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Le paradigme du coquillage.



Un soupir las. Il devait pas être loin de trois heures, la fin de semaine approchait à grand pas. Il repoussa les dossiers sur lesquels il travaillait, hésitant avant de s’y remettre. Puis de s’en détourner à nouveau. Il faisait une chaleur à crever. Les fenêtres étaient ouvertes, mais au lieu d’un faible courant d’air c’était une chaleur atroce qui s’engouffrait dans le bureau. Et si on les fermait, c’était pire. La carafe d’eau était devenue tiède, les grillons chantaient. Décidément pas un temps à travailler. L’heure était aux chants, aux danses. Pour de nombreuses personnes, Shell Town était une destination de rêve, de vacances mais ce n’était malheureusement pas le cas pour tout le monde. C’était peut-être ça le pire … Bon allez, il était temps pour un café. Un peu de mouvement, un peu d’air frais. Soi-disant que les boissons chaudes désaltéraient mieux. Pourtant, c’était de froid qu’il avait envie. Mais il s’en contenterait. Il se leva, s’étira en baillant outrageusement. Dure la vie de gratte-papier du gouvernement.

Comme si elle en devinait les pensées,  la silhouette encapuchonnée dissimulée sur un toit voisin, à vue, secoua la tête. Vêtue de noir, bardée d’armes. Voilà qui donnait une idée de la souffrance : cela faisait des heures qu’il guettait cet instant. Le moment où le fonctionnaire abandonnerait son poste. Une demi-heure qu’il jouait avec ses trombones à procrastiner honteusement ! Il s’engouffra dans le bâtiment en secouant la tête. Il aurait certes pu entrer plus tôt et le neutraliser, mais ce n’était qu’un pauvre hère qui faisait son office. Il doutait que celui-là fut assez alerte pour ne serait-ce que porter une épée. Il fourra ses mains dans la paperasse et crocheta rapidement la serrure du bureau. Il y avait là toute une collection de tampons règlementaires. Pourquoi réaliser de faux papiers lorsqu’on pouvait se servir à la source des accréditations, hé hé …

~~~

« Hm. Tout est en ordre, allez-y. » maugréa l’agent de la Marine en relisant plusieurs fois le document.

Ce fut un charmant jeune homme à la peau hâlée et aux cheveux de jais qui récupéra le papelard. Il avait les yeux océans et un sourire goguenard. Lieutenant ERnest-EVelyn Orélans. Voilà ce qu’on pouvait lire sur le papier. C’était un mandat de perquisition à l’encontre d’une cargaison arrivée tout droit d’Hinu Town, du moins soi-disant. L’officier avec un sourire malicieux puis le rappela à l’ordre et mentionna assez brièvement ‘cours de discipline’. Juste assez pour le faire blêmir et se mettre au garde à vous. Cela fait, il entra dans l’entrepôt et commença son inspection. Grâce à son mandat factice, il avait pu suspendre l’arrivée des travailleurs et se réserver l’entrepôt pour lui seul afin de mener ses investigations. Il suspectait depuis plusieurs jours un trafic au sein des marchandises livrées dans ce hangar. C’était une affaire assez importante car il s’agissait des suites d’une entreprise menée il y avait cela plus d’un an à Hinu Town où il avait été jusqu’à confronter la royauté pour mettre en branle une organisation du crime. C’était là une des dernières réminiscences de cette organisation qu’il essayait de mettre à mal.

En effet, il y avait à Shell Town un receleur de talent qui parvenait à refourguer armes et opium sans que cela ne transparaisse. L’assassin avait donc décidé de s’infiltrer directement au sein des administrations compétentes – façon de parler – pour simplifier ses investigations. Ce n’était pas la première fois qu’il voguait à travers elle dans cette ville, ce qui l’arrangeait particulièrement car il en connaissait les rouages. Il avait mandaté quelques uns de ses contacts pour lui fabriquer une identité tangible avec quelques dossiers bien placés qui lui attribuaient des états de service fictifs, ce qui expliquait le besoin du mandat signé par un tampon officiel et fabriqué de toutes pièces. Il commença ainsi à farfouiller dans les caisses à la recherche de son but. La tâche était d’envergure : il y avait là plus d’une centaine de boîtes en tout genre, étiquetées sous des noms toujours plus étranges les uns que les autres … De quoi décourager n’importe qui sauf lui.
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- Hahaha, eh ! La nouvelle ! Viens par ici ! Regarde moi la tête qu'il a celui-ci...

Je me déplaçais en roulant sur la chaise rembourrée associée à mon bureau. Le Binoclard - c'était comme ça qu'on l'appelait - avait sorti les dossiers de recrutement des différents fonctionnaires de la base et cherchait les petites anecdotes marrantes dans les informations de leurs curriculum vitae. Ce gars était une peste, il avait un humour vraiment merdique, mais on pouvait lui reconnaître une certaine intelligence, celle d'un fervent spectateur de Des Chiffres et des Lettres, de Motus ou de Question pour un Champion. C'était d'ailleurs pas pour rien qu'il bossait au service comptable et fiscal de l'établissement. Personne pouvait vraiment le blairer, moi non plus d'ailleurs, mais j'avais bien été forcée de partager son bureau, puisqu'il n'y avait aucun autre endroit de libre dans le bâtiment pour que je m'y installe. D'ailleurs il était tout aussi malheureux que le gaillard ait accès aux documents des Ressources Humaines.

- Et regarde celui-là, son nom si on l'écourte ça fait "Tet' Deu Bitt".

Je pouffais de rire maladroitement. Pourtant c'était affligeant comme blague, mais tellement stupide que ça en devenait drôle. Tetsuo Deugma Bittelagio, déjà rien qu'à la base c'était pas très facile à porter, alors si en plus Le Binoclard en rajoutait une couche... Et dire que ça faisait trois jours que j'étais là, infiltrée comme Sergent, a trier la paperasse que rédigeait constamment l'autre abruti à lunettes, lorsqu'il n'était pas en train de faire de l'humour vaseux. Tout ça car j'avais - sans faire exprès - fait exploser une bonne partie de l'aile ouest du QG d'East Blue en essayant de m'améliorer au tir au canon à main. Ao Novas m'avait donc envoyée ici, en pénitence autant qu'en dédommagement, dans le but d'effectuer durant une courte période le travail d'un employé de la Marine.

- Ahah, mais la plus grosse coïncidence que j'ai pu rencontrer aujourd'hui, c'est un Lieutenant qui vient juste d'arriver à la base : il s'appelle Ernest-Evelyn Orélans.

- Et alors ? Demandais-je, le sourcil droit légèrement levé.

- Bah, si on prends les deux premières lettres de ses prénoms et la première lettre de son nom de famille, avec en plus la première lettre de son grade avant, ça donne LE REVO. Ah, cet acronyme est plutôt tiré par les cheveux, tu trouves pas ? Par contre, j'ai aucune information sur lui, pas de papier, rien, je l'ai juste vu tout à l'heure se présenter à l'entrée...

Je me passais la main sous le menton. Il était vrai que c'était une sacrée coïncidence, tout autant qu'il était vrai que c'était vachement tiré par les cheveux. Et en effet c'était aussi bizarre d'avoir aussi soudainement un nouveau Lieutenant dans le coin, alors que rien de la sorte n'avait été prévu au niveau administratif. Non, le chef m'avait bien prévenue que j'étais un cas spécial et qu'ils n'avaient pas l'habitude d'envoyer des agents s'infiltrer dans les rangs de la Marine lorsqu'il n'y a rien de louche, que Shell Town était l'endroit le plus tranquille et le plus chiant d'East Blue. D'ailleurs pour vérifier ça, il régnait une chaleur abominable sur l'île qui, pour les plaisanciers se révélait être un bonheur, mais pour les fonctionnaires une véritable hécatombe. Dans tous les cas, il me semblait pertinent de rencontrer ce fameux Lieutenant Ernest.

***
Ah, j'étais enfin libérée de cette horrible torture qu'était ce terrible local où je devais supporter continuellement et la chaleur torride due aux problèmes d'aération, et les migraines que me fournissait le branquignol de la comptabilité. Tout en remontant jusqu'à la surface - car oui nous étions domiciliés dans les sous-sols de la base - je savourais la fraicheur de l'air rendu par les ventilateurs du plafond. D'après ce que j'avais pu en soutirer au Binoclard, le nouveau avait son bureau au cinquième étage. Il me fallut donc grimper sept paliers à partir de mon bureau pour finalement y arriver en nage.

Le bâtiment était vaste et bondé de fonctionnaires qui s'activaient dans tous les sens, mais personne ne faisait vraiment attention à un sergent qui vagabondait. De longs couloirs débouchant sur une importante variété de pièces se succédaient à des gigantesques salles aménagées en open space. J'arrivais finalement jusqu'à de véritables offices où quelques gradés vaquaient à leurs occupations. Le colonel étant en congés, ces-derniers faisaient réellement ce qu'ils voulaient. C'était presque si l'un d'eux attendait mon départ pour ressortir la raquette de ping-pong de son tiroir et reprendre sa partie effrénée de tennis de table avec son adjoint. Enfin, je le trouvais, le nouveau, il était là, à farfouiller discrètement dans les boites de l'annexe du bureau du colonel, une sorte de petit local de stockage où étaient stockés tout un tas colis militaires. Il ne m'avait pas vu, excellent. Je reculais jusqu'à l'entrée de la pièce adjudante où se trouvait le poste du Lieutenant douteux et fermais la porte aux trois quarts discrètement. Enfin, je toquais avant de prévenir ma venue d'une voix innocente.

- Lieutenant Orélans, puis-je entrer ?

Au bout d'une dizaine de seconde, l'homme vint m'ouvrir, l'air de rien. Pas moche, le bougre, avec sa barbe de quelques jours, son teint mat et son corps carré aux allures costaudes. Une légère cicatrice à peine visible s'étendait sur quelques centimètres au dessus de sa lèvre supérieure.

- Euuh... B'jour ! Excusez-moi d'vous déranger. J'suis votre nouvelle secrétaire, Elizabeth Butterfly, héhé. Nous sommes censés travailler ensemble, vous n'avez pas été informé, m'sieur ? Ben... voilà !


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Mer 21 Oct 2015 - 3:45, édité 6 fois
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Vingt-deux, Vingt-trois … Et à chaque fois avec minutie. Le Lieutenant déguisé enfonçait ses mains jusqu’au coude dans les caisses, cherchant tant bien que mal des paquets douteux ou des armes habilement dissimulées. Pourtant, depuis la chute d’une grande partie du réseau d’Hinu Town, il aurait espéré que ses cibles rapatrient les stocks en maximisant les imprudences. Pourtant, il n’avait rien vu jusqu’à présent dans le hangar. Alors il avait décidé d'utiliser son sauf conduit pour aller encore plus loin et fouiner dans les affaires du Colonel en personne. Son bureau avait une annexe où l'on stockait les preuves et qui pouvait parfois servir de débarras pour les affaires pressantes. Du fait de l'absence du Colonel, c'était la seconde solution qu'il fallait privilégier. Et puis on ne savait jamais, si quelque chose se dissimulait dans les preuves ... Pourtant, c'était à croire qu’il faisait chou blanc. Il ne fallait pas se précipiter, il n’avait pas encore fait la moitié des caisses après tout. Se remontant une nouvelle fois les manches – l’uniforme bleu et blanc n’arrêtait pas de lui tomber sur les poignets – il acheva de fouiller la caisse en cours et replaça le couvercle et le condamna avec les quelques clous qui étaient encore en place. S’emparant d’un pied de biche, il commença à en ouvrir une vingt-quatrième lorsqu’un léger bruit attira son attention. Avec un froncement de sourcil, il se retourna pour dévisager la donzelle dans la lumière du jour. Il déglutit, posa son pied de biche sur la caisse, rebaissa ses manches puis s’en alla ouvrir la porte. Il ne répondit pas à sa question mais ouvrit simplement la porte. Il n’était pas le Lieutenant le plus agréable du monde …

« Je n’ai pas été informé, non. » lui fit-il, suspicieux.

Il l’inspecta de haut en bas, comme aurait presque pu le faire un Lieutenant vicelard. Pourquoi donc lui aurait-on confié une secrétaire ? Il n’en avait pas besoin, c’était plus que louche. Avait-on découvert son petit stratagème ? Avait-il était trop audacieux dans ses frasques ? Elle correspondait presque au tableau que l’on pouvait se faire de la secrétaire. Avec une petite touche d’innocence qui enjolivait le tableau. Il hésita à lui demander son ordre d’affectation mais se retint, pensant que cela ferait vraiment un peu trop suspicieux. D’autant plus que ce qu’il faisait était ‘autorisé’ par la Marine. Pourquoi ne pas accepter un peu d’aide ? Hé hé … Mieux valait l’avoir à l’œil, près de lui. Il ne croyait pas que cette secrétaire fut là pour de bonnes raisons, si elle était secrétaire. Il aurait pu croire à ce jeu s’il n’avait pas lui-même été un infiltré dans le camp de la mouette.

« Soit. C’est fort aimable de m’envoyer quelqu’un pour me prêter assistance. J’ai presque cru à un bizutage jusqu’à maintenant. » lâcha-t-il sur un ton qui se voulait neutre.

Il l’invita à entrer puis s’essuya les mains en allant récupérer son pied de biche. Il lui montra l’ordre de perquisition dans un coin de la pièce, posé à la va-vite.

« Je dois inspecter les caisses estampillées en provenance d’Hinu Town. Il y a une fiche avec leur contenance supposée sur chacune d’elles et je dois vérifier le contenu. J’en ai déjà inspecté cinquante-trois. Tu veux bien me suivre et cocher celles qui sont réglo ? » lui demanda-t-il, passant naturellement au tutoiement.

Tutoyer n’était pas dans les états de fait d’un Lieutenant, mais il ne parlait pas à un Marine après tout. Et puis il avait fait en sorte d’obtenir une couverture assez gradée, donc cela pouvait aussi passer pour un excès de bonne volonté. Il fit passer la secrétaire devant lui, tâchant de garder un œil sur elle. Il regretta un instant de ne rien avoir de l’attirail d’assassin sur lui. Seule son éternelle rapière Auditore était venue avec lui, trônant à sa taille. Une arme de belle facture, à vrai dire, mais une arme simple tout de même. Il n’aurait, de toute manière, pas tué une pauvre secrétaire. Mais il se doutait bien que ça allait au-delà, et ça l’énervait. Il restait pourtant de marbre, allant même jusqu’à lui offrir un sourire compatissant. Son appétit carnassier était assez connu, lui aussi. Et à l’instar de tous les agents secrets qui se pavanaient en costume, les femmes restaient l’un de ses points faibles. Bah oui, il était l’agent secret de la révo, ou ce qui s’en rapprochait le plus.

