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Winter Assault

HRP:

Winter Assault

I.

Froid glacial.
- Tain on s'les gèle chef... On aurait dû nous envoyer à Ypres...

- Ouais, enfin Float, là-bas on ne serait pas ensevelis sous la neige, mais sous les obus, donc bon.

- Pas faux... mais faut bien râler, laissez-moi au moins ça, chef.

Mountbatten esquissait un sourire léger mais franc. Ce genre de situation arrivait souvent. Le sergent d'élite Float M. Pacific était un bon élément. Il écoutait les ordres sans broncher et avait des résultats plus que bons. Son principal défaut était qu'il la ramenait constamment. Mais après tout, n'était-ce pas le propre des soldats que de râler ? Telle était la vision de la plupart des officiers. Et le Marijoan n'était pas une exception. Lui qui avait grandi à côté des huiles de la capitale mondiale, bien qu'élevé dans une continuelle glorification du Gouvernement Mondial, avait une image légèrement péjoratif des personnes de bas rangs.

Pourtant, il avait commencé presque en bas de l'échelle, en tant que caporal d'élite. Ratzkill avait été un simple marin d'élite. Mais avec les promotions, il était devenu un tantinet prétentieux. Et puis son environnement n'avait pas aidé. Les simples soldats étaient légions et facilement remplaçables. Les sous-officiers l'étaient moins, et la perte d'officiers compétents étaient très souvent un coup dur pour tous. Autant pour les personnes placées encore au-dessus de lui que pour ses hommes, qu'ils avaient appris à respecter et à écouter. S'il y avait bien une leçon que Mount allait tirer de cette guerre, au même titre que tous les autres soldats engagés dans la guerre, c'était que personne n'était irremplaçable dans ce monde.

A une exception près. Au niveau des sentiments. La disparition d'un être chair laissait, le plus souvent, une trace indélébile sur soi. Non pas physiquement, mais au niveau du cœur. C'était comme un vide. Un vide rempli de vide. Rien ne pouvait se mettre à sa place. Il faut du temps pour se remettre d'une chose pareille. C'était la deuxième leçon que les combattants avaient appris. Alors, ils changèrent leurs comportements en conséquence. Ils étaient plus détachés des autres, plus remplaçables que jamais. Mais c'était nécessaire. C'était une guerre où il soldat ne valait rien, une trentaine ne valait qu'un pion dans un gigantesque échiquier.

La température avoisinait les moins quinze degrés. Tout le monde avait des manteaux, plus ou moins adaptés. Le manteau n'était pas compris dans le paquetage réglementaire de chaque soldat. Ainsi, ils durent en acheter auprès des locaux avec leur maigre solde, qui arrivait, le plus souvent, en retard. Et ce à cause du ravitaillement. L'état-major avait décidé qu'investir dans de nouveaux matériels militaires étaient une meilleure décision que de payer à temps des soldats, qui au fond, n'avaient pas une durée de vie très longue. D'autres marins avaient pris dans leurs bagages quelques vêtements. Enfin, certains avaient demandés à leurs familles d'en envoyer. Certains découvraient avec joie de chaudes doudounes envoyées par leurs proches. Et d'autres n'avaient que leurs larmes pour pleurer.

Les plus aptes à combattre dans de telles conditions étaient les troupes arctiques de Tequila Wolf et de Boréa ; ainsi que les troupes de montagne de Sanderr, pour ne citer que les îles les plus connues. Le froid n'était plus un obstacle gênant pour eux ; simplement un paramètre à prendre en compte à chaque instant. Au bout d'un moment ils s'y sont habitués. Leur expertise était si précieuse, qu'à chaque unité était adjoint un groupe de spécialiste des conditions. C'est ainsi que sous les ordres de chaque lieutenants d'élite, il y avait des habitués du climat et du terrain, qu'ils soient de l'élite ou de n'importe quelle autre branche du Gouvernement Mondial.

La quarante-huitième avait été basé, les premiers jours, à Briansk, l'état-major de Mekiel. Les militaires s'étaient basés sur un haut plateau depuis lequel on avait une vue dégagée sur une grande vallée stratégique. Aux premiers jours de la guerre, cette implantation avait servie maintes fois, en témoigne les fossés creusés par les obus, qu'ils soient dans la vallée ou sur le plateau. La vallée était un point stratégique de passage : elle reliait la plaine de Malmö, une grande plaine fertile où de grandes quantités de nourriture étaient produites, à la grande ville de Narvik, prise par la Marine après d'âpres combats.


Le quartier général avait décidé d'envoyer la division d'élite entière s'occuper du front sud de Mekiel, celui qui touche à son extrémité sud la capitale des vindexois, fortifiée jours après jours. Les militaires, les habitants, tout le monde était mobilisé à la défense de la ville. Pour le généralissime Theid, Ypres était sa dernière carte. Mekiel allait tomber, ce n'était qu'une question de temps et il le savait. En revanche, dans le secteur rural d'Ypres, c'était tout l'inverse. Les Kriegers - le surnom des soldats du secteur - avaient un avantage certain sur la Marine. La campagne s'était transformée en un gigantesque champ de bataille. Il n'y avait plus d'herbe, que de la terre labourée par l'artillerie. Une terre sur laquelle de nombreux soldats se décomposaient, aidés par les vers et les rats.

Avec cette guerre de position, les vindexois avaient rapidement pris l'avantage. Les marins avaient eu beaucoup de mal à débarquer et le ravitaillement était extrêmement compliqué. C'était un enfer pour les troupes du Gouvernement Mondial. En face, le moral tenait bon. Les soldats défendaient leur patrie avec ferveur, agrémentés par des discours révolutionnaires enflammés tenus dans les tranchées mêmes par les corps francs de la Révolution. Contrairement à leurs ennemis, ils avaient des vivres, des lettres de leurs proches, des cigarettes ou encore de l'alcool en abondance pour tenir le coup.

- Pour l'instant, le front principal d'Ypres est gagné et la Marine recule. Mais lorsque Mekiel tombera, deux divisions de la Marine iront directement leur prêter main forte au nord et à l'ouest. Nos troupes risquent l'encerclement... Il faut absolument trouver une solution.

- On la trouvera.

Le ton ferme de Nelson D. Theid imposait le respect dans la salle des opérations d'Aldebaran. Là, autour de lui, tous les grands pontes de l'armée vindexoise étaient réunis pour décider du futur de la guerre. Lors de la formation militaire de tous, une notion avait été effacée de leur cerveau. Le défaitisme. La défaite de Vindex n'était pas possible. Elle n'était pas envisageable. Elle n'était tout simplement pas pensable. Sous peine de passer pour un traître. Mekiel allait tomber. Mais il fallait absolument que les Hices, les combattants arctiques, résistent le plus possible pour infliger le plus de perte aux marines. Surtout chez les officiers, car les hommes de bas échelon étaient remplacés presque immédiatement. Les bons officiers étaient rares. L'ordre avait été donné à tout le district. Il ne manquait plus qu'à le mettre en oeuvre. Les officiers étaient les cibles numéro une.


Dernière édition par Mountbatten le Lun 21 Mai 2018 - 17:09, édité 2 fois
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II.

Echange glacial.
Un bruit sec résonna à la porte de la salle des opérations de la Marine. Mountbatten toquait.

- Entrez.

La porte s'ouvrit lentement mais d'un geste sûr. Le regard dur du lieutenant d'élite défia celui des autres officiers de la salle. Un par uns, les lieutenants, qu'ils soient de l'élite ou de la régulière, étaient appelés afin de leur distribuer les tâches dont ils devaient s'acquitter. En face, les deux grandes personnalités de ce front décidaient en majorité des missions qu'ils distribuaient. Il y avait tout d'abord le commandant d'élite Fujimi, responsable de la quarante-huitième division d'élite, et la contre-amirale Nishi Kanjiro, réputée pour sa grande force au combat. En revanche, c'était tout l'inverse en ce qui concerne sa patience et sa minutie. Grande cheffe, mais piètre tacticienne, le défi à relever pour les hauts-gradés de cette pièce était de calmer ses ardeurs et ses volontés au niveau stratégique. Elle proposait des placements catastrophiques... preuve de son incompétence.

- Voici le lieutenant d'élite Mountbatten.

Le lieutenant-colonel Fidjr, en charge de la présentation des nouveaux venus, lui ouvrait la voie vers la table stratégique. Toutes les autres personnes le saluèrent verbalement ou physiquement, à l'aide d'un hochement de tête ou d'un garde-à-vous concis. Toutes, à une exception près. Kimblee le fixa, sans un mot, sans un geste. Le courant passait mal entre le supérieur et le subalterne. Leurs personnalités n'étaient pas si éloignées que ça ; mais leurs valeurs si. Certains remarquèrent ce petit détail fâcheux, et en premier lieu l'intéressé qui ne manqua pas de noter cette énième attention mesquine de la part de son commandant.

- Lieutenant, votre mission sera de conquérir cette région.


- C'est une région montagneuse où vous risquez d'avoir du mal à progresser. C'est pourquoi vous embarquerez avec vous une section d'élite entière de Boréalins.

- Faites attention, beaucoup de nos gars se sont fait avoir par le réseau troglodyte qu'utilisent les vindexois.

- Ah, et vous risquez d'avoir à apprendre un nouveau sport.

- Comment ?

- Le ski. Au vu des pentes et du terrain, le ski est un moyen rapide pour nos troupes de se déplacer. Les Hices s'en servent régulièrement, et ce, même au combat. Vous allez devoir apprendre, ainsi que vos hommes, à en faire. Et ne prenez pas cela comme un jeu : c'est une tactique militaire qui pourrait bien pour avantager. Vous nous remercierez plus tard pour l'idée.

- J'espère...

- Bonne chance.

Ce souhait glacial avait été envoyé par Kimblee, qui n'avait pas ouvert la bouche depuis l'arrivée du Fantôme. Un "bonne chance" plein d'ironie. Un "bonne chance" satirique, qui laissait penser à tous qu'il lui souhaitait tout l'inverse. Les deux hommes se défièrent du regard, jusqu'à ce que Fidjr brisa ce blanc gênant qui s'était installé.

- Vous devez partir immédiatement pour soutenir l'offensive principale, qui tente de supprimer la poche de résistance vindexoise située sur la rive ouest du Cataracte... Bien. Je pense qu'on a tout dit...

- Tu peux disposer.

L'ordre assassin ne fit qu'envenimer une situation qui en devenant presque insoutenable. Mount tourna les talons et ferma la porte avec vigueur. Il n'était pas énervé. Mais il avait bien l'intention de prouver à cet ignoble personnage ce dont il était capable. L'affrontement direct avec un supérieur ne servait à rien. Cela lui vaudrait une dégradation, voire pire. Alors qu'un duel indirect était bien plus fin et, peut-être, plus savoureux à mener.

La région en question était située en plein milieu du Kirov, ce massif montagneux réputé pour être le plus grand de Mekiel.

Mais aussi le plus dangereux.

En effet, ses pentes sont parmi les plus vertigineuses de Grand Line. Les férus d'alpinisme et de sports d'hiver s'y régalent, malgré la faible présence d'infrastructure adaptées. Parfois, le défi personnel est plus important que la dangerosité de la tâche, pour certaines personnes. Là-bas, la population vit dans de petits villages perchés en altitude, qui vivent principalement des ressources sylvestres et minières. Des réseaux de grottes se sont mis en place aux fils des siècles, transformer certaines montagnes en terrain de jeu favori des petits vindexois de la région. Inutile de préciser qu'ils allaient se révéler avantageux pour les soldats locaux.

La compagnie Créole, association de l'unité des lieutenants d'élite Ratzkill et Mountbatten, avait perduré depuis la campagne d'Isthme. En travaillant ensemble, ils étaient plus efficaces. Elle était officiellement sous la direction du Marijoan ; mais dans les faits, ils dirigeaient ensemble. A ce groupe s'ajoutait une section de marins d'élite issus de Boréa. Avec eux dans la troupe, nul ne doutait de la redoutable efficacité du groupe.

C'était à peu près trois cents soldats qui quittèrent le quartier général. Un quartier général où se reposaient tranquillement certains gradés, pendant que la compagnie Créole avançait, inexorablement, dans le blizzard, phénomène climatique récurrent à Mekiel. Leurs pas s'enfoncèrent dans la neige, parfois profondément. Puis, lorsqu'ils enlevèrent leurs pieds, ils ne voyaient déjà plus la trace qu'ils étaient censés laisser après eux. Leur visibilité était faible, très faible. Les conditions étaient mauvaises, et les Boréalins n'avaient pas manqué de le faire remarquer au duo. Mais leur mission était d'une importance capitale : les renégats pourraient, à tout moment, tenter de prendre par derrière l'offensive.

