Un raclement. Le vent caresse les haut'z'herbes, devant moi. Le vent se lève, un peu plus encore qu'y'a cinq minutes. Elles balancent, les têtes vertes, d'arrière en avant. Je continue. La maison n'est plus loin. Je suis fatigué. Harassé. Pas physiquement, non. C'est juste que... j'suis en descente. Une bonne grosse descente de mégalomanie, dans les hautes herbes. Nu. Et poilu. J'repense à c'qui vient d'se passer... D'une façon soirnoise, cette île m'a prise. J'commence à comprendre le pourquoi de son nom. ... Un raclement. Je passe les hautes herbes... Quand j'y pense, moi qui voulais passer ici en éclair. Poser mon cul, souffler un brin puis surtout, surtout ne prendre parti, pour personne. Et m'voila, comme un con, qu'a pris parti, contre tout l'monde. Ca doit être dans l'sang. Ou p't'être est-ce le titre... Corsaire. Non. J'ai pas attendu d'l'avoir pour commencer à m'prendre ces trips de hauteurs. Non, c'est pas l'titre. Pas l'sang. C'est juste le panache. Un raclement.
La maison au loin apparait. Il était temps. Gambader comme un bestiau m'a crevé, vraiment. J'en traine les pattes, qui raclent le sol de temps à autre, lançant mes plantes de pieds dans un combat sans merci avec les cailloux, au sol. Pas besoin d'préciser, les caillous perdent. Mes toutes ces guerres, grandes et petites, me donnent faim. Et je me sens très clairement l'envie d'carapater ma carcasse suante et odorée vers la luxueuse, et rapprocher ainsi l'heure de la bâfre. Mais je n'en fais rien. Parce qu'affamé veut pas dire stupide, et que je suis en terrain ennemi. Revenant d'une expédition incognito qui plus est. J'cavale donc, en planque, vers l'arbre l'plus proche, et j'le grimpe. Ouaip. Bien calé dans les feuillages, j'peux admirer l'paysage, pis l'passage aussi. Mais personne en vue. Je scrute je scrute. R.A.S. . A moins que... Dans les airs, face à moi, une ombre évolue, petite. Elle s'approche. C'est un oiseau, pas n'importe lequel, une mouette. Livreuse de surcroit. Ca faisait longtemps qu'j'les avais plus vues tiens, ces livreuses de gazette. D'un pouce volontaire mais discret, lui fait mine de se ramener. Ces piafs là ont d'bons yeux, elle m'repère tout d'suite, s'approche, l'aile molette, de mouette. A ma vue, elle s'rosse un peu, hésite. Un Gorille va-t-elle la payer? La réponse est oui, mais ne me demandez pas d'où sortait le billet. Des berrys disparaissent, et un journal apparait. Je l'ouvre.
...
Quand j'entre dans la baraque, j'ai la gueule fendue d'un sourire d'éjaculateur précoce. J'me sens bien. Beaucoup de nouvelles. Des bonnes, je sais pas, mais des réjouissantes, ça c'est clair. J'espère que Micha' est d'jà là, parce qu'j'ai envie d'lui annoncer la nouvelle. Pas celle de notre guerre totale qui s'prépare. Pas celle de la déroute de la marine à Impel Down, lue dans l'journal. Pas celle de la trahison du deux de meilleurs éléments de la marines. Non Non. J'ai juste envie d'lui dire:
Tahar est sorti de prison et, main à couper, on va le revoir. Héhé.