Les deux comparses se remirent alors au travail, l’assassin gardant un œil sur la donzelle et sur les caisses à la fois. Il les ouvrait et les refermait à un assez bon rythme et faisait passer sa méticulosité pour du zèle. Il plongeait sa main au fond, faisait les coins. Il tombait sur des étoles, des produits en tout genre et parfois même quelques denrées avariées qu’il se faisait un plaisir de signaler à la donzelle. Si en plus de ses propres recherches il y avait des trucs louches c’était parfait, cela crédibilisait d’autant plus son rôle. Jusqu’à ce qu’au fond d’une caisse, la soixante-douzième, sa main ne s’arrête sur quelque chose de dur. Une caisse de soieries coquettes. Il écarta le tissu, révélant du bois blanc sans identification. Clairement quelque chose qu’on essayait de faire passer en douce. Il fit une mine surprise – ou s’y essaya – puis fit signe à la donzelle de venir en épiant le moindre de ses gestes. Peut-être venait-elle pour cela, pour l’empêcher de découvrir le pot aux roses ? Il lui montra la caisse en rapprochant sa main de la garde de son épée.

« On est tombé sur quelque chose. » grommela-t-il, laissant quelques secondes se passer avant d’essayer d’ouvrir la caisse.

Des armes. Des armes de la Marine qui n’avaient rien à faire là. C’était visiblement objet de contrebande. L’assassin recula d’un pas, jouant de ce prétexte pour toiser la secrétaire .

« Rassure-moi, Elizabeth … tu n’as rien à voir là-dedans ? » la menaça-t-il, jouant les paranoïaques sans trop de mal.


Dernière édition par Solomon Grundy le Lun 5 Mai 2014 - 14:06, édité 1 fois
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- Rassure-moi, Elizabeth … tu n’as rien à voir là-dedans ? Me demandait-il tout en désignant les armes dissimulées sous les soieries.

Pour tout dire, j'étais moi-même étonnée. Dans un premier lieu car il y avait là contrebande d'armes à feu au sein même des bureaux du Colonel de la base, mais aussi car la situation semblait s'être inversée et j'étais désormais menacée de perdre ma couverture, voire bien plus que ça. L'expression de l'homme était morbide et son regard inquiétant, il valait mieux ne pas faire de vieux os dans le coin.

- Je... je... Non, je vous promets ! Dis-je, prise au dépourvu par la question.

Dans ma tête je n'avais qu'une envie c'était de tirer les choses au clair. Un homme qui n'avait rien à faire ici venait de fouiller les affaires du coin des hauts-gradés et y avait découvert une transaction illégale. Ce qui voulait dire qu'un gars douteux venait de mettre le doigt sur quelque chose d'encore plus douteux. Tout ça c'était trop bizarre pour moi.

- Qu'est-ce que vous faites dans le bureau du Colonel vous deux ?!

Une grande femme trapue venait de faire irruption dans la pièce. Son visage était à moitié dissimulé par la casquette qui lui recouvrait le crâne et son corps était enrobé dans l'habituelle tenue vestimentaire des officiers de la Marine. A en voir ses galons, il s'agissait d'un Lieutenant-Colonel. Sa voix trahissait le fait que sa question soit moins interrogative qu'impérative : elle nous disait de dégager les lieux. Ses yeux fixaient attentivement les caisses, comme si elle cherchait à savoir si nous avions découvert quelque chose que nous n'aurions pas du apercevoir.

- Bah... Euh... Au revoir !

***
Je déguerpissais aussi vite que possible des locaux, rejoignais les escaliers et finis en sommes par sortir du bâtiment. La situation s'était plutôt aggravée et je me retrouvais désormais dans une mauvaise passe. Il me fallait savoir qui était cet officier douteux sans me faire avoir. Le comportement suspicieux de la Lieutenant-Colonel me semblait aussi nécessiter sa petite enquête, mais je me disais qu'en trouvant l'un je tomberais forcément sur l'autre. En attendant il était plus avantageux de rentrer à l'appartement que je louais pas loin de la place centrale de la ville, histoire de décompresser et de clarifier tout ça.

Il s'agissait d'un trois pièces très peu éclairé, dont les fenêtres amenaient directement sur les façades des immeubles juxtaposés. C'était pas cher, mais de toute façon les frais étaient pris en charge par le gouvernement. Devant la porte en bois blanche défraichie, je cherchais mes clés pendant quelques minutes dans ma veste blanche de Marine. Finalement je me souvins que la porte n'était pas verrouillée et qu'il me suffisait de donner un coup de paume dans le panneau central pour que cette dernière se débloque soudainement. A l'intérieur, c'était plutôt le foutoir : il faisait noir, les volets étaient bien évidemment fermés et des vêtements et lingeries trainaient un peu partout. En fait j'avais vachement tendance à m'étaler dans n'importe quel endroit où je me trouvais, il fallait à tout prix qu'à chaque fois je me mette à l'aise.

J'allumais directos mon escargot-projecteur histoire d'être au courant des dernières nouvelles. Comme d'habitude ça ne constituait qu'un bruit de fond tandis que je faisais diverses petites choses comme prendre ma douche, préparer à manger ou lire un livre, quand il ne s'agissait pas tout simplement de monter et démonter mes armes. J'étais donc cette fois-ci en train de me laver quand j'entendis un bruit suspect venant du salon. Quelqu'un aurait-il trouvé un moyen d'ouvrir la porte et de pénétrer dans mon appartement ? Improbable. Pourtant quelques dizaines de secondes plus tard, rebelote. Finalement suspicieuse je sortis de la douche - une serviette autour du corps bien que j'étais persuadée que les remparts de mon studio étaient infranchissables - et me rendis dans la pièce centrale. Rien, comme je l'avais deviné. Pas d'intrus, pas d'espion, juste ma paranoïa qui me faisait défaut. Je laissais donc retomber la serviette à terre, prête à retourner dans ma douche, me retournant déjà vers la cuisine que j'allais traverser pour regagner la salle de bain.

Soudain je le vis, ma boucha lâcha un hoquet de surprise en surprenant ses deux petits yeux tapis dans l'ombre. Tant bien que mal plaqué sous ma table, l'homme avait les joues incroyablement empourprées et semblait visiblement très mal à l'aise. Pendant quelques secondes le silence régna et mon visage ne laissa transparaître aucune expression. Puis, quelque chose fit *Tilt* dans mon crâne. Mes bras se resserrèrent autour de mon corps, camouflant tant bien que mal mes parties intimes, tandis que mon pied volait déjà vers la mâchoire de l'individu.

- MAIS QU'EST-CE QUE TU FOUS LA BORDEL ?!!


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Mer 21 Oct 2015 - 3:14, édité 3 fois
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Ce qui devait arriver arriva. On avait dû informer le responsable des lieux qu’un Lieutenant était entré là avec un mandat et il venait vérifier par lui-même ce qu’il se passait. Evidemment, il n’y avait aucune raison pour que quelqu’un soit là. L’assassin darda un regard interrogateur sur la ‘secrétaire’ puis revint vers la Commandante. Il ne comprenait pas le lien entre l’une et l’autre. Qui avait envoyé la secrétaire en ce cas ? Le Commandant était-elle au courant du trafic ? Le révolutionnaire ne demanda pourtant pas son reste et fila pendant qu’il en était encore temps. D’ici quelques minutes ils se rendraient compte qu’il n’avait vraiment rien à faire ici puis ils essaieraient de le coincer. Et ça, c’était dans le meilleur des cas. Ainsi s’excusa-t-il, tendit le mandat et déguerpit lorsque le Commandant le congédia d’un signe de la main. Elle allait remonter jusqu’au bureaucrate qui avait autorisé cela et ce dernier lui dirait que c’était un faux. Il précéda de peu la secrétaire et fit mine de disparaître dans un couloir avant de revenir sur ses pas et de la suivre de loin. De fil en aiguille, il parvint à localiser où elle vivait mais il n’apprit rien de plus sur ce qui le préoccupait. Pourquoi était elle venue, et comment elle avait réussi à le trouver ?

Il attendit donc la nuit pour se rendre à son domicile. C’était le meilleur moyen pour se trouver seul avec elle et lui baratiner quelque chose afin de la pousser à parler. Inutile de s’y présenter en temps qu’assassin, elle ferait directement le lien. Se montrer en temps que Lieutenant ou même Cipher Pol cela pourrait toujours être utile : le temps qu’elle découvre sa réelle affiliation, elle aurait parlé ou serait morte. Il était bien connu que les cadavres étaient moins loquaces. Il s’infiltra donc sans mal, passant par les recoins d’ombre et les couloirs. Il s’agenouilla devant la porte, tenta de la crocheter avant de se rendre compte comment l’ouvrir. Il força sans succès et se résolut donc à imiter la ‘secrétaire’ et frappa de la paume de la main, espérant que cela ne le ferait pas découvrir. Il entendait du bruit, certainement un visio denden, et la douche couler. Ainsi, c’était peu probable.

L’assassin se faufila dans l’appartement, toujours dans la tenue du Lieutenant, puis entreprit de fouiller le tout. L’eau de la douche s’arrêta alors et chercha du regard un endroit où se camoufler. Pas de meilleur endroit qu’en dessous de la table : les gens ne pensaient jamais à regarder là de toute manière. Un dernier coup d’œil lui permit de confirmer que la donzelle n’était pas ce qu’elle paraissait. Des armes démontées trônaient là, ainsi que quelques autres détails qui trahissaient son affiliation militaire. Etait-elle dans la Marine ? Chasseuse de Prime, ou Criminelle ? Peut-être était-elle-même le contact des truands sur Shell Town. Il resta immobile, silencieux comme une tombe. Il avait encore besoin de fouiller avant de l’interroger et préférait ne pas se faire prendre. Il l’entendit se diriger vers la salle de bain. Sous la table de la cuisine, il risquait d’être visible. Ainsi commença-t-il à se déplacer discrètement lorsqu’il l’aperçut du coin de l’œil. De stupeur, il resta interdit. Pour sa défense, il ne s’attendait pas forcément à la voir nue. Et …

« Heu … Hey. Salut. » grommela-t-il, se sentant stupide de s’être ainsi fait avoir.

De simples formes avaient suffi à perturber son flegme légendaire. L’assassin recula précipitamment, évitant le coup de pied vengeur de la donzelle puis se redressa en levant les mains. La table se scinda en deux.

« Holà, holà ! Je suis pas ton ennemi, Elizabeth … » mentit-il, essayant de lui montrer qu’il ne lui voulait aucun mal en mettant ses mains en évidence.

« Tu sais pourquoi je suis là, juste que heu … je voulais pas que tu penses que j’venais … te mater. » tenta-t-il de s’excuser, faute de mieux.
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- D'accord, si tu le dis.

Eyh, il venait de profiter de ma naïveté d'incompétente influençable ! Mais bon, c'était trop tard pour revenir en arrière, je l'avais accueilli dans ma demeure en manifestant mon approbation. Je m'enroulais dans ma serviette à nouveau et lui tournais le dos.

- Si ça te gène pas j'aimerais finir de prendre ma douche.

Ainsi je fermais la porte de la salle de bain derrière moi et plongeais à nouveau sous l'eau chaude. Je ne me faisais pas de souci, pas tant que ça : il n'y avait rien que le "Lieutenant" puisse trouver qui ne puisse trahir ma couverture d'agent secret infiltré. Bien entendu je ne pensais pas que pour lui j'étais la parfaite "petite secrétaire" comme j'aurais voulu le faire croire, mais cet homme n'avait pas l'air si louche que ça dans la mesure où nous semblions avoir, tous les deux, de nombreux points en commun. Je le suspectais donc d'être un agent d'un autre Cipher Pol plutot qu'autre chose, peut être le CP4, qui était connu comme étant la police des hauts gradés. Mon pied dérapa sur le savon que j'avais malencontreusement laissé par terre lors de ma précédente sortie et je faillis brusquement m'affaler contre le sol.

- Y'a rien d'cassé !! Criais-je, au cas où l'homme prenait finalement l'initiative de venir voir si je n'étais pas morte, et auquel cas il m'aurait trouvée nue à nouveau.

Non pas que je sois très pudique, hein, mais je n'avais pas envie de montrer mon corps deux fois dans la même journée à un inconnu qui a tendance à se camoufler sous les tables des cuisines des pauvres gens. Enfin, après quelques minutes passées à me sécher et éponger le sol de la salle de bain avec ma serviette avant de la mettre au linge sale, je sortis en petite tenue pour aller m'poser sur l'un des fauteuils en faux-cuir qui faisaient face à un vieux canapé en toile pas du tout assorti. L'individu me regardait avec des yeux ronds comme des soucoupes, toujours à la même place. Je me grillais une clope et l'invitais à venir se poser sur le sofa.

- Va falloir t'habituer à ma tenue, hein. J'suis chez moi, j'me mets à l'aise. Pis tu m'as déjà vue à poil alors... Bon, tu vas enfin m'dire pourquoi tu m'suis ?

- Et toi, pourquoi as-tu prétendu être ma secrétaire ?

Arf, touché. C'est vrai que c'était grossier, comme mensonge. Mais bon, j'avais pas vraiment d'idée, ça m'semblait plausible, vu comme ça. J'lui déballe le truc, ne mentionnant que la moitié de la vérité :

- J'bosse dans l'bureau du mec de la compta. Coïncidence, c'est aussi là que sont entreposés tous les documents des ressources humaines, alors que le Binoclard est une vraie fouine. Et figure-toi que cette tête d'ampoule - fascinée des Sudoku et des Mots-Fléchés - est tombée sur toi et m'a dit "tiens regarde, son acronyme ça fait "LEREVO". Du coup, vu que t'es nouveau, j'ai trouvé ça louche. Tous les nouveaux ont l'air louche ici. J'me suis dit que si j'me faisais passer pour ta secrétaire et que j'te prenais sur le fait à faire quelque chose de bizarre, j'aurais sûrement eu ma promotion.

Ernest fronça les sourcils, ma poigne se resserra sur le couteau que je gardais camouflé sous le coussin du fauteuil : je ne voulais courir aucun risque.

- Mais maintenant, je pense que t'es plus une espèce d'agent secret infiltré dans la Marine, à la recherche de contrebandiers. Honnêtement j'en avais entendu parler avant, mais j'en avais jamais vu un de mes propres yeux. Et je sais pas ce qui se passe là-haut, mais si t'as prévu de mettre quelque chose à jour, je veux en être !

Voilà, j'avais laissé passer assez d'informations pour être crédible, en espérant qu'il s'agissait bien d'un agent du CP4. Sinon il était de mon devoir de l'éliminer : faute ou pas faute, seul le Cipher Pol est autorisé à enquêter sur les actions de la Marine.
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L’assassin prit donc ses aises. Son interlocuteur ne semblait pas lui accorder une once de méfiance, du moins pas autant qu’elle aurait dû. Hm. Il avait bien fait de conserver l’habit. Il s’installa sur le divan, attendant qu’elle retourne à sa douche pour farfouiller un peu partout. Il ne prêta pas attention à sa chute, il ne perdait pas son objectif de vue. De toute manière, il finirait certainement par devoir la neutraliser, cette pauvre chose. Elle en avait déjà trop vu. Si elle s’était arrêtée à l’entrepôt, il aurait pu ignorer la menace qu’elle représentait, mais elle était trop impliquée dans tout cela. Il doutait même qu’elle s’appelât réellement Elizabeth. Tout comme il ne s’appelait pas Ernest-Evelyn. Quel nom ridicule … À part le strict minimum pour se défendre, il ne décela rien qui pouvait la trahir. Pas même un bouquin sur l’art du parfait manipulateur. Il alla se rasseoir en percevant le débit de l’eau se stopper. Il attrapa un bouquin au hasard, le traité de psychologie humaine et non humaine du Dr. Johnson. Il en parcourut la page de garde, fit semblant d’avoir lu la préface et les premières pages puis le posa avec un sourire amusé devant la jeune femme. Il ne cachait pas sa surprise de la voir ainsi dénudée. Mais après tout, elle avait raison : il l’avait vue dans son plus simple appareil. Bah, ce ne serait ni la première, ni la dernière.