Après quatre jours de marche éprouvantes, après avoir découvert le Kirov et le blizzard habituel de la région, ils arrivèrent, à peu près, à l'endroit indiqué sur la carte. Le paysage était à couper le souffle. Face à eux, les pics se succédaient. Abrupts, bruts, solides, ces monts enneigés étaient bien plus dangereux que ceux de Boréa. Le soleil illuminait faiblement le ciel ce matin-là, sur le Kirov.



Dernière édition par Mountbatten le Sam 19 Mai 2018 - 18:33, édité 1 fois
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III.

Un week-end au ski.
- Lieutenant, il va falloir qu'on apprenne à tout le monde comment skier...

- Ahhh... Oui c'est vrai, j'avais complètement zappé. Mais... vu la pente... tu es sûr qu'on peut apprendre dans de telles conditions ?

- Boarf, vous savez lieutenant, entre une cheville cassée et un crâne cassé, y'a pas photo.

- Sauf qu'on peut aussi se casser le crâne sur ces rochers...

En effet, de nombreux blocs de pierre troublaient les flancs enneigés des montagnes. Des irrégularités qui pouvaient bien être fatales à tous ces apprentis skieurs. Et ça, leur chef le savait.

- Ratzkill, il n'y a pas une zone moins pentue pour apprendre aux hommes le ski ?

- A vrai dire... Pas vraiment. Pour en trouver une, il faudrait marcher... au moins... quatre jours de plus.

- Et on n'a pas vraiment le temps... Bon. Et bien on va faire avec. Les médecins de la Brigade Scientifique ont-ils ramenés des brancards... genre luge ?

- Euh... Ouais ils ont ça.

- Parfait. Y'a plus qu'à.

- Y'a plus qu'à.

L'entraînement fut... catastrophique. Chaque seconde un soldat valdinguait dans la neige glacée. Un joyeux spectacle qui amusait les Boréalins, qui s'esclaffaient dans un bonheur palpable. Même les gradés de la compagnie étaient obligés de s'y mettre. Et Mount le premier. Lui qui détestait les sports de glisse. Il arrivait cependant à tenir debout, mais n'était pas assez confiant pour aller aussi vite que ses instructeurs. Il connaissait ses limites, et ne les dépassait pas. Il avait besoin de s'entraîner avant d'aller à de telles vitesses.

Soudain, l'ambiance fut plus froide. Glaciale même.

Le premier blessé.

Le marin en question s'était dirigée vers un de ces gros rocs, qui avaient été signalés et balisés au préalable. Ils n'avaient pas su changer sa trajectoire, ni son allure, malgré les ordres des professionnels. Un accident, qui mit sa vie en danger. Les médecins se dépêchèrent pour lui porter secours, à l'aide de quelques moniteurs et soldats qui se trouvaient non loin du lieu de la collision. Désormais, tous avaient en tête ce qui lui était arrivé. Ils étaient plus assidus, plus concentrés, mais moins enthousiastes.

Nonobstant ce fâcheux incident, la journée se passa bien. Le blessé s'en sortit, en dépit du fait qu'il ne puisse combattre avant quelques semaines. Ce qui le rendit maussade devant ses supérieurs et ses infirmiers, mais qui le remplit de joie intérieurement. Il avait eu beaucoup de chance. Au vu de la pente et de la taille des blocs de pierre, un autre accident aurait vite fait de tuer l'hypothétique malheureux. C'était pour cette raison précisément que d'autres n'eurent pas le courage de tenter l'expérience pour éviter les combats, de plus en plus dévastateurs et intenses.

Les vindexois avaient la hargne. Ils défendaient leur mère patrie coûte que coûte. Leur acharnement était très meurtrier dans les rangs de la Marine. Ce sentiment patriotique était galvanisé par les prédicateurs révolutionnaires, qui haranguaient de beaux discours, courts pour la plupart, mais terriblement efficace sur ceux qui n'avaient pas la présence d'esprit de voir que ce n'étaient que des balivernes. Face à un mélange explosif de troupes patriotiques et connaissant parfaitement le terrain et des corps francs révolutionnaires menant une guerre militaire et idéologique, les pauvres marins tombaient comme des mouches sous le feu, sous leur fureur.

A côté de ça, la compagnie Créole avait l'air de s'amuser, à en oublier la guerre.

Au bout de deux jours d'entraînements intensifs, en plein Kirov, la compagnie était prête à réellement partir au combat. Un campement de fortune avait été dressé pendant tout ce temps, rudimentaire. Les conditions étaient plus qu'extrêmes, avec une telle température et un tel terrain. Fait notable, aucun accident n'était à déplorer. C'était dû à la rigueur et au sérieux des marins d'élite. Ils le sont par définition, mais la guerre de Vindex - ou du moins ce qu'ils avaient connu jusque là - les avaient endurcis. Ils s'étaient résignés au final. Et faire du ski était toujours plus agréable que prendre une balle, comme les milliers de marins qui furent mis hors de combat.

Il était temps pour eux de mettre en pratique ce qu'ils avaient appris sur les quelques pentes enneigés où ils avaient passé du bon temps. Ils dévalèrent les montagnes du Kirov en skiant. Plus d'une centaine de skieurs slalomaient sur la piste blanche, évitant tous les obstacles. Pendant ces quelques jours d'apprentissage, ils n'avaient pas flâné. Le combat alpin était une chose si différente du combat en bataille rangée, dont ils avaient l'habitude. A Briansk, on l'avait prévenu : il fallait utiliser le ski comme technique de combat, et cesser de le voir comme un loisir, un sport.

La progression fut lente malgré tout. Il fallait sans cesse enlever ses skis et les mettre dans son dos lorsqu'il fallait gravir un terrain. De longues colonnes de marins se formaient alors, dans le blanc immaculé de la neige. Les conditions météorologiques leur étaient favorables ces jours-là. Le soleil réchauffait timidement les soldats.

Le temps de souffler, Mountbatten réunit les gradés de la compagnie pour leur exposer son plan, en tenant en l'air une carte.

- Comme vous le voyez sur la carte, nous sommes en territoire ennemi. Mais le problème, c'est qu'on ne les voit pas, à cause de la superficie et de la topographie. Une idée ?

- C'est vrai que ça fait quelques jours qu'on avance, mais on ne voit rien...

- C'est louche.

- Pourtant, lorsque nous allons sur de hauts sommets, nous devrions pouvoir déceler de la fumée, des campements, des mouvements de troupes...

- Je ne comprends pas non plus.

- Ah... Je me souviens d'un truc que m'avait dit un soldat sur la route. Les Hices utilisent un réseau troglodyte utilisé par les habitants. Il permet de relier des villages paumés à travers la montagne.

- Bien ! Mais... Il faut encore qu'on trouve des villages. Mekiel est si mal cartographiée... Surtout dans le Kirov. Et je n'ai pas envie qu'on fasse marcher nos hommes pour rien.

- Je suis d'accord.

- Comment faire ?

- Si on ne peut pas les trouver parce qu'ils sont cachés... Hum... Laissez les nous trouver avant ?

- Leur tendre un piège ?

- Exactement ! On trouve un endroit dégagé, on établit un campement et on y met une section. Les autres seront cachés et attendront une attaque de la part des vindexois. Ensuite, on pourra retrouver le réseau troglodyte et, enfin, pouvoir les combattre efficacement. Nous sommes sûrement allés trop vite dans la conquête de la région, et ils n'ont pas pu nous attaquer entre-temps. Alors laissons leur l'occasion de leur vie, et tombons leur dessus.

- Bien reçu.
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IV.

Chaos glacé.
Le ciel était dégagé, rien ne pouvait entraver la volonté du lieutenant.

En suivant son plan, une section d'élite vint s'installer en contre-bas en montant un campement. Avec quelques branches tombées des sapins éparses de la petite vallée, ils avaient allumé un feu, aussi bien pour réchauffer leurs âmes éprouvées que pour se placer dans la continuité du plan. Se faire repérer était nécessaire. Sinon, toute cette mascarade ne servirait à rien.

Le gros du groupe se dissimula sur les crêtes, allongés, fusils pointés vers la vallée, prêts. Comme toujours. Les hauts gradés avaient donné à la compagnie des uniformes blancs, parfaits pour se camoufler. Dans de telles conditions, le bleu habituel des marins devenait éclatant - et donc repérable à des kilomètres. Bientôt, on entendait faiblement les crispations lointaines du bois qui brûlait. Le souffle des soldats effleurait le sol dur, glacé, caractéristique des montagnes qui composaient le Kirov.

Mountbatten avait chargé son bras droit, Ratzkill, de commander les troupes des crêtes. Lui, il resterait avec Pacific au campement. Il avait été dressé contre un grand rocher, afin de pouvoir avoir un couvert, au moins d'un côté. Des caisses, des sacs de sables, et tout ce qui pouvait servir d'obstacle étaient dressés en vrac, rapidement, pour pouvoir protéger les soldats de l'hypothétique feu ennemi. Le stress était présent ; même si les marins qui composaient la section avait été sélectionnée selon leur force, leur courage et leur sang froid. Une quinzaine de soldats montaient la garde pendant que les autres solidifiaient leurs positions. Les quelques jumelles qu'ils avaient passaient d'une main à l'autre. Leurs grands manteaux blancs annonçaient une prochaine résistance acharnée. Stoïques, ils se tenaient face au reste de la vallée, les yeux furtifs et précis.

Pendant longtemps, ils attendirent dans le froid et un léger blizzard s'installa.

Les deux commandants de la compagnie Créole durent communiquer par den-den. Le champ de vision était limité à cinq mètres ; les conditions étaient plus qu'effroyables pour une telle situation. Le temps changeait vite en montagne.

L'attente... une chose insoutenable avec une telle température et un tel temps. Le désespoir traversa l'esprit de nombreux marines. Le désespoir de mourir ici, dans le Kirov, loin des leurs. Et puis un mal-être plus global aussi. Cette guerre durait déjà depuis plus de deux mois. Même si certains n'étaient là que depuis un mois tout au plus, cela avait été éprouvant pour tous. Les morts se comptaient en milliers. Personne n'avait connu ça, même pas les quatre chefs de divisions, dont Kimblee. Marin, c'était un métier qui avait fait rêver beaucoup d'enfants. Mais aucun n'avait pensé à de telles choses. A l'école de la Marine, au BAN, en centre de formation, on ne les avait pas prévenus sur ça. Personne n'y avait pensé, tellement c'était inimaginable.

Soudain, la fête commença.

Des coups de feus hagards détonnèrent dans une confusion assez prévisible.

- Alexander, ça y est ?

- OUI !

Les coups de feus s'intensifièrent.

- RAMENEZ-VOUS !

Les quelques cent vingt marins d'élite postés en hauteur dévalèrent la pente prudemment. Le blizzard était de plus en plus violent. Avec leurs uniformes blancs, les marins distinguaient difficilement leurs alliés. Plus loin, dans le campement, le moment était critique.

La visibilité était encore pire ; le blizzard étant bloqué dans la vallée. Les vindexois étaient là. Les premières balles furent inefficace. Elles avaient été tirées plus ou moins au hasard. Mais lorsqu'ils s'avancèrent suffisamment, des salves de fusils les accueillirent. Les marins, solidement fortifiés, se cachaient derrière les sacs de sable et les nombreuses caisses.

Mais se cacher de cette manière devint rapidement impossible.

Les Hices attaquèrent de tous les côtés, sans répits. De plus, ils lancèrent des grenades, qui rendirent impensable la technique de la Marine. Le combat au corps à corps s'installa. Dans une grande confusion, les marins luttèrent avec leurs sabres contre les vindexois, beaucoup plus nombreux. Des coups à bout portant furent aussi tirés. Il fallait rester en mouvement le plus possible pour rester en vie, le temps que le gros des troupes arrive.

Mountbatten était de ceux qui avaient fait le choix de tirer à bout portant. Avec une telle visibilité, il ne pouvait pas infliger de grands coups de sabre, sous peine de blesser ses hommes. Il courut dans le campement, enjambant les cadavres, les caisses, tout. Il délivra des tirs de temps en temps, lorsqu'un ennemi se présentait à lui. Le chaos régna, et l'odeur de poudre réchauffait les narines de chacun, anesthésiées par le froid glacial. De grandes bourrasques de neige déstabilisaient parfois des hommes en train de lutter dans les pires conditions qu'ils pouvaient espérer. La Marine recula. Les hommes de la section d'élite tombèrent petit à petit. Le lieutenant d'élite exhortait son ami de se dépêcher ; mais de son côté aussi les conditions étaient compliquées. Le blizzard ralentissait son intervention. Le temps ainsi perdu ne put jamais se rattraper.

Ils arrivèrent. Mais avec un retard qui eut des répercussions...

