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La chance sourit aux audacieuses

Pourquoi Tombe-ton ?

Ce matin là, un talon singulier battit les dalles d'Enies Lobby, et bien que le concept même de matinée passa bien au-dessus de la tête de l'île de la justice, les gardes d'astreintes pour ce qui s'apparentait -au-dehors- à la nuit furent surpris de voir débouler devant eux une jeune femme toute de noir vêtue, sabre au côté et coiffure visiblement arrangée à la va-vite. A peine l'eurent-ils remarquée, à peine l'eurent-ils reconnue, qu'elle disparaissait à un autre coin de ces longs couloirs impersonnels qui faisaient la fierté de l'île de la justice. Ça ne les empêcha pas d'entendre encore longtemps ses pas résonner dans l'édifice comme un métronome réglé sur un rythme en trois temps. Ils se regardèrent un instant, et sans parler, ils se comprirent. Ce pas, ils ne l'avaient pas entendu depuis une bonne semaine. Et aujourd'hui, si un léger sourire étira fugacement leurs lèvres comme ils reprenaient leur ronde avant que la relève des heures décentes n'arrivent, c'est qu'ils tendirent l'oreille et perçurent dans ce claquement sec la détermination qu'il avait manqué au Commandant d'élite depuis son retour d'Impel Down. Il foulait au pied cette tristesse qui l'avait anéantie et la peine qui l'avait étreinte. Et il leur sembla que ce pas rapide, ce martèlement , se voulait le plus énergique possible, comme si l'écho qui rebondissait sur ces murs blancs et ces dalles de marbres pouvait expulser toute la frustration et toute la colère d'avoir perdu une semaine à sa morfondre. Une nouvelle fois. À n'avoir pas bougé pour aller rattraper Red. À n'avoir pas agi pour rattraper ses erreurs. À avoir laissé ce navire couler sans tenter de le réparer. Alors le pas est brusque, le pas est vif, le pas est rapide. Ça faisait trop longtemps qu'elle n'avait pas marché avec un but.

Les jambes sont lourdes, pourtant. Lourdes d'être restées inactives certes, enfouies sous des draps lourds comme des chapes de béton et nourries d'un simple fruit quotidien. Mais surtout lourdes de devoir bouger en plus d'un faible corps à la peau d'albâtre le poids des remords et des regrets. Elle avait conscience avec une cruelle froideur de tout ce qu'elle avait perdu. C'était un fait. Un équipage, une arme-sœur, un amour devenu impossible, un rêve brisé. Et à un nouveau détour au coin d'un couloir identique aux vingt précédents elle peinait à compter ce qu'il lui restait d'une vie entière construite sur des bases qu'elle croyait solides et qui venaient de s'écrouler en deux petites semaines. Que lui restait-il ? Elle avait du mal à répondre à cette question. Se refusait d'y répondre. Elle savait que si elle faisait l'inventaire, il ne lui resterait guère que des médailles, ses souvenirs et Salem qu'elle n'avait plus contactée depuis longtemps. Et pourtant, même sans y répondre, elle sentait les larmes lui monter aux yeux et manquer de les embuer comme ses pensées la hantaient et la tourmentaient. Elle les endigua avec une volonté qu'elle se découvrait étrangement forte. Elle s'en étonna un instant avant de se dire qu'elle avait pleuré toute la semaine durant et que ses glandes lacrymales ne devaient plus fonctionner aussi bien qu'avant. Que restait-il d'elle ? Ses galons. Et il était terrible de se dire qu'elle n'avait réellement plus rien. Qui savait si cette affaire des Sea Wolves n'allait pas en plus les lui faire perdre, ses galons ? Il ne lui aurait plus resté qu'à aller se blottir contre un feu de cheminée dans une petite bourgade de South et de s'y laisser dessécher. Pourquoi attendre, d'ailleurs, qu'on la raie de la liste des meilleurs éléments de la marine de Grand Line pour se retirer du devant de la scène ? Pourquoi ne pas simplement abandonner toute cette mascarade ? Que lui restait-il à accomplir ?

De grandes choses?

Il fallait se faire une raison, Rachel n'aspirait pas à moins. Qu'importe que Impel Down ait-été détruite, qu'importe que le pénitencier risquait de fermer ses portes au profit d'une prison moins connue, Rachel aspirait à la grandeur, à la reconnaissance, à l'admiration. À la crainte aussi, mais ce serait anecdotique. Pour l'instant, il lui faudrait remonter la pente, tout reprendre de Zéro. Car elle se relevait d'une chute qui l'avait précipitée aux pieds de tous. Et la pente qui s'annonçait se révélait plus abrupte et brumeuse qu'elle ne l'avait jamais été. Une difficulté supplémentaire, mais pas insurmontable. Rachel avait déjà fait tant et tant plus. Et elle ferait bien plus encore.