Quoi qu’il en fût, elle avait trouvé son acronyme. Quelqu’un avait été suffisamment malin pour voir au-delà de cette vanne poisseuse ? Hm. Dommage. Il aurait préféré qu’on ne le découvre qu’après lors de l’enquête qui aurait succédé ses forfaits. Il aimait qu’on sache qu’il les avait floués. Qu’il s’était baladé à la vue et au nez de tous. Qu’il était plus fort qu’eux. Bon, cela n’avait fait que lui attirer une fille un peu trop curieuse, soit, mais il flairait l’anguille sous roche. Si cette fille était capable de prendre de tels risques pour une promotion, c’était étonnant qu’elle soit encore aussi basse dans l’échelle. On ne devenait pas téméraire en un claquement de doigt. Il pensait que c’était calculé et mesuré. Il se gratta le menton, songeur. Puis elle serra elle-même la corde autour de son cou, lui offrant une astuce trop facile à cerner. Volontaire, ou … ? De toute manière, il n’avait aucun intérêt à révéler son affiliation révolutionnaire ici. Il jouait au Marine, il pouvait donc très bien jouer au Cipher Pol. Bien entendu, il connaissait parfaitement cet organisme qui constituait son plus farouche ennemie, notamment le CP6 chargé de le poursuivre lui et ses frères. Mais dans les Cipher Pols, il y en avait un qui pourrait très bien faire l’affaire en termes de couverture …

« Tu devrais savoir que ce genre de révélation s’accompagne généralement d’une mise à mort plutôt rapide. Fort heureusement pour toi, le CP4 n’a pas le permis de tuer. » révéla-t-il en pinçant les lèvres.

Si elle connaissait bien l’organisation, elle tomberait dans le panneau de savoir ce qu’était le CP4. Ce n’était pas information connue du grand public alors elle n’en serait que d’autant plus suspecte. Il la pensait presque honnête lorsqu’elle déclarait ne jamais avoir vu d’agent du CP, mais il était trop paranoïaque pour accorder du crédit à des paroles et des gestes. Les CPs, tout comme lui, étaient maîtres dans l’art de la manipulation et du mensonge. Il était en quelque sorte leur reflet révolutionnaire.

« Et si tu n’as pas encore compris que ta place est dans un bureau et pas dans un entrepôt à fouiller des caisses suspectes, tu ne vivras pas longtemps. Un tel acronyme n’était en effet pas anodin : je cherchais à ferrer le gros gibier qui traficote à Shell Town et tu es tombé dans mes mailles, ma grande. Résultat : tu es suspecte. » lui fit-il, sur un ton neutre, comme si cela ne changeait absolument rien pour lui.

Il jouait à l’agent secret sûr de lui, sans trop de difficulté à vrai dire. Il ôta sa casquette, se passa une main dans les cheveux puis la posa à côté du livre ouvert. L’assassin se rassit un peu plus confortablement et adopta une posture un peu plus intimidante. Il lui offrit un sourire carnassier, de ceux qui vous font comprendre que vous n’êtes qu’une proie pour un type comme lui.

« Et je te conseille de lâcher la lame que tu caches sous le coussin de ton fauteuil, tu ne sais pas à quoi tu joues gamine. » la menaça-t-il, droit dans les yeux.

Elle n’aurait pas dû le laisser pendant qu’elle se douchait. Fort de sa propre expérience, l’assassin avait repéré toutes les armes les moins bien cachées en quelques secondes. Cela le confortait dans l’idée que ce n’était pas une simple secrétaire : elle était trop assurée, trop détendue pour cela. Surtout en pareille situation. De la même manière, elle était prête à frapper et à le neutraliser. Donc elle le mettait au test. Test de quoi ? L’information sur le Cipher Pol, sur les agents secrets, n’était pas anodine, se pourrait-il que … Un seul Cipher Pol était voué à traquer les marines. Le Cipher Pol 4. Attendait-elle de lui qu’il se trahisse ? Hm. Depuis Kaitô il n’avait pas eu affaire à d’autres agents, mais la rencontre avec ce dernier avait été enrichissante. Il en avait appris un peu plus sur leurs méthodes d’investigation et leur formation. Des types d’une grande envergure s’il en était. Bon. Si c’était une civile, il ne craignait rien. Si c’était une simple marine, il passerait pour un agent parano. Mais s’il tapait juste …

« Et toi, gamine, t’es de quel CP ? » la railla-t-il, jouant de sa propre assurance pour donner du crédit à son affirmation.
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J'étais perdue dans mes pensées ; le dénommé Ernest me parlait mais en réalité je n'écoutais que les ondes sonores sortant par flots continus de l'escargot-projecteur. Un mot avait capté mon esprit : "contrebande" ; et à partir de là je n'avais plus eu d'oreilles que pour les informations télévisées. Soit disant alors, un commerce de contrebande avait été mis à jour par la Marine de Shell Town quelques jours plus tôt, et un Lieutenant-Colonel - la femme baraquée qui nous avait interrompu dans le bureau - passait en direct pour expliquer l'exploit qui venait d'être exposé aux médias, quelques instants plus tôt. Selon elle alors, la Marine avait surpris de nombreux actes illégaux de livraisons régulières d'armes à feu provenant d'un armurier à destination de pirates primés. Les forces de l'ordre avaient attendu le bon moment, c'est à dire avant-hier, pour finalement prendre les suspects en flagrant délit. Résultat donc, les forbans avaient été mis en taule, le livreur était gardé sous surveillance et on recherchait toujours l'artisan. Elle alla même d'ailleurs jusqu'à affirmer qu'ils avaient stocké toutes les caisses douteuses dans les bureaux des officiers de la base. La boucle était donc bouclée, enfin à ce qu'on essayait de faire croire aux humbles téléspectateurs tout du moins.

- Héhé...

- Et toi, gamine, t’es de quel CP ?

Hein, quoi, qu'est-ce qu'il disait ? Le CP ? Lequel ? Je tiltais pas. Je sentis mentalement Bachibouzouk me tirer sur la manche.

- Dis lui oui, tiens.

- Oui ! Obéis-je.

L'homme me regarda d'un air louche, visiblement perplexe de la réponse donnée à sa question. Son regard semblait empreint d'un certain mépris à mon égard et même en y réfléchissant très fort, je n'arrivais pas à me souvenir de ce qu'il voulait. J'avais toujours la main sous le coussin, mais il semblait le savoir depuis longtemps. En même temps j'lui avais bien laissé le temps de trouver toutes mes cachettes, comme je lui avais offert l'opportunité de me suivre, de trouver comment ouvrir ma porte, d'infiltrer mon appartement. En fait, inconsciemment, je l'avais amené ici, lui ayant fait savoir ce qu'il voulait bien savoir. C'était peut-être un avantage que de l'avoir dans mon salon plutôt qu'à la base ? Il réitéra donc sa question, ce à quoi je répondis finalement :

- Je fais partie de ceux qui contrôlent ce que les gens comme toi font, la police des polices, le top des agents secrets... Non ça allait pas, si je voulais être crédible il allait falloir mentir mieux que ça. Maintenant, si tu veux tout savoir, je suis venue sur cette île car ces derniers temps on y envoie assez souvent des agents des CP trois et quatre. Et visiblement ceux qui fournissaient ces renseignements voyaient juste, te sachant là.

Je doutais toujours un peu de la véracité de ses propos, néanmoins même dans la confusion, les agents des autres Cipher Pol n'étaient pas mes alliés. Ainsi j'évitais de jouer carte sur table lorsque je n'étais pas sûre que mon adversaire ne possédait pas un carré d'as. L'une des premières règles, les règles d'or, apprises auprès du Cipher Pol 8 est qu'il ne faut jamais parler du Cipher Pol 8. Il en allait de même pour les autres Cipher Pol et cet agent venait de la briser.

Ernest souriait. Mon poing quant à lui se crispait d'autant plus sur l'arme sous le coussin... non l'arme dans le coussin. Je ne m'étais définitivement pas assise au hasard, je ne pouvais pas laisser mes Wallace et Gromit tant que ça en évidence, ni même mon Grominet. Je les avais ainsi caché plus en sûreté, directement dans le mobilier ou dans les murs. De toute façon je payais pas le loyer ni la caution. Mais bon, je fis signe à l'autre gusse de prêter un peu plus attention aux news.

- On dirait que notre petite affaire de corruption d'officier a été camouflée comme il se doit. Je ne te dévoilerai pas mon identité ni même ce que je suis ou pour quoi je me bats, mais je veux découvrir ce qu'il se trame là-dessous. Je me levais, lâchant subitement mon arme à feu. Désolée de te mettre à la porte, mais j'aimerais m’habiller. J'imagine que nous allons faire une sortie nocturne, non ? Ah oui, je te l'ai pas dit, on fait équipe. Le destin, héhé !

Le prétexte était surtout bon pour m'équiper de mes flintlocks au cas où je devrais m'en servir. Quant au canon à main, je n'en aurais sûrement pas besoin pour une mission d'infiltration, même si mon collègue semblait des plus douteux.


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Mer 21 Oct 2015 - 3:15, édité 2 fois
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Le Cipher Pol des Cipher Pol ? En ce cas, il était sacrément dans la mouise. Merde. Hm. Il suffisait qu’elle remonte les dossiers pour se rendre compte qu’il n’était pas référencé au Cipher Pol. Et pas même dans la Marine. Il darda un regard sombre sur elle, se demandant comment il pourrait cacher son cadavre puis se rasséréna. Ce n’était pas une solution, et elle pouvait être en train de mentir. Il ne pouvait pas tuer sur un doute, sur une possibilité. Ce n’était pas son crédo. Mais si jamais elle était définitivement une Cipher Pol … elle n’y couperait pas. Ils étaient ses concurrents directs, quelque part. Il ne pouvait donc pas prendre le risque de les voir faire capoter son entreprise, pas comme à Hinu Town avec ce Kaitô. Peut-être pourrait-il contacter Scarlett pour avoir un peu plus de détails sur celle-là ? Non. Cela finirait par lui nuire si il faisait trop souvent recours à elle. D’autant plus que la vigilance de Kaitô avait dû en alerter plus d’un. Celle affaire là, il l’éluciderait tout seul.

« Tu te rends compte que vous me mettez plus des bâtons dans les roues qu’autre chose ? » grommela l’assassin, sachant que la police des polices n’était pas aimée parmi ses pairs.

Cela supposait aussi que cette gamine était un des agents les plus efficaces au monde et incorruptible par-dessus le marché. Un être inflexible, qui incarnait la malice même du Gouvernement. Une personne qu’il n’aimerait pas confronter sur un terrain neutre. Il lui fallait la piéger ou la semer. Mais, encore une fois, si elle disait vrai, cela ne serait pas aisé. Un frisson glacé couru le long de son échine. Il devait se ressaisir. Elle lui en laissa l’occasion, aiguillant son attention vers les informations locales. Rafael fronça des sourcils. Qu’est-ce que ça signifiait ? Comment avaient-ils … Il flairait les ennuis à plein nez. Cette femme mentait éhontément, ou alors il était passé à côté de quelque chose. Il reprit un masque neutre en contemplant les images qui défilaient puis revint vers la donzelle.

« Nous voilà en plein dedans. Ce serait malvenu d’aller directement voir la hiérarchie. Je vais aller interroger les personnes soi-disant coupables. » grommela-t-il en faisant mine de vouloir partir.

Elle ne lui laissa pas l’occasion de s’approprier cette excuse qu’elle mit en branle toute possibilité de fuite. Equipe, hein ? Ça sentait mauvais. Elle ne voulait pas lui dévoiler qui elle était ni ce qu’elle faisait, mais … ne venait-elle pas de le faire ? Mentait-elle, venait-elle de se trahir ? Hm. Le fait de l’envoyer attendre dehors n’était pas bon pour lui. Elle risquait de contacter ses supérieurs. Non, il ne se laisserait pas faire. Il s’installa encore plus profondément dans son fauteuil et lui fit face.

« Tant que je ne saurais pas qui tu es, tu resteras une suspecte. Comme je te l’ai dit plus tôt. De plus, je t’ai déjà vu nue et la pudeur ne semble pas être ton apanage. À la moindre embrouille que je capterai, je te mettrais les fers et tu partiras direction la cour martiale … si tu es bien une Cipher Pol. Même si ton CP est censé nous surveiller, comme tu l’as dit, tu ne dois en aucun cas entraver ma mission. Telle est la loi. Donc soit tu mets une tenue règlementaire et TU fais équipe avec moi, soit tu ne me suis pas et je m’acquitte de ma mission comme c’était prévu. Je prends le choix de ne pas te considérer comme une menace. Ne me donne pas tort. » lui fit-il, joignant ses deux mains avec un sourire mesquin.

Il n’allait pas se laisser dicter ses conditions non plus. Il devait conserver l’aval sur cette situation et ne pas se laisser déborder par les déclarations de cette inconnue. Son but était de se débarrasser d’elle. Il trouverait un moyen de mettre en scène sa propre mort en action et de rendre tout corps inidentifiable par la suite. Si elle le suivait … et bien il pourrait la garder à l’œil et c’était déjà ça de pris. Il soupira tout en se redressant puis la regarda droit dans les yeux.

« La seule chose qui te sauve ici, c’est que je n’ai pas le permis de tuer. Je te conseille d’en profiter, Cipher Pol ou pas tu n’entraveras pas la mission. » conclut-il avant de se lever.

Allait-elle le suivre ? Il n’espérait pas. Il avança vers la porte, bien décidé à s’infiltrer dans les geôles pour parler directement aux personnes nommées par la Commandante. Pourquoi ne pas retrouver celui qu’elle cherchait ? Tout un programme dont la teneur diffèrerait en présence ou non de l’importune.
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Le soi-disant Ernest attendait à la porte pendant que j'enfilais un uniforme propre, vu que j'en avais trois de rechange que je faisais régulièrement tourner. Tant qu'à être dans le coin, autant conserver ma couverture de Marine ; puis ça laisserait présager moins de soupçons si je devais me balader dans un bâtiment officiel dans cette tenue plutôt qu'en civile. Me voilà donc avec un nouveau partenaire, plus l'autre Binoclard. Bon, le mec était vraiment louche, mais il était foutrement intelligent, c'qui était encore plus dangereux pour moi. Pis il mentait et il mentait bien, ça j'en avais la certitude, il avait pas la carrure d'un mec du CP4, plus d'un mec du CP9 à la limite, ça se voyait dans ses yeux que c'était un assassin. Mais il parlait trop pour faire partie de cette unité.

