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CP4 contre CP5

Rappel du premier message :

Cher journal,

Shell Town est une chouette petite ville-île comme il en existe des tas sur East Blue. C'est un peu un trou perdu il faut bien l'avouer, mais un trou perdu très attractif si l'on en croit les nouvelles qui défraient régulièrement la chronique depuis quelques années ! J'aurais aimé passer plus de temps à flâner dans les rues avant de me mettre au travail: j'aurais discuté avec quelques passants, fais le tour de quelques boutiques, découvert la cuisine locale et visité le zoo... Tu te rends compte journal, il y a un zoo sur cette île !! Tu crois qu'ils ont des éléphants ?!! Je sais, je sais: les éléphants seront pour plus tard, j'ai un rendez-vous professionnel aujourd'hui et je me dois d'être ponctuelle.
Je t'arrête tout de suite journal: je suis une personne ponctuelle ! Cesse de te moquer, bien sur que si c'est vrai ! Si je suis souvent en retard c'est parce que j'en fais exprès. Tu vois, plus une personne se permet de faire attendre les autres plus ça veut dire qu'elle est importante. C'est une manière de montrer aux gens que mon temps est plus précieux que le leur, et que contrairement à moi ils peuvent se permettre de le perdre. Et puis parfois ça me laisse le temps de trainer un peu, faire quelques achats, ou de savourer un thé avec des glaçons...

Je vais t'épargner ma montée jusqu'au sommet de la ville, ainsi que mon arrivée dans la base de la marine qui domine l'île tel un gros volcan -ou comme une grosse cheminée industrielle peinte façon tigre bleu-. Franchement, quitte à avoir un monstre comme ça qui domine leur foyer ils auraient pu en faire quelque chose d'artistique. Et d'élégant ! Je ne leur demande pas d'aller jusqu'à en faire une œuvre d'art, mais... Oh mais c'est une idée ça ! Je devrais en parler au maître des lieux tiens !
Il faudra que tu m'y fasses penser journal quand on aura le temps.

Le bruit de mes talons résonne avec assurance et agressivité dans les couloirs de la fameuse base moche, faisant se retourner les gens sur mon passage comme des écoliers pris en faute qui s'efforceront d'avoir l'air sage à l'approche de leur institutrice (puis ils me voient, comprennent qu'ils ont affaire à une "gamine" de dix-huit ans en talons, et se détendent voir sourient... Non, oublie ça journal, ça casse tout l'effet de ma description. Retiens juste la partie ou ils ont l'air très impressionnés !). Je suis accompagnée par un soldat anonyme en uniforme blanc qui me sert de guide à travers ce labyrinthe de couloirs et de bureaux, et par Sbire qui garde un air stoïque en toutes circonstances (Sbire, ce n'est pas son vrai nom. Simplement je ne lui ai pas demandé comment il s'appelait vraiment pour ne pas risquer de l'oublier).

Comme dans toutes les missions que j'aime, je porte un déguisement élégant et une fausse identité. Je suis vêtue d'un tailleur strict gris et d'une jupe stricte assortie, ainsi que d'un chemisier blanc strict au col sans artifices, d'épaisses lunettes noires strictes (tu vois, celles qui ont une forme pointue sur les côtés et qui donnent l'impression que celle qui les porte est tout le temps fâchée), et je porte bien sur d'élégantes chaussures à talons noir qui font "PAC !" à chaque fois que je pose le pied par terre ! Je tiens sous le bras une pochette (stricte elle aussi) qui déborde de papiers à l'allure indigeste, et à ma boutonnière scintille un rutilant (mais strict) pin's doré indiquant mon appartenance à la marine. Et bien sûr mes cheveux sont coiffés en un chignon strict.
Si je suis aussi stricte, c'est parce que je suis déguisée en inspectrice de la comptabilité (oui je sais c'est précis. Et non je n'ai pas un déguisement pour chaque branche de l'inspection que je m'amuse à incarner ! Quoique... merci de l'idée journal !). Évidemment que toutes les inspectrices ne sont pas comme ça, la plupart sont même des personnes normales à ce qu'il paraît ! Mais les gens aiment les clichés. Ils aiment se dire "on dirait vraiment une inspectrice pas commode cette bonne femme" et avoir raison. Sbire, lui, est déguisé en cliché de comptable qui est nettement moins flatteur: chemise à manches courtes démodée, cravate, et coiffure un peu ringarde.
A la réflexion j’aurais quand même pu avoir droit un acolyte plus discret pour cette mission. Quelqu’un qui fasse un peu plus “comptable inoffensif”, et pas une armoire à glace deux fois plus épaisse que moi qui s’efforce d’avoir l’aire crédible dans sa chemisette jaune pâle !