La centaine de soldats nouvellement débarqués eurent vite fait de battre les vindexois, moins nombreux et aussi moins forts. Ils fuirent dans le blizzard, en trombe, laissant leurs blessés, leurs morts derrière eux, qu'ils soient amis avec eux ou non. C'était ça la guerre. Il n'y avait plus d'honneur, plus de promesse qu'on ne pouvait tenir.

Ceux qui disent le contraire n'ont pas connu la guerre.
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V.

Obscurité mortelle.
Mount regardait impassiblement le paysage chaotique qui s'offrait devant lui. La tempête était de plus en plus douce, et la visibilité devenait meilleure chaque minute. Mais le spectacle était terrible. De nombreux morts. Le sang se cristallisait, leur âmes aussi. Les rayons de soleils n'arrivaient toujours pas à percer cette épaisse couche de neige qui virevoltait au-dessus de la tête des marins.

- Il faut faire vite et les suivre. Les traces de pas vont s'estomper si on attend trop longtemps.

- Et pour... Eux ? Désigna fébrilement un jeune marin d'élite, venu récemment dans la guerre.

- Et bien ? Que veux-tu en faire ?

- Je...

- On part dans 5 MINUTES !

C'était aussi ça. Laisser les vestiges d'une vie, de décennies de travail, d'émotions, de pensées, là. Au beau milieu de nul part, dans la neige, enfouis dans un endroit que personne ne retrouvera. A la fin de la guerre, ils allaient avoir une tombe sans corps, comme beaucoup. Avec un nom, un prénom, des dates, comme tout le monde. Anonymes.

La compagnie se remit en marche. La moitié de la section du camp fut laissé là où elle était. Les munitions, les vivres, tout ce qui pouvait encore être utile leur fut arraché de leurs mains gelées, immobilisées dans une position de par la température. Leurs visages aussi. Les bleus qui avaient dû faire cette tâche ingrate eurent un choc. Mais à côté, d'autres faisaient ce qu'on leur disait sans broncher. Ils étaient morts, ça n'allait pas encore leur servir. Le pragmatisme est une chose nécessaire dans une guerre ; le Fantôme avait depuis longtemps assimilé cette idée.

Une longue colonne se remit péniblement en marche, vers la mort.

Les deux chefs en tête, ils suivaient avec attention la traînée de pas des vindexois. Enfin, après quelques minutes de marche dans un blizzard faiblissant, ils atterrirent devant l'entrée d'une grotte. Peu rassurante, elle était cependant immense. Des stalactites de glace faisaient office de domestiques, accueillant lugubrement les nouveaux visiteurs. Des lumini dials illuminèrent l'obscurité de la grotte. Une atmosphère étrange et sournoise s'installa au fur et à mesure que les soldats entrèrent dans la cavité.

Malgré les lumières balayant l'ombre, la peur s'installa petit à petit. Effet renforcé par les bruits suspects qui provenaient dans certains coins des rochers...

Rapidement, de nombreux réseaux durent scinder le groupe. La compagnie se désintégra pour laisser place à quatre sections bien distinctes, avec un nombre plus ou moins défini par le règlement. Et c'est à partir de ce moment, que commença les problèmes.

La section commandée par l'invisible emprunta le chemin le plus large. Les chauves-souris grouillaient dans le plafond... Des cailloux tombaient de temps en temps. Avec le lieutenant d'élite il n'y avait, à quelques exceptions près, des hommes expérimentés et qui savaient à quel point ce genre de situations étaient délicates. Leurs yeux scrutaient le moindre recoin. Si l'ennemi voulait faire une embuscade, ça ne pouvait qu'échouer.

Ratzkill et Pacific avaient tous les deux pris des chemins différents. Tous savaient que les Hices n'étaient pas loin, et il était probable qu'ils les attendaient. Fusils pointant l'avant, les marins avançaient, les genoux fléchis, les yeux alertes. Les quatre sections d’élite s'enfoncèrent dans les entrailles de la montagne à reculons. Pendant quelques temps, l'espoir d'une fuite subsista. Mais il fut troublé par l'arrivée de... trouble-fête.

PAN PAN PAN PAN

- A couvert !

Le premier accrochage fut pour le groupe du Marijoan. La largeur du couloir permit aux différents camps de s'éparpiller pour se réfugier derrière des obstacles naturels, tels des stalagmites, ainsi que des colonnes de roches. La luminosité était faible, mais les dials permettaient de briser l'obscurité. De plus, les flammes crachées par les armes à feu apportaient un semblant de lumières dans ce grand espace. Les hommes, à cran depuis leur entrée dans la grotte, pouvaient enfin relâcher leurs nerfs et déferler leur combativité sur les défenseurs de Mekiel.

Une femme se dressa soudainement derrière ses hommes.

- Le Fantôme, où es-tu ? Cesses de te cacher derrière ton pouvoir !

- Ah mais je suis pas caché hein, je suis là.

- Ah, au temps pour moi.

- Si tu me connais... Tu dois être la commandante de ces troupes ? Dit-il, en se cachant derrière un rocher.

- C'est exact. Mais laisse moi te montrer ce que vaut une intrusion à Mekiel !

Une grande lame d'air vint sur le rocher, et le transperça.

*Elle doit être vraiment puissante...* pensa Mountbatten, qui sauta avant de se prendre le coup de plein fouet.

A présent, les deux officiers se firent face, tous deux sabres en main.

- Oberleutnant Helge Ingstad, pour vous servir.

- Enchanté. Lieutenant d'élite Mountbatten.

- Et bien... Que le meilleur gagne !

Ingstad prit l'initiative et fonça sur son adversaire, à l'aide de sa belle épée. Son style alliait précision et brutalité à la perfection, combinaison fortement mortelle, mais qui plaisait cependant au marine. Il para sa lame avec son Shinsei, une lame au fourreau d'un blanc éclatant qui, malgré la pénombre, ressortait splendidement. Les deux ennemis se firent face à face, se défiant du regard. Leurs tempéraments étaient sensiblement les mêmes. Fiers servants de leurs corps respectifs, ils étaient impartiaux en combat et tous deux déterminés... A quelques exceptions près.

Le combat s'annonçait rude, et déjà le bleu contre-attaqua à l'aide de son deuxième sabre, d'un coup latéral vif, qu'esquiva sa cible au dernier moment. Dans cette grotte, dans ce chemin, ici, les marins affrontaient encore les vindexois. Partout. Villes, forêts, déserts, montagnes, campagnes... Encore ici, dans un endroit improbable et sans réel intérêt stratégique, ils s'affrontaient. Les effectifs étaient faibles par rapport à ce qu'ils avaient vécu auparavant, avec d'immenses batailles rangées impliquant plusieurs centaines de soldats dans chaque camp. La réduction du nombre de combattant eu pour conséquence de rendre chaque duel plus long. Tout se jouait au coude à coude ; chaque coup comptait. Aussi, la bataille était moins anonyme : tous se connaissaient dans une section, et voir un camarade effondré dans sa propre mare de sang aurait pu en démoraliser plus d'un, si les conditions générales étaient différentes.
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VI.

Combat pitoyable.
Le duel s'intensifiait. Il durait de plus en plus, et les soldats de chaque camp reculaient sans cesse pour ne pas subir de dommages collatéraux. Voilà des dizaines et des dizaines de minutes que les combats avaient lieu. Que ce soit du côté de Ratzkill, Pacific ou Mountbatten. L'opposition féroce et les marines, de par la méconnaissance des galeries, subissaient plus de pertes. Seuls leurs officiers tenaient réellement tête aux Hices. Ces derniers, enivrés par une rage guerrière et probablement un désespoir patriotique, étaient particulièrement implacables. Jamais, ils ne reculèrent. Ils tombaient, mais se relevaient. Un zèle rare, même dans cette guerre.

Il faut dire qu'eux, habitués aux conditions extrêmes dès leur plus jeune âge, ne connaissaient pas l'abandon. Ils faisaient face constamment aux dangers de Mekiel, à ses conditions climatiques. Le froid les rendait calmes en toute situation. Mais c'est grâce à l'entraide que tous survivait. Voir leurs amis, leurs connaissances, leurs villages dominés par la Marine leur donnait une force supplémentaire que les attaquants n'avaient pas. Loin de chez eux, dans un pays en guerre aux conditions rudes, ils savaient qu'ils allaient y passer d'un moment à un autre. Il y avait de l'espoir, souvent insufflé par leurs supérieurs. Mais étaient-ce de belles paroles pour les garder encore un peu plus au service du Gouvernement Mondial ? Au-delà du conflit physique, dans chacun se menait un conflit intérieur.

- Bon... Tu te débrouilles bien à l'épée, je dois l'avouer. Mais passons au niveau supérieur... Hakai no...

Le lieutenant d'élite s'avança petit à petit vers Helge, yeux fermés et tête baissée. Elle sentait qu'il tramait quelque chose... Mais qu'était-ce ? Elle allait le savoir bien vite. Sa position défensive et ses yeux espiègles étaient ses seules cartes en main pour parer l'attaque à venir. Enfin, Mount releva sa tête et ouvrit ses paupières.

- Tatsumaki !

Il se projetta en avant sans que les yeux de son opposante puissent suivre. Ses deux lames en avant, il tournoya sur lui-même tout en se déplaçant à une vitesse impossible à suivre à l'œil nu. Il atterrit quelques mètres derrière Helge, et une tornade se créa. Au sein d'une grotte, le rendu était spectaculaire. Heureusement, sa hauteur permettait une telle technique. L'Oberleutnant fut emportée pendant quelques secondes, avant de se faire projeter contre le sol. Elle se releva, pleine de rage. Mais déjà le lieutenant d'élite était déjà reparti. Il allait enfin utiliser le Rokushiki.

- Hanmā to... anbiru !

Il l'utilisa trois fois. Sans que son ennemi puisse réagir ou faire quoi que ce soit. Une véritable mutilation qui se déroula sous les yeux horrifiés de ses hommes. Ils étaient habitués à la voir comme une commandante forte et déterminée, une gagnante. Elle ne pouvait plus rien faire pour eux. Un coup dur au moral, mais ils continuèrent de combattre malgré tout.

- Et maintenant le coup de grâce...

- Non... Arrête...

- Hum ?

Prenant ses forces restantes pour tenter de sauver sa vie, Ingstad cria de toutes ses forces.

- JE NE VEUX PAS MOURIR ICI ! LAISSE-MOI PARTIR EN VIE JE T'EN SUPPLIE !

Le Fantôme leva un sourcil. Il n'était pas vraiment surpris. Il l'était de moins en moins. Mais ce qu'elle avait dit était tout à son avantage. Le moral de ses hommes allaient s'en retrouver grandement affecté.

- Et pourquoi ?

Il se rapprocha de son adversaire qui n'avait pas vraiment envie de crier ce qu'elle allait dire pour tenter de sauver sa vie.

- Je... J'ai un avenir radieux et je le sais.

Elle plaça ses deux mains au sol et s'inclina devant l'officier.

- Qu'est-ce que ça peut bien me faire ?

- J'ai beaucoup de choses à faire dans ma vie... Vous gagnerez j'en suis certain, et je veux être parmi ceux qui reconstruiront ce pays. Moi, Oberleutnant Hel...

- Tu es une opportuniste. Tu retourneras ta veste si les révolutionnaires t'offrent plus. Je me trompe ?

- Non ! Bien sûr que non !

- C'est ça. Tu vois que tu perds, alors tu t'arranges avec ton ennemi pour survivre. Tu es une lâche, une traître, une fuyarde. Je vais t'épargner, c'est mieux ainsi. Mais ne t'attends pas à rebondir après ça.

- Comment oses-tu !

Dans une tentative désespérée, elle se releva et fonça sur son ennemi, sabre en main. L'attaque était violente, remplie de rage et de soif. De soif du pouvoir, de reconnaissance et d'ambition. Ces trois choses là la poussait à aller plus loin. Mais la mort n'était pas envisageable pour elle. Le lieutenant para non sans difficulté son attaque, puis utilisa quelques sorus pour s'éloigner.

- Lâche, c'est tout ce que tu es. Kami no ken !

Il bondit dans les airs, monta en altitude, puis fonça en piqué sur sa cible.

Du sang gicla sur l'uniforme de l'officier. Le blanc immaculé fut tâché de sang. La lame transperça de bout en bout la vindexoise. Ses yeux sortaient de ses orbites. Elle assistait à la fin de sa glorieuse carrière. Carrière obtenue par des coups de théâtres plus que par des actes. La chance avait joué aussi, mais quoi qu'il en soit, la guerre avait révélé son véritable visage. Ses hommes la dévisagèrent, choqués de sa défaite, mais surtout par ses propos. C'était un autre visage de la guerre également. Elle faisait avouer l'inavouable aux hommes. Dans ses derniers instants, on voyait alors la face la plus vraie de chacun. Parfois, un simple regard suffisait. De la rage, de la tristesse, de l'indifférence. Parfois c'était un soulagement aussi. La fin de la souffrance physiques ou morales. La fin de l'effort, la fin de tout. Une libération, en somme. Chacun appréhendait la mort différemment, et c'était là un sujet d'étude intéressant pour ceux qui s'y intéressaient et y prêtaient attention. Mais encore fallait-il survivre pour pousser la réflexion à son paroxysme.
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VII.