Puis vous savez, je suis l'une de ces personnes impulsives qui débitent des mensonges et y réfléchissent ensuite, avant de se cogner le front contre un mur. Et là, j'avais l'impression d'avoir perdu plusieurs pions sur l'échiquier. Merde, il m'avait en effet déjà vue à poil ; j'avais donc du m'habiller devant lui, laissant mes armes dans leurs cachettes. Puis il n'avait pas besoin d'en savoir plus que ce que je lui avais déjà dit par rapport à mon identité, je ne lui avais rien dissimulé du tout... En plus, déjà que j'étais pas très douée au tir, c'était pire pour le combat au corps à corps. Si ce gusse décidait subitement d'en finir avec moi car je m'étais mis dans ses pattes, il avait l'embarras du choix. Mais bon, advienne que pourra ! Je le rejoignais à mon tour à la porte où il m'attendait depuis cinq bonnes minutes avant de dévaler les escaliers de l'immeuble la première.

- Bon et maintenant on fait quoi, hein ?

Il devait être aux alentours de vingt-trois heures, il faisait nuit depuis longtemps. Mon nouveau collègue ne me répondit pas, son regard semblait perdu dans le vide, il réfléchissait. Puis soudain il se remit à marcher, sans indications, au fond il m'avait simplement proposé de le suivre. Quand bien même je conservais une distance suffisante, je restais en plus sur mes gardes. Rien ne l'empêchait, au détour d'une allée mal éclairée, de se débarrasser de moi, de me couper en morceaux et de me jeter dans la mer. Et cette fin était tellement susceptible d'arriver que je préférais ne pas y penser. Je restais bloquée sur ça alors que l'on était encore aux pieds de l'immeuble. 'Fin moi surtout, car lui il m'avait pas attendue pour partir.

***
Le chemin me semblait plus long qu'à l'aller, mais c'était sûrement car j'avais couru. Là, je prenais mon temps, je restais plusieurs mètres derrière ; il ne se retournait même pas, c'était encore mieux. Plus il était indifférent à ma présence et mieux c'était, mais je me disais que ça allait vite changer. Il ne voulait sûrement pas, au fond, que je l'espionne. Shell Town était une petite ville, mais une ville tout de même : elle avait la singularité de s'étendre sur l'ensemble de l'île, île qui s'appelait singulièrement de manière éponyme Shell Town. De jour, l'endroit était bien vivant, les gens relativement heureux et la vie prospère. Chaque jour, comme dans tout port, les marchands arrivaient, chargeaient et déchargeaient leurs marchandises, puis s'en allaient. Chaque jour, ces produits étaient livrés aux commerçants qui les dispensaient dans les rues et sur les places. Chaque jour la Marine veillait à ce qu'il n'y ait aucun problème, à ce que la criminalité soit réduite, à ce que tout soit sûr et légal. Or la nuit il n'y avait plus un chat, l'endroit était désert, les volets fermés, l'obscurité reignait et la Marine veillait mais sans plus.

- Eh r'garde c'que l'on a là, Raoul... Et bien la d'moiselle, qu'faites vous là en pleine nuit ?

Un étrange olibrius venait de m'accoster en me barrant la route. Il avait des habits de clochard, pas de chaussures et un grand haut de forme troué de partout ; son visage était jaunâtre de ton et trois chicots se baladaient dans la fente taillée au cutter qui lui servait de bouche. J'voyais déjà le genre à des kilomètres à la ronde, le mec était pas net et me voulait pas que du bien. Heureusement que j'étais pas seule.

- J'suis avec mon petit-ami, il est juste... là...

Mon infortuné compagnon avait disparu. J'avais oublié que ce-dernier désirait simplement se débarrasser de moi et qu'il s'agissait probablement de la bonne occasion pour ça, ainsi il avait même pas à se salir les mains à la place de ces gentlemen. D'ailleurs, en me retournant, je faisais face à l'autre gusse qui me posa ses grosses paluches sur mes épaules. Un gros balourd joufflu, pas décharné comme son pote, mais dans les mêmes vêtements avec la même odeur corporelle.

- D'qui 'le parl' la m'demoiselle ? Y'a t'y bien qu'nous ici. Allez v'z'allez nous suivre, hein ? On va vous ram'ner chez-OURFFF !!

Ma jambe vengeresse venait de heurter les berlingots du pauvre bonhomme à la bonne vitesse d'un éternuement. Ça devait être lui, Raoul, mais maintenant on pouvait l'appeler Raoula. L'autre était encore stoïque et c'était plutôt la bonne occasion pour décamper.

- Rah merde, qu'ess qu't'as fait à Hervé, s'lope ?!

Hein, Hervé ? Alors c'était qui Raoul ? Une pression dans le dos me répondit quasi-instantanément ; un poing de la taille d'une bêche venait de me casser en deux et de m'envoyer rejoindre le sol. Raoul c'était le gros musclé de la bande, celui qui se cachait encore dans la ruelle à côté et qui venait de débouler d'un air pas content. Fébrile, j'essayai de me relever mais ratai, m'écroulant sur le dos. La première raclure, celle dont je ne savais pas le nom, venait vers moi tout en déboutonnant tranquillement sa ceinture et en retirant un à un les boutons de son pantalon.

- T'l'auras voulu, catin, t'vas payer cher.

Prise de panique, je reculai vivement en balayant le sol de mes jambes jusqu'à ce que mon dos rencontre un mur. J'allais me mettre à crier aux secours quand soudain j'entendis une voix, une voix qui ne se voulait pas chaleureuse mais qui me réconforta sur le moment.

- C'est comme ça que se défend "le top des agents secrets" ?

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La semer était chose risquée. Elle avait vu son visage, elle semblait encore le prendre pour un CP. Il se devait de garder un œil sur elle tout en restant aussi loin que possible. Il sentait peu à peu monter cette sordide envie d’en découdre. Cette force qui se tapissait au fond de son esprit. Si la bonne conscience existait, il y avait aussi son homologue malicieux. La petite voix qui susurrait d’en finir, que personne ne retrouverait le cadavre. Mais, et si elle était innocente et jouait au bluff ? Malgré tout, ce fut cette question qui obligea l’assassin à sourire et à faire comme si de rien n’était. Cette simple question qui sauva la vie de la donzelle, ou celle de l’assassin … Son regard exsudait cependant d’une froideur sans bornes. Il n’aimait pas jouer aussi près de la lumière. La capuche avait au moins la sécurité de l’anonymat, là il devrait redoubler de malice pour échapper aux conséquences de ses actes. Une coïncidence qui le mettait en fort mauvaise position et sa conscience qui lui dictait de ne pas céder à la facilité. Ridicule honneur d’assassin … C’était de cela qu’était fait son dernier lien à l’humanité. Supprimer le mal à la racine et laisser les purs survivre. Donner ce pouvoir à un humain était insensé. Et pourtant, il se l’arrogeait.

Les comparses malgré eux s’enfoncèrent dans la nuit, se dirigeant à pas rapides vers la caserne la plus proche. Perdu dans ses pensées, il échafaudait des plans toujours plus rocambolesques pour échapper à cette fille sans lui donner matière à dresser un portrait robot de lui. Il devait disparaître corps et bien tout en taisant ses soupçons. Ce jeu n’avait ni queue ni tête, des incertitudes encore et toujours. Il carra les épaules, accéléra encore l’allure. Au bout d’un moment, il émergea du miasme qui s’était emparé de ses pensées. Il darda un coup d’œil en arrière et se rendit compte qu’il était à présent seul. Un étrange pressentiment lui vrilla la colonne. Etait-elle partie, ou jouait-elle à un autre jeu ? Il s’arrêta, regarda autour de lui.

« Elizabeth ? » l’appela-t-il, la main sur sa rapière.

Bon sang. Il revint sur ses pas, scrutant les coins d’ombre. Un moment d’inattention, c’était tout ce qu’il lui avait fallu. Il avait presque couru en cherchant un moyen de s’en sortir et voilà qu’il lui avait donné l’occasion qu’elle devait attendre depuis le départ. Il l’avait surveillée, pistée et laissée partir. Il serra sa main sur le pommeau de son arme, grognant contre sa propre stupidité. Si elle enquêtait sur lui, c’en était fini de sa couverture. Elle connaissait son visage, et c’était ce qui le gênait le plus. Si un CP0 en venait à connaître son identité, il pouvait s’attendre à en avoir pléthore à sa poursuite. Tant qu’ils ne connaissaient pas sa réelle identité, le risque était minime mais demeurait existant. Qu’ils sachent que Rafaelo Di Auditore était Il Assassino, l’un des plus grands ‘meurtriers’, selon leurs termes, des blues …

Il tourna à l’angle de la rue et lâcha la garde de son arme. Toute la pression s’envola d’un coup lorsqu’il la vit combattre. Il s’était fait avoir, tout cela n’était que du bluff ! Lui, le maître ès manipulation s’était fait flouer par une secrétaire. Il remercia intérieurement la petite voix qui lui avait demandé de l’épargner, son honneur et son crédo. Une innocente qui ne lui avait, peut-être, dit qu’une fraction de la vérité. Il lui avait tendu une piste pour le leurrer et elle l’avait saisi, prétendant qu’elle faisait partie du Cipher Pol. Mais là, elle était à deux doigts d’y passer. Elle ne combattait pas comme il l’aurait cru … Le sang de l’assassin ne fit qu’un tour. Observant la scène, il se rapprocha d’un pas calme, étudiant les faits. Trois vagabonds aux envies charnelles. Pas un danger pour lui, mais une innocente était en proie à leurs sévices. Il s’arrêta derrière eux, la main sur le pommeau de la rapière.

« C'est comme ça que se défend le ‘top’ des agents secrets ? » la toisa-t-il, tandis que les larrons se retournaient vers lui, reculant d’un pas en voyant son uniforme.

Et oui les gars, c’était trop tard. Ils comprirent que de toute manière ils ne pourraient pas y échapper et leur réaction fut fulgurante. L’homme au haut de forme rapiécé se jeta sur l’assassin, dégainant un poignard émoussé. Rafaelo se décala d’un pas, esquivant le couteau. Joignant son index, son pouce et son majeur il frappa sa pomme d’Adam. L’homme s’écroula en crachant, se tenant la gorge, hurlant de douleur. Il se retourna, commença à lever son autre bras puise se retint. Non, elle avait vu son visage. Elle ne devait pas le voir user de sa lame secrète. Il était du CP4, il ne pouvait pas tuer. C’était l’histoire qu’il lui avait servie alors il aurait jusqu’au bout du bluff. Il suspendit son geste et se redressa pour coller un coup de pied sur le crâne de sa victime. L’homme sombra dans l’inconscience avec, certainement, une mâchoire brisée. Le second sauta sur l’assassin, mains nues. Ce dernier lâcha un petit éclat de rire méprisant puis attrapa le bras droit du vagabond. Il lui ramena la main vers l’intérieur du bras, le faisant hoqueter de douleur. Profitant de la prise, il lui asséna une droite qui l’expédia dans l’inconscience sans préavis. Le troisième commit alors une erreur impensable : il prit la fuite. Il tourna les talons mais il était encore trop proche de Rafaelo. Ce dernier lui fit un croche-patte et l’homme s’écrasa au sol, tête la première. L’assassin se plaça au-dessus de lui.

« T’as de la chance que je ne possède pas le permis de tuer. » lui fit-il en continuant de jouer son rôle, avant de l’endormir d’un coup de poing.

Il se redressa, puis se dirigea vers la donzelle. Il la toisa de toute sa morgue puis observa les corps de ses victimes. Des racailles pareilles dans la nasse de la Marine. Ils seraient relâchés rapidement, puis recommenceraient … ça le débectait. Mais il n’avait pas le choix, il ne devait pas se compromettre. Il tendit la main à Elizabeth.

« Tu vas rentrer chez toi, Elizabeth et me laisser terminer cela toute seule. Qui que tu sois, tu mets en danger une mission cruciale et je ne peux pas me permettre de te surveiller en même temps que j’exécute ma mission. Chaque minute passée est une prise de risque supplémentaire et je n’ai pas envie d’y rester à cause de toi. » lui ordonna-t-il, bien plus sûr de lui qu’auparavant.
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- Chaque minute passée est une prise de risque supplémentaire et je n’ai pas envie d’y rester à cause de toi.

Je haletais, stoïque, encore choquée par les derniers événements. J'avais eu tout le loisir de montrer à  Ernest que je n'étais rien d'autre qu'un poids mord, une faiblarde et il pensait évidemment que je n'étais pas un agent secret. Tout ceci venait de faire basculer d'un coup la situation, m'apportant visiblement une sorte de crédit pathétique de la pauvre jeune mythomane qui se prend pour ce qu'elle n'est pas, juste pour vivre quelques moments d'action. Il pensait que j'étais qu'une secrétaire, ma couverture m'était revenue dans la face comme une gifle incroyable, détruisant mes paroles et tout ce que j'avais pris plaisir à construire jusque là. J'étais sauve, oui, personne n'allait me couper en morceaux et me balancer aux poissons cette nuit-là, mais j'avais perdu ma fierté, une fois de plus. J'étais sous ce regard malveillant, méprisant, que j'avais eu l'occasion tant de fois d'expérimenter : auprès des Marines, auprès d'Ao Novas, auprès de tous. Pour aucun je n'étais un membre du CP8, juste une maladroite pauvre fille qui, suite à un indescriptible concours de circonstance, s'était retrouvée là, recrutée sans véritable raison par un agent désireux d'apporter l'aide d'une armurière pas talentueuse pour un sou pour le combat. C'est bon, j'en avais marre, j'avais le déclic, il fallait que ça change, la petite vie pépère de gardien de la paix, si je l'avais vraiment voulue, je l'aurais eue à la Marine. J'y étais là, je pouvais voir à quoi ça ressemblait, c'était chiant. Pas de mission, pas de requête, pas d'investigation : trop de temps perdu à vivre inutilement. Depuis des heures j'avais besoin d'avoir mes armes que je ne manipulais pas si bien dans mes mains ; il me fallait agir, courir, sauter, bondir et potentiellement me battre. Je ne pouvais pas rester un légume toute ma vie, j'avais toutes mes chances d'être virée si je ne réagissais pas. Et voilà.

- Fous lui une claque.

- Ouais.

Ma main vola jusqu'à l'homme, s'enfonça dans l'étendue rugueuse de sa joue et claqua clairement contre son épiderme meurtri. La tâche rouge s'étendit tout aussi directement sur la pauvre joue maltraitée, réponse des nerfs qui venaient d'être mis à l'épreuve sans prévenir. Ma respiration se faisait lourde, ma posture fléchie, comme si le mouvement m'avait demandé une force considérable et que j'étais à bout de force. Mais en réalité non, j'en avais marre, la nervosité me guettait et tout ce trop plein de véhémence qui n'avait cessé de faire déborder le vase depuis plusieurs années menaçait de sortir, là, sur ce pauvre gars qui ne voulait qu'une chose, c'était réaliser son travail.

