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Le renouveau



Parisse. Cette île d’un potentiel inimaginable était actuellement vouée à la destruction. La faute à une Révolution qui a voulu s’imposer de la manière forte et d’un Gouvernement Mondial qui préfère détruire une île du moment qu’elle n’était pas aux mains de son ennemi juré. L’occupant actuel du siège de la Guerre ne pouvait plus fermer les yeux sur cette sombre affaire, il était temps d’y mettre son grain de sel. Autrefois, il tenta d’apaiser les choses, mais une mission prioritaire et un manque de pouvoir l’en empêchèrent. À ce jour, Parisse était sa priorité. À ce jour, il avait le pouvoir de décider de certaines choses. La première tentative fut un cruel échec mais il ne put se résoudre à abandonner ces pauvres gens dans cette guerre intestine.

Ragnar n’avait pas retrouvé son équipage depuis bien longtemps, probablement depuis la bataille de Jotunheim. Déguster de nouveau la cuisine de Mokthar, écouter les réprimandes de Marie à l’encontre de ceux qui jouaient dans son jardin, trinquer jusqu’à pas d’heure avec Yumi, se faire hurler dessus par le vieux Robert au sujet de sa santé, discuter de longues heures avec Suelto, suivre avec précision les recommandations de Marcel sous peine de mort… Mais malgré le temps qui s’était écoulé sans ces derniers, les retrouvailles furent chaleureuses et ils se retrouvèrent comme si de rien n’était. Un véritable équipage dont les liens semblaient incassables.

Le seul changement résidait dans la présence d’une personne, qui n’était pourtant pas étrangère au groupe, mais dont le statut changea depuis quelques temps. Kardelya. La dernière fois que l’Atout vit la belle blonde fut lors de leur dernier passage sur Parisse. Sa présence ici était donc légitime du fait de sa connaissance de l’île, du contexte et, surtout, de l’enquête qu’elle commença et qu’elle ne put mener à son terme par manque de temps. Avec les éléments qu’elle recueillit quelques mois auparavant, elle pourra aisément relancer son enquête. Ragnar avait une idée bien précise de son rôle dans cette quête et Kardelya n’hésita pas une seule seconde pour participer une nouvelle fois à cette aventure.

Mais par-delà ces raisons, le chef des armées révolutionnaires avait d’autres plans pour cette dernière. Comme son prédécesseur, il devait choisir son Excuse, celle qui le contrôlera et s’assurera que la fonction soit correctement exercée. Elle avait absolument toutes les qualités requises pour cette tâche, aussi ingrate et délicate soit-elle. Cette tâche aurait pu convenir à Suelto Visconti, son bras-droit, mais Ragnar réservait d’autres missions ingrates à ce dernier, aux côtés de Yumi qui était un merveilleux exécutant. Non. Kardelya avait la capacité de prendre du recul, d’analyser les situations et d’agir en conséquence. Sans oublier son professionnalisme avec leuquel elle pourrait défaire son partenaire en cas de préjudice causée à la Révolution.

Dans sa cabine, sombre, embaumée par de l’encens, le musicien jouait de sa guitare en attendant ses convives. Une clope au bec, dont la fumée et l’odeur se mélangèrent avec celles de l’encens, qui parfumèrent ensemble la grande pièce. L’un dissimulant l’autre évitant que cette bonne vieille odeur de tabac froid vienne rendre le passage dans ce lieu insupportable. Décontracté, le musicien portait une chemise blanche déboutonnée, laissant apparaître partiellement ses muscles saillants, pendant que ses pieds arboraient le décor du bureau sur lequel ils étaient posés. Il semblait s’entraîner à jouer l’air d’un morceau qui lui posait quelques soucis, puisqu’il s’y reprenait à plusieurs reprises. Suelto entra le premier, sans frapper, sans être étonné de la posture de son camarade.

- Où va-t-on pouvoir aller avec un type comme toi, s’inquiéta Suelto en constatant la posture de son ami.

Yumi entra ensuite, un verre à la main, terminant en brayant un chant commencé avec les hommes à l’extérieur.

- Ah ! Quel soirée putain ! Faudrait faire ça plus souvent, Rag’ !