Les talons arrêtèrent de torturer le sol blanc pour faire face à une porte close qui aurait pu retenir un Ging enfermé tant elle était lourde et épaisse et dont même la voix de Scab n'aurait pu percer. Là, Rachel s'appuya contre le mur pour masser son genou qui se remettait trop doucement à son goût de ses dernières blessures. Elle prit une seconde pour maudire le destin qui la blessait toujours au même endroit. Ce genou devenu son point faible, à n'en point douter. Et lorsqu'elle releva le regard vers cette porte qui lui barrait la route et qui, en cet instant déterminant, marquait également la première épreuve de cette quête vers une gloire qui s'était éloignée d'elle si vite. Et elle eut peur des réponses.
Ça tombait bien, elle n'en aurait pas.

-Il faut arrêter de se tourner les pouces et appliquer une solution !
-Je...
-Ce n'est pas un cas anodin et il va vraiment falloir qu'on prenne une décision. Ensemble !
-Je sais bien que c'est un cas grave ! Tu me prends pour un con ? On ne sait déjà pas dans quel bourbier cette affaire nous jette alors si ces dames nous recouvrent un peu plus de purin, je peux t'assurer que j'aurais préféré avoir posé mes fesses dans une retraite méritée bien avant !

Arrivant de l'opposée d'où elle-même venait, le duo d'hommes -veste noire, porte-document rempli et cravate de travers- avalait les mètres qui les séparaient de Rachel avec une hardeur sans pareille. On eut dit qu'ils faisaient la course à qui arriverait le premier. Ils ne jetèrent aucun regard à Rachel et cette dernière se contenta juste de laisser trainer une oreille discrète sur ce que ces deux hommes du gouvernement se disaient. L'un semblait plus vieux et ses cheveux courts laissaient paraître quelques mèches blanches parmi leur brun naturel. Le second, lunettes haut sur le nez et petit bouc studieux traduisait par ses gestes un plus grand trouble et une anxiété plus vive que chez son comparse aux mains fermes et caleuses sur ses dossiers. Ils passèrent devant elle et tournèrent comme un seul homme vers cette large porte qu'ils franchirent presque sans s'arrêter. Et comme ils repartaient dans leur discussion mouvementée toujours sans prêter attention à Rachel, cette dernière se décolla vivement du mur et se glissa à leur suite. Probablement une erreur.

-Alors qu'est-ce qu'on choisit ? Vous prévoyez quoi ? Parce que pour l'instant, je crains pour les relations avec Amazon Lilly. On se doit d'intervenir, tout de même, non ?
-On n'est en rien obligé, garçon. Et c'est pas la diplomatie avec ton île de guerrières qui m'inquiète. A la limite, c'est juste une grognasse à la peau bleue qui veut se la jouer présidente et qui cherche à donner des ordres au gouvernement...
-C'est bien pour ça que je dis qu'il faut tout de même prendre en compte ce qu'elle raconte. Lust, c'est pas le genre de femme dont on ignore les dires et les envies.
-C'est elle qui les dicte, les envies, garçon. Et c'est pas nouveau. Et c'est pas parce qu'elle rend fou les hommes qu'elle croise que ça en fait vraiment une cador dans le genre.
-Mais voyons... !
-Moi ce qui me gêne plus, c'est que la Valkyrie s'en mêle. Et ça, c'est jamais bon signe.
-Je suis navré, mais je vois pas en quoi ça pose vraiment souci. C'est normal qu'elle coure après le Malvoulant, non ?
-Jusque là, oui, mais elle avait pas encore pris un tel parti dans une affaire. Elle ne s'était pas encore impliquée avec autant d'ardeurs dans aucune autre. Et je t'avoue que je redoute de la voir se ramener ici, elle et ses cauchemars, comme elle semble le sous-entendre. Qu'elle veuille faire justice elle-même...
-C'est peut-être pas la période...
-Harf Harf Harf !
-...
-Ouais, c'était pas drôle mais faut déstresser des fois.

La marche continue. Tout droit. Les deux hommes ne s'embarrassèrent d'aucun virages et ne regardèrent pas même les bureaux qu'ils croisèrent sur leur route. Beaucoup étaient vides, et s'il n'y avait pas le bruit de leurs pas sur le sol nacré des bureaux, les trotteuses des aiguilles de toutes les horloges de chaque table auraient empli la pièce d'une atmosphère oppressante qui aurait convenu à Rachel. Parfois, un bureau était masqué par des piles de dossiers et une tête brune dépassait parfois de ces monticules de papiers. Rachel eut un rictus dédaigneux. Elle ne savait pas comment ils pouvaient ainsi se perdre dans des tonnes de dossiers sans jamais voir la lumière du soleil. Elle était bien heureuse d'être à l'air libre et sous les embruns marins.