- Maintenant mon gaillard tu vas ouvrir grand tes mirettes et tes oreilles et m'écouter ! J'en ai plus que marre d'être prise pour de la merde, pour une simple femme bonne à rentrer chez elle et faire à bouffer pour son petit mari qui rentre du boulot. Car je suis faible, vous avez tous l'image de la ménagère bonne à élever des gosses et rien d'autre ! Pourtant je le fais ce boulot et malgré toute la merde que je me prends à chaque fois sur le dos, je continue à le faire tant bien que mal. Jusque là j'arrivais à le supporter mais maintenant j'en ai ras le bol ! Je n'ai plus envie d'être le pauvre gamin qui est le dernier sélectionné pour un match de foot' en EPS, un produit de déception. Alors ouais peut-être que je ne suis pas une prouesse au corps à corps, peut-être que je peux pas me défendre contre trois mecs aux envie malsaine, mais je peux toujours faire mon boulot. Je t'ai proposé de faire équipe car je veux en savoir plus, tu m'as proposé de te suivre alors je continue, y'a pas à chiquer, point barre.

Le faux-lieutenant porta sa main droite à son visage tout en me dévisageant avec des yeux ronds. Il semblait visiblement ne pas avoir l'habitude que l'on lui parle sur ce ton. Pour ma part je n'avais pas non plus coutume de me disperser ainsi et laisser parler mes sentiments. Au fond, je n'arrivais même pas à communiquer généralement, les mots étaient comme des poignards à double tranchant qui finissaient souvent par me couper les mains. Du coup nous avions tous les deux l'air de deux cons, là, dans la pénombre de la rue mal éclairée, soudainement stoppés dans nos missions respectives, choqués l'un comme l'autre. Puis la réaction fut claire, pas vraiment attendue, mais significativement bienvenue. Ernest hocha la tête.

***
Nous arrivions aux alentours de la base ; les deux grands bâtiments cylindriques toisaient l'ensemble de la ville et s'il y avait bien quelque chose de facile à trouver, c'était ça. A l'instar du dicton "toutes les rues mènent à Rome" ici s'appliquait le "toutes les rues mènent à la Marine". Bon, par nuit sans lune c'était pas idéalement plus facile à trouver, mais il nous avait suffit de prendre une allée centrale à partir de chez moi, de faire un petit bout de trotte à pieds pour y arriver. Un bâillement m'arracha la révélation de l'heure qu'il était, celle où les gentils fonctionnaires allaient dormir près de leur épouse pendant que la garde de veille prenait possession du complexe. Il devait pas y avoir grand monde pour accomplir cette tâche, peut être une dizaine de gars, voire plus. Je me disais que ça serait facile de les éviter, mais Ernest ne voyait pas les choses de cet œil-là.

Suivant ses indications, nous nous dirigeâmes donc d'un pas tranquille vers l'entrée principale où trois gars gardaient la porte. C'était pas faut d'y avoir deux autres seuils pour pénétrer dans le bâtiment, mais je ne fis pas de commentaire, c'était déjà bien que je puisse continuer à ses côtés. Petit à petit la situation se détendait entre nous et je le concevais finalement comme un véritable agent aux services du gouvernement, qu'importe le département et qu'importe son utilité, ce gars n'était pas malhonnête. Je gardais secrètement mes remerciements par rapport à son apparition auprès des malfaiteurs et la raclée qu'il leur avait foutu. Même parmi les Marines, y'en avait des tas qui n'auraient pas levé le petit doigt et laissé une pauvre femme se faire violer, juste par perversion ou flegme. Car ouais, depuis le temps que je côtoyais les forces de l'ordre, j'avais plusieurs fois eu l'occasion d'être déçue par les gusses qui peuplaient les rangs pas si clean de la Marine.

M'enfin bref, les trois gaillards semblaient visiblement dérangés dans leur partie de poker. Ils avaient sorti les chaises, la table, les jetons et campaient devant la porte. Sûr que comme ça personne allait passer, mais de toute façon seuls les hauts officiers tels que le Lieutenant-Colonel ou le Colonel - ou ceux habilités par eux - pouvaient prétendre au travail nocturne dans les locaux. Après un bref soulèvement de képi et quelques chemises re-rentrées dans le pantalon, nous fûmes vivement apostrophés par ce qui semblait être un caporal.

- M'dame, M'sieur, qu'est-ce que vous venez faire dans le coin ?


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Mer 21 Oct 2015 - 3:15, édité 1 fois
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Surprise, stupeur. Il pensait avoir touché la corde sensible et lui avoir enfoncé la tête assez profondément dans le noir pour qu’elle abandonne mais la donzelle se révéla plus véhémente qu’il ne l’aurait cru. Alors qu’il aurait parié qu’elle se serait mise en position fœtale et aurait pleuré, elle le surpris une fois de plus et le laissa désemparé. Il dut reconnaître qu’elle avait du mordant, et son erreur lui chauffait la joue. Il porta sa main à son visage, surpris et énervé à la fois. Son indécision lui donna un air imbécile, hésitant entre la planter là et lui faire comprendre de quel bois il se chauffait. Mais non. Ils se regardèrent. Il ne savait plus que penser. Ses théories s’étaient elles-mêmes sabordées dans la propre complexité de ses plans et il ne savait plus si il devait garder un œil sur elle ou l’éloigner le plus loin possible de sa proximité. Il soupira, regarda autour de lui. Le principe de parcimonie ne pouvait même plus s’appliquer. Il hocha la tête. Il trouverait une autre solution.

« Aucun commentaire, aucune contestation. Il n’y aura pas de seconde fois. » fit-il, histoire de conserver la face.

Puis il tourna les talons et se dirigea vers les bâtiments de la Marine. Le tout se basait sur le fait que personne n’ait cherché à enquêter sur son nom pour l’instant et que la femme qui les avait surpris n’ait pas regardé plus loin par le manda officiel qu’il avait agité. Il savait que la Marine n’était pas rapide à ce point, d’autant plus que si on le cherchait ce serait sous le sceau du secret de peur de voir s’ébruiter le fond de l’affaire. Enfin, certainement. Ils arrivèrent ainsi bien vite devant une porte, gardée par des soldats occupant bien sagement le tour de surveillance. Ils observèrent les galons présents sur les épaules de l’assassin, fronçant les sourcils. Hm. Un souci ?

« Lieutenant Orléans, chargé de mission. » fit-il, s’attendant les voir à se mettre au garde-à-vous.

Ils tardèrent à réagir, ainsi se racla-t-il la gorge. Les trois hommes s’exécutèrent bon gré mal gré, toujours aussi peu soucieux du protocole.

« Repos, soldats. » lâcha l’assassin, sur un ton cinglant.

« Pour répondre à votre question, je suis en mission officielle : nous recherchons toujours l’homme qui a organisé le trafic dont tout le monde parle aujourd’hui. Ainsi, je vous enjoins de m’ouvrir cette porte. Je ne mentionnerai alors pas votre nonchalance et l’absence de respect due à un supérieur dont vous venez de faire preuve, Caporal. » poursuivit-t-il, sur le même ton insolent.

A la mention de la sanction, le Caporal perdit toute méfiance. Le ton formel et professionnel de Rafaelo semblait l’avoir freiné dans ses ardeurs. Pour appuyer le clou, l’assassin sorti de sa poche le mandat qu’il avait utilisé un peu plus tôt dans la journée, assorti du sceau officiel. Il n’avait pas fait la bêtise de le laisser longtemps entre les mains du premier homme qu’il avait croisé. Ses talents d’escamotage n’étaient plus à prouver. Le Caporal le regarda rapidement, déstabilisé par la verve assurée de l’assassin. Il semblait toujours y avoir quelque chose qui le gênait, mais il obtempéra.

« Quelque chose ne va pas, Caporal ? » lui demanda Rafaelo, joignant ses mains derrière son dos.

« Et bien … c’est que … heu … » hésita-t-il, glissant doucement la main vers son arme.

« Vous avez reçu l’ordre de ne pas me laisser passer, c’est cela ? » l’interrompit-il, sans bouger d’un pouce.

Le visage du Caporal blêmit. Il avait visé juste. Il fallait y aller au culot, à l’esbroufe. Le sang de l’assassin ne fit qu’un tour.

« De qui cet ordre découle-t-il ? Le Lieutenant-Colonel ? » poursuivit-il, faisant reculer d’un pas le Caporal.

Et merde. Il avait sous-estimé leur rapidité de réaction. Il adressa un regard entendu à la demoiselle en guise d’assentiment. Il n’avait pas d’autre choix que de faire passer ce Lieutenant-Colonel pour l’instigatrice du complot. On targuait la marine de Shell Town d’impeccable, de propre à souhait. Lui n’en croyait pas un mot mais doutait qu’un officier puisse être mêlé à tout cela. Mais ne l’excluait pas, ce serait une erreur.

« Désolé, Caporal. Ce n’est pas personnel, je ne fais que suivre les ordres. Tout comme vous. » lui fit-il, avant de bloquer sa main sur son arme.

Le poing de l’assassin s’écrasa sur la tempe du Caporal, l’envoyant droit dans les bras de Morphée. Il tira la manche d’un première classe, l’envoyant vers la gamine pour qu’elle se débrouille de lui puis s’effaça devant le troisième larron pour lui glisser son bras sous le menton. Il força suffisamment pour l’étouffer sans le tuer puis le laissa s’écrouler à terre. Ce faisant, il tira son corps et l’assit à la table de jeu avant de faire de même avec le Caporal. Il fouilla ses poches et en tira la clef. Avec de telles difficultés, il devait impérativement en finir avant la fin de la nuit, il connaissait les procédures et savait qu’il serait traqué dès la fin de celle-ci.

« Liz’, on va pas avoir le choix. C’est certainement elle qui a maquillé tout ça. On doit absolument lui tomber dessus avant qu’elle ne fasse disparaître les preuves. T’es prête ? On risque d’en avoir beaucoup d’autres sur le chemin. Il ne faut pas se faire attraper, tu connais la politique du bureau. Si tu le sens pas, c’est ton choix. » fit-il, choisissant de joueur le jeu de croire qu’elle était toujours une CP.
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Mon poing s'écrasa violemment contre le nez camus du pauvre soldat se précipitant vers moi malgré lui, propulsé par le bras vengeur de mon camarade dans ma direction. Véritable obstacle sur la trajectoire de son visage, il ne me fallut pas beaucoup de force pour assommer le gusse de ma main droite et le laisser mariner dans le sang coulant abondamment de son nez cassé. Histoire de pouvoir me défendre, je pris la pétoire du mec et me la passai autour de l'épaule.

Peut-être ne me serais-je pas attendu à voir Ernest coller une telle raclée aux deux autres gardes si je ne l'avais vu auparavant démontrer sa force au combat avec les trois clochards. Confirmant mes derniers doutes, j'en avais vu assez pour deviner que l'homme était taillé pour l'assassinat, non l'investigation. Je mourrais d'envie d'être fixée sur la question : était-il vraiment l'un de ces monstres du CP9 reconnus pour leur violence inouïe et leur capacité à faire disparaître n'importe qui ? Probablement, mais je ne pouvais pas simplement lui demander, comme ça, surtout que les questions semblaient assez malvenues dans le moment présent. Si l'on était passés par des moments d'extrême pression où je me voyais déjà perdre la vie par différents moyens, désormais tout semblait propice à l'entraide et l'esprit d'équipe. J'étais décidément fière d'avoir trouvé l'un de mes comparses des autres Cipher Pol, bien que nous ne nous entendions pas bien en général.

Après une dernière mise en garde par rapport à ce qui m'attendrait si j'allais de l'avant, nous finîmes pas pénétrer dans le bâtiment. Il pensait véritablement que je n'étais qu'une secrétaire, il avait vulgairement associé ma puissance physique à mon incapacité à être un agent secret et je devais jouer là-dessus. J'avais l'impression de pouvoir profiter d'une certaine protection en gardant cette ridicule identité en sa présence, protégée de et par lui notamment. De nuit l'absence de lumière rendait le repérage autant que la traversée assez difficile, néanmoins la présence de "veilleuses" teintaient l'obscurité d'une faible lumière orangée et nous permettait, après une courte période d’accommodation, d'évoluer dans le gris "eigengrau" environnant. Si nous devions rester sur nos gardes, il serait plus long autant que plus ardu d'atteindre le bureau du Colonel dans lequel nous avions les seules preuves découvertes jusque là incriminant la Marine de Shell Town dans les affaires louches de contrebande. Ce Lieutenant-Colonel, aussi irréprochable soit-elle, si elle se retrouvait à avoir commercé avec des pirates pour son intérêt personnel aurait à subir les conséquences de ses actes.

Je cherchais toujours les raisons ayant pu amener un officier de la Marine pouvant obtenir légalement des armes n'importe quand et en n'importe quelle quantité auprès du Pôle Armement à effectuer un commerce illicite avec la basse piraterie. Rien n'avait de sens pour moi là-dedans, surtout que dans toutes les caisses qu'on avait fouillé, juste une seule renfermait une poignée de misérables armes à feu comme n'importe qui peut en faire, j'étais bien placée pour le savoir. La question demeurait en suspens dans mon esprit quand nous atteignîmes le sommet du premier palier, en catimini, et nous collâmes directement au mur en entendant les rires résonner dans la jonction. Les deux gaillards n'avaient visiblement pas été informés d'une intrusion, au lieu de ça ils se lavaient littéralement l'intestin avec de l'hydromel artisanal, bien bourratif, qui avait la sale réputation de vous faire tourner la tête à la première rincée. Répondant à ceci, l'un des gars était tombé de sa chaise et semblait plongé dans un semi-coma de rire et de sommeil ; son compagnon quant à lui frappait le sol de ses poings en se tordant dans tous les sens, hilare.

Nous continuâmes notre route, incognitos, sans même prendre la peine de nous dissimuler ou de presser le pas. Une fois les quatre autres étages grimpés - sans gardes apparents étrangement cette fois-ci - nous nous engageâmes dans le long corridor débouchant sur des pièces variées de tous les côtés, et permettant d'accéder à l'open-space des bureaucrates. Ici encore, nous ne croisâmes aucun âme qui vive, même pas un chat, tout était véritablement silencieux. Il devait pourtant y avoir plus de gardes que ça normalement, voire même encore plus au vu des derniers événements et de l'attention particulière du Lieutenant-Colonel qui nous avait interdit l'entrée. Nous n'étions visiblement plus très loin, ça semblait tout cuit, nous restions sur nos gardes face à un incontournable et prévisible piège. Mais comment ce-dernier allait-il se manifester ?

Et puis soudain, sans crier gare, alors que nous sinuions entre les box, une balle perça l'une des parois cartonnées et siffla près de mon oreille, manquant de me la transpercer d'un cheveu. Je sautai à terre, à plat ventre, le fusil dans la main droite, le souffle court et roula sous le bureau le plus proche. Je coulais un regard vers mon partenaire qui était s'était plaqué contre un secrétaire, dans le box d'en face. Le silence retomba, il passa son index sur sa bouche non sans esquisser une moue de douleur.

Il avait été touché.


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C’était calme. Beaucoup trop calme. Les deux comparses progressaient lentement, l’assassin évitant à tout prix de se précipiter. La facilité ne lui déplaisait pas, mais ce n’était jamais ainsi que les choses se passaient. Toujours des complications, toujours de la difficulté. Quelle histoire serait intéressante à raconter, si jamais rien ne se délogeait de la routine ? Ils grimpèrent les étages, Rafaelo semblant se diriger comme s’il savait déjà où aller, ce qui n’était pas faux en soi. Ce qu’il cherchait se trouvait bien évidemment au plus profond du bâtiment et il ne pouvait pas y accéder par les chemins habituels. Les fenêtres étaient absentes de là, ce qui était logique au fond. Mais ce silence, cette absence de mouvement, c’était …

« Merde. » eut-il à peine le temps de lâcher, percevant le cliquetis caractéristique d’une arme à feu.