♦♦♦♦

Je remue avec application mes glaçons dans la tasse de thé chaud qui m'a été servie tandis que le maître des lieux me dévisage, partagé entre l'étonnement devant mes goûts en boisson qu'il ne partage visiblement pas, l'amabilité forcée de circonstance à laquelle il est tenu pour accueillir une nouvelle venue haut placée de la branche judiciaire du GM, et aussi une certaine gêne.
Le colonel Pal Vélachez, chef de la base de Shell Town, est un homme au visage plutôt oubliable ou pointe une certaine dose d'indolence. Il n'y a pas que son visage qui est oubliable d'ailleurs ! Avant la mission j'ai demandé à Sbire de me préparer et de me fournir un certain nombre de rapports, dont le dossier complet du bonhomme. Et j'ai beau l'avoir lu et mémorisé par cœur, la seule chose qui me vienne à l'esprit en y repensant est "sans intérêt" ! Velachez est un peu lui aussi, à la manière de mon déguisement de comptable, un cliché. L'illustration parfaite de l'idée reçue selon laquelle on mute à East Blue les officiers les moins compétents, les planqués, les tire au flanc, et les gradés en fin de carrière. Hé ho, ce n'est pas moi qui l'ai inventé journal, tout le monde dit ça ! Et peut-être que je ne me gêne pas pour colporter ce cliché, mais...
Mais... non, rien. Je n'ai pas d'excuse, c'est la vérité. D'accord, c'est vilain de ma part !
Mais regarde-le, avec sa barbe négligée et son oeil endormi !!!

"- Colonel Vélachez, enchantée.
"- Véhachez."
"- Pardon ?"
"- Véhachez, pas Vélachez"
"- Ah ? Hum, oui, tout à fait. Je suis Dragémilie Smith-Martin-Lepetit-Kalinsky" ... que veux-tu journal, accoler les noms de famille plutôt que d'en choisir un seul ça ne fait que décaler le problème d'une génération... "inspectrice en chef chargée de la surveillance des finances et des comptes au sein de la marine, rattachée au QG d'east Blue."

Ça existe vraiment journal, je t'assure ! Simplement en général on appelle ça "la compta' ".

Je sais qu'une visite surprise de l'inspection des finances n'est jamais une bonne nouvelle et je ne m'attendais pas à ce que le colonel m'accueille avec joie, mais on peut dire que sa réaction est plutôt éloquente ! Je le vois blêmir un court instant, écarquiller les yeux, et se ressaisir finalement de justesse en affichant un sourire aimable tout en jetant des regards appuyés en direction de son aide de camp. Roooh, tout de même, colonel ! Je sais bien que les gens de la compta sont de vrais pénibles -et je ne dis pas ça parce qu'ils rechignent à chaque fois que je leur présente mes notes de frais de missions ! Enfin pas que-, mais ce n'est pas une raison pour prendre un air aussi contrarié ! Véhachez a un sourire pas très franc et s'efforce de prendre un air détaché pour me répondre : quelque chose dans son attitude me fait sentir que lui aussi est enchanté de me voir mais qu'il le serait encore plus si je n'étais pas là !

"- Eh bien madame... mademoiselle Smith, vous êtes la bienvenue à Shell Town." Il se masse la gorge et fait crisser sa barbe. "Cependant, je m'étonne de cette visite plutôt inhabituelle... et imprévue."

Je lui réponds par un petit sourire mesquin:

"- Aussi inhabituelle que vos derniers rapports de comptabilité, à vrai dire." Je reprends mon air strict: "Nous avons noté plusieurs irrégularités de type 3 et C dans les rapports du zéro-un zéro-neuf soixante sept, zéro-un dix soixante sept, et zéro-un douze soixante sept, ce qui correspond à une situation nécessitant le contrôle d'un agent de catégorie un. Nous allons donc devoir effectuer un contrôle scrupuleux de vos archives ainsi que de vos inventaires et de votre matériel afin de vérifier si faute il y a bien eu."

La qualité numéro un d'un agent, c'est l'aplomb avec lequel il peut déblatérer des mensonges pour s'ouvrir des portes. Avec un peu d'aide, comme quelques phrases de charabia technique et de véritables papiers d'identification pour appuyer de fausses identités que me fournit le CP5, je suis sûre que j'arriverais même à me faire conduire dans le bureau de l'amiral en chef si j'en avais besoin ! Et comme toujours, quelques semaines après la fin de ma mission, ma fausse identité disparaîtra des listes du personnel pour ne plus faire parler d'elle.