-Et cette Nazca, on a vraiment aucune info à son sujet ?
-pas grand chose, je te dis. Elle avait déjà fait des petites vagues. Assez pour se faire remarquer par Teach. Jamais au point de ravager une île.
-C'était peut-être la période.
-...
-J'aurais essayé.
-Tu devrais essayer de la fermer parfois, garçon, ça vaudrait mieux.
-Ouais. Mais faut bien déstresser des fois, non ?
-Ah ça t'as pas tort.

Rachel s'enivrait de toutes ces informations qu'elle ne comprenait pour la plupart qu'à moitié. Mais des informations qui n'auraient peut-être pas du tomber dans n'importe quelles oreilles. Peut-être aurait-il mieux fallu qu'elle n'écoutât pas... Mais elle n'en avait cure. Et puis de toute façon, personne ne lui avait dit qu'elle n'était pas à sa place. Les deux qu'elle suivait et qui ouvraient la voie ne l'avaient pas remarquée, et les autres qu'ils avaient croisé l'avaient crue avec eux. Pourquoi donc s'embêter.
Et tandis que les deux hommes s'immobilisaient soudain devant un bureau un peu plus gros et un peu plus décoré que les autres, Rachel se raidit comme tout bon soldat pour que l’œil scrutateur de la femme derrière le bureau ne s'inquiète pas plus de sa présence. Et pourtant Rachel n'avait que rarement vu un regard aussi perçant. Surtout venant d'une femme en conversation via den den. Les deux hommes restèrent silencieux, le garçon lissant son bouc dans un geste nerveux et le plus ancien restant plus immobile d'une photo. La femme prit deux notes, acquiesça à deux questions et mit finalement fin à la discussion. Elle lissa ses ongles dans un geste mécanique et invita les nouveaux arrivants à parler.

-Nous sommes du Cp 1 et 4 et nous venons vous faire part des nouveautés concernant l'affaire d'Amazon Lilly.
-Joie... Et vous, qui êtes-vous ? Demanda-t-elle en fixant Rachel avec insistance
-Plait-il ?
-Je suis le Commandant d'Elite Blacrow et je serai l'officier de la marine en lien avec cette affaire.
-QUOI ?!?

La chance sourit aux audacieuses.


Dernière édition par Blacrow L. Rachel le Jeu 12 Déc 2013 - 1:51, édité 1 fois
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Les secondes s'écoulèrent trop lentement pour êtres honnêtes. Rachel observait, témoin impuissant, son souffle s'intensifier comme cette femme la fixait avec cette présence qu'ont les chats quand ils ont repéré un oiseau sur une branche. Et de son point de vue de petit corvidé sans ses serres, Rachel craignait légèrement qu'elle ne bondisse pour la mettre à terre une fois de plus. Rachel craignait. Cette pensée la frappa alors qu'elle faisait son possible pour ignorer les deux agents s'insurger de son attitude jugée déplacée. Alors elle serra les dents et garda la silence, soutenant le regard de cette bureaucrate impassible. Elle avait conscience qu'elle mettait le doigt dans un engrenage qui ne manquerait pas de lui broyer la main si elle ne la jouait pas assez fine. Non pas qu'elle tenait à sa main, mais au vu de l'état de son genou, elle préférait garder au moins un membre de son corps viable. De toute façon, sa raison foutait déjà le camp.

Et visiblement, sa capacité de discernement avec.

-Blacrow ? Des Sea Wolves ? Amusant...
-Je ne suis pas certaine de trouver tout ça amusant ! Répartit Rachel.

Un tisonnier. Voilà ce qu'étaient les paroles de cette bureaucrate. Un tisonnier chauffé à blanc qui perçait les défenses trop maigres d'une peau d'albâtre et sévèrement diminuée. Une brûlure qui avait surprit Rachel au point de la faire bondir sur la défensive. Elle déglutit avec difficulté en fixant cette femme au visage dur, et non loin les deux hommes se taisaient, conscients qu'on leur demanderait bientôt de prendre part mais qu'intervenir avant qu'on les y invite aurait été une erreur. Sur son épaule, la marque noire pulsait lentement ; le rythme lancinant d'un deuxième cœur qui faisait battre son sang à ses tempes comme le flux et reflux des marées sur le sable. Il s'en fallut de peu qu'elle ne tremblât devant la figure aux ongles manucurés qui restait aussi impavide que les tableaux dans les couloirs.