Le calme avant la tempête.
Les combats s'étaient finis avec une victoire timide de la Marine. Si du côté de Mount les choses avaient été facilitées par une baisse du moral des soldats et une victoire relativement rapide sur la cheffe, Ratzkill et Pacific avaient eu plus de mal, mais heureusement pour eux il n'y avait pas d'adversaire très puissant, seulement des hommes du rang ou des sous-officiers. Le bilan était mitigé, d'autant plus que des fuyards eurent le temps de s'extraire du réseau troglodyte.

La compagnie Créole avait rempli sa mission. Les patrouilles s'enchaînèrent après cette bataille, mais aucun accrochage. Les vindexois s'étaient repliés vers la rive est du Cataracte. Ils avaient perdu leurs deux poches de la rive ouest, mais se défendaient toujours aussi farouchement là où ils étaient. C'était l'occasion pour les hommes de se reposer pour Noël.

Le lieutenant d'élite avait écrit une lettre au père Minoël. Peut-être sous le coup du désespoir. Quoi qu'il en soit, il eut un retour plus qu'inattendu. Alors qu'ils bivouaquaient, il la lu. Une lueur faible issue d'une bougie éclaira le bout de papier que les services postiers lui avait donné.

Une lettre qui lui fit chaud au cœur. Les temps étaient durs, mais lui, était là. Peut-être était-ce quelqu'un du service postier qui avait écrit cette lettre, et même d'autres pour que les soldats ne perdent pas espoir. Mais l'effet psychologique fut dans tous les cas bénéfique. Il savait que s'il survivait à cette guerre il ne serait plus jamais le même. Il abordera un regard vide, dénué de sentiments. Il les avait laissés sur le champ de bataille. Sa personnalité de base n'aidait pas, il faut dire. Le seul sentiment qui faisait de lui encore un humain était peut-être l'amitié et l'amour. Compassion, pitié, gentillesse. Plus rien n'a de valeur. Il était devenu horriblement pragmatique, mais peut-être que cette lettre essuyait pour un temps la buée qu'il avait sur ses lunettes.

Ils reprirent la route après avoir s'être reposé. La nuit tombait et la lune se dévoilait magistralement. Les étoiles donnaient d'une certaine manière de l'espoir aux soldats. Notamment aux plus jeunes. Ils se disaient que leurs parents, leurs amis, leurs proches voyaient les mêmes étoiles, n'importe où qu'ils soient. Enfin, pour ceux qui en avaient encore.

L'état-major de Briansk avait mis au repos la compagnie Créole et le reste du bataillon Godwin. Les hommes du commandant d'élite étaient déjà au lieu qui leur avait été désigné : le château de Vyborg. Abandonné par la noblesse Aldebaranne lorsque la guerre éclata, il était presque intact. Peu de choses avaient été déménagées, grâce à l'orgueil de l'aristocratie vindexoise qui pensait que la supériorité de leurs troupes ne faisait aucun doute et que la guerre allait être vite réglée.



Aux alentours de minuit, l'avant-garde de la compagnie arriva au château. Bâtisse imposante, elle avait été façonnée dans la roche d'une montagne. L'endroit avait une vue dégagée sur de nombreux kilomètres et les éclairages somptueux rendait un effet presque miraculeux. Que cet endroit soit tel qu'il était alors qu'à d'autres, au sein du même district, les combats faisaient rages, était tout simplement incroyable. Alors, le Fantôme s'avança sur le pont qui menait jusqu'à l'entrée du château. Seul, ses troupes attendant de l'autre côté du pont. Là, un sergent d'élite le réceptionna. Il vit alors, derrière les remparts, Streisand, un verre de vin rouge à la main. Il le salua d'un hochement de tête puis disparu du champ de vision du Marijoan. Une fois la venue de la compagnie annoncée, ses hommes purent s'avancer. Ils n'étaient pas autant qu'à leur départ de Briansk. Ils avaient laissé leurs camarades derrières eux. Ils étaient fatigués. Sac dans le dos, skis attachés, fusil à l'épaule, ils avaient la tête baissées et ne parlaient pas. Même s'ils n'avaient pas combattu ces derniers jours, ils étaient éprouvés. Éprouvés, par les combats qu'ils avaient menés auparavant, par les conditions et par la perte de leurs camarades, qui restait.

L'accueil dans le château fut chaleureux par les autres soldats. Le temps était à la fête. Il y avait aussi beaucoup d'alcool pour se détendre. Mais surtout oublier. Pour oublier ses problèmes, et surtout les morts qui s'accumulaient. Théoriquement, ils auraient dû être trois cents dans ce château. Ce jour-là, ils n'étaient que cent vingt-neuf.

Les grandes salles du château avait été disposée pour accueillir un bal. Les militaires qui savaient jouer de la musique jouaient de la musique. Les instruments avaient été trouvés sur le tas dans le château. Tout était déjà en marche lorsque la compagnie Créole arriva. On pouvait également se promener au niveau des remparts, scrutant l'horizon. Là, quelques amourettes avaient lieu. C'était peut-être l'une des rares occasion qu'ils avaient pour passer un moment romantique avec une femme.

- Alexander ! Je suis heureux de te revoir.

- Streisand ! Plaisir partagé.

L'officier et son subalterne discutèrent pendant quelques minutes autour d'une table où étaient disposées bouteilles et quelques amuses-bouches. La discussion portait sur le déroulement de la guerre. La situation à Ypres était vraiment critique et la Marine perdait beaucoup de terrain. C'est là que Godwin dit à Mountbatten son souhait d'en finir au plus vite avec Mekiel.

- La quatre vingtième a vraiment du mal en ce moment, et la quatre-vingt-unième n'arrive pas à poser pied durablement dans le secteur. Heureusement qu'on a un pont maritime permanent qui leur amène de nouvelles recrues chaque jour... Là où nous, on en reçoit chaque semaine. Et encore ahah.

- Il va falloir qu'on se dépêche, en effet...

- C'est pourquoi Kimblee a organisé à Briansk une vaste offensive qui commencera d'ici quelques jours. Nous ne sommes pas ici grâce à sa gentillesse inexistante, mais parce que nous devons nous reposer avant d'y participer. Bon, je n'ai pas les cartes tout de suite, mais ça va consister à une grande attaque qui sera menée majoritairement par la soixante-dix-neuvième. Ils fourniront l'effort de guerre principal dans les premiers jours, mais nous serons chargé de l'assaut du quartier général des Hices, que nous avons localisé dans une vallée du massif montagneux de la rive est, l'Abakan.

- Je vois... Donc au final on va jouer un rôle de troupes tactiques, qui au final est la base de la Marine d'élite.

- Exactement. Donc les premiers jours seront plus ou moins faciles pour nous... Nous serons au front, mais dans les zones avec peu de résistance. Par contre, pour l'assaut de leur base, on va s'heurter à pas mal de problèmes.

- Comme ?

- Comme le fait qu'ils sont enclavés dans une petite vallée. On attaquera à partir des sommets, mais du coup on va devoir y aller en ski.

- Ah.

- Et ouais, ah comme tu dis. En ski, utiliser son arme est compliqué et dangereux. Alors on va devoir s'organiser pour que les uns couvrent les autres. Rien que la descente risque de nous faire perdre pas mal d'hommes.

- Pourquoi ne pas y aller à pied ?

- Impossible. Vu les températures et les témoignages des habitants, dans cette zone il y a beaucoup de verglas. Aussi, les pentes sont très pentues. Si on y va à pied, beaucoup risquent de glisser et de se casser des membres. En ski c'est plus facile apparemment. C'est plus ou moins lisse comme piste... Mais bon, c'est pentu. Il y a à quelques endroits des sapins, alors nos hommes pourront s'abriter derrière et répliquer avec les fusils.

- Oui mais bon... Il n'y aura pas de réelle riposte.

- Tu as raison et j'y ai pensé. On mettra des canons de montagne et des mortiers au sommet pour qu'ils bombardent les positions ennemies avant et pendant l'assaut.

- C'est vrai qu'on n'aura pas l'effet de surprise... Ils vont nous attendre.

- Voilà. Mais bon on ne va pas pouvoir faire un barrage de préparation pendant longtemps... C'est vraiment compliqué d'acheminer des obus en montagne. Mais bon, ça sera déjà ça.

- C'est sûr.

L'officier porta une coupe de champagne à ses lèvres et la dégusta. On voyait très vite les origines sociales des marins. Certains buvaient bruyamment, d'une traite, comme les personnes d'origine modestes ; d'autres - officiers pour la plupart - goûtaient délicatement aux liquides alcoolisés à disposition. Godwin était également de cela. Lui et les règles de conduite de la bonne société, il connaissait.
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VIII.

Valse au clair de lune.
La petite fête battait son plein dans la pièce principale de Vyborg. La musique était bonne et tout le monde semblait passer un bon moment. C'était une scène plutôt irréaliste, mais peu importait à ces soldats harassés et fatigués. Le plan dévoilé à Mountbatten le faisait plonger dans ses pensées et dans des schémas tactiques, appris sur les bancs de l’École supérieure de la Marine, où il avait fait ses classes, ainsi que sur le champ de bataille. Il se tenait droit, avec son beau smoking gris, regardant sans voir la piste de danse où les officiers faisaient une valse avec les femmes du bataillon. Verre de champagne à la main, il se ressassait aussi des scènes précédemment vécues. Notamment les derniers moments de l'Oberleutnant Ingstad. Dans des situations de tensions extrêmes, l'être humain exhibe les noirceurs de son âme...

- Alex ?

Se retournant, entendant son propre prénom - fait rare étant donné que peu sont les personnes qui le connaisse -, il fut étonné puis sourit à la personne qui l'avait doucement interpellé. C'était Louise. Sans un mot, ils se rapprochèrent et lièrent leurs mains libre de coupes, avant d'effectuer un baiser passionné, en fermant les yeux. Les retrouvailles, enfin. Préoccupé par ses responsabilités, ses obligations et la situation, le Fantôme avait presque oublié sa copine. Pourtant, il avait quelque chose d'important à lui dire.

Alors, la musique s'arrêta et l'orchestre s'apprêta à jouer un nouveau morceau.

- Viens, suis-moi.

Il laissa sa coupe de champagne sur une table et entraîna sa bien-aimée à l'extérieur, derrière les remparts. Personne ne les dérangeait : ils étaient seuls, loin de la foule des grandes salles. Néanmoins, ils entendaient très nettement la musique qui commençait à peine.

- M'accorderas-tu cette danse ? Dit-il, en mettant en genoux à terre, tenant sa main délicate en perçant ses yeux gris pâles.

- Volontiers. Lâcha-t-elle, dans un sourire timide mais franc.

Musique:

La valse les entraîna dans une danse légère, douce et délicate où chacun de leurs mouvements s'accordaient dans une harmonie immaculée. Les deux avaient été élevés dans de bonnes familles, même si Louise était plus modeste. Ils paraissaient isolés du reste du monde, et les seules choses les accompagnant dans ce moment étaient la musique et la lune. Cette dernière éclairait les reflets de leurs âmes et faisait scintiller leurs yeux. Rien ne comptait plus que la personne avec qui ils dansaient.

Les pieds s'entremêlaient calmement dans cette danse régie par des codes de beauté propres aux classes privilégiées. Alors, ils se faisaient face. Ils se fixaient en dansant, comme s'ils n'y avaient qu'eux. Leurs cœurs battaient la chamade et personne ne pouvait enlever la magie de l'instant. Ils commencèrent ensuite à accélérer le rythme, enchaînant les pas plus ou moins compliqués. Ils n'étaient pas des danseurs professionnels, mais les soirées mondaines auxquels ils avaient occasionnellement participé les avaient entraînés.

Coula alors une larme sur la joue des amoureux. Sans faiblir, ils suivaient les pas de la mélodie qui dictait ce moment intime et rare. Ils savaient qu'ils avaient de nombreuses chances de mourir. Cette larme concentrait l'horreur et l'effroi qu'ils avaient vu depuis quelques mois. Il y avait peu d'espoir, tous les deux le savaient très bien. Chacun avait de motivations personnelles. Pour Mount, c'était sans aucun doute sa famille. Pour sa chérie, c'était une revanche sur la vie. Sur son passé, qu'elle n'était pas encore prête à dévoiler. Parfois, le temps est nécessaire pour admettre les choses si lourdes qu'elles finissent par hanter ceux qui les portent.

