Dans l'énorme salle où les hommes s'entassent, il y a une porte. Simple, grande. Les gonds de ferraille pendent de chaque côté pour tenir encore droits les planches de bois mangées par le temps. Des griffures parsèment chaque parcelle comme si des dizaines d'hommes s'étaient enragés à casser chacun de leurs ongles sur le bois. Mais les quarante centimètres d'épaisseur ont toujours résisté et c'est à la force de dix hommes qu'elle s'ouvre chaque jour pour envoyer les esclaves en pâture dans les arènes ou à la vente.
Les hommes, eux, ne la regardent plus. Ils ne regardent que leurs mains souillés par le temps et leurs gueules qui trop sales se ressemblent toutes. Ce sont d’innombrables sosies de pitié qui se collent entre eux quand la fraîcheur de la nuit vient les faire frissonner.
La porte, c'est ce qu'ils ne veulent plus voir quand enfin, le repos d'un sommeil volé vient les chercher. La porte, c'est toute la puissance de l'homme qui les a écrasé pour en faire du bétail, pour les transformer en animaux bons qu'à trimer, incapable de penser à autre chose qu'à leur propre survie. Cette porte là, c'est celle qui explose.
D'un coup. Horrible. Violent.
Un énorme fracas survient et la porte se déchire comme du carton mâché pour faire voler un garde à l'autre bout de la prison. Comme un énorme boulet de canon.
C'est la stupeur. Les râles qui remplissaient la pièce se sont soudain tût. Aucun bruit ne vient déranger celui, discret, d'un homme que les esclaves n’aperçoivent pas. Les plus prêts de la porte semblent entendre un souffle, des mains venir frotter un pantalon. Puis la porte s'ouvre lentement, faisant grincer les gonds jusqu'à manquer de les faire lâcher.
Quand enfin elle s'ouvre c'est pour faire apparaître un homme, un seul, un Monstre. Il a une sale gueule avec une moustache finement taillée et un costume trois pièce qui voudraient le faire passer pour plus beau qu'il n'est. Chaque esclave le regarde comme s'ils croyaient rêver. Lui, remet lentement son nœud papillon en place. Ils croiraient qu'il prend plaisir à jouer cette scène mais pourtant aucun sourire n’apparaît sur les lèvres du Monstre. C'est peut être de la tristesse qu'ils croient discerner dans ses deux yeux fatigués.
-Hmm. Vous avez deux minutes pour quitter cette pièce et me suivre. Que ceux qui veulent rester le fassent mais ceux qui se rappellent encore de leur liberté, que ceux qui veulent enfin revivre le plaisir de se lever parce seuls eux l'ont décidé, alors que ceux là me suivent.
Il attrape un sac faisant plus de deux mètres pendant dans son dos qu'il lance d'un simple geste à une vingtaine de mètres, au milieu de la pièce. Deux hommes tentent de l'attraper mais manquent de se faire écraser sous le poids.
-Je n'ai pas d'arme pour tout le monde. Que chacune d'entre elle arrive dans la bonne main. J'aurai besoin d'aide. Beaucoup de personnes vont vouloir vous empêcher d'être libre et nous devons aller jusqu'au port.
Beaucoup d'hommes se regardent en chien de faïence mais déjà bon nombre d'entre eux se jettent sur le sac pour attraper pieus, arcs, flèches, épées, haches et même fourches. Le Monstre lui a déjà fait demi tour et c'est plus de cinq cent hommes, femmes et enfant qui lui emboîtent le pas. Ils s'engouffrent dans un tunnel où seuls quelques torches réussissent à éclairer les gueules blafardes d'esclaves affamés.
Gol est l'un d'eux. Un gamin d'à peine 12 ans et qui a déjà vécu la moitié de sa vie comme esclave. Il marche en suivant les autres comme un chiot suit sa meute : plus par instinct de survie que par volonté de liberté. L'enfant s’arrête un instant avant de se faire bousculer par les esclaves derrière lui. Il a crut rêver. Il a cru que le sol devenait mou mais plus il continue et plus cette sensation lui revient. Quand il baisse son crane, ses yeux voient des gardes au sol. Il voit ses pieds écraser le corps d'un homme qu'il ne connaît pas pour s'enfouir dans son bassin. Il sent son poids et celui des autres esclaves tuer un homme et cette idée lui donne une étrange sensation qui fait battre son cœur plus fort encore.