Soyons honnêtes tout de suite journal: je n'en ai rien à faire de ces histoires de finances ! Quoi que je prétende et malgré ce que montre mon déguisement, je ne suis pas comptable ni intéressée par les dépenses du gouvernement tant que cela ne me touche pas directement ! C'est grâce au rapport de Sbire, que j'ai chargé de faire le tri dans les archives lors de ma phase de préparation avant la mission, que j'ai découvert cette petite faiblesse qui m'a permis d'imaginer cette couverture et ce prétexte à ma présence ici (mais les sbires ça ne compte pas alors on va dire que l'idée vient de moi). Imaginez un colonel de la marine, très sérieux sans doute -j'en suis persuadée- mais avouons-le pas très doué pour gérer ses comptes. De maladresses vraiment pas méchantes, à peine de quoi faire lever les sourcils quand on compare ses comptes mois après mois, mais qui pourrait faire tâche sur un dossier si l'on venait à regarder ça de trop près. Ledit colonel, évidemment, ferait alors tout pour dissiper ce malentendu en se montrant prévenant de toutes les manières possibles auprès de la personne venue tirer les choses au clair !


Dernière édition par Caramélie le Ven 20 Aoû 2021 - 22:14, édité 5 fois
  • https://www.onepiece-requiem.net/t21492-l-envers-du-journal#2313
  • https://www.onepiece-requiem.net/t21479-caramelie-la-critiqueuse
Cher journal,

C'est avec sérénité que je quitte la base de la marine en compagnie de Sbire et d'une petite escorte de soldats de la marine obligeamment fournie par mes hôtes. Notre colis est bien à l'abri dans l'une de mes valises, suffisamment calé pour ne pas faire de bruit. D'ailleurs mon subordonné est un excellent et très délicat porteur de valises, je l'ai entraîné à ça ! Il ne s'agirait pas qu'il abime mes petites affaires en trébuchant sur les pavés.

Le cas du colonel réglé, je n'ai plus de véritable obstacle sur ma route. J'aurais couru un véritable danger si j'avais pris le risque de m'enfuir comme une voleuse une fois la cargaison en ma possession, mais à présent que ma couverture tient toujours je peux appareiller l'esprit tranquille sans redouter que mon navire ne se fasse intercepter à cent mètres du port.

Tandis que nous descendons la ville en direction du port, je continue de jouer mon rôle en faisant claquer mes talons et en affichant mon air sévère, même si en vérité je peine à dissimuler mon sourire ravi ! Mon jeu d'actrice fait toujours son petit effet et certains passants me dévisagent lorsque je passe devant eux et d'autres me désignent même du doigt. Je ressens une bouffée d'enthousiasme, toute ragaillardie par l'effet que j'ai sur eux. Ils ne s'en doutent pas et pourtant le ressentent, leurs vies seront un peu meilleures grâce à moi ! C'est donc ça, journal, la sensation d'être une héroïne qui vient de braver les dangers en exécutant une mission pour le compte du glorieux gouvernement mondial ?!

Mon navire m'attend au port. C'est une petite caravelle de la marine habilitée à effectuer la liaison entre différentes bases de la marine, et qui me ramènera au QG d'East blue. De là, je m'éclipserai sous une autre identité pour retourner à Marie Joie où je remettrai mon précieux colis. Paradoxalement journal, alors que le plus dur est fait la partie la plus longue de ma mission reste encore à venir !

♦♦♦♦

CP4 contre CP5 - Page 2 Zidk

Paisiblement installée dans le château arrière du navire, sur une espèce de petit balcon ou je passe le plus clair de mon temps depuis le début du voyage, je lis le journal. Le journal, pas mon journal. Je t'écris plus souvent que je te lis d'ailleurs, et puis je parle rarement de toi à la troisième personne !
Même si je m'applique toujours à jouer ma fausse identité, on peut observer un certain relâchement de ma part et je m'autorise déjà à porter des tenues plus légères et agréables, mais aussi à considérer de larges portions de mes journées en bateau comme du temps libre, ce dernier incluant: fa niente, bronzette, lecture des quelques livres que j'ai emmenés avec moi, contemplation de la mer et du ciel, et actuellement lecture du journal.
Si je n'y trouve aucune information susceptible de m'alarmer ou d'éveiller ma prudence, un petit article éveille néanmoins mon intérêt:

Un nouveau petit ami pour France Rodriguez ?
Vacances incognito et romance sulfureuse à Shell Town

En vacances à Shell Town, France Rodriguez a été aperçue sur la plage en compagnie d'un bel inconnu, un fringuant jeune homme d'une vingtaine d'années avec qui elle semble entretenir une relation des plus sulfureuses.