La musique arrivait comme un écho, et soulignait le silence de la scène. Les majestueuses montagnes s'imposaient tout autour d'eux. Mais grâce à la hauteur du château, on pouvait voir à perte de vue. De petites colonnes de fumée s'élevèrent à plusieurs dizaines de kilomètres. Le front était loin, mais elles rappelaient que la guerre était toujours là.

Cette larme trahissait aussi une culpabilité. Celle d'être toujours en vie, narguant ainsi les milliers de morts qui s'étaient battus sous la même bannière. Celle d'être assez fort pour avoir survécu jusque là, les simples soldats survivant généralement moins longtemps. Celle de pouvoir danser dans un cadre magnifique avec un être qui leur était cher, pendant que d'autres en perdaient au même moment.

Dans une union parfaite, ils se synchronisèrent et Louise s'élança vers son partenaire, toujours main dans la main. Elle tomba en arrière et il la rattrapa. Ils se dévorèrent des yeux. Même si cette position était inconfortable pour les deux, ils ne firent rien pour la changer durant de nombreuses secondes. Alors leur tête se rapprocha. Ils fermèrent les yeux et vint un baiser passionné.

Mais rempli de désespoir.

Sans être niais ni froid, cette valse discrète reflétait la dure réalité de la situation. Elle était remplie de mélancolie. Vifs - peut-être vainement -, ils s'éloignaient pour mieux se rejoindre, plus forts. Alors, pendant toute la durée de la mélodie, ils valsaient d'une manière tumultueusement calme. Et puis elle s'arrêta. Plongeant dans ses yeux ténébreux, le Fantôme avait quelque chose à lui demander. Ils étaient là, face à face, dans leur bulle invincible.

- Louise... Je voulais te demander...

Il regarda sur le côté, l'air gêné. Louise le regardait chercher ses mots.

- Voilà. Ça fait quelques temps que l'on se connaît et... Il se peut que...

Une larme coula sur son visage. Rares étaient les fois où il pleurait. La fois précédente était il y a quelques années. Il ne pleurait pas, même lorsqu'il frôlait la mort. Son éducation noble lui avait appris à garder la face coûte que coûte. Mais la seule chose qui pouvait le faire plier étaient les sentiments. Du moins, ceux qui lui restaient, ou ceux qui semblaient lui rester. L'amour et l'amitié étaient les seuls qu'il affichait publiquement. Le reste, il le gardait pour lui. Le poids des responsabilités, son honneur et ce qu'il avait vécu lui empêchait de tout montrer. Alors les gens pensaient qu'il était froid, à tord.

- Je sais, Alex.

- Bref... Louise.

Il sortir d'une des poches de sa veste un écrin d'une taille moyenne et l'ouvrit solennellement.

- Veux-tu devenir ma fiancée ?
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Winter assault

IX.

La guerre ne change jamais.


Musique:

Le bataillon Godwin était déjà au front, alors que la compagnie Créole progressait pour le rejoindre. La grande offensive annoncée par le commandant d'élite avait débuté, et comme prévu la soixante-dix-neuvième menait majoritairement l'assaut. Le bataillon Godwin constituait l'avant-garde de la quarante-huitième, et la compagnie Créole était temporairement en arrière. Cela était dû aux lourdes pertes subies dans le Kirov. Alors, il fallait attendre que les nouvelles recrues remplacent les morts dans les rangs de chaque section d'élite. Un processus qui ne pouvait se faire rapidement, à cause du nombre croissant de pertes dans le secteur d'Ypres. Et ces pertes, il fallait bien les remplacer.

Mountbatten, en tête de la formation, avançait avec à ses côtés Ratzkill. Les mines étaient fermées... Il faisait froid.

Ils faisaient partie de la longue colonne de la division d'élite qui avançait jusqu'au front. Devant la compagnie, il y avait le bataillon Scardestin. Des chars d'assaut faisaient aussi partis de la colonne, plus en avant. Le bruit de leur moteur effrayait les enfants du village qu'ils traversaient à ce moment-là. Le regard des habitants était terrifiant. Ils avaient vu leurs voisins, leurs connaissances, leurs amis, leurs enfants partir pour la guerre. Et à présent, ils voyaient leurs ennemis fouler leur sol. Peu de nouvelles arrivaient concernant ces soldats-là : les registres étaient mal tenus à cause de la déroute de l'armée vindexoise. Ils n'avaient aucune nouvelle. C'était une torture psychologique incomparable pour ces parents, qui avaient cru naïvement aux dires des révolutionnaires. Ils se sentaient coupables, coupables d'avoir participé involontairement à ce fiasco.

La charge de chacun pesait sur leurs épaules. Fusil en bandoulière, yeux rivés sur le chemin, ils avançaient. Un silence de mort accompagnait cette triste marche.

La route était à double sens. Il y avait ceux qui partaient combattre, et ceux qui allaient à l'arrière. C'était principalement les membres de la Brigade Scientifique, dont beaucoup de personnel médical. Des chariots entiers transportaient les morts, couverts d'un simple drap blanc. Les cochers étaient choqués de tout ce spectacle. Beaucoup d'entre eux n'étaient que de simples civils, recrutés pour l'occasion, contre un faible salaire. La guerre privait beaucoup d'autochtone de travailler. Les revenus faiblissaient, et la Marine leur offrait ponctuellement du travail, de manière temporaire. Mais ils n'étaient pas prêts pour leur tâche. Ils avaient beau avoir les compétences physiques... Psychologiquement, c'était très dur.

Devant le Marijoan, des voix s'élevaient. De nouveaux chariots arrivaient... Ils signalaient de lourdes pertes, à un endroit où à un autre. Un binôme de soldat en parlait, désespérés et indifférents à la fois.

- C'est qui cette fois-ci ?

- D'après ce qu'on m'a dit, c'est un peloton complet...

- Pas de survivant ? ...

- Aucun.

Un vent glacial s'engouffra dans l'allée principale du village. Les villageois regardaient avec dégâts les nouveaux corps. D'autres détournaient la tête, et d'autres encore – dégoûtés ou lassés – repartaient chez eux. Plusieurs chariots se suivirent, alors qu'habituellement il y en avait un de temps en temps. Parfois ils transportaient des blessés, mais cette fois-ci il n'y avait que des corps sans vie.

- Un peloton de la soixante-dix-neuvième ?

- Non... Des mecs de chez nous.

- Ah bon ? Mais comment ça se fait ?

- Apparemment, sur ordre direct de Kimblee, ils devaient tenir un col. Sauf que les vindexois ont pu positionner correctement leur artillerie et... Boum.

- Boum ?

- Ils se sont faits pilonnés, puis y'a eu un assaut. Après, les informations ne sont pas très nettes puisqu'on n'a pas de témoin direct. Des gars de la régulière ont pensé ça puisqu'ils sont arrivés à le reprendre. Et l'état des corps le laissait penser...

- Tu veux dire que...

- Ouaip. De la bouillie.

- Oh mon...

- Après c'est ce qu'il nous attend à Ypres donc bon... Foutue guerre.

- ... Foutue guerre.

Mountbatten dévisageait ces chariots, désabusé. Un peloton entier... Il ne pouvait pas le croire. Rares étaient les unités qui périssaient en entier au combat. De toute la guerre, il n'avait jamais vu ça. Les taux de survie variaient, mais il y avait toujours des survivants. Cette fois-ci, aucun.

Et puis lui vint cette vision.

Cette vision d'horreur.

Ce bras inerte sortant du drap qui couvrait les cadavres. Ou plutôt cette main... et ce doigt.

Il portait une bague qu'il reconnût immédiatement.

« Jusqu'à la mort »

C'était ce qu'il y avait écrit sur les deux bagues que Louise et Mount avaient.

Son regard resta fixé pendant quelques secondes sur ce détail. Ce regard se vida de toute vitalité, et le chariot dépassa le militaire. Il continua à avancer, seul dans ses pensées. Il n'entendait plus rien, plus un bruit. Tout s'écroulait. Un pied devant l'autre, il n'avait d'autre choix que de continuer. Avec... ou sans elle.

La guerre bouleversait les vies.
La guerre prenaient des vies.
La guerre ne changeait jamais.
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Winter assault

X.

Road to battle.
L'offensive se passait parfaitement bien. Diverses percées avaient été effectuées par la soixante-dix-neuvième division d'infanterie. La contre amirale Nishi Kanjiro s'était notamment illustrée en menant ses troupes à la victoire, dans ce qui fut nommé la troisième bataille du Kirov. De nombreuses pertes de chaque côté ; mais une victoire éclatante de la jeune femme. Cela avait redonné du moral à toute la division et ils avaient presque rempli leur mission.

La quarante-huitième attendait son heure. Elle avait rejoint le front et attendait que la voie soit dégagée par la régulière pour fondre sur le quartier général vindexois de Mekiel. Des fortifications avaient été bâties tout au long de cette voie large de quelques kilomètres, et la division d'élite devait la défendre coûte que coûte pour empêcher un encerclement du bataillon chargé de la percée. La tâche se révélait plus facile que prévue. En effet les Hices étaient acculés plus au sud, et s'ils retiraient des troupes pour briser la ligne de ravitaillement, ils allaient rompre la ligne de front. Alors, Ivan Vatutin, le commandant des troupes de Mekiel, n'avait pas d'autre choix que de battre en retraite sans pouvoir améliorer la situation. La situation était, dans la globalité, catastrophique à Mekiel. Mais le nationalisme et le fanatisme idéologique de certains exaltaient tout le reste de la troupe et leur permettait de tenir.

Mount n'avait eu de cesse de penser à celle qu'il aimait. Sa perte fut si violente, si brutale. Assis sur un banc de fortune fait de bois, adossés à un mur de terre, il fixait le sol sans cligner. Le choc psychologique était trop important ; mais il ne fallait pas qu'il montre des signes de faiblesse devant ses hommes. Alors, lorsqu'un jeune caporal d'élite lui demanda si tout allait bien, il leva les yeux tout sourire et balaya les craintes du conscrit. Un sourire de façade, qui n'échappa pas à Ratzkill. Il le connaissait bien, et cette attitude était bizarre.

- Alex, qu'est-ce qui ne va pas ?

- Ne t'y mets pas aussi...

Il s'assit à côté de son ami, fronçant les sourcils.

- Je ne t'ai jamais vu dans un tel état... Tu es la personne la plus calme que je n'ai jamais vue. Mais là...

Mountbatten posa un regard dur sur l'autre lieutenant d'élite. Un regard qui exprimait son désespoir profond ; mais Ratzkill ne savait pas l'origine de ce regard. Alors il insista ; mais rien. Il repartit bredouille, sans pour autant mettre de côté l'idée de le faire parler. Il se dit qu'il retenterait sa chance plus tard.

Seul, plongé dans les ténèbres de son esprit, il déprimait, impuissant. Il ne trouvait de réconfort nulle part ; même pas chez son ami. Tout autour de lui, rien de joyeux. Des hommes en armes, des blessés, des adolescents utilisés comme chair à canon et des cadavres jonchant la terre. Les épées plantées dans le sol représentaient les tombes des soldats morts dans le no man's land. Les marines ne pouvaient pas se risquer à récupérer les corps, sous peine d'être accueilli par des balles ennemies. La situation était bien moins risquée qu'à Ypres ; mais il ne faisait pas bon d'être à découvert.

Au bout d'une dizaine d'heures, pendant lesquels la division avait stagné sur ce qu'il fut appelé la piste Abakan Kirov. Une longue piste, défendue âprement, et qui avait dégagé le passage pour la quarante-huitième, pour qu'ils se livrent à une attaque sur le quartier général Hice. Alors, ils se rassemblèrent et firent routes vers leur cible. L'aigle de montagne - surnom du général Vatutin - se préparait à l'attaque et fortifiait la base. La mobilisation des civils des environs avait été nécessaire. La base était encaissée dans une vallée et son unique entrée menait sur une grande route, qui la reliait au reste de Mekiel. Les troupes gouvernementales allaient forcément entrer par ici ; par conséquent de nombreux obstacles avaient été bâtis sur le tas.

Dépassant la zone contrôlée par la régulière, les hommes de la Marine d'élite avancèrent dans un territoire de plus en plus hostile. La piste, aménagée et défendue, laissait sa place à un décor montagneux peu praticable et dangereux. Leur cible était à quelques kilomètres du bout de la piste ; ils devaient donc marcher dans la neige de nombreuses heures, encore. Malgré leur repos, les hommes étaient de moins en moins motivés. Devant les horreurs de la guerre, nombreux étaient ceux qui remettaient en cause le bien fondé de cette guerre. Mais ils avaient signé pour ça, et ils devaient accomplir leur devoir jusqu'au bout. Jusqu'à la mort.