Une salve de plomb meurtrière ricocha contre les murs, illuminant la pièce à l’instar d’un stroboscope. En première ligne, l’assassin risqua un regard arrière, pur réflexe pour sauver Liz’ et se jeta sur le côté une fraction de seconde plus tard. Trop tard. Il roula contre le mur, se traina derrière un meuble en poussant des pieds. Il se tenait le flanc avec une grimace de douleur. La guigne, exactement ce dont il avait besoin. Rah. Il écarta le tissu pendant que les Marines rechargeaient et passa son doigt sur la plaque d’armure qu’il arborait sous sa tenue. L’acier était fendu et un liquide poisseux et chaud s’en écoulait. Il ôta son gant, pour prendre mesure de sa blessure. La balle était encore là. Retenant un gémissement de douleur, il glissa souleva la plaque d’armure, ouvrit sa tunique et passa sa main en dessous. Il plongea ses doigts dans sa blessure puis avec un hoquet de souffrance, il en retira le plomb qu’il jeta à terre. Une blessure légère en apparence. Il reprit sa respiration, alors que des pas se faisaient entendre.

« Tu penses qu’on l’a eu ? » marmonna un timbre masculin, rongé par les méfaits du tabac.

Aucune réponse des autres. L’assassin referma sa tunique, cachant au plus vite l’armure d’assassin qui trônait sous ses effets. Même si l’absence de lumière empêchait Liz’ de distinguer tout cela, il préférait ne pas s’y attarder. Il posa ses mains sur sa blessure, essayant de voir jusqu’à quel point la plaque avait été renfoncée. Elle plongeait dans la chair, le faisant souffrir à chaque respiration. De mieux en mieux, mais il ne pouvait pas s’en passer. Il grogna doucement. Tant pis pour Liz’, ceux-là ne s’en sortiraient pas. Il glissa sa main gauche dans sa botte et en tira deux dagues de lancer. De son autre main, il s’empara de celles qui étaient cachées à sa ceinture. Il se redressa, grimaçant de douleur puis fit signe à Liz’ de se planquer.

*siffle*

« Là ! » tonna l’un des Marine en avançant vers Rafaelo.

Trop tard, imbécile. Grâce au son de sa voix, l’assassin pu le localiser grossièrement et lui expédia une dague qui s’enfonça dans son plexus. Il ne pouvait viser précisément pour les tuer, mais au moins les handicaper jusqu’à la fin de la rencontre.

« Putain, il a eu … » fit un autre, avant de recevoir la même sentence.

Les deux hommes s’écroulèrent avec un gargouillis étouffé. Ceux qui restaient eurent la bonne idée de se taire et de se planquer. L’assassin se redressa et, surpassant sa douleur, se hissa à leur hauteur, frappant le premier à la tempe d’un revers de la main et condamnant l’autre à la chaise roulante en écrasant son talon sur son genou qui craqua sans vergogne. La main de l’assassin vint faire taire tout cri et une fraction de seconde avant de lui briser la nuque, il se rappela qu’il n’était pas venu là en temps qu’assassin mais en temps que Lieutenant de la Marine, ou Cipher Pol. Peu importait. Il écrasa le crâne du soldat contre le mur et fit de pas pour réserver le même châtiment à celui qui se relevait, sonné, de son premier coup. Se tenant les côtes, l’assassin récupéra les deux dagues, non sans vérifier leur pouls. L’un d’eux était à peu près stable, et bougeait encore. Il l’endormit du tranchant de sa main gauche. L’autre n’allait pas tarder à y passer. Il adressa un regard sévère à Elizabeth et entreprit de lui faire un garrot de fortune. On noterait l’attention.

Quoi qu’il en fût, les deux comparses ne trainèrent pas là longtemps, les coups de feu ayant secoué la fourmilière. Rafaelo s’avança dans le couloir sans un bruit, le souffle court. Sa blessure l’handicapait mais il ne pouvait se laisser le luxe de donner les commandes à la douleur. Il farfouilla dans sa bourse et en tira quelques cachets antidouleur. Prévoyance était mère de sûreté. Il les croqua et les avala rapidement. Le bureau du Lieutenant-Colonel n’était plus très loin. Au coin du mur, il se dissimula dans l’ombre, faisant signe à la jeune femme d’en faire autant. Une patrouille d’une dizaine d’hommes surgit alors et les dépassa sans les voir. L’assassin adressa un regard chargé de sous-entendus à la donzelle, manière de dire qu’ils ne feraient pas de quartier pour elle non plus. Ils arrivèrent enfin non loin du bureau, mais Rafaelo ne se laissa pas leurrer par l’apparente facilité des choses. Avec un sourire, il farfouilla dans sa bourse et en tira un escargophone noir. Avant de se dissimuler dans l’ombre, assez loin tout de même. Mais assez prêt pour être à portée …

« … Oui, il est entré. Je pense que nous ne mettrons pas longtemps à lui mettre la main dessus. »

C’était la voix du Lieutenant-Colonel. Bien. À qui parlait-elle donc ?

« Bien. Il est une plaie depuis Hinu Town. Quant à Atsuji Kaitô, qu’en est-il ? »

L’autre voix … il ne la connaissait pas. C’était quelqu’un qui était au courant de petites affaires que l’assassin avait mené à Hinu Town, intéressant. Peu de monde connaissait son implication dans le conflit, mais pourquoi mentionnait-il Kaitô ? L’assassin serra les dents.

« Le Cipher Pol ? … Attendez … Hm … On me signale qu’une patrouille a été retrouvée, en sale état. Je vais vous laisser. Je vous tiens informé quant à la suite des évènements. Nous trouverons celui qui a caché ces armes dans notre cellule, je vous l’assure mon Colonel. »

Puis plus rien. L’assassin fronça les sourcils. Il n’y avait que deux solutions de sortie : prendre le problème à bras le corps ou s’enfuir en espérant glaner des informations un peu plus tard maintenant qu’il savait que la Marine aussi avait été surprise par la découverte de ces armes. Cela n’expliquait pas la fausse déclaration. Ou alors avaient-ils tenté de garder la face ? L’hypothèse de la corruption tenait de moins en moins la route, du moins à un échelon aussi haut de la hiérarchie. Rien d’intéressant à rester ici, donc, sinon pour interroger ce femme. Rafaelo regarda son flanc. Il n’était pas en état, et encore moins pour se confronter à un Lieutenant-Colonel. Il se redressa en grimaçant et adressa un signe de la tête à la jeune femme. Ça voulait dire ‘on rentre’ … sauf si elle possédait d’autres tours dans son sac …

« Je perds trop de sang. Ce n’est pas ce soir que nous nous en sortirons. Tu sais escalader ? On passera par les fenêtres. » trancha-t-il, inspirant profondément en goûtant au répit que lui proféraient les anti-douleur.
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Si je savais escalader ? Bof pas vraiment. Je n'avais pas le vertige, c'était au moins ça, mais par contre quand il s'agit de trouver des prises sur un mur d'escalade ou de grimper dans un arbre, c'est pas exactement dans mes habitudes. Néanmoins je n'avais d'autre choix au vu de la situation que de hocher la tête activement et m'exécuter. Ernest se précipita vers la fenêtre la plus proche et l'ouvrit, générant un puissant et inattendu courant d'air. Il semblait que le temps se soit légèrement dégradé ; le vent soufflait fort et balayait les objets légers dans la pièce, roulant sur les bureaux et tombant à terre dans un fracas assez important pour être ouï par une bonne partie des occupants. Il passa sa jambe droite dans le vide, trouva appui et habilement se glissa de l'autre côté de la vitre, entamant presque aussitôt la descente. Pour moi, ce ne fut pas si aisé : je faillis carrément perdre l'équilibre en enjambant le cadre pour trouver le rebord sur lequel Ernest s'était reposé, ceci notamment dû à ma petite taille face à la sienne.

Ma main gauche lâchait ledit rebord quand un projectile brisa le carreau et qu'à l'intérieur une voix gueula :

- Les voilà ! Ils escaladent le mur !

Mon camarade entamait la descente du deuxième étage quand moi j'étais toujours coincée au quatrième. Mes bottes tenaient difficilement sur les quelques centimètres de béton mouillé, la pluie me flagellait le dos et les côtes et je n'y voyais vraiment rien. Je progressais à l'aveugle, pressée par l'approche sûre et certaine des soldats qui ne tarderaient pas à pointer le bout de leur nez dehors et tenter de nous achever avec leurs fusils. Une mort comme ça, y'avait rien de plus facile, suffisait de viser juste. Visualisant dans mon crâne l'image de deux doigts qui s'entrecroisent, j'espérais vivement que l'ont ait à faire à des véritables nases de la gâchette et des aveugles. Pourtant, il n'en fut rien, aucune tête ne sortit par l'ouverture laissée par notre passage, aucun fusil ne menaça de nous coller une balle de la tête, pas d'en bas en tout cas. Peut-être étaient-ils en train de descendre les escaliers pour nous réceptionner à l'accueil, nous tuer n'était probablement pas dans leurs objectifs. De toute manière s'ils me faisaient prisonnière, j'étais sauve ; je n'aurais qu'à reporter la faute sur mon camarade qui était pleinement responsable de tous les dommages humains, une quelconque enquête sur le personnage prétextant ma présence.

***
Néanmoins, même une fois que nous eûmes rejoint la terre ferme, pas même une escouade ne vint nous cueillir. Non, un silence étrange planait dans l'air, le même silence qui grignotait cette ville lorsque la nuit tombait ; toute trace de vie avait à nouveau disparu autour de nous. J'ignorai comment tout cela allait finir, mais il me semblait évident que nous étions en plein milieu des emmerdes désormais. Le plan, pour le moment, c'était de rentrer à l'appart' pour soigner la blessure du gazier. Ernest était resté mystérieux depuis le moment où nous dûmes fuir la bâtisse, il n'avait pipé mot et continuait à le faire en chemin. Nous rallongeâmes, passâmes par des ruelles sombres et très mal éclairées dans lesquelles nous fîmes disparaître nos traces, obscurité aidant. Le plaisir fut intense lorsque j'ouvrai finalement, à l'aide de mes clés, tout simplement, la porte de ma moitié de bicoque. Grommelant de douleur, le gusse se plongea dans le canapé, les yeux légèrement vitreux, en se tenant les côtes de sa main droite. Son regard allait de l'escargot-projecteur, en veille, à la table du salon, puis à moi, puis à sa blessure à nouveau. Son état piteux faisait peine à voir, tant et si bien que je sortis mon sac de médicaments et le balançai à côté de lui.

- Tiens, sers-toi, y'a tout ce qu'il faut ; les médocs ça coute cher mais nous on a ça gratis.

Je me servis un verre d'eau que j'avalai en deux-deux. Désaltérée, un passage aux petit-coin s'imposa avant de finalement retrouver ma place sur mon fauteuil. Le gars s'était légèrement redressé et désinfectait sa blessure dans un mimique de douleur intense, le regard perdu dans le vide. Je passai la main dans le coussin du meuble sur lequel j'étais assise et en ressortis les deux flintlocks que je posai sur la table.

- Tu as raison, j'ai mis ta mission en danger...

Je me levai, parcourus la pièce en nettoyant toutes les cachettes possibles des armes qui y étaient dissimulées. Couteaux, pistolets lambdas, fusils et enfin Grominet. Tout ceci était regroupé sur la table, il n'y avait qu'à se servir, une véritable armurerie. Après tout, c'était mon métier : confectionner et collectionner les armes à feu. Mais jusque là j'avais vraiment rechigné à m'en servir. Je pris un couteau que je plantai dans le bois d'acacia.

- Qu'est-ce que tu fous, sale gamine ?

- La ferme ! T'as raison chaque minute passée était une prise de risque...

Je pris mes Wallace et Gromit, fis courir mes doigts sur leurs canons, vérifiant leur état, leur propreté, passant un dernier coup de chiffon avec le revers de ma tunique. Puis enfin, mon regard revint vers le visiteur qui attendait visiblement la fin de ma phrase.

- Et j'ai toujours rechigné à user de la violence, mais tu m'as fait me rendre compte d'une chose. Dans ce monde, il n'y a pas de place pour une personne comme moi si elle n'est pas à même de se défendre, héhé.

Mon bras gauche se leva prestement, arme au poing, en direction d'Ernest. Il n'eut pas le temps de réagir. Mon doigt pressa la détente de Wallace, la balle siffla à l'oreille droite de mon invité et se logea finalement dans le mur de la cuisine, juste derrière. L'homme resta stoïque, partagé et bloqué dans son mouvement, la lame d'un poignard dépassait légèrement de sa manche. Tranquillement, je me déplaçai vers la zone de l'impact pour admirer la précision de mon tir. La bestiole gisait à terre, parfaitement perforée en son centre, baignant dans un liquide répugnant. C'était la première blatte que je vis dans cet appartement, la première qu'Ernest vit aussi.

- Comme je l'avais dit, on fait équipe, mais laisse-moi juste prendre ce qui me sert de crocs et de griffes, à défaut de ne pas être un animal. Je peux très bien veiller sur moi-même. Pour le reste, t'as des idées ?
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Elle … elle avait failli le tuer. Non. Il en était convaincu maintenant. C’était pas une secrétaire. En une fraction de seconde, il avait vu la gorge de la gamine ouverte, une dague plantée dans la carotide. Mais l’angle de tir, le regard. Ce n’était pas lui qu’elle visait. Sinon l’appartement aurait été redécoré de deux cadavres ce soir. Enfin, un et demi, au moins. Il se détendit légèrement, grognant tant de surprise que de douleur. Ses armes étaient … particulières, et elle savait s’en servir. C’était pas le genre de truc qu’on faisait par plaisir de la chose. Ça dépassait la petite secrétaire parano et indiscrète. La voir les nettoyer, s’en munir. Il fronça les sourcils, puis revint vers sa blessure, finissant d’appliquer la compresse et le désinfectant. Il prenait garde à ne pas trop ouvrir sa tunique, on ne savait jamais.

« Bon. Soyons clair. T’es dans quel camp ? » lui fit-il, de but en blanc.

Il en avait assez des faux semblants. Il en avait assez de ce jeu qui lui avait presque coûté sa mission. Il avait pris une balle parce qu’il avait été trop négligent, parce qu’il avait l’esprit ailleurs pendant sa mission. Cela ne devait jamais arriver. Voilà pourquoi il oeuvrait seul ou avec des hommes façonnés selon des préceptes similaires aux siens. Il devait pouvoir avancer en ne pensant à rien d’autre que son prochain mouvement sur l’échiquier. Il referma sa tunique, bougea légèrement le bras. Il avait tenté de suturer le trou, mais à faire cela saignerait quand même. Il dut s’y reprendre à deux fois pour se lever. Maintenant que l’action était passée, il payait le prix de ses ardeurs et son corps ne le lui rappelait que trop bien. Il avança jusqu’à la cuisine, fit les tiroirs sans vergogne et s’empara de la première bouteille d’alcool qui lui passa sous la main. Il la déboucha d’un coup de dent et s’en servit une rasade. Ça aiderait autant pour la tête que pour la douleur. On aurait pu croire à un vétéran, alors qu’il dépassait à peine la vingtaine … bien que son visage fut suffisamment marqué pour en témoigner autrement.

