Année 1625,
Cap des phares jumeaux
Cap des phares jumeaux
Après avoir reçu la lettre, l'avoir rangé précieusement, j'ai repris mon entraînement au sabre. J'ai tenté de faire des lames d'air, sans succès vraiment. Depuis, je réfléchis, assis sur un rocher. Le soleil s'est levé depuis quelques minutes. Presque une heure en fait. On y voit comme en plein jour. Tout me semble démesuré. Ce n'est pas comme chez moi où tout est petit. Sur mon île, tout est entassé. Faut dire aussi que Troop Erdu, c'est pas le meilleur endroit au monde. Petit, je rêvais d'aller sur Grand Line, de faire des combats épiques contre des adversaires renommés. Maintenant que je suis à l'aube de cette ère, c'est différent. Tout diffère de mes rêves de gamins. Le monde me semble plus noir que jamais, plus profond, plus intense. Je prends conscience de ce que je risque. Sur les Blues, ça a toujours été facile pour moi. Ou presque en tout cas, car je connaissais les lieux. Mais là ... je ne connais rien. Je ne suis qu'un gamin dans l'océan des grands. Je vais aller sur la seconde voie, mais je ne sais même pas quelle île je vais croiser, à part Kuraigna. C'est sûr qu'ainsi, c'est plus amusant, plus pétillant. Mais plus dangereux. N'ayant pas d'équipage, étant seul, je dois réduire les risques au minimum. Personne pour me protéger, pour assurer mes arrières, pour m'aider. Puisque je ne suis pas riche, je vais devoir faire attention encore plus à l'argent. Maintenant que j'ai mon entreprise, je vais gagner des sous à intervalle régulier. Plus qu'avec mon salaire. Mais ce n'est pas une raison pour tout dilapider. Je crois que je vais essayer de me faire discret. Et puis merde. On verra bien comment je la joue une fois sur place. Ça ne sert à rien de prévoir. Je ne connais pas les îles. Donc tout ce à quoi je pense pourrai être faux. Mon père m'a toujours dit 'Sur Grand Line, oublie ce que tu sais, ça ne te servira à rien'. C'est un endroit dangereux, je le sais. A moi d'être encore plus dangereux si je veux survivre. Tiens, un bateau se pointe à l'horizon. Et on dirait qu'il avance droit vers le cap. Serait-ce le drakkar ? Possible. Les voiles sont entièrement noires. C'est tout ce que je peux voir de loin. Il se rapproche, finissant par accoster. Là, une quarantaine de types sortent du navire. Un petit bateau, sans envergure. Je commence à douter que ce soit le bateau envoyé par la transilienne. Je me relève, main droite sur la poignée de mon sabre. J'avance à la rencontre des cinq qui se détachent du groupe.
"Bonjour.
Tu as la lettre, pas vrai ?
Quelle lettre ?
Ne fais pas l'innocent. La lettre pour les épreuves. On avait attrapé la bestiole, mais elle a réussis à s'enfuir. On l'a suivit, et elle nous à mener jusqu'ici.
C'est vous qui l'avez blessé ?
On s'est amusé un peu. Mais elle s'est libéré avant que le cuistot n'arrive.
Vous êtes des monstres.
File nous la lettre, gamin, et on te tuera rapidement.
Et si je refuse ?
Hahahahahahaha. Un gamin, tout seul, abandonné au cap. Personne pour te sauver aux alentours. Tu es tout seul. On est quarante. T'es qu'un petit marin. Tu ne peux rien contre nous.
Un petit marin, hein ? Dans ce cas, qu'attendez-vous pour venir chercher la lettre ?"
Je la sors de ma poche intérieure et la leur montre. Le type tend son bras pour la saisir. Je lui frappe le coude avec mon autre main, tout en rangeant la lettre à sa place.
"Vous n'aurez pas la lettre. Pas la peine d'essayer. Je l'ai trouvé, elle est à moi.
Tu penses vraiment que tu fais le poids face à quarante adultes comme nous ?
Vous savez quoi, je vais vous faire un cadeau. Je ne vais pas utiliser de techniques contre vous.
A l'attaque !"