Une petite accalmie avait permis à la division de sortir s'infiltrer en territoire ennemi. Bientôt, ils arrivèrent non loin de la base vindexoise. Ils avançaient par compagnie, soit par quatre sections d'élite. Cela facilitait l'avancée et diminuait les chances de se faire repérer. Les officiers communiquaient par den den, mais pour l'instant tout était calme. Et tant mieux. Le silence régnait dans les rangs. Les visages étaient fatigués et paraissaient résignés. Beaucoup allaient y passer, encore et encore. L'histoire se répétait et les vétérans étaient de moins en moins surpris. Le mot bataille était souvent associé à la gloire, aux intérêts stratégiques et à des occasions de se mettre en avant pour beaucoup d'officiers de la Marine. Mais pour ceux qui étaient sur le terrain, ainsi que leurs hommes, c'était plus un synonyme de massacre.

Les visages étaient creusés. La compagnie de Mountbatten avait atteint leur position. Le gros de la division allait attaquer de front, sans trop s'avancer ; tandis que trois compagnies devaient attaquer depuis les versants de la vallée. Ils devaient dévaler la montagne en ski, tout en limitant leurs pertes, de manière à ce que les vindexois se retrouvent entre quatre feus. Chacune des compagnies allait attaquer depuis une direction. Celle du Marijoan allait s'occuper du nord, sachant que l'attaque frontale allait se passer au sud.

Dans le froid, dans la neige, ses hommes se reposaient. Plus que quelques heures avant que l'attaque soit lancée. Kimblee allait personnellement diriger l'offensive principale. Les trois compagnies étaient équipées en ski et en obusiers, et le gros de la troupe avait apporté des canons de montagnes. Faciles à transporter, car démontables, ces petits canons permettait de briser de petites fortifications, comme celles faites à la hâte par les Hices.

Ratzkill et le Fantôme scrutaient la base, en se collant au sol, avec des jumelles. Les forces ennemies étaient prêtes à réceptionner une attaque à tout moment. La bataille s'annonçait difficile.


Dernière édition par Mountbatten le Jeu 17 Mai 2018 - 21:05, édité 1 fois
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XI.

Avalanche.
- A tous les officiers de la quarante-huitième division d'élite, ici le commandant Kimblee ! L'heure tant attendue est arrivée. Nous lancerons l'attaque en premier ; que les équipes sur les versants se tiennent prêtes à passer à l'action quelques minutes après notre intervention !

*Bien reçu, enfoiré de Kimblee...*

Il repensait encore à la perte de l'être qu'il aimait tant. Mais il balayait son égoïsme. Il avait une centaine d'hommes sous son commandement, il ne pouvait pas plier maintenant. C'est ce qu'il redoutait le plus lorsqu'il s'engagea dans sa relation avec Louise. C'est précisément ce qui l'avait fait repousser ses sentiments lorsqu'il l'avait rencontré à Marijoa, à l'occasion d'un entraînement spécial.

BOUM BOUM BOUM

Les premiers coups de canons avaient retenti, faisant réagir les hommes de Vatutin. Ils se mirent rapidement en position. Les premiers coups de feus arrivèrent peu après. Les obus de l'artillerie gouvernementale détruisirent progressivement les fortifications des vindexois, ce qui ébranla leur stratégie de défense. Ils se replièrent vers les murs de la base ; mais ces derniers n'allaient pas tenir longtemps non plus.

Des armes lourdes furent installées des deux côtés, rendant le combat de plus en plus violent. Les échanges de tirs devinrent quasi ininterrompus au bout de quelques minutes. Les équipes des versants attendaient le bon moment, celui où le maximum de troupes Hices étaient aux prises avec celles de Kimblee. Alors, une fois que ce fut suffisant, ce dernier ordonna l'assaut des trois compagnies.

Les obusiers tonnèrent aussitôt. Le manteau neigeux des versants ne tarda pas à se détacher, pour venir fondre sur la base, recouvrant ainsi les murs de celle-ci. Les soldats à ski allaient pouvoir en profiter pour glisser dessus et s'immiscer directement dans la base. Après quelques minutes, les skieurs se lancèrent à l'assaut. Leur entraînement leur avait beaucoup servi, au vu de l'inclinaison de la pente. Les vindexois, bombardés et assaillis de tous les côtés, ne purent contenir l'assaut efficacement.

Les marines dévalèrent la montagne en utilisant un système de protection mutuelle. Un premier soldat descendait, puis s'arrêtait quelques secondes sur un endroit plus plat que les autres. Il tirait alors quelques slaves vers les Hices qui s'occupaient de couvrir les versants. Ensuite le deuxième descendait encore plus bas, et l'opération se répétait. Ce système de roulement permis une riposte directe, mais certes limitée.

Les Hices, dépassés, se retirèrent au niveau de leur deuxième ligne de défense. Leurs fortifications étaient réduites à l'état de débris, mais cela faisait l'affaire. L'artillerie tonnait toujours, mais plus faiblement. Le risque de toucher des soldats amis devenant de plus en plus grand, Kimblee décida de réduire la cadence de tir. Une décision raisonnable, qui en surprit plus d'un, à cause de sa soif de sang notoire. Mais au final il était loin d'être débile ; il avait ses propres prétentions de carrière. De plus, il avait vu tellement de sang dans cette guerre, que son caractère sanguinaire devenant de moins en moins marquant.

Mount était au combat, avec ses skis et son fusil. Ratzkill lui, supervisait la compagnie depuis la montagne. Dissimulé dans la neige, un den den à côté de lui, il dictait ses ordres aux obusiers. Avec son fusil à lunette il pouvait désigner les cibles avec précision. L'appui-feu ainsi donné s'avéra très important ; il permit de désorganiser encore plus la riposte vindexoise.

Soudain, un tir vint se loger dans un marin situé non loin de Ratzkill. Son intention fut vite captée et il comprit vite ce dont il s'agissait : un autre tireur d'élite, mais de l'autre côté de la barrière. Il ne le savait pas encore, mais c'était le Leutnant Vladim Nikivorov. Un duel de patience s'engagea alors entre les deux hommes. Dans son uniforme blanc, Ratzkill était totalement camouflé dans l'environnement montagneux ; et son adversaire également. Cependant le marine avait un avantage : il était au courant de l'existence de l'autre.

Les premiers hommes des trois compagnies ne tardèrent pas à atteindre la base ; Mountbatten fut parmi les premiers. Il fallait vite s'organiser et l'officier dicta ses ordres à ses hommes. Il se réfugia avec un petit groupe de soldat derrière un bâtiment en béton. Le haut de l'édifice avait été touché par l'artillerie et des débris jonchaient l'artère principale du camp. Les défenseurs fournirent un tir nourri depuis des abris, à l'aide de mitrailleuses, ce qui prévenait tout mouvement. Les marines arrivaient au compte goutte ; puis se débarrassait de leurs skis et de leur paquetage pour aller au combat. Les échanges de tirs s'intensifiaient de plus en plus ; ce qui immobilisait les marins de la compagnie Créole dans les premiers bâtiments qu'ils rencontrèrent. Certains étaient montés dedans pour riposter depuis des fenêtres aux étages.

De longs râles agonisants provenaient de ces mêmes bâtiments ; les blessés avaient été traînés à l'intérieur pour pouvoir être soignés par les toubibs de la Brigade Scientifique. Alors que Mount demandait à une escouade d'aller se positionner sur le flanc d'une équipe de mitrailleurs ennemie, un soldat tenta de rejoindre l'autre côté de l'allée. Il fut immédiatement fauché par une rafale de balles, qui le transpercèrent à de nombreux endroits. Le sang jailli et éclaboussa même les quelques hommes qui se trouvaient à proximité. Il lâcha un cri, tomba en arrière et finit par se taire. Sa tête heurta le sol et ses yeux regardaient dans la direction du groupe de soldat. Il fit son dernier soupir et s'éteignit à tout jamais.

Mais le lieutenant d'élite n'avait pas le loisir de regarder la scène atroce qui s'offrit à ses yeux, contrairement aux soldats ; un den den à la main, il dicta ses ordres au sergent d'élite Float, situé dans le bâtiment de l'autre côté de l'avenue. Ce dernier commandait personnellement une section qui s'était mise à l'avant-dernier et dernier étage, ce qui leur permettait une vue surélevée de l'ensemble de la base. En plus de fournir un tir de couverture non-négligeable, ils purent donner des informations précises aux équipes de mortiers. Ce rôle leur fut attribué directement par Ratzkill, qui était pris avec le tireur d'élite Hice.
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XII.

Et pour quelques balles de plus.
Le froid.

C'était probablement l'ennemi le plus redouté de tous sur Mekiel. Il fallait le combattre, le vaincre. Mais il restait toujours aussi mortel. Un instant d'inattention, et il vous dominait. Un autre de plus, et vous mourriez.

Les soldats de tous camps avaient bien été formés à cela. Les Hices plus que les marines certes ; mais pour tous c'était une variable avec laquelle il fallait composer. Pour les civils, c'était une autre paire de manche. Le manque de vivres et les réquisitions permanentes des deux armées les rendaient plus vulnérables chaque jour. Si bien que les morts s'accumulaient et gelaient dans la neige, les yeux grands ouverts et demandant pourquoi ils en étaient là. Pourquoi devaient-ils souffrir, dans une guerre qui ne les concernait pas ? La guerre était injuste.

Le ciel était illuminé ce jour-là. Les échanges de tirs étaient semblables à des éclairs qui frappaient les êtres humains, pour leurs crimes. Obus, balles... Le ciel était effroyablement mortel. Les explosions, les coups de feus, les râles et les écroulements formaient un fond sonore familier aux combattants. Les permissions étaient inexistantes et faisaient oublier progressivement ce qu'était une vie normale. La douceur de vivre de South Blue était loin pour Mount et pour Ratzkill.

Ce dernier utilisait tous ses sens pour traquer son ennemi, lui aussi fondu dans la neige. Avec son fusil à lunette, il scruta tous les endroits possibles où le tireur aurait pu se fondre. Soudain, il aperçu un vindexois apparaître en sortant de la neige et courir rejoindre une position défensive. Vêtu de blanc et tenant une arme semblable à la sienne, Ratzkill retintson souffle et attendit le moment opportun tout en évaluant la vitesse et la direction du vent. Il provenait du sud-ouest, et soufflait à une vitesse de quatre-vingts kilomètres à l'heure. Il devait faire un tir chirurgical, où il allait se faire repérer. Sa cible, située sur le toit d'un des immeubles de la base, courait en direction des escaliers. Alors qu'il ouvra la porte qui y menait, il se prit un dans l'épaule. Le lieutenant d'élite rechargea à toute vitesse, ferma l'oeil gauche et visa à nouveau son ennemi. Ce dernier s'était écrouler et cherchait à tout prix à rentrer dans le bâtiment.

Mais c'était trop tard, et le tireur d'élite s'empara de sa vie.

Sur le champ de bataille, Mount n'avait pas le temps d'utiliser son propre fusil de précision pour abattre ses ennemis. Il était bloqué avec une équipe de soldat derrière ce qui s'apparentait à un baraquement, bloqué par des armes lourdes Hices couvrant l'artère principale de la base. Float, de l'autre côté avec une section d'élite, tentait de détruire ces nids de mitrailleuses. Devant la lenteur de l'opération, le Marijoan décida de prendre les choses en main.

Il se mit en invisible et utilisa son Geppou de sorte à être suffisamment en l'air pour localiser ceux qui bloquaient sa compagnie. Il y avait trois emplacements, dont un protégé par une structure bétonnée. Une sorte de bunker. Bien qu'il ne savait pas encore comment allait-il s'occuper de ce dernier, Mountbatten fonça vers les deux premiers et lança une lame d'air vers chaque poste, avant d'atterrir sur un morceau de béton. Enfin, il courut dans un angle mort de la dernière mitrailleuse et se débarrassa des quelques soldats vindexois postés là, à grand coup de Hanmā to anbiru. Il rentra violemment dans l'abri en découpant la porte en métal, rentra et surpris les soldats. Ils finirent tranchés sans plus de sommations.

A présent la voie était libre, et les soldats de la Marine affluaient toujours plus nombreux dans l'allée et commencèrent aussitôt à nettoyer les différents bâtiments.

Ratzkill, non content de sa réussite, entreprit de descendre également. L'aide des mortiers devenant de moins en moins nécessaire, il était plus utile en bas qu'en haut. Il dévala la montagne sans tir de couverture, contrairement aux soldats, à présent tous descendus - ou laissés pour morts sur les versants -.