Les vacances de l’amour ou amour de vacances ?
On ne présente plus France Rodriguez, l'actrice qui a fait battre le cœur de toute une génération, encore auréolée du succès de son dernier film: "La folie des Iom". En voyage incognito sur East Blue entre deux périodes de tournage, la belle blonde a été surprise lors d'un tendre tête à tête avec un charmant et riche jeune homme alors que ces derniers prenaient le soleil sur la plage.
C’est en exclusivité que notre journal dévoile les photos de l’actrice et de son mystérieux amoureux, que nous découvrons tout près l'un de l'autre, leurs yeux se dévorant avec amour, France vêtue d'un très seyant maillot de bain azur qui rappelle fortement son apparition remarquée dans "Carnage à la Piscine".

Le discret inconnu, qui a déjà déclenché les passions autant qu'il fait battre les cœurs, n'a pu être identifié que sous le pseudonyme de monsieur K., qui serait selon nos sources un commercial très talentueux et un agent en mannequinat.
Rien ne dit cependant s’ils sont officiellement en couple ou non.

À lire aussi page 16: Il était une fois… France Rodriguez



Je suis un peu déçue journal, parce que d'après l'article France se trouvait à Shell Town en même temps que moi et je ne l'ai même pas vue ! Dire que Véhachez m'a caché une information pareille ! Je comprends mieux pourquoi il avait cet air louche !
Bon par contre ils se sont trompés sur les photos, la femme en maillot de bain qu'on voit en train de bronzer c'est...
Oh, attends voir journal... ?!!
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- Obéir, pas réécrire les règles quand ça vous arrange.

Jaros n'en avait pas fini, mais manifestement le durcissement de son ton incitait Véhachez à tout sauf à faire acte de contrition. Contrairement à Paddington, l'air plus abattu que jamais, le Colonel répondit d'une voix un peu nerveuse, mais loin d'être éteinte.

- Jolie déclaration de principe... Complètement déconnectée de la réalité du terrain.
- Oh vous avez ouvert la danse question belle paroles, avec vos histoires de vocation, je n'allais quand même pas me priver.

La nécessité de réorienter son discours s'imposa au jeune homme. Il aurait tout à fait pu partir et faire son rapport sans creuser plus loin. C'était sans doute ce que Beladon aurait fait d'ailleurs... Mais justement, des prétentions plus nobles animaient l'agent tout frais qu'il était. *Comment je pourrais les...* Après un autre petit silence, rythmé par le léger craquement des doigts crispés du Lieutenant-Colonel qui se tordait les mains, il tenta quelque chose.

- Qu'est-ce que vous croyez, que j'ai la bêtise de penser que j'ai ne serait-ce que le quart de votre expérience et de vos connaissances, pour ce qui est de mener une garnison ? La question n'est pas là et vous le savez.

Cette fois l'effet fut bien plus appréciable pour Jaros. L'atmosphère s'apaisa, brusquement douchée, et Véhachez, resté debout jusque là, s'assit enfin après quelques secondes. *Une ouverture ?* Usant de cet outil décidément bien utile qu'était le silence, l'agent attendit un peu que les deux Marines s'expriment.

- Hum, bon... Reste que vous ne comprenez pas que... Rogues, ça va ?

Le vieux militaire venait de poser une main un peu crispée sur le bras de son supérieur, geste inattendu. *Alors Paddington, on a assez mariné ?* Sous sa barbe, la bouche de l'homme était réduite à une fente contrite, serrée sur ses lèvres légèrement gercées.

- ... Pal, ça suffit. On a merdé, on est coupable, c'est tout. On va juste s'enfoncer...
- Entre nous, vous deviez bien vous en douter lorsque vous avez cherché à brûler les preuves.
- Idée de merde... J'en ai ma claque de ces conneries. On aurait dû arrêter y a longtemps Pal, tu le sais, je le sais...
- ...