« C’était de ma faute. J’étais dispersé. » avoua-t-il, posant ses deux mains sur la table et fixant étrangement la bouteille qu’il venait d’y poser.

Ce n’était pas dans ses habitudes d’avouer ses erreurs, mais il commençait à prendre conscience du fait que la ville était trop bien sécurisée, même pour lui. Enfin, surtout pour lui avec une blessure par balle. Et encore, il avait de la chance, c’était superficiel. Le type aurait visé un peu plus haut … ouais non, il aurait visé un peu plus haut, l’armure aurait complètement arrêté la balle. Fait chier.

« La suite du plan … je sèche. Je sais pas pourquoi ils ont caché ces putains d’armes dans les caisses, je sais pas pourquoi la Marine veut maquiller ça et je trouve aucune raison logique sinon la présence d’une taupe. Putain. Des armes qui viennent d’Hinu Town. Qu’est ce que tu ferais, toi, si tu recevais la dernière commande d’un type mort ? Hm. Ah. Hé hé … Voilà ce qu’il nous faut ! » fit l’assassin, réfléchissant à voix haute.

Il regarda dans l’intérieur de sa tunique et il en sortit un petit carnet tâché par le sang. Il le posa sur la table et fit signe à Liz’ de venir.

« Dis-moi, Liz’. Comment t’as fait pour me trouver. C’était ton ami, là, qui regardait tous les noms et toutes les affectations, c’est ça ? Dis moi. Est-ce que tu reconnais l’un de ces noms ? » lui fit l’assassin, lui montrant la liste incroyable de noms qui s’étalait là.

La plupart de ces noms étaient rayés, mais certains subsistaient encore. Inutile de nier ce qui leur était arrivé. L’assassin soupira longuement en voyant les yeux ronds de la donzelle.

« Des malfrats pour la plupart. Cela remonte à quelques moins maintenant. Ils tenaient un réseau d’esclaves, d’armes et de drogue à Hinu Town. Mais c’est fini et je traque les derniers représentants de cette bande. Beaucoup d’entre eux étaient dans la Marine. » avoua-t-il, lui adressant un regard qui pouvait valoir pour une promesse de mort lente et douloureuse si elle cherchait à en parler à quelqu’un d’autre.

C’était toujours plausible dans l’histoire du CP. Mais il ne pouvait prétendre à rien d’autre que le CP9 avec un tel récit. Ou pas. Il s’embrouillait trop, trop de données. Il inspira longuement, se massa les tempes, résolu à ne pas fausser son discours et ne pas mettre en danger sa couverture. Il ne voulait pas en venir à tuer une innocente. Mais l’était-elle vraiment …

« Bref. L’un d’entre eux a peut-être fui ici. Si tu reconnais un des noms, nous saurons de qui il s’agit. Loin de moi l’idée d’empiéter sur les plats de bande de la Marine, mais j’ai une mission, et je m’en acquitterai. » trancha-t-il, ramenant le regard de la jeune femme sur le carnet ensanglanté.
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L'assassin me montra une longue liste de noms gribouillés et pour la plupart barrés, une sorte de carnet de bord de toutes les victimes qui avaient eu l'audace de braver les lois-mêmes qu'elles étaient censées appliquer. Des bavures, des pourris de la Marine comme il en existait des tas et en existera toujours. C'était pas pour rien que le CP3 et le CP4 existaient, il fallait toujours contrôler le travail des agents de la paix les plus douteux et parfois même celui des plus irréprochables. Je n'en reconnaissais aucun, peut-être si j'avais eu des photographies... Le regard d'Ernest se faisait lourd et soupçonneux, j'avais l'impression d'avoir à nouveau glissé dans cette zone "rouge" où je repassais comme quelqu'un de dangereux pour lui et de particulièrement douteux. En quelques sortes je me sentais plus à l'aise ainsi, avec un certain rapport d'égal à égal, ou presque. Enfin bon voilà, il avait une mission, des personnes à liquider, mais que faire pour la suite ? Où étaient les détails qui nous permettaient de savoir que faire, où nous rendre ? Au vu de la blessure de mon camarade, nous ne pouvions agir efficacement avec la fatigue qui nous tiraillait.

- Nous aviserons demain, hein. Vu ta tronche, serait peut-être mieux de passer la nuit ici. Lui dis-je en éteignant la lumière du salon.

Visiblement le gaillard ne l'entendait pas de cette oreille, mais sa fébrilité l'empêcha d'émettre plus longuement des contestations. Comme l'appartement était ridiculement petit, il n'y avait qu'une seule toison qui séparait la cuisine, la chambre à coucher et le salon ; ma piaule était donc ainsi totalement ouverte sur le séjour qui faisait aussi office de salle à manger. Mon lit était carrément défait, des vêtements propres fraichement sortis du bac à linge trainaient dessus dans un foutoir incommensurable, voltigeant allégrement aux mouvements de mes pieds sous la couette. Le temps était salement frais au dehors et c'était un véritable plaisir de se glisser sous les chaudes couvertures de mon lit douillet. Je savais que la nuit serait complexe et le réveil particulièrement difficile, alors je profitais de ces petits instants de conforts tandis que pas loin de moi, dans le canapé qui me tournait le dos, j'entendais la respiration forte de l'agent du CP9 qui se déplaçait difficilement pour s'allonger de toute sa longueur sur le sofa.

Je posai finalement la tête au creux de mon oreiller, allongée sur le dos et prête à sombrer dans un profond sommeil enrôlé par la fatigue qui me liait les membres par des contractions musculaires. Je repensais aux noms qui figuraient encore intacts sur la liste d'Ernest et tentais de me persuader que j'en avais déjà entendu certains quelque part. Particulièrement un qui revenait habituellement dans ma tête : Oliver Thomas Anderson. Je ne savais pourquoi, j'y avais été habituée pendant des jours sans parvenir à me rappeler du visage auquel il était associé. Puis tout d'un coup je me redressai, alerte, vivace et complètement ahurie. C'était l'allusion fugace de l'assassin au Binoclard qui m'avait mis sur la piste et j'en avais carrément oublié que l'olibrius avait une véritable identité. Tout le monde l'appelait le Binoclard et il ne s'en était jamais plaint, en revanche le matin lorsque les officiers supérieurs tels que le Colonel ou le Lieutenant-Colonel se rendaient au local pour le saluer et lui donner de nouveaux documents, ils l'appelaient d'une autre façon, forcément : Oliver T. Anderson. L'adrénaline m'empêcha de dormir pendant un bon moment, alors que la certitude de l'endroit où il fallait se rendre le lendemain tournait et se retournait dans mon crâne. Nous avions commis la bévue de nous rendre au mauvais endroit dans la base et désormais toutes les informations devaient avoir été mises en sûreté, cependant si le Binoclard était véritablement derrière tout ça, quel autre endroit pouvait être plus sûr que sa propre demeure ?

***
Le lendemain nous nous apprêtâmes en vitesse aux premières lueurs du jour. La nuit s'était faite courte, nous dûmes nous arracher au royaume des songes seulement cinq ou six heures après nous être mis au lit. Malgré tout le gaillard s'était légèrement rétabli, bien qu'après le passage à la douche sa plaie saignait encore assez abondamment. Une fois le pansement refait, le petit déjeuner pris et les armes planquées, nous passâmes la portes et nous rendîmes une énième fois dans la rue, mais cette fois-ci en civils. Je connaissais la maison d'Oliver, ce-dernier avait des vues sur moi au boulot et avait déjà tenté de m'y faire rester après un repas copieux, un soir, après m'avoir invitée à prendre un verre. Bref j'avais fait le tour de la maison en cherchant les toilettes, c'était une grande baraque, quelque chose d'assez surprenant pour un simple fonctionnaire ennuyant comme le Binoclard. Et maintenant je me dis que cela n'avait probablement été qu'une couverture, que son apparence, son caractère, tout n'était qu'une pièce infâme jouée pour camoufler son rôle de grand manitou de cette affaire étrange qui demeurait encore floue dans mon crâne.

Ainsi donc nous faisions face à l'imposante bicoque pour peu taillée dans le marbre, avec ses grandes fenêtres dignes du patrimoine de la Renaissance, ses balcons taillés dans du bois blanc, ses colombages et gravures sur la façade et les piliers qui supportaient cette-dernière au-dessus de la véranda. Il s'en fallait peu pour qu'il n'y ait pas une boite au lettre fantasmagorique avec marqué en lettres brodées d'or dessus, dans une calligraphie irréprochable : Demeure des Anderson. Bref nous pénétrâmes dans le bâtiment après avoir contourné ce-dernier pour trouver une seconde entrée, plus camouflée. A supposer que nous étions attendus, il aurait probablement été moins dangereux de ne pas faire un débarquement fracassant. Comme prévu, la porte n'était pas de notre avis et rechignait à s'ouvrir, mais si Ernest ne s'était pas chargé de crocheter la serrure, je l'aurais fait. Cela faisait partie des cours d'espionnage que l'on enseignait en première année et c'était véritablement bénin. Nous débouchâmes sous le lourd escalier en colimaçon qui faisait face à la porte du vestibule. C'était désert, silencieux, chacun de nos pas sur le plancher grinçant me provoquait des sensations gênantes dans le cou et il m'était difficile de faire face au fait que l'infiltration soit ratée.

- Vous voilà enfin, hé hé hé !

Je la reconnaissais, cette voix, c'était celle du Binoclard, mais elle avait quelque chose de changée, comme un excès de confiance. L'homme descendit tranquillement l'escalier à la façon d'un grand méchant fier de lui, mais failli misérablement se viander en loupant la dernière marche.

Reprenant une posture digne, l'individu claqua des doigts et une bonne demi-douzaine de sbires musclés et armés jusqu'aux dents apparurent, le Lieutenant-Colonel y compris. Le gusse s'approcha dangereusement d'Ernesto et prononça quelques mots qui firent brutalement changer la donne :

- Croyais-tu réellement que je n'allais pas me douter que tu viendrais prendre ma tête, Di Auditore ? Alors le voilà, ton vrai visage. Pff ! Je te croyais plus malin que cela pour tomber aussi brutalement dans notre piège. Le "Paradigme du Coquillage" est une réussite !

Mon expression passa par le stade de l'incompréhension, du dégoût de m'être faite berner et enfin de la peur. Cet homme que je prenais curieusement pour un assassin du CP9 était en réalité l'un des plus connus et recherchés révolutionnaires que ce monde avait pu porter. C'était la cause de base contre laquelle se battait le Cipher Pol, notre ennemi juré. L'intéressé ne pipa mot, ne fit aucun geste et demeura fixe. Entouré de ses malabars, Oliver recula d'un pas, il n'en avait pas fini.

- Je n'aurais jamais su qu'une telle figure de la révolution aurait pu être à mes trousses si tu avais correctement achevé l'une de tes précédentes victimes. Elle eut malheureusement pour toi le temps de me susurrer ton nom dans l'oreille avant de mourir. Triste histoire, hum. Il tourna son visage vers moi, redressant ses grosses lunettes rondes sur son nez. Ah regardez ce que nous avons-là, notre magnifique écolière du CP8, hé hé hé. Ma très chère Annabella Sweetsong, je me vois au regret de devoir en finir avec ta si peu prometteuse carrière, aujourd'hui. Dommage collatéral, mais grâce à toi tout ce petit monde est exactement à l'endroit désiré au moment voulu. Il écarta les bras pour désigner ses molosses et le révolutionnaire. Mais la question demeure : comment le Cipher Pol a-t-il pu accueillir un boulet comme toi en son seing, hein ? Pourquoi toi et pas moi, hein, alors que je suis monstrueusement intelligent ?! M'enfin bon, nul ne saura jamais ce qu'est devenu ce déchet inutile de Sweetsong, tout le monde s'en foutra à la limite, hé hé hé. Très triste histoire, huhu.

Ma rage bouillonnait, je me sentais cernée. Mon ex-compagnon représentait désormais autant une menace pour moi que pour les autres gusses qui m'encerclaient. Les mains dans le dos, je me préparais à bondir en arrière et tirer dans le premier venu, mais tant qu'Oliver était là, personne ne fit un seul mouvement. Je n'en pouvais plus d'être considérée comme une personne faible et je sentais que tous les efforts que j'avais fait jusque là venaient d'être réduits à néants, ma confiance en moi dilapidée après avoir pris connaissance de l'identité de l'assassin.

Et puis mon cœur manqua un battement lorsque celui-ci se décida finalement à faire un geste.


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Mer 21 Oct 2015 - 3:35, édité 3 fois
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La nuit fut agitée. Perturbée par des rêves fiévreux et les aléas de cette maudite mission. Il s’endormit en étudiant la multitude des possibilités sans pouvoir y changer quoi que ce fût. Il garda un œil sur la jeune femme, guettant la moindre incartade de sa part mais il ne put lutter grandement tant son état de faiblesse était grand. Mis à mal par une seule balle, pitoyable. Les journées de privation qui avaient succédé à cet état y étaient aussi pour quelque chose. Comme toujours, il ne tenait qu’à un fil. Ainsi s’endormit-il, son sommeil troublé par des scénarios improbables. Plusieurs fois se réveilla-t-il en ayant l’impression d’avoir loupé quelque chose de crucial, persuadé d’avoir été confondu. Ses chimères lui menaient la vie dure, mais il avait d’autres tours dans son sac. Ce soir, cependant, il n’était pas en état. Il jalousait en cet instant les pouvoirs de son frère. Mais lui demeurait humain, ou presque. Raison pour laquelle il s’en remettait à lui la plupart du temps. Raison pour laquelle ils traquaient leurs proies en un duo impitoyable.

Le matin fut plus productif que la nuit. Liz’ lui révéla le nom de celui qu’elle traitait de Binoclard. Il accueillit la nouvelle avec un sourire, comme si la boucle était bouclée. Mais il avait toujours cette sensation étrange d’avoir un coup de retard et il n’aimait pas cela du tout. Il était dans une situation où il ne pouvait pas jouer de toutes ses cartes. Il se sentait nu, presque isolé. Ce n’était cependant pas une situation rare. Il lui suffirait de faire valoir ses atouts, et peut-être même son Joker. Il ne cessa d’arborer un petit sourire pendant tout le temps où ils préparèrent leur petit manège. Il ne pouvait risquer de contacter ses frères, mais si tout se passait bien il n’en aurait pas besoin. Il s’isola le temps de changer son pansement et revint plus frais que jamais. Les capacités de récupération de l’assassin semblaient incroyables. Il avait une mission.