Comme je m'y attendais, il perd son calme. Ils me foncent tous dessus. Les cinq étant juste devant moi, je dois avoir vingt secondes avant que les autres ne les rejoignent. Je parie que je vais me faire entourer. Tactique typique des lâches. Ils foncent, poings en avant. Je me laisse glisser sur le sol. Les prenant au dépourvu, le temps qu'ils ajustent leur trajectoire, je leur frappe dans le genoux gauche avec mes poings. Perdant leur équilibre, ils tombent sur le sol. J'en soulève un. Ma main droite sur sa gorge, la gauche dans son dos. Je le soulève au niveau de la tête, le met presque à l'horizontale, puis je le lance sur le sol. Le sol reçoit mon cadeau, qui ne se relève pas. Bon, puisque trente neuf. Bienvenu sur Grand Line ! Les hommes sortent leurs sabres, je fais de même. Si quelqu'un arrivait à cet instant, il dirait que je suis foutu. Pourtant, si quelqu'un mène le jeu, c'est moi. Je recule de trois pas, les forçant à avancer. Une masse chaotique me fonce dessus. Cette marée humaine ne possède que des bras et des épées. Ils sont ensembles, mais désorganisés. Première faille. Tous regroupé, mais attaquant individuellement. Seconde faille. Si je me met sur la défensive, ça sera un combat d'usure, que je vais peut-être perdre. Alors dans cette situation, je fais la seule chose à faire. Mais avant, je monte sur mon petit rocher, de manière à être en hauteur. Puis je m'élance. Je saute pour atterrir en plein milieu des attaquants. Certains s'écartent, d'autres n'ont pas cette chance. Ils finissent écraser par mes soixante dix kilos. D'un geste circulaire, je fais reculer les autres. Voilà, je suis en plein milieu d'eux. Et je vais profiter de la cohue un maximum. Tant qu'à faire, tirons-en parti. Je charge. Sabre en avant, je frappe. Encore, et encore. Le bruit du métal qu'on abat contre un autre résonne. Les cris des guerriers s'affaiblissent rapidement. L'esprit de combativité qu'on lisait dans les yeux s'évanouit au fur et à mesure que je laissais des hommes sur le sol. Je ne les ai pas tué, non, bien sur. Mais j'ai frappé assez fort pour qu'ils ne puissent plus bougé, soient sonné ou soient incapable de poursuivre le combat. Dix sont tombés. Trente restants.
Je taille dans la chair, au niveau des avants bras autant qu'il m'est permis de le faire. Je frappe sec, provoquant des entailles. Elles sont juste assez profondes pour faire souffrir quand ils utilisent leur membre, mais pas assez pour causer une hémorragie s'ils arrêtent de bouger. A l'école, on nous apprends à se battre. A frapper pour tuer. Mais pourquoi tuer quand on peut éduquer ? Mon visage est déformé par les combats. Il n'y a pas de rage dans mes yeux, seulement une lueur de joie. J'aime me battre. On se sent plus vivant que jamais. Mettre sa vie en jeu et s'en tirer, c'est jouissif. Voir la face des ennemis qui se décompose quand ils comprennent qu'on est plus puissants qu'eux, ça n'a pas de prix. Repousser une armée tout seul n'est pas encore dans mes capacités. Mais j'espère qu'un jour j'en serais capable. J'espère qu'à moi seul, je serais capable de changer le cours des choses. Et ce ne sont pas des petits civils mal intentionnés qui vont m'en empêcher. Chacun des adversaires à désormais saisis la différence de puissance entre eux et moi. Ils me regardent avec appréhension désormais. Je fais deux pas en avant. Ils en font deux en arrière. Autour de moi, il y a des corps, dans tous les sens, empilés les uns sur les autres. J'enjambe la petite pile. Je continue à avancer. Ils se séparent en deux lignes. Ils tiennent leurs armes fermement. Je comprends alors que le combat n'est plus nécessaire.
"Est-ce que vous savez pourquoi vous êtes là ? (silence) Pour récupérer une lettre, en ma possession. Vous êtes venu à quarante. Un quart sont au tapis. Est-ce que vous voulez continuer ou est-ce que vous avez compris ? Vous ne pouvez pas me battre. C'est inutile d'essayer. Prenez vos hommes, et repartez d'où vous venez. Jamais vous n'aurez cette lettre.
Si tu négocies, c'est que tu n'en peux plus. Ça fatigue de combattre sans s'arrêter, pas vrai ?
Oui, ça fatigue. Mais il m'en faut bien plus pour cesser les combats. Je peux continuer pendant près d'une heure. Et comme vous me tapez sur le système à insister, j'irai plus loin encore. Je suis dans la marine, vous le savez. Mais savez-vous que je suis un lieutenant ? (des bruits indistincts proviennent des hommes) Oui, exactement. Je peux tous vous faire enfermer si vous continuez. Retournez d'où vous venez, renoncer à cette lettre, et j'oublie votre venue. Tout le monde y gagne. Restez, affrontez moi, perdez et je vous emmène en prison moi même. Vous avez deux minutes pour choisir."
Je recule assez pour qu'ils n'aient pas besoin de passer autour de moi pour récupérer leurs copains. Leur chef étant inconscient, le second prend le commandement. Il est bien sonné, mais parvient encore à articuler des syllabes. Ses hommes vont ramasser les marins, et retournent au bateau. Je peux voir dans les yeux du second qu'il m'en veut. Et alors ? Quelles sont les chances pour que je les recroise sur Grand Line ? Ils montent dans leur bateau, et quitte les lieux. Je me retrouve de nouveau seul au cap. Je reprends mon entraînement. Je suis tellement excité par le combat que de toute façon, je ne peux pas dormir ou réfléchir. Je dois évacuer cette excitation, et rapidement.