Le concerné ne trouva rien à répondre, et un nouveau silence, presque gêné cette fois, s'installa dans le bureau. Trop pragmatique ou pas assez téméraire, toujours est-il que Véhachez perdit ses velléités justificatrices en voyant qu'il n'aurait pas le soutien de son homme de confiance. Bien, au moins la situation était-elle calme, à présent. Très calme même. Jaros ne put s'empêcher de se faire la réflexion que, décidément, ces moments de vide prenaient une place assez conséquente. Et qu'être celui qui le briserait était bien pratique, aussi, c'est donc ce qu'il fit encore une fois, après avoir pris de quoi écrire sur le bureau du Colonel.

- Bon. Maintenant je vais vous demander de me préciser certaines choses pour mon rapport.

Il se sentit presque obligé de rajouter :

- Autant vous le dire tant qu'on y est... Je ne vois pas la nécessité d'une arrestation ou sanction immédiate, mais j'espère que vous comprenez que vous n'allez pas vous en sortir avec juste une tape sur les doigts. Si vous coopérez, ça se passera mieux pour vous comme pour moi. Oui ?

On opina vaguement du chef sans rien dire de plus à l'agent, qui laissa échapper une expiration un peu appuyée. Les mines étaient moroses, peu volontaires. Quelque chose lui disait qu'il allait en avoir pour un petit moment...


Quelques heures plus tard...


- ...très bien, merci.

Jaros raccrocha son escargophone et se laissa aller en arrière sur sa chaise, fermant brièvement les yeux. Sur la fenêtre à sa gauche, les reflets de la mer toute proche se teintaient de l'orange du crépuscule, écho de la lueur chaude de la lampe à huile accrochée non loin. Le verre verre vide devant le jeune homme, sous cet angle, prenait à ses yeux des airs de kaléidoscope, la lumière diffractée par ses facettes miroitant doucement sur le vernis de la table. *Hah, tout de même...*Servir un Gin tonic dans un tel récipient faisait figure de maladresse au charme pataud, mais l'alcool était bon et bien frais, c'était tout ce qui comptait pour l'agent. Comme pour l'attester, deux verres identiques et tout aussi vides trônaient un peu plus loin sur le bois du plateau.

C'était à croire que son corps avait attendu que l'affaire fut finie, car une tenace lourdeur s'était emparée de lui dès qu'il avait quitté la garnison de Shell Town. Ses membres engourdis et fourbus l'élançaient comme après le pire des entraînements, mais ce n'était pas le pire. Lorsqu'il n'était encore qu'un grand gamin livré à la misère de la rue, la faim lui avait fait bien plus mal. Ses tempes impitoyablement écrasées par un étau brûlant, voilà ce qui l'avait le plus dérangé. L'alcool glacé, tout intoxiquant notoire qu'il fut, avait fait office du plus délicieux des remèdes pour Jaros.

Il eut une brève pensée pour cette jeune femme un peu trop culottée, se rendant seulement compte qu'il n'avait pas relevé son identité réelle. Ce détail, petit en apparence, faisait un peu tache, mais il était trop tard. Mieux valait penser au pétillant de ses yeux ou au charme de son sourire qu'aux ennuis qu'elle ne manquerait pas de lui apporter, une fois toute la paperasse du jeune agent délivrée.

À ses pieds, sa serviette de cuir était notablement plus rebondie qu'à l'aller, pleine à craquer, même. S'il n'avait encore jamais beaucoup eu affaire à la bureaucratie du Gouvernement Mondial, il anticipait déjà le flot de problèmes que son rapport, forcément plein d'inexactitudes diverses aux yeux fouineurs des ronds-de-cuir qui s'occuperont de son cas. Ou plutôt, il avait anticipé jusqu'à son troisième verre. L'amertume raffinée de la boisson bien froide avait le don de dissoudre celle qui s'immisçait dans sa bouche, alors que son esprit engourdi s'enveloppait d'une douce chaleur. De quoi détendre le jeune homme avant la purge qu'allait être le long voyage en bateau qui l'attendait. Là, il aurait tout le temps de ruminer les événements de la journée, entre deux vagues nauséeuses. À l'autre bout de l'auberge, le mousquet que l'agent avait repéré lors de sa première visite le narguait, accroché au mur en toute innocence. Une vision qui se teintait d'accents sardoniques dans son regard légèrement embrumé...

Les pommettes ornées d'un léger rosissement, Jaros se leva un peu brusquement, avant que l'envie d'un quatrième verre se fasse sentir. Une fois dehors, le vent du soir vint agréablement mordre ses joues, et il partit d'un bon pas. Le port l'attendait... Et le mal de mer aussi.
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