Les deux compères se préparèrent durant une bonne partie de la mâtinée, Liz’ lui décrivant le manoir dudit Anderson et l’assassin fit en sorte de s’en faire une représentation mentale assez précise. De la même manière, ils discutèrent des quelques situations de repli qu’il serait possible de mettre en place, en passant de la révélation du complot à la purification par les flammes. Il essayait d’entrer dans le rôle de CP qu’elle lui attribuait, ce qui n’était pas si difficile quant à ses propres attributions au sein de la révolution. Au fond, ils se ressemblaient presque. Mais en mettant en lien les différents éléments de cette triste histoire, il semblait évident que la suite en serait d’autant moins aisée. Leur infiltration avait été déjouée la veille par un facteur inconnu. Ainsi il y avait une forte probabilité que cela se reproduise. Plus il laissait de temps à ses ennemis pour s’organiser, plus cela devenait risqué. Ce fut donc un pari fou que prirent les deux alliés.

Ils s’infiltrèrent, et comme ils l’avaient supposé, ils étaient attendus. Pourtant, l’assassin ne s’était pas préparé à cela. Pas à ce qu’on révéla qui il était, ce qu’il était. Il vit le visage de la donzelle se décomposer au fur et à mesure que le sien se fermait. Pour éviter un sourire, pour éviter un rire mesquin. Il n’avait pas dit ‘Il Assassino’. Non. Il avait dit ‘Di Auditore’. Pitoyable erreur que voilà, vermine. Par contre, comme il le suspectait, Liz’ ne s’appelait pas Elizabeth. Pas plus qu’elle n’était qu’une simple secrétaire. CP8. Tch. Pire que tout à vrai dire. Il avait eu de la chance, elle n’avait pu vérifier ses affiliations, confondre ses mensonges. Maintenant, il savait qui elle était et elle était une menace. Cela lui remit en mémoire l’ordure de Kaitô et se demanda s’il pouvait encore utiliser la donzelle, ou s’il ferait mieux de la tuer au plus vite …

« Si sa victime a survécu, Anderson, c’est bien parce qu’il l’a voulu. » répliqua-t-il, avec un sourire carnassier que Liz’ ne lui connaissait pas.

Il jaugea du regard les quelques malabars qui s’étaient rassemblés autour d’eux. Maintenant qu’ils avaient entendu la vérité, il était obligé de les tuer. Tous. Son sourire s’étira au fur et à mesure que son pouls s’accélérait, prémices d’une bataille alléchante.

« La peur, la panique. Je le vois à vos pupilles, vos mouvements. Vous avez alors commis une erreur et j’ai pu vous retrouver. Le paradigme du coquillage est un succès ? J’en suis certain. Mais dites-moi, si vous êtes aussi monstrueusement intelligent … pourquoi un homme de ma réputation aurait-il suivi une piste aussi chaude, aussi facile ? » grogna-t-il, posant la main sur sa rapière.

Il adressa un regard à Annabella, puisque c’était son nom. Le combat était inévitable.

« Parce que je suis l’Empereur et que je ne souffre aucune concurrence. Je suis Césare Di Auditore, et vous, vous n’êtes rien. Votre mort fera l’objet d’une brève dans le journal local. Poussière vous étiez, poussière vous redeviendrez. » ricana-t-il, adoptant avec une morgue parfaite l’arrogance de son frère jumeau, à telle point que …

Les hommes ricanèrent, toisant le pauvre petit cancrelat qui osait les menacer de son dard ridicule. Ils étaient des hommes entraînés à toute situation. Des mercenaires pour qui seul l’argent faisait loi. Pourtant, il vit une lueur de doute dans l’œil d’Anderson lorsqu’il mentionna l’Empereur. La petite parcelle qui s’allumait, qui lui disait que non, il avait bien cerné Il Assassino. Mais aurait-il pu se … tromper ? La probabilité qu’Il Assassino fut une autre personne, la probabilité qu’Il Assassino soit ailleurs était …

« Monsieur Anderson … » reprit-il, se passant une main dans les cheveux.

« Si j’étais vraiment Il Assassino, comment pourrais-je faire ceci ? » poursuivit-il, pointant du menton le visio-denden.

Un sourire mesquin se dessina sur ses traits. Interloqué, Anderson arqua un sourcil, se glissa jusqu’à la salle et activa l’objet. Quelques secondes se passèrent. Rien.

« Tu essaies de gagner du temps par des mensonges insipides, assassin … je t’aurais cru un peu plus intellig… » commença-t-il avant qu’une voix caverneuse ne lui enfonce ses mots en travers de la gorge.

« Bonjour Shell Town. » fit la voix, alors que l’image grésilla soudainement pour révéler un être revêtu d’une capuche noire qui ne laissait voir qu’un sourire amusé.

Anderson écarquilla les yeux et revint vers les deux compères qui étaient là.

« Permettez-moi tout d’abord de vous présenter mes excuses pour cette interruption. J’aime, comme beaucoup d’entre vous le confort du train-train quotidien, le sentiment de sécurité et la tranquillité que procure ce qui est familier et répétitif. Je les apprécie, comme tout à chacun.

Mais aujourd’hui est un jour un peu particulier. J’ai à vous parler, Shell Town. Il existe bien sûr des personnes qui ne veulent pas que nous parlions. Je soupçonne qu’en ce moment même, des ordres sont aboyés et que des hommes armés vont bientôt se mettre en route. Pourquoi ? Parce que même si l’on peut substituer la matraque à la conversation, les mots conserveront toujours leur pouvoir. Les mots sont le support de la compréhension et pour ceux qui les écouteront l’énonciation de la vérité. Et la vérité c’est que quelque chose va très mal dans ce pays, n’est ce pas ?

Cruauté et injustice. Intolérance et oppression. Et la où, auparavant, vous aviez la liberté de faire des objections, de parler comme bon vous semblait, vous avez maintenant des hommes qui le font à votre place et se permettent de prendre ces décisions en votre honneur. Pourtant, ces hommes sont-ils irréprochables ? J’en doute, j’en doute … Prenons en exemple notre citoyen de ce jour. »
poursuivit la voix, captant l’attention du félon, sans pour autant permettre à l’Empereur une ouverture.

On ressentait là le style, la façon de s’exprimer de l’assassin. Quelque chose d’animal qu’Annabella put alors identifier. Cette même façon qu’avait eue Ernest de s’adresser à elle par de faux semblants et des mimiques vindicatives. Une propension à user du mot juste au bon moment à la seule fin de blesser. Quelque chose qu’elle n’avait étrangement pas retrouvé ce matin-là, chez son camarade. L’Empereur lui adressa un clin d’œil. Les deux échangeaient souvent leur identité pour brouiller les pistes et pour se sortir de situations épineuses comme celle-là même. Au fur et à mesure, Anderson perdait en couleur, cherchant à comprendre jusqu’à quel point il avait été dupé ou s’il ne s’agissait que d’une mise en scène. Les assassins de la Confrérie d’Il Assassino étaient légion. Pourtant, celui-là revêtait la tunique noire, parlait comme lui. Et surtout, il avait réussi à s’infiltrer suffisamment loin pour diffuser cette étrange émission. Anderson blêmit lorsque l’assassin révéla son visage, tirant une photo. Cesare esquissa un sourire. Son frère avait été efficace. L’émission tombait trop bien, sur un timing trop impeccable. Cela ne pouvait qu’avoir été prémédité.

« Oliver Thomas Anderson. Honnête aristocrate parvenu à une fonction de fonctionnaire au sein de votre glorieuse Marine … vraiment ? » continua-t-il, feuilletant un petite pile de papiers.

On entendit alors distinctement un grand cou porté non loin de l’assassin qui parlait. L’image grésilla mais il ne sembla pas paniquer. Visiblement, on cherchait à l’empêcher de parler. Comme il l’avait suggéré plus tôt.

« Mais saviez-vous que cet homme à la mine si paisible, si complice avec ses pairs, était à la tête d’un trafic d’armes qui sévissait ici-même à Shell Town, finançant esclavage et drogue à Hinu Town ? » fit-il, montrant alors une image prise le jour où il avait découvert les caisses avec les armes, révélant le contenu d’une caisse pleine.

Un nouveau coup retentit. L’image bascula et la main de l’assassin vint empêcher le visio-denden qui le filmait de tomber, comme si de rien n’était. Anderson revint vers l’Auditore qui lui faisait face, ne sachant comment réagir face à ces révélations. Même si les dires de l’assassin n’étaient pas fondés, il soulevait des questions et des interrogations. Il mettait en doute la force de la Marine et celle-ci serait prompte à réagir pour étouffer l’affaire. Peu importe comment ils le feraient, Anderson serait le premier à en pâtir. Qu’ils lui fassent porter le chapeau ou non. L’assassin cherchait à mettre le feu à la fourmilière, et ils feraient tout pour sauver les meubles.

« Allons bon. Pas ici, pas à Shell Town ? Pourtant … je viens vous parler dans un souci de vérité, Shell Town. Que vous sachiez, car les mots ont un pouvoir qu’ils ne sauraient vous enlever.

Comment est-ce arrivé ? Qui est à blâmer ? Bien sûr, il y a ceux qui sont plus responsables que les autres et qui devront en rendre compte mais... Encore dans un souci de vérité, si vous cherchez un coupable, regardez simplement dans un miroir.

Ce genre d’homme ne peut exister que parce qu’il est toléré. Guerre, terreur, maladie. Une myriade de problèmes contribue chaque jour à perturber votre jugement, à vous priver de votre bon sens. Alors ils s’instillent dans votre vie et abusent de vous, Shell Town. »
poursuivit-il, accaparant toute l’attention de la salle.

« Ils vous ont promis de l’ordre, il vous a promis de la paix. Tout ce qu’ils ont demandé en échange, c’est votre consentement silencieux et docile. Je sais pourquoi vous l’avez fait. Je sais que vous aviez peur. Qui pourrait se vanter du contraire ! La peur a pris ce qu’il y a de meilleur en vous. Et dans votre panique vous vous êtes tourné vers le Gouvernement, aujourd’hui omniprésent.

Et pendant ce temps ? Les bureaucrates eux-mêmes se tournent en criminels : ceux-là mêmes chargés de vous protéger, de vous servir. Alors je te le demande, Shell Town, n’y a-t-il pas quelque chose que tu puisses faire ?

Rappelle-toi simplement que quand les hommes suivent la vérité aveuglement, rappelle toi que rien n’est vrai ; quand la morale ou les lois bâillonnent l’esprit des hommes, rappelle toi que tous est permis. Rien n’est vrai, tout est permis. »
acheva-t-il, avant de laisser le signal s’éteindre.



Le temps sembla s’étirer, Anderson était devenu blafard. Ainsi donc il s’était fourvoyé ? Di Auditore n’était pas Il Assassino, il n’était que ce maudit Empereur qu’il se proclamait être ? Il recula d’un pas, tremblant. Le courage n’était visiblement pas l’apanage des traîtres. Une colère furibonde passa sur ses traits et il pointa un doigt inquisiteur sur l’Empereur. Il chercha ses mots, tentant à grande peine de retrouver son calme. Il lui fallait appeler des renforts, se faire aider. Mettre en place quelque chose pour le blanchir, oui, un complot ! Voilà ce que ce serait, il pourrait les convaincre, les payer, ça marcherait ! Il s’empara de son denden, essayant de trouver quelqu’un qui pourrait l’aider.

« Monsieur Anderson … à quoi bon téléphoner si vous êtes dans l’incapacité de parler ? » le railla l’Empereur avant de sauter à l’assaut du bureaucrate.

Deux malabars s’interposèrent, surpris par la réaction de leur prisonnier qui était jusqu’alors inactif. Deux couteaux papillons s’enfoncèrent dans leur gorge. Il fit tomber le Commandant d’une balayette qui le prit par surprise puis s’empara de la tunique d’Oliver et lui écrasa son coude dans la mâchoire. Les hostilités étaient ouvertes …
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Je me pinçai, muette de surprise, abasourdie face au mur d'information qui venait de me heurter de plein fouet et me laisser là, pantin désarticulé mentalement, au milieu de cette bagarre autant pittoresque que mystérieuse. Je n'avais pas prêté attention aux différences, si mineures soient-elles, qu'il y aurait pu y avoir entre mon Ernesto et celui qui était là ; enfin plutôt entre Rafaelo et son frère, Cesare. De là, n'importe quel autre agent de n'importe quel Cipher Pol dirait que c'était la véritable occasion d'en finir avec l'un des deux jumeaux, néanmoins j'étais autant bloquée par l'expérience que j'avais partagé avec mon Di Auditore troué au bide et celui qui faisait des ravages ici-présent.

- Eh, réagis, andouille !

- Euuuuuuuuuuuuh...

Du groupe de géants costauds et vénéneux se détacha le plus petit - mais pas le moins trapu - avec sa fantasque coupe iroquoise qui lui recouvrait le sommet du crâne ridiculement. Un trop plein de différentes émotions comme la peur, l'angoisse, l'incompréhension me submergeait et me laissait là, pile sur la trajectoire du gaillard, prête à me faire tailler en deux d'un coup de hache. Réagir, réagir, il me fallait réagir. Mes bras qui depuis tout à l'heure étaient restés coincés dans mon dos, les doigts bloqués autour des crosses de mes pistolets finirent par répondre à mes appels au secours. Mes doigts se crispèrent et saisirent les gâchettes, mes bras se tendirent dans un mouvement totalement synchrone et symétrique, visant soigneusement le crâne de mon malheureux assaillant. Si celui-ci avait peur de se faire faucher, il n'en montra rien, jusqu'à ce que les deux projectiles partent, qu'il se décale légèrement pour éviter la première balle mais que la seconde lui perfore parfaitement la pupille droite pour ressortir à la base de son crâne.

Blom.

Le macchabée s'effondra de tout son long dans un bruit sourd mais pesant, comme si l'on laissait tomber un gigantesque jambon et son os sur le sol. Mais à peine en avais-je terminé avec celui-là qu'un autre me lança un regard hargneux désireux de vengeance et de la satisfaction de s'en prendre à une femme.

***
- Urgh...

Tel fut le cri de mort du troisième individu qui avait à son tour essayé de s'en prendre à moi. Visiblement plus lâches les uns que les autres, ceux voyant qu'ils n'avaient aucune chance contre le prétendu Cesare Di Auditore s'étaient repliés sur moi mais, manque de bol, avaient tous deux péri d'une balle vissée en plein milieu de l’œil. Étonnée, satisfaite et heureuse, c'était la première fois que j'arrivais à atteindre une telle précision plusieurs fois d'affilée.

- Tu vises toujours l'oeil, héhé.

-  Ouep !

Enjambant les corps morts ou agonisants qui jonchaient le sol, j'arrivais jusqu'à la pièce où mon acolyte du moment semblait prêt à en découdre avec la crapule d'Anderson. Je n'avais pas l'intention d'en finir, tout ce qui m'intéressait depuis le départ était de découvrir le pot-au-rose et le développer dans mon rapport pour toucher une maxi-prime. Cependant plus ça allait et plus je remarquais que je possédais un plus grand nombre d'informations qu'il n'en fallait sur les jumeaux Di Auditore, que j'avais développé une certaine amicalité avec Rafaelo et que j'aurais probablement des remords si je balançais son véritable visage au Gouvernement Mondial. Ainsi je choisis de rester dans un coin, à sa disposition et de m'en mordre les doigts si jamais il en venait à avoir besoin de me liquider.

Au mois j'avais le plaisir de découvrir comment se terminait le bouquin.
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  • https://www.onepiece-requiem.net/t10652-a-sweetsong-ou-l-effet-papillon-100-fini
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