Aujourd'hui, Gol a tué pour la première fois.
Les hommes, eux, ne la regardent plus. Ils ne regardent que leurs mains souillés par le temps et leurs gueules qui trop sales se ressemblent toutes. Ce sont d’innombrables sosies de pitié qui se collent entre eux quand la fraîcheur de la nuit vient les faire frissonner.
La porte, c'est ce qu'ils ne veulent plus voir quand enfin, le repos d'un sommeil volé vient les chercher. La porte, c'est toute la puissance de l'homme qui les a écrasé pour en faire du bétail, pour les transformer en animaux bons qu'à trimer, incapable de penser à autre chose qu'à leur propre survie. Cette porte là, c'est celle qui explose.
D'un coup. Horrible. Violent.
Un énorme fracas survient et la porte se déchire comme du carton mâché pour faire voler un garde à l'autre bout de la prison. Comme un énorme boulet de canon.
C'est la stupeur. Les râles qui remplissaient la pièce se sont soudain tût. Aucun bruit ne vient déranger celui, discret, d'un homme que les esclaves n’aperçoivent pas. Les plus prêts de la porte semblent entendre un souffle, des mains venir frotter un pantalon. Puis la porte s'ouvre lentement, faisant grincer les gonds jusqu'à manquer de les faire lâcher.
Quand enfin elle s'ouvre c'est pour faire apparaître un homme, un seul, un Monstre. Il a une sale gueule avec une moustache finement taillée et un costume trois pièce qui voudraient le faire passer pour plus beau qu'il n'est. Chaque esclave le regarde comme s'ils croyaient rêver. Lui, remet lentement son nœud papillon en place. Ils croiraient qu'il prend plaisir à jouer cette scène mais pourtant aucun sourire n’apparaît sur les lèvres du Monstre. C'est peut être de la tristesse qu'ils croient discerner dans ses deux yeux fatigués.
-Hmm. Vous avez deux minutes pour quitter cette pièce et me suivre. Que ceux qui veulent rester le fassent mais ceux qui se rappellent encore de leur liberté, que ceux qui veulent enfin revivre le plaisir de se lever parce seuls eux l'ont décidé, alors que ceux là me suivent.
Il attrape un sac faisant plus de deux mètres pendant dans son dos qu'il lance d'un simple geste à une vingtaine de mètres, au milieu de la pièce. Deux hommes tentent de l'attraper mais manquent de se faire écraser sous le poids.
-Je n'ai pas d'arme pour tout le monde. Que chacune d'entre elle arrive dans la bonne main. J'aurai besoin d'aide. Beaucoup de personnes vont vouloir vous empêcher d'être libre et nous devons aller jusqu'au port.
Beaucoup d'hommes se regardent en chien de faïence mais déjà bon nombre d'entre eux se jettent sur le sac pour attraper pieus, arcs, flèches, épées, haches et même fourches. Le Monstre lui a déjà fait demi tour et c'est plus de cinq cent hommes, femmes et enfant qui lui emboîtent le pas. Ils s'engouffrent dans un tunnel où seuls quelques torches réussissent à éclairer les gueules blafardes d'esclaves affamés.
Gol est l'un d'eux. Un gamin d'à peine 12 ans et qui a déjà vécu la moitié de sa vie comme esclave. Il marche en suivant les autres comme un chiot suit sa meute : plus par instinct de survie que par volonté de liberté. L'enfant s’arrête un instant avant de se faire bousculer par les esclaves derrière lui. Il a crut rêver. Il a cru que le sol devenait mou mais plus il continue et plus cette sensation lui revient. Quand il baisse son crane, ses yeux voient des gardes au sol. Il voit ses pieds écraser le corps d'un homme qu'il ne connaît pas pour s'enfouir dans son bassin. Il sent son poids et celui des autres esclaves tuer un homme et cette idée lui donne une étrange sensation qui fait battre son cœur plus fort encore.
Aujourd'hui, Gol a tué pour la première fois.