L’Atout s’arrêta de jouer et arqua légèrement le sourcil.

- De quelle soirée parles-tu, crétin ? Je n’entends rien d’autre que ta sale gueule depuis tout à l’heure, pesta Ragnar en gardant son attention sur la position de ses doigts.
- Laisse tomber, reprit Suelto, ce con ne se rend même plus compte de ce qu’il fait. Le vieux doc’ s’inquiète.
- Ferme-la, le rouquin, j’suis parfaitement conscient de c’que j’fais, dit l’ivrogne en terminant son verre cul-sec.

Le musicien continua de jouer en laissant les deux abrutis se quereller sans rien dire. Il s’arrêta de jouer quand enfin, la poignet de la porte se tourna, laissant ainsi place à la dernière personne attendue ce soir : Kardelya. Il posa ensuite son élégant instrument de musique au sol, contre le même bureau, avant de reprendre une posture un peu plus sérieux. La cigarette étant maintenant entièrement consumée, comme si tout fut programmé, il pouvait enfin commencer cet entretien.

- Bien. Maintenant que tout le monde est là, nous pouvons commencer, fit-il en guise d’introduction, calmement. Pour commencer, je vous l’annonce, vous travaillerez ensemble tous les trois. Vous avez eu le temps de faire connaissance ?
- Qu’est-ce tu m’racontes !? J’veux m’battre à tes côtés ! Ça fait un bail qu’on n’est pas amusés, dit Yumi en agitant son meitou.
- Ce sera pour une autre fois, Yumi, rétorqua l’Atout. Ici, il n’y aura - je l’espère - plus aucune bataille. Cependant, ce que j’attends de vous, c’est votre disparition.

Yumi se retourna vers Suelto pour avoir une explication, mais Suelto ne réagit pas. En réalité, ce type plutôt intelligent d’ordinaire ne semblait pas réellement comprendre. Se doutant néanmoins qu’il y avait bien des intentions derrière cette phrase.

- Il y a quelques mois, Kardelya a commencé une enquête sur l’implication du Gouvernement dans cette guerre organisée sur l’île. Grosso modo, indirectement, le Gouvernement semble avoir des pions au sein du parti opposé pour attiser la haine.
- Et donc, quel est le plan ? demanda Suelto en fronçant les sourcils.
- Vous serez mes yeux.
- Tes yeux ? Y t’sert à quoi ton haki ?
- De mon côté, je vais ordonner à Bernadette de mettre un terme à cette guerre futile, qui nous cause des tords et affaiblie notre armée qui alimente ses rangs. Nous commencerons les travaux de reconstruction. Mon haki, Yumi, servira à protéger nos hommes qui seront concentrés à un autre labeur, vois-tu. Votre objectif sera d’enquêter sur notre ennemi tapis dans l’ombre, protéger les membres du parti pacifiste, qui risquent d’être victimes collatérales également. J’ai pour ambition de rencontrer leurs représentants. Des questions ou suggestions ?

Le musicien reprit machinalement sa guitare et commença certains réglages, comme si cette pause lui permis de régler une énigme.



Dernière édition par Ragnar Etzmurt le Dim 29 Nov 2020 - 21:22, édité 1 fois
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Parisse... Je suis à la fois heureuse et aussi nerveuse d'y remettre les pieds, après tout ce temps.
Travailler avec Ragnar va vraiment être compliqué, surtout depuis Jotunheim, qui a clairement montré que je n'étais pas à la hauteur des ambitions des grands Révolutionnaires comme lui...
Mais bon, le temps a passé, j'ai pu grandement m'entraîner et j'ai su m'entourer de compagnons dignes de confiance, ce n'est pas comme ma première fois à Parisse ou sur cette prison de glace.

Et puis, avec les dernières et brèves observations que nos sources ont pu nous communiquer depuis le temps, la situation à Parisse devient tellement préoccupante que l'on ne peut décemment pas continuer à les ignorer.
Il s'est passé bien des choses depuis Jotunheim, des rumeurs que j'ai pu entendre sur Ragnar, avec qui j'ai peu discuté depuis le temps. Très clairement, je ne serai qu'une gêne pour lui, dans les profondeurs de cette mer appelée le "Nouveau Monde" et je suis venue sur Parisse un peu à-reculons, même si c'est supposée être sur la "voie calme" de cette mer.