Néanmoins, une balle siffla à côté de lui, le déstabilisant et le faisant tomber. Lui qui slalomait pour éviter d'avoir une trajectoire trop prévisible, fut surpris. Il laissa ses skis et sprinta vers un gros rocher, à partir duquel il pouvait se cacher et cherchait ce nouveau tireur. Un second tir vint se loger dans sa cheville droite juste avant qu'il puisse atteindre son abri, le ralentissant. Au bout de quelques secondes qui lui parurent une éternité, il put se réfugier derrière cet amas de roc.

Haletant, effrayé, mais malgré tout lucide, il prit son fusil pour se mettre en position de tir après s'être appliqué des bandages sur sa plaie. Par chance, il n'avait reçu qu'une égratignure moyennement profonde. Timidement, il leva la tête. Vêtu lui aussi d'un uniforme blanc et le visage couvert de neige et de peinture blanche, il se convainquit - à tord ou à raison - qu'il était fondu dans le paysage.

Ayant repéré la direction du tir, ses recherches furent plus simples. Un troisième tir - qui fut comme un avertissement avant la mort - lui arracha une partie de la joue. La douleur fut grande, mais il savait qu'il pouvait l'avoir. Il ne disposait que de quelques secondes pour abattre l'autre tireur, peut-être trois ou quatre. Remarquant un mouvement dans la neige, il visa en calculant la déviation du vent et la distance, et tira. Une tache rouge vint salir la neige innocente. Un deuxième tir permit à Raztkill de s'assurer que son adversaire était bien mort.

Il s'appelait Vladim Nikivorov. Il était Leutnant dans l'armée vindexoise. Il avait vingt-six ans et une histoire. Tout ceci fut balayé en deux balles.
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XIII.

Idées noires.
La compagnie chargée d'attaquer à l'est avait réussi à entrer et à rester dans l'enceinte de la base, ainsi que les troupes de la compagnie Créole. A l'ouest, les choses étaient plus compliquées et l'offensive avait été brisée. Les vindexois, acculés entre deux feux, décidèrent une deuxième fois de reculer vers leurs dernières positions défensives. Leur seule chance était de provoquer une mêlée générale. Même s'ils allaient être encerclés, ou du moins pris en tenaille, ils auraient de meilleures chances de gagner.

Les morts s'étaient accumulés le long de la route principale, qui traversait d'est en ouest la base et qui était progressivement contrôlée par les hommes de Mountbatten. Les médecins n'étaient pas assez nombreux ; le matériel venait à manquer et les brancardiers se faisaient rares. A tel point que de nombreux blessés étaient laissés là où ils étaient.

Le barrage retentissant de l'artillerie de la Marine s'était stoppée, devant la réduction de la distance entre les troupes amies et ennemies. Les combats devenaient de plus en plus intenses et les pertes augmentaient considérablement.

Mount avait en ligne de mire le bâtiment principal de la base, où siégeait très probablement le commandant des forces à Mekiel, Ivan Vatutin. Aussi appelé l'aigle de montagne, il avait su opposer une résistance farouche face au rouleau compresseur de la Marine, avec des effectifs réduits et un matériel qui ne se renouvelait désespérément jamais.

- En avant ! Que deux sections, dont celle de Float, m'accompagnent ! Direction ce bâtiment ! Dit le lieutenant d'élite, pointant ledit édifice.

Une trentaine de soldats vinrent se placer derrière leur chef, avec le sergent d'élite à ses côtés.

- J'avais dit deux sections : où est la deuxième ?!

- La deuxième ? Elle est là.

- Ah... On a perdu tant que ça ?

- Faut croire.

- Bon, tant pis on va faire avec. Ordonne aux deux autres sections de couvrir nos flancs. Normalement le flanc gauche devrait être couvert par la compagnie B ; mais on ne sait jamais. Qu'ils se postent en hauteur.

- Bien reçu.

Peu de temps après les marins chargèrent sur le bâtiment, en parcourant une petite distance remplie de débris et d'installations militaires en tout genre. Aucun ennemi ne fut en vue : ils s'étaient repliés un peu plus loin. Mais le danger restait présent.

A en croire cette balle qui vint se loger dans la tête d'un soldat un peu trop à découvert. Il tomba en arrière et fut tué sur le coup.

Cette prise de conscience alerta encore plus les marines, qui se baissèrent encore plus derrière les couverts successifs derrière lesquels ils se cachaient, tout en progressant jusqu'à leur cible. Des coups de feus éclatèrent sur le flanc droit ; signe que les Hices avaient compris leur stratégie et qu'ils essayaient d'encercler le groupe de soldat.

Brutalement, une explosion vint se loger à la droite du Fantôme. Tout le monde s'arrêta et se mit à couvert, en alerte totale, fusils pointés vers l'hypothétique ennemi. L'explosion avait touché trois soldats qui marchaient côte à côte. Ce n'était pas beau à voir. Si seulement deux d'entre eux s'en sortaient avec des plaies superficielles, le troisième n'avait pas eu de chance. Quelques secondes plus tard, le regard désabusé des marins se posèrent sur un homme qui se releva malgré tout. Mais il avait bien changé depuis la dernière fois qu'ils l'avaient vu. Son oeil droit était en lambeau ; un morceau de chair le couvrait. Sa chaussure gauche était trouée et encore fumante ; à l'intérieur, que des débris de son pied. Son genou gauche était ouvert, tandis qu'il avait perdu son bras droit. Son ventre était quasiment ouvert.

Il ne criait pas, il ne pleurait pas. Il avait été anesthésié par la douleur. Son corps ne savait plus sur quoi poser sa souffrance, tant elle était immense. Il gémit mollement et prononça ces quelques mots qui firent pâlir ceux qui les avaient entendus :

- Les gars, c'est normal que ça soit tout noir ? …

Deux des rares médecins qui accompagnaient la petite troupe vinrent à son secours en le rassurant, et en le portant tant bien que mal pour l'extirper de ce cauchemar. Ces images secouèrent les deux sections d'élite. Elles étaient violentes, trop violentes.

Mount lui aussi, resta bouche-bée devant cette scène. C'était tout simplement horrible. En général, il avait tendance à rester de marbre en voyant les blessés. Mais ça dépassait l'entendement... et ça lui rappelait la mort de Louise. Ses yeux restèrent bloqués. Elle n'était plus là. Plus jamais ils ne pourraient danser ensemble, ne serait-ce qu'une fois... Le temps d'une valse.

PULU PULU PULU PULU. PULU PULU PULU PULU

La sonnerie de son den den personnel vint l'extirper de ses idées noires. Un dur retour à la réalité.

- Oui. Dit-il, sans réelle envie de connaître la réponse de l'autre.

- Allo, ici Ratzkill !

- Ah... c'est toi.

- Je suis descendu et j'ai rejoint l'équipe du flanc gauche. Si t'as besoin d'un coup de main pour le bâtiment principal, je suis preneur.

- Ça dépend si t'es en pleine forme ou pas.

- Oui bien sûr ! J'ai quelques égratignures, mais rien qui puisse m'enlever ma détermination.


Bien sûr, il mentait. Sa joue avait été percée par une balle du sniper vindexois, qu'il avait affronté quelques minutes auparavant, et il était touché à la cheville droite. Néanmoins... devant le manque cruel de soldats disponibles, il avait fait le choix de repartir combattre. Il avait demandé à un toubib de lui administrer le plus puissant antidouleur qu'il avait, et de lui bander et désinfecter ses plaies le temps de quelques combats. Une décision dangereuse et peu réfléchie... Mais c'était pour la bonne cause, comme il disait.

- Bon... Rejoins-nous alors.

Sans plus de détails, le lieutenant raccrocha et regarda la cible du groupe, d'un air nonchalant. Qu'il meure ou qu'il vive, ça n'avait pas d'importance. Certes, il avait encore son objectif à poursuivre : servir le Gouvernement Mondial. Pourtant, avec la mort de Louise, les choses n'allaient jamais être comme avant.

Il leva son bras, puis le dirigea sur ce qui était, visiblement, le quartier-général. Les marines se mirent en route, encore chamboulés par la vision d'horreur qu'ils avaient eu.
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XIV.

L'aigle de montagne.
Les combats opposants la force principale menée par Kimblee et la majorité des Hices se faisaient de plus en plus proches du groupe. L'arrière du bâtiment devint facilement visible, et quelques malheureux vindexois qui passèrent par là furent mis hors d'état de nuire par les marins. Le but de Mount était de voler les documents militaires contenus dans le bâtiment. Il fallait donc avant ça s'en emparer. Ratzkill ne tarda pas à les rejoindre, malgré ses blessures. Le Fantôme, trop préoccupé par ses propres pensées, ne les avait pas remarquées.

La compagnie B, qui s'occupait du flanc gauche, avait fait la jonction avec les troupes principales. L'encerclement était presque effectif ; il ne manquait que le flanc droit. Mais la compagnie A qui devait s'en charger avait failli à sa tâche, au grand dam du commandant d'élite de la quarante-huitième.

Alors que les hommes avancèrent lentement, en état de vigilance maximale, des rafales vint faucher plusieurs d'entre eux. Très vite, les marins se protégèrent derrière des débris et autres couverts en tout genre. Les marins touchés furent ramené derrière un abri, dans la mesure du possible. Des vindexois s'étaient postés aux fenêtres du bâtiment ; et leur feu continu immobilisa les fantassins. Dans un chaos relatif, la riposte s'organisa. Les marins se mirent debout et tirèrent des balles sur leurs adversaires. Certaines firent mouche ; et peu à peu la progression put reprendre. Des soldats étaient encore tombés ; leur nombre diminuait à vue d’œil.

Mountbatten sortit ses deux sabres. La mêlée avait commencé de l'autre côté. Il ouvrit la porte arrière du bâtiment et s'engouffra dedans, suivi de ses hommes. Le hall était bordé de deux escaliers en quartz. Ce blanc immaculé était taché de gouttes de sang, et un cadavre gisait sur les deux dernières marches. Il avait été touché au torse par une balle, et avait probablement tenté de chercher un médecin. Sans succès.

Il monta un des escaliers, postant sa compagnie au rez-de-chaussée. Une dizaine d'entre eux l'accompagnait. Ils nettoyèrent le premier étage, en exécutant les blessés vindexois ou ceux qui étaient encore debout. Ils n'étaient pas très nombreux ; la grande majorité avait rejoint la mêlée. Les grandes fenêtres, qui couvraient les murs des deux côtés du bâtiment, avaient presque toutes finies en morceaux. Les marins d'élite s'occupèrent ensuite d'appuyer leurs confrères qui luttaient avec leurs sabres, en tirant dans le tas de vindexois.

Mount les laissa là et entreprit de fouiner un peu partout des documents utiles. Cependant, il sentit vite que les salles stratégiques n'étaient pas à cet étage, et monta au deuxième. Soudainement, un vindexois fonça alors sur lui, avec une épée richement ornée. Le lieutenant esquiva de justesse, et bondit quelques mètres plus loin pour se mettre à bonne distance de son ennemi.

- Ivan Vatutin... Je me trompe ?

- C'est bien moi.

Un long silence s'en suivit. Les deux duellistes se scrutaient mutuellement, pour repérer les faiblesses de l'autre. Vatutin n'avait qu'un sabre ; le Marijoan en avait deux. Sans oublier ses lames secrètes, et son fusil à lunette. Toujours lourdement armé, basculer d'une arme à une autre l'avait souvent aidé dans ses duels.

Faisant tournoyant son sabre, l'aigle de montagne perçait les yeux du Marijoan. Les deux étaient bien déterminés. Le premier avait la volonté farouche de défendre sa patrie, mais aussi celle de faire honneur à son rang. Il avait travaillé dur, très dur, pour ce poste. Il comptait bien prouver à tous qu'il n'était pas un touriste, un de ces nombreux nobles de la capitale qui obtenaient un rang élevé de par leur nom de famille. Mineur dans ses jeunes années, sa volonté l'avait poussé à travailler plus et à atteindre l'un des plus hauts grades de l'armée vindexoise. Rien ne pouvait entraver sa ténacité.

Le deuxième était tout autant ferme. Il avait une mission : il comptait la remplir, peu importe les obstacles qui se trouvaient sur son passage. Néanmoins, la perte très récente de sa bien-aimée l'affectait au plus haut point. Souvent, il revoyait les moments qu'ils avaient passés ensemble. Il savait pertinemment que ça pouvait le déstabiliser. Il avait donc fait une croix à l'amour, car cela le rendait plus faible. Un choix drastique et irrationnel.

Le général en chef de Mekiel lança alors une technique qui prit au dépourvu Mount. Alors que son sabre tournoyait, il lança plusieurs lames d'air à la suite. Elles se heurtèrent à ses deux sabres, Shinsei et Maelstorm. Le marine recula sur plusieurs mètres, avant d'être bloqué par le mur. Ces lames d'airs étaient très puissantes, et le vindexois n'avait de cesse d'en produire avec son arme. Il regarda fixement son ennemi repousser avec difficulté sa technique, avant de lancer une ultime lame d'air. Ensuite, il fonça sur lui, accompagnant avec un léger retard sa dernière attaque.

