à toucher le coeur de ce vaste dépotoir. Là, plus de pavés pour épargner nos beaux souliers de la fange. Les flaques de boue, les détritus et les excréments d’animaux sont le seul revêtement de sol imaginable en ces lieux. J’ai beau ne pas avoir un odorat développé, la puanteur me décape les narines aussi bien que des vapeurs d’éthanol. Des bâtisses en matériaux de récupération bordent les deux côtés du chemin, logis insalubres pour nous, toits au dessus de la tête de centaines ou milliers d’abandonnés ici. Malgré l’heure très avancée dans la nuit, des enfants s’amusent encore dehors… avec un rat pour compagnon de jeu. Itinéraire d’une soirée, Goa gloire et décadence…
Un homme emmitouflé dans un empilage improbable de vêtements rapiécés nous observe depuis un moment déjà sans se décider à nous aborder. Je ne saurais dire s’il est basané naturellement ou s’il est juste atrocement crasseux sous sa chapka. Les bras croisés sous ses aisselles comme pour les protéger du froid, il nous suit comme un escargot sous crack. Je ne compte pas m’attarder bien longtemps ici alors je me décide à faire un geste pour accélérer les choses. Les âmes qui contrôlent cette partie de l’île sont aussi noires qu’une nuit sans lune. Les habitants de Grey Terminal n’ont rien à gagner, rien à perdre, même pas la vie. Le pauvre qui se fait battre à mort pour un objet sans valeur et usé jusqu’à la moelle, est plus chanceux que celui qui lui a pris la vie. Au moins il échappe enfin au sordide destin qui l’a fait naître ici. Il est temps d’échanger quelques mots avec notre sangsue.
- Hé toi là-bas ! Oui toi là ! Non pas toi, ton jumeau à côté ! Raaaah mais arrêtez de bouger autant !
Goa’s trap, épisode II, le retour du mec bourré.
- Je crois qu’on s’est un peu perdus avec madame. J’te donne 100 berries si tu nous indiques la sortie vers le port. Oooooh finalement nan, 200 berries si tu me dis où je peux trouver le meilleur cabaret de toute l’île !
Un petit sourire pour la gamine en lui pinçant la joue pour la dérider. J’avoue prendre un certain plaisir à lui infliger cette mise en scène.
- Oh allez, fais pas cette tête voyons… C’est une sortie pour que t’apprennes ce que c’est qu’une vraie femme. T’as pas ça dans ta campagne !
J’y vais doucement pour ne pas affoler le gaillard. Il faut dire que je ne peux pas non plus appâter avec du lourd sans risquer d’ameuter toutes les bandes à portée d’oreille et là ce serait notre fête. J’espère qu’on n’aura pas à trouver un autre pigeon si celui-ci s’envole en tout cas…