Après avoir accosté sur Parisse, j'ai mis du temps à me remettre dans le bain, à me rappeler les quelques explorations que j'avais faites à gauche à droite, même si le contexte semble d'avantage chaotique encore... mais je ne dois pas non plus m'égarer. Autant rejoindre au plus vite Ragnar et les autres, pour avoir un meilleur compte-rendu de la situation et de pouvoir me synchroniser avec eux. En tant que seconde, je me sens obligée de ramener Skela avec moi, la Tontatta restant dans ma poche de costume lorsque nous sommes en extérieur, pour éviter d'attirer l'attention sur elle. Clairement, je dois garder à l'esprit que j'ai une prime sur moi, aussi "faible" peut-elle sembler être, comparé aux primés du Nouveau Monde, mais je préfère encore "m'entraîner" dès maintenant à rester discrète, si jamais je venais à voir cette prime grimper au fil de mes activités.

J'arrive au lieu de rendez-vous, Skela sortant la tête de ma poche de costume, pour tout observer et écouter attentivement.
J'adresse un signe de la main à tous ces visages connus, mais que je n'ai pas non plus vu depuis un moment:

- Bonjour à vous.

Bien vite, je remarque de nouveau la dispersion habituelle qui anime cet équipage, me donnant tellement l'impression de voir une bande de copains à la taverne... mais bon, avec mon petit équipage, je ne vais pas non plus les juger et leur faire la morale. Et puis bon... ça reste amusant de voir qu'il y a des choses qui ne changent pas...

Restant en arrière pour le moment, j'écoute attentivement ce qui se dit, restant assez évasive, lorsque l'on parle de mes quelques enquêtes, me faisant doucement secouer la tête et balayer l'air d'un rapide mouvement de main:

- Oh non, on ne peut clairement plus se baser sur mes observations, complètement périmées depuis quelques mois.
Trop de choses sont susceptibles d'avoir changées et le fait que la révolution locale soit complètement éclatée et que cette information semble connue d'un grand nombre de civils, ça constitue la principale préoccupation de cette histoire.
Oui, la piste d'une "tierce faction" tirant les ficelles des deux armées se rentrant dedans depuis des semaines, détruisant cette île petit à petit, c'est la piste la plus probable que l'on aie. Mais on ne doit pas non plus tout mettre dans une seule piste: créer une rébellion pareille par le biais de manipulations dans l'ombre, tout en restant si bien caché, il doit y avoir des dizaines de manières différentes de procéder ainsi.
On va sûrement devoir retourner chaque cadavre de cette île, vérifier les approvisionnements de chaque camp, observer comment les dirigeant d'un camp réagissent aux actes du camp opposé... La première chose à faire, c'est d'avoir l'ensemble des informations autour de ce conflit, pour repérer ensuite ce qui pose question et enquêter dessus par la suite.


Je cligne des yeux à quelques reprises, avant de grimacer en baissant la tête... avant de rigoler doucement, en relevant la tête avec un sourire et un clin d'œil crispé:

- Hum... Je vous ai manqué, avec mes tirades interminables?

Erf, ça se voit que je ne les ai pas vus depuis longtemps et que cette opération me tient à cœur, parce que j'ai réfléchi à tout simplement sur le chemin de cette planque...

Je m'éclaircis brièvement la gorge, essayant de me reprendre:

- Hu-hum... Donc...
J'ignore complètement comment marche ce "Haki de l'Observation", mais je ne pense pas que le capitaine puisse tout observer aussi simplement qu'un simple claquement de doigts, surtout qu'il va clairement servir de porte-parole durant cette mission. Il devra d'avantage se concentrer sur les mots qu'il devra prononcer devant chacun, pour éviter d'empirer les choses avec une maladresse mal dite.
Clairement, avec Ragnar, on va attirer l'attention de manière assez importante, donc il faudrait clairement définir les gens qui resteront en arrière-plan, pour protéger les "représentants", tels que Ragnar ou Bernadette. Un camp qui perd l'une de ses principales figures, surtout par le biais d'un assassinat, possiblement public, ça va embraser d'avantage cette île, peut-être pire encore que si tout un quartier avait été bombardé.
Donc, ça paraît effectivement une bonne chose que nous ayons une "diversion diplomatique" avec Ragnar qui sera mis en avant, pendant que d'autres s'occuperont "d'enquêter dans l'ombre". Vu que Ragnar va attirer les figures-clés de ces mouvements et peut-être du gouvernement, il risque aussi d'attirer les ennemis orchestrant tout ce chaos en coulisses.
On servira à la fois de "démêleurs de complots" et aussi de "gardes du corps", si j'ai bien suivi l'idée du capitaine?
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Chacun des trois bonhommes qui écouta Kardelya se rappela par la même occasion les souvenirs de ses longs discours. Dépités, ils la regardèrent avec un sourire niais pour ne pas la contrarier. Un petit bout de femme sortit de la poche de Kardelya, une Tontatta, appartenant visiblement à l'équipage qu'elle s'était construit depuis la dernière fois.

- Oh, si petite chose, comme tu es mignonne, dit Yumi en voulant la caresser avant de se faire becter le doigt.

L'Atout connaissait que de nom cette race et, malgré leur grande bienveillance, il entendit certaines histoires peu racontables à leur sujet. Il eut de brefs frissons. Mais Suelto reprit son calm et redonna un brin de sérieux en approuvant justement les propos de la jeune femme qui vit juste. Ils partaient tous de rien. Tout le travail était à reprendre depuis le début. L’Atout lança une note de sa guitare et son regard se rabattit de nouveau vers ses interlocuteurs.

- Tu as en effet raison, Kardelya. Dieu seul sait comment les choses ont évolué depuis notre passage. On m’a confié que Bernadette mourrait à petit feu, alors la situation est certainement plus préoccupante qu’autrefois.

Il posa son instrument sur le bureau, s’enfonça bien au fond de son siège et croisa les bras en observant le plafond, pensif.

- Foutus chiens du Gouvernement, pesta Ragnar. Le moins que l’on puisse dire est que leur salaire est entièrement justifié. Ils sont bons et redoutables. En plus d’être de bons manipulateurs qui passent inaperçus, ce sont d’excellents combattants. J’en ai gardé un beau souvenir, fit-il en repassant la cicatrice sur son torse.

Il termina son verre de scotch d’un cul-sec, reboutonna sa chemise et se leva délicatement.

- Suelto, Yumi, vous serez dès maintenant sous les ordres de Kardelya. Vous devez en aucun cas être démasqués, et surtout, survivez à cet enfer oppressant dans lequel vous allez devoir enquête. Cette tâche est la plus ingrate qui soit. D’autant plus que, sans vouloir rajouter un poids sur vos épaules, la réussite de ce que nous entreprenons ne dépend que de vous. Mon rôle ne se limite qu’à tenter d’apaiser les tensions.

Le musicien prit une dernière fois le temps de regarder droit dans les yeux ses trois camarades, vraisemblablement prêts et remplis de confiance. Il parlait des agents du Gouvernement, mais ses agents sont également redoutables.

- Descendez. Une trape est reliée aux égouts de la ville. Personne ne nous verra quitter le navire.


•••

Ragnar sortit de sa cabine sous ce ciel bleu, brusqué par les rayons du soleil dont il perdit l’habitude en restant enfermé dans sa tanière. De valeureux camarades révolutionnaires la saluent. Maria et son petit nez aquilin se rapprochent de ce dernier en tapotant sur sa montre.

- Tu es en retard. Bernadette t’attend dans ses quartiers. On ne fait pas attendre une dame, Rag’. Combien de fois vais-je devoir te le dire ?
- Tu sais bien que je bosse beaucoup maintenant. Ménage-moi un peu, veux-tu ?
- Mieux vaut être sourd que d’entendre tes sornettes ! Allez, file !


Comment est-ce qu’une femme si fragile peut-elle être aussi effrayante ?, pensa l’Atout en se grattant la tête. Il quitta le navire et dirigea donc dans les quartiers de la présidente du parti républicain de la révolution. Quel nom odieux. Les infiltrés - s’il y en avait - et les espions purent aisément noter la