-Touchant... Les raisons de votre présence ?
-Je vous l'ai dit, répondit Rachel dans une vaine tentative pour paraître calme. Je viens prendre mes fonctions sur l'affaire Nazca.
-Permettez-moi d'en douter.
-D'accord, mais permettez-moi d'insister.

Il était affreux pour Rachel  de se savoir complètement démunie et à la merci d'une femme qui avait probablement les moyens de la briser. Comme le rat ronge les amarres. Lentement. Sans jamais se départir de son regard pénétrant et de son air désabusé. Comme un adulte face au caprice d'un enfant.... Il était dur d'admettre qu'aux yeux de cette bureaucrate, Rachel n'avait pas plus d'importance qu'un garde fou pour un paquet de mer. Il était dur de l'admettre...
Devant ses yeux verts se dessinait un ravin. De ceux dont les couleurs sont ternes et les profondeurs impénétrables. Un vide insondable que lui renvoyait sa propre faiblesse. Sa propre fragilité. Elle en prenait conscience. Elle n'en avait conscience que maintenant, face à ce bourreau à la chevelure impeccable. Elle n'avait jamais été grand chose. Elle n'était plus rien. Et cette vérité la frappait au creux de l'estomac avec la force nécessaire pour que l’œil vert perde de sa superbe et s'humidifie. Un fétus de paille devant un incendie. Une poussière dans le vent. Elle voyait distinctement ce mur qu'elle représentait, elle et son bureau. Une barrière à laquelle notre gothique se confrontait d'elle-même. Trop haute.

Elle prit peur.

Peur de chuter.
Peur d'y perdre. De se perdre.
Peur de décevoir. De se décevoir.
Peur.
Peur de l'adversité, aussi.
Peur.
Peur à en faire trembler la rotule folle.
Peur. A lui hurler. Lui hurler de prendre ses jambes à son coup.

Elle prit peur. Et les larmes montaient ! Et la mâchoire se resserra sur un sanglot que sa gorge suppliait de laisser geindre entre ses lèvres entrouvertes ! Que diable foutait-elle donc là ? Qu'elle fuie !

-L'affaire concerne les amazones. Des guerrières qui ne permettent pas aux hommes de s'approcher. Je suis l'un des meilleurs éléments de la marine de Grand Line, et je suis une femme. Deux éléments qui jouent en ma faveur.

Le ton était clair. Et si les fins de phrases vibraient d'une émotion qu'elle peinait à contenir, la commandante d'élite réussissait à maintenir le regard vissé dans les yeux de la bureaucrate. Son cœur la suppliait pourtant de retourner dans la torpeur d'une chambre d'où ne sortiraient pas ses sanglots. Elle ne céda pas. Elle ne cèderait pas.

-Non. Vous l'étiez.

Elle vacilla.
Son regard flancha.
Elle rompit le contact.


Dernière édition par Blacrow L. Rachel le Jeu 12 Déc 2013 - 1:24, édité 1 fois
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La minute suivante, Rachel aurait été capable de dire de combien de fissure le carrelage en apparence parfait était zébré. Elle avait la tête basse et tout son dos était parcouru de frissons. Ses épaules tremblaient de cette émotion qui la faisait souffrir. Son regard fixe et ce décompte étaient le salut qui permettait à ses joues de rester sèches. Elle s'en voulait déjà assez d'être sortie dans cet état pour affronter des yeux scrutateurs et une langue blessante pour ne pas rajouter à sa honte le goût salé de ses larmes au coin de ses lèvres.

Toutes ses volontés s'affrontaient en elle, dans un chaos qui la laissait chancelante. Elle se noyait.

Et le chignon aux ongles effilés ne la regardait même plus.

-Vous parliez de nouveautés ?

Les deux hommes regardèrent sans la voir la femme derrière son bureau comme des spectateurs un match de tennis. Ils s'offrirent cinq secondes avant de réaliser qu'elle s'adressait bien à eux puis de se rasséréner. Ils balbutièrent quelques mots vagues, des mots automatiques en cas de questionnement impromptu, comme s'ils avaient préparé leur discours -sans toutefois s'attendre à ce qu'ils entrent en scène si tôt. Puis le jeune finit par lisser son bouc.