Le marin se retrouva collé au mur. Ce dernier, fragilisé par les combats, finit par céder. Sauf que derrière ce mur se trouvait le hall. Il tomba alors sur le sol du rez-de-chaussée. Mais Vatutin n'avait pas dit son dernier mot et sauta dans le trou et brandit sa lame au-dessus de sa tête et l'abattit sur le Fantôme, alors à terre.

Il sauta de justesse, et contre-attaqua par un Hanmā to anbiru. La technique surprit sa cible, qui put la contrer au dernier moment. Profitant de la mauvaise posture de son ennemi, Mountbatten utilisa son Kami no ken. Il sauta en l'air avec un rapide geppou, avant de changer d'orientation pour s'abattre sur le général, sabre en avant. Le militaire ne put esquiver, et para avec son unique épée. Le Fantôme utilisa sa deuxième arme pour l'atteindre dans les côtes ; tentative qui fut réussie. Ivan fut projeté contre un mur, et se releva d'urgence. En effet, des marins vinrent en aide à leur chef et se mettaient en joue.

Vatutin lança sur eux quelques lames d'air, avant qu'ils eurent le temps de mettre en action leur plan. Un statut quo revint entre les deux adversaires, qui se fixaient avec une rage croissante.
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XV.

Touché, coulé.
Dehors, les entrechoquements d'armes blanches et les coups de feu constituaient le fond sonore typique d'un champ de bataille. La mêlée générale faisait fureur, et des combattants de plus en plus forts s'engageaient dans une lutte infernale. Kimblee lui-même finit par faire une apparition, en actionnant son fruit du démon. Il créa un champ de silence qui recouvra l'intégralité de la zone de combat, ce qui attira l'attention de nombreux militaires. Il se transforma alors en une sorte de monstre : ses yeux changèrent au rouge, et une étrange aura se forma autour de lui. La seconde suivante, il lança une attaque dévastatrice avec son sabre. La mêlée reprit, devant l'absolue nécessité pour les vindexois de stopper ce chien fou.

A l'intérieur, le duel continuait. Après une action dangereuse, le Marijoan se retrouva propulsé contre un énième mur. Se relevant difficilement, il débutait à avoir de sérieuses difficultés à contrer les assauts du général. Son regard puait la prétention. Après avoir gravi les échelons un à un, après avoir réussi à se hisser là où il était alors qu'il partait d'une famille pauvre, il avait peu de considération pour les autres. Ce qui l'importait, c'était son titre. Il avait passé sa jeunesse dans la poussière ; il ne comptait pas y revenir. Ceux qui n'avaient pas fait de telles prouesses ne valaient rien à ses yeux. Un regard dur, qui conduisit à des attentes élevées envers ses hommes. Une stratégie payante, car les Hices s'étaient taillés une bonne réputation dans l'armée vindexoise. L'action d'une seule personne avait permis aux autres de s'élever.

Implacable dans ses offensives, autant lors des grandes batailles que lors des duels, ils ne lâchaient rien jusqu'à ce que la situation soit trop mauvaise pour continuer. En l'occurrence, il avait prit l'avantage dans ce combat à mort. Mountbatten décida d'arrêter la débâcle et de riposter. Son adversaire n'était pas non plus en pleine forme ; et il pouvait aisément le battre en ajoutant de la puissance dans ses coups.

Il se dirigea vers son opposant, augmentant petit à petit la vitesse à laquelle il se déplaçait. Puis, arrivé à sa hauteur, il lança un Rengoku no burēdo pour briser sa défense. L'autre, coriace, tint bon et enchaîna en assénant un violent coup de poing avec sa main libre, en plein dans l'estomac du Fantôme. Ce dernier recula légèrement, mais évita de justesse le sabre du général. Le duel était à son apogée, et les deux duellistes rivalisèrent d'ingéniosité et de puissance pour défaire l'autre.

Sans succès.

Ils avaient une force, une détermination, une capacité de réflexion et une maîtrise dans l'art de la guerre équivalente. Les minutes s'allongèrent, et bientôt ils commencèrent à fatiguer. Ne pas arriver à prendre l'ascendant sur son ennemi agaçait les deux hommes. Alors que dehors la mêlée faisait rage, ils étaient bloqués ici avec un adversaire qui semblait imbattable, les empêchant d'aider leurs pairs.

Soudain, un marin mal avisé ouvrit une porte dans le hall, captant l'attention de l'aigle de montagne pendant une seconde.

C'était une seconde de trop.

Saisissant sa chance avec hardiesse, il lança un Kami no ken magistral. Sa cible eut le temps de s'apercevoir son erreur et brandit tant bien que mal son épée pour contrer les deux armes du Fantôme. Mais le retard qu'il avait prit rendait sa poigne trop légère pour parer une attaque qui concentrait toute la rage du marine.

Son dernier rempart avant la mort céda, et les deux lames rentrèrent profondément dans sa chair. Retombant au sol, Mount observa avec satisfaction le corps inerte de son ennemi, sur lequel il avait gravé à tout jamais une croix ensanglantée. Son subalterne se précipita pour vérifier l'état de son supérieur.

- Lieutenant, ça va ?

- Maintenant, bien mieux.

Mais il fut obligé de poser un genou à terre, tant ses douleurs au dos lui faisait mal. Il avait beau être fort, tomber d'un étage n'était pas sans conséquence. Le nouvel arrivant se précipita pour soutenir son chef. Vatutin était mort ; et la bataille devenait de moins en moins serrée. Après avoir pris une dizaine de minute pour se remettre en état de marche, grâce à l'intervention d'un infirmier, le lieutenant d'élite poussa la porte du hall qui menait à la mêlée générale.

Il sourit. La bataille était gagnée. Les Hices étaient encerclés ; cependant, ils se défendaient âprement avec leurs sabres. Un détail retint l'attention du Marijoan : Kimblee était aux prises avec un jeune homme qui paraissait bien au-dessus du lot. Les cheveux noirs, les yeux bleus et des gestes précis qui démontraient son grand sang-froid : voilà comment était Jagd P. Kraft, As de la Révolution. C'était la personne qui était à l'origine même de l'insurrection de Vindex. Mais à ce moment-là, peu de gens hors des circuits révolutionnaires le savaient.

Il savait jouer à la perfection avec le caractère du commandant de la quarante-huitième division d'élite. S'il était moins fort en terme de force brute, nul ne doute qu'il possédait de meilleures capacités de réflexion et il se servait de tous les éléments mis à sa disposition pour gagner son combat. Fujimi connaissait très bien ses faiblesses, dont la plus grande était sa définition réduite d'un duel. Il ne savait pas utiliser des moyens immédiats pour arriver à ses fins ; ni même prédire les conséquences du lancement d'une attaque, que ce soit l'une des siennes ou celle d'un adversaire. Cela en faisait un duelliste médiocre. Lassé de ce combat qu'il ne pouvait définitivement pas remporter, il désigna le lieutenant d'élite le plus proche pour prendre sa relève : à savoir Ratzkill.

Ce dernier avait décidé de s'engager dans la mêlée lorsqu'il s'aperçut que les troupes de la Marine avaient du mal, au début. Il avait bien aidé à faire gagner ses collègues, en semant la zizanie dans les rangs ennemis. Avec des tirs dans l'arrière de la tête de plusieurs vindexois, la peur s'installa vite chez ceux qui avaient vu ce qui se tramait.
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Winter assault

XVI.

Rage.
- A tous ! Suivez-moi !

Le révolutionnaire savait pertinemment que la situation se dégradait de minutes en minutes. Il avait un plan en tête ; toutefois, le tireur d'élite s'efforçait de l'arrêter dans ses actions. Il devait extirper tous les vindexois de la bataille le plus vite possible ; et ce n'était pas un pauvre petit lieutenant qui allait l'empêcher de continuer la lutte ailleurs.

- Bon, puisque tu ne me laisses pas le choix...

- Qu'est-ce que tu vas faire, révo du dimanche ?

- Ce que je vais faire ? Ahah.

Il lança de multiples sorus qui empêchèrent son adversaire de le viser efficacement. Il changeait constamment de position et se rapprocha de plus en plus. Une course de vitesse s'en suivit ; mais Ratzkill ne pouvait suivre le rythme. Alors, quand l'agitateur vint derrière lui, il n'eut pas le temps de se retourner et une lame le frappa de plein fouet dans le dos. Hurlant de douleur, le pauvre marine était incapable de changer son destin. Le primé enfonça son sabre encore plus profondément et finit par se retirer. Les yeux du gradé sortaient de leurs orbites et sa bouche restait grande ouverte, et muette. Il posa sans le vouloir ses deux genoux à terre, et tomba au sol.

Mount resta bloqué sur lui. Comment pouvait-il mourir ? Comment pouvait-il le laisser seul ? Il se refusait d'accepter ce qu'il s'était passé, et déniait tout en bloc. Il ne pouvait l'accepter. Après Louise, il ne pouvait perdre une autre personne. Cet enfer lui aura donc tout pris ? C'était impossible.

Le révolutionnaire perça l'encerclement et fut suivi par les Hices. Sa force dissuadait de nombreux soldats de tenter de l'arrêter. Les blessés et les morts s'étaient aussi accumulés chez eux, et il était grand temps d'arrêter le massacre. Kimblee ordonna de les laisser tranquille ; la bataille était gagnée, pas besoin d'allonger la liste des victimes. Kraft ouvrit un tunnel dans lequel s'engouffra les vindexois, en toute impunité. Les tirs avaient cessé, et les membres de la Brigade Scientifique se précipitaient pour s'occuper de ceux qui étaient tombés au champ d'honneur. Dont Ratzkill.

Le Fantôme ne pouvait contenir sa rage. Il alla contre les ordres du commandant d'élite et fonça à toute vitesse sur l'assassin de son meilleur ami. Même s'il n'était pas dans son meilleur état, ses émotions prenaient le pas sur le reste. C'était très rare ; et c'était probablement la première fois que les marines le virent comme ça.

Il sauta en l'air puis fonça sur lui, n'écoutant que sa haine. Ce dernier l'avait vu depuis un moment et était prêt à réceptionner son attaque, avec son fidèle Meitou Yakikatsu. Le choc entre les deux hommes fut violent, et une onde de choc attira l'attention de tous. Mount sauta en arrière puis effectua un énième Hanmā to anbiru, sans espoir.

- Alexander Mountbatten, retire toi IMMEDIATEMMENT !

L'ordre incisif de son supérieur rentra dans une oreille et ressorti par une autre. A ce moment-là, il se fichait des conséquences. Qu'il meure ou qu'il vive, qu'il reste lieutenant d'élite ou qu'il soit dégradé, qu'importe. Il lança plusieurs assauts ; aucun d'entre eux fut couronné de succès. Son adversaire était serrein, et se contentait de repousser ses attaques, le temps que les militaires ralliés à la Révolution aient le temps d'aller suffisamment loin dans le tunnel. Une fois ceci fait, il lança une violente technique sur le Marijoan. S'approchant avec plusieurs sorus, il se plaça à sa droite pour tenter de trancher ses pieds ; puis se mit à sa gauche pour trancher sa tête.

Mais à ce moment-là, une chose bizarre se produisit. Alors que la rapidité d'exécution aurait dû le prendre de vitesse, Mount esquiva à la dernière seconde sans même contrôler ses gestes. Il se contorsionna pour éviter le premier coup, et le deuxième, stupéfiant au passage son ennemi. C'était comme si toutes les émotions qu'il avait accumulées au cours de cette guerre s'étaient exprimés par une volonté féroce de survie. Le gris bondit quelques pas en arrière, l'air intrigué.

- Tu l'as aussi, n'est-ce pas ?

- De quoi tu parles, chien de révolutionnaire !

Sans réfléchir à ces mots, le Fantome repartit à l'attaque. Néanmoins, son opposant s'était reculé de plusieurs soru et rentra dans le tunnel. Ses pas résonnaient et le marine décida de le poursuivre malgré tout. Le regard de Jagd croisa le sien. Ces deux-là n'en avaient pas encore fini.

BOUM

Une grande explosion retentit et scella l'entrée du passage. S'agenouillant, Mountbatten enragea encore plus et lança un long cri. Il n'avait pas put empêcher la mort de Louise, ni même celle de Ratzkill ; et il n'avait même pas pu venger la mort de ce dernier. Sa tristesse était profonde ; mais ce jour-là il n'exprima que de la rage. Il était en colère contre cet homme qui avait tué son ami et contre ce supérieur qui avait provoqué la mort de sa copine.

Mais surtout, il était en colère contre cette guerre inutile et injuste.
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