-Hum... Eh bien... Ah oui ! Lust à annoncé il y a peu qu'elle allait envoyer un émissaire pour que la situation soit gérée au plus vite. Visiblement, elle n'a pas vraiment confiance envers le gouvernement en ce qui concerne la gérance des affaires sur son île.
-Ou alors c'est une fierté mal placée doublée d'un simple désir de vengeance...
-Joie... Quelles nouvelles de Mona Lysa ?
-Silence radio depuis deux jours. Le dernier appel a été si tendu que le pauvre homme chargé des communication est resté tétanisé plusieurs heures et fait maintenant crises d'angoisses sur crises d'angoisses. Il a été mis en arrêt pour les trois prochains mois.
-...Mon collègue croit que la Valkyrie se dirige vers nous.
-Pour un Imprévu... Pourquoi Venir à Enies ?
-Pour faire justice elle-même. Nazca est la poupée du Malvoulant ; on peut comprendre qu'elle lui en veuille. Et je vous avoue que je préfèrerais grandement lui laisser carte blanche. Non pas que mon avis importe, mais elle est sans aucun doute la plus motivée et la plus déterminée à  l'emporter sur Nazca. Et puis c'est une femme, elle n'aura aucun souci ni avec les amazones ni avec une possible rencontre avec les pouvoirs de Lust.
-Je disais exactement la même chose.

Rachel se tenait de nouveau droite. Elle ne tremblait plus, mais on pouvait voir dans son regard que sa détermination avait légèrement vacillé. Et ses yeux rougis ne donnaient plus la même image d'elle qu'auparavant.

-Agacement. Une bonne fois pour toutes, qu'espérez-vous prouver, Commandante ?
-Que je ne suis pas un mouchoir usagé dont on va se débarrasser. Je ne suis pas un déchet, je saurai être utile.
-Certes, mais pas aujourd'hui. Ces histoires ne vous regardent pas, je vais vous demander de sortir avant que je ne vous l'ordonne.
-C'est moi qui choisis de quoi mes lendemains seront faits !
-Pas avec moi commandante !
-Avec vous comme avec n'importe qui d'autres ! Vous ne dicterez pas mes pas, pas plus que n'importe lequel des amiraux ! Avec tout le respect que je vous dois.
-Colère ! Ce n'est pas avec de telles paroles que vous vous ferez aimer, ma chère !
-Ça n'a jamais été mon but.
-Alors quoi ? Vous prévoyez de désobéir et de n'en faire qu'à votre tête, sans tenir compte des ordres ou même des conseils ?
-Quels conseils m'avez-vous donnée, s'il vous plait ?
-Celui de ne pas vous imposer là où vous dérangez. Et que dans ces histoires là, vous allez vous faire tuer. Vous n'êtes absolument pas en état, Commandante !
-Vous vous êtes vue... ?

Le ton était monté. Les deux subordonnés s'étaient de nouveau esquivés de quelques pas pour laisser les deux femmes monter dans les tons et les aigus comme l'échange se renforçait jusqu'à donner l'impression d'éclater. Rachel réussissait malgré tout à rester stoïque devant la bureaucrate endimanchée. Cette dernière laisser sourdre cette tension que la colère restreinte secrétait.

-Lorsqu'une pomme est pourrie, tout le panier est à jeter. Les Sea Wolves ont bien perdu de leur superbe. Même Rossignol et vous.

Le tisonnier qui meurtrissait la poitrine de Rachel depuis la première pique que lui avait envoyée cette femme à lunettes sembla s'embraser d'un seul coup, consumant ses côtés et ses poumons. Son cœur rata un battement, sa respiration se bloqua. Puis elle se laissa aller à la colère. Sa mâchoire crispée put à peine laisser passer ces mots qu'elle cracha avec une ire sincère.

-Red a plongé les mains dans la crasse pour que j'en ressorte blanche comme neige ! Il a fait une connerie pour m'aider moi !

Je ne referai pas la même erreur que lui !


Et sans tenir compte de son genou grinçant, elle tourna les talons, furibonde, vers l'entrée, laissant sur le carreau trois protagonistes étrangement effrayés par cette silhouette presque démoniaque qui s'enfuyait par la grande porte. Il faut dire que les cheveux qui se nouaient seuls en cornes et l'ombre surnaturelle qui semblait suivre la gothique n'aidaient pas. Le silence s'imposa lentement sur eux. Rachel avait disparue bien avant que ne claque le montant. La bureaucrate posa ses lunettes et se lissa les ongles en soupirant.

-Qu'est-ce qu'on va faire pour cette folle furieuse ?
-Rien. Je n'ai aucun pouvoir sur elle.
-Alors on va la laisser faire son speech à d'autres ?
-Qu'importe. Elle creuse sa propre tombe en agissant ainsi. Personne n'est assez fou pour accepter cette requête. Et une fois qu'elle aura essuyé quelques refus, elle mûrira un peu.
-Vous êtes sûre ?
-Je l'espère.
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Le grondement incessant comblait l'atmosphère d'oppressants sons humides. Amplifié par les échos de l'écume bouillonnante contre parois de pierres, de briques ou de roches brutes, il bourdonnait aux oreilles comme si une ruche entière avait décidée qu'un tympan serait le plus calme des endroits pour nicher. Pour cette raison, peu de marins parlaient lorsqu'ils franchissaient ce pont gigantesque qui joignait les deux berges d'une seule et même île. Qui joignait le tribunal et la tour de la justice de cette terre qui jamais ne dormait. Peu de gens s'y arrêtaient d'ailleurs, devant cette cascade sans fin. Les abysses sont effrayantes même pour l'élite et la peur du vide n'a d'égale que l'attirance qu'il exerçait sur les gens. Alors on ne s'y arrêtait pas plus de temps qu'il était nécessaire au mousse pour jeter une pièce par dessus son épaule, dans cet abime qui semblait le contempler de toute son entière infinité. Pour la chance, la Dame ou par superstition. Et si personne ne pouvait s'empêcher d'y jeter un regard ou un œil pour les plus audacieux, il était plus rare que l'on s'y arrête, que l'on s'y assoie et qu'on s'y perde.

Pourtant, la silhouette noire était là, perchée sur une arête de roche que les constructeurs avaient délaissée à cause de son apparente fragilité lors de l'érection de l'édifice qui faisait aujourd'hui la gloire du gouvernement et de la marine avec Marie Joie. Elle était là, simplement. Comme la veille et l'avant veille. Certains se demandaient si elle avait bougée. D'autres se gaussaient qu'elle était morte. Mais personne n'était allé s'enquérir de cette information auprès de la principale intéressée aux anglaises noires. On parlait, au sein même d'Enies, et l'on savait que Rachel n'était pas au mieux de sa forme. Au moins était elle sortie de sa chambre.



Elle était allée voir Lin pourtant.
Lin qui allait repartir sur les blues.
Elle n'avait pas réussi à recroiser Ryuuku. Disparu avec un amiral, selon d'autres.

L'eau qui chutait était un spectacle dont elle n'arrivait pas à se défaire. Une allégorie de sa propre existence qu'elle tentait vainement de nier. Ça la fascinait. Ce combat du vide contre la mer. Un statut quo que personne ne pouvait briser, que personne ne pouvait rompre. D'où venait toute cette eau ? Où disparaissait-elle ? Le bout de ses chaussures oscillait devant ses yeux, suspendus au-dessus de cette immensité. Comme une lente complainte. Une sourde prière. Un désir ardent qu'elle étouffait de sable mais dont elle couvait les braises.
Les jours se suivaient. Mais ici, sur cette île qui ne dort jamais, le seul rythme horaire était celui qu'instaurait le sifflement aigu d'un train qui arrive en gare ou le martèlement des centaines de bottes à chaque quart sur les pierres froides et impersonnelles de l'île de la Justice. Aussi estimait-elle à quelques deux jours le temps passé ici. Le regard rivé sur cette eau, mais l'esprit ailleurs. Elle sondait cet abime étourdissant à la noirceur entêtante de ses yeux verts et parfois, elle se surprenait à fixer cet horizon infini. Inconsciemment rivée sur ce Nord qu'elle commençait à peine à apprivoiser. Red est là-bas.

Un jour viendrait le temps de sa migration.

Un jour.

*****

-Commandante Blacrow !

Rachel se détourna. Elle détailla ce grand homme, cheveux brossés, qui la dominait de ses deux mètres et qui, le souffle court, avait le visage buriné par un mélange d'excitation, d'appréhension et d'empressement.

Rachel ne répondit pas. Elle attendit simplement que l'homme aux épaules charnues et aux hanches solides ne reprenne son souffle.

-La Valkyrie arrive. Et... Comme vous m'aviez demandé... je me suis dit que... je pensais...
-Merci beaucoup. J'arrive.

*****


Quitter le grondement assourdissant d'une cascade sempiternelle pour le tintinnabulement des mats et les mouette stridulantes avait quelque chose d'étrangement dépaysant. Comme des vacances à la campagne ou mettre des boules quiès pour dormir dans le Puffing Tom. Et l'effervescence nouvelle qui régnait dans les rangs des marins du coin se teintait de terreur et d'admiration. La moitié de leur cerveau se sentait honorée d'avoir vu passer la grande Valkyrie tandis que la plus rationnelle -qui domine les émotions- leur intimait de faire dans leurs frocs et de se tirer en vitesse. Une atmosphère qui convenait parfaitement à notre commandante qui déambulait au milieu de cette foule paniquée et traversait ces émanations d'effroi avec un calme olympien. Pire, aux autres paires d'yeux, elle semblait gagner en assurance comme elle s'approchait du navire de la Colonel d'élite. Elle se serait nourrie de cette ambiance de train fantôme que ça n'aurait étonné personne. Et les cornes noires torsadées qui ornèrent soudain son crâne permirent à certains de l'affirmer.
Rachel s'invita auprès des plus proches du navire. Ou du moins, ceux qui semblaient les moins perturbés par la venue de Mona Lisa. Probablement parce qu'ils arrivaient avec elle. Elle ne posa pas la question et d'ailleurs, si sa curiosité lui en voulut, elle s'en fichait. Elle demanda juste avec l'amabilité qu'elle réservait à ses supérieurs si la Valkyrie était là. La réponse fut simple : Non. Elle dut insister un peu plus pour apprendre qu'elle reviendrait d'ici peu. Qu'elle passait juste pour officialiser son départ et s'arrêter prendre quelques muffins pour la route. Les meilleurs de Grand Line, ajouta-t-il avec un air rêveur. Rachel lui accorda bien ça et finit par lui demander si elle pouvait l'attendre ici. Son puissant regard vert et ses cornes lui permirent d'en obtenir l'autorisation. Aussi monta-t-elle à bord sous le regard mi-pomme mi raisin de cette homme à la barbe drue qui tendit vainement un bras surpris pour l'arrêter.

Rachel salua poliment les gens à bord du navire. Ils voulaient repartir dès que possible. Elle voulait repartir dès que possible. Ça arrangeait aussi notre faucheuse devenue simple sabreuse. Elle porta un regard triste sur le sabre qui pendait mollement à son côté, bien trop léger pour elle, et détourna finalement son regard pour filer s'installer sur le bastingage. Jambes ballantes au-dessus des quais. Le regard perdu sur Enies et les rayons d'un soleil éternel.

Puis après une attente qui lui parut interminable au regard des journées perdues dans la contemplation de chutes, Il y eut un mouvement de foule au loin. Les portes s'ouvrirent pour la laisser passer, un carton gros comme une tête de géant sur l'épaule. Les muffins, déduisit Rachel en sautant de son siège pour paraître à peine plus présentable. Il fallait avouer que sur le navire on la regardait déjà avec cet air étrange que l'on réservait d'ordinaire aux fous et aux touristes pendus à leurs den-den photo. Au loin, la silhouette de la Valkyrie se rapprochait et on s'écartait d'elle plus vite encore. Parfois accompagné d'un cri apeuré ou d'un évanouissement. Pour le commun des mortels, elle était terrifiante. Pour Rachel, elle était fascinante. Et elle venait directement à elle. À quelques pas près, à quelques minutes, elle embarquerait avec eux. Vers l'île des amazones, sûrement. Vers la gloire, certainement. Renouer avec ce qu'elle avait perdue en débarquant ici.
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Vers la gloire, vers l’avenir, vers le monde, vers la conquête de la terre, vers…

La chance sourit aux audacieuses Monalisam_imagesia-com_3kh7_large

Qui c’est, elle ?
La commandante Blacrow, dit le mousse qui la suit sans une once d'hésitation. Te voilà célèbre après toutes ces frasques. Une réputation te précède.
Hun.

Vers tout ce que tu veux, oui. Mais avant de partir avec toi à son bord, la Valkyrie a quelques trucs à régler avec toi. Du genre : T’es qui toi et qu’est-ce que tu fous là ? Alors, oui forcément, quand Mona Lisa grimpe sur le pont du navire et te voit, toi toute pimpante et prête à partir, elle ne peut s’empêcher de questionner parce que tu sors de son ordinaire. Elle fixe son œil noir sur toi et s’approche avec un faciès stoïque et glacial, en parlant de toi comme si tu n’étais pas vraiment là. Tu peux voir un petit nerf se contracter sur sa joue lorsqu'elle comprend qui tu es et d'ou tu viens, sûrement un signe qu’elle essaye de sourire mais qu’elle n’y arrive pas.

Avec sa réputation de frigidaire ambulant, avoir un semblant de sourire nerveux, c’est peut-être bon signe. Peut-être, car avec la Valkyrie rien n’est sûr. Elle finit par simplement se détourner et avancer à grand pas conquérant jusqu’au capitaine du navire en charge de l’expédition. Tu n’es pas loin et tu as l’ouïe assez fine pour tout entendre. Et c’est sans un regard dans ta direction alors qu’elle parle encore de toi et de ta présence sur son embarcation qu’elle lance d’une voix froide :

C’est celle qui s’occupera de faire ma chambre ?
Euh… Non. Du tout. Elle… Elle n’est pas dans l’équipage.
Donc elle ne fera pas ma chambre.
Non… Mais elle est commandante, elle pourra vous seconder... Et puis, si elle est commandante elle ne se charge pas de l'entretien des-
Et alors ? Soit elle fait mon lit, soit elle descend du bateau. Ou alors, elle va se terrer comme un rat dans la cale. Mais je ne veux pas la voir ici.

Et tant que je peux la voir, on ne part pas.
    -Je ferai votre lit.

    Rachel se tenait juste derrière elle. Dans son dos. La Colonel était pourtant plus grande qu'elle de presque une tête. Lorsqu'elle se retourna alors, notre commandante eut l'impression de faire face à une statue gravée dans le marbre. Autant pour la rigueur de ses traits que pour la froideur de son regard. Elle déglutit avec difficulté malgré l'air revêche et décidé qu'elle arborait encore. Dans ses yeux verts, on pouvait déceler la pointe d'amertume qui n'y était pas avant l'arrivée de la Valkyrie.

    -Je vous servirai vos repas et vous ferai la conversation, si vous le désirez...

    Par bravade -ou pour s'assurer un ancrage incertain- elle avait la main posée sur la garde du sabre qui remplaçait sa faux manquante. Qui faisait office de bouche-trou. Car elle se tenait devant Mona Lisa et disait tout haut ce que d'autres n'auraient jamais osé penser tout bas : s'opposer à elle. Et si notre commandante avait cette impression qu'a d'ordinaire l'écume contre une falaise, elle savait au moins que la patience et le sel avaient raison de ces pics abruptes. Autour d'elles, un vent souffla mais laissa les voiles inertes. Un vent d'inquiétude. Parce que si Rachel proférait des mots en apparence anodins, l'assurance qui emplissait sa voix et animait ses cordes vocales laissaient entendre qu'elle n'en avait pas finie. Elle ancra son regard émeraude dans l’œil obscur et fermé de la Valkyrie. Elle s'était sentie minuscule face à la cascade. Elle se sentait maintenant insignifiante.

    -Je saurai également vous conseiller, vous écouter, vous obéir, vous suppléer, vous épauler...

    Devant Tetsuda aussi elle s'était sentie insignifiante. Elle n'avait été qu'une fiente sur la figure de proue de leurs navires. Elle en avait marre d'être prise de haut, d'être regardée à la volée comme ces regards que l'on jette aux mendiants. Marre d'être ignorée. Elle avait cru que prendre son envol d'entre les jupons de Salem avait été dur. Ça l'avait été, mais ce n'était rien comparée à cette sensation désagréable d'être abandonnée sur l'île de la Justice, comme jetée aux requins. Un caneton aussi vilain que dans l'histoire. Elle valait mieux ! Pourquoi ne voulaient-ils pas le comprendre, tous ? Elle n'était pas Toji !

    -Mais s'il vous plait, si vous devez me parlez, regardez-moi en face !

    Je vous en prie...
    ajouta-t-elle dans une prière qu'elle trouva profondément absurde et qu'elle regretta presque aussitôt.
    • https://www.onepiece-requiem.net/t889-fiche-de-rachel-100
    • https://www.onepiece-requiem.net/t816-rachel-la-grande-faucheuse#8700
    Pourquoi est-elle toujours là ?

    Après tout ton discours sur le comment tu vas lui être super utile durant la durée de son voyage, elle ne répond que ça, de quoi te rendre chèvre. En fait, elle a arrêté de t'écouter après "je ferai votre lit" parce que ça répondait à sa question et qu'il n'y avait, de fait, plus de problème. La suite, elle l'a entendu sans avoir envie d'y réagir, les émois d'une jeune commandante ne l'interessant que peu.

    Et c'est avec un regard terrifiant qu'elle finit de se tourner vers l'assemblée, pour souligner un fait qui commence à lui dresser les cheveux sur la tête :

    Pourquoi je n'ai pas mon café ?

    Il y a un cri dans la foule et tout le monde retient son souffle. Son café (enfin, ses cafés vu qu'elle doit en boire au minimum six par jours) est la seule chose capable de la rendre un peu plus souple. Paradoxal, lorsqu'on sait que le café énerve plus qu'il n'apaise. Et tous se tourne vers toi d'un seul homme comme pour voir ce que tu as à répondre à ce problème épineux dont tu es vraisemblablement la solution... Et vu que tu ne réagis pas, un mousse à côté se penche à ton oreille pour te dire :

    - Noir, serré et sans sucre.

    Forcément...

    On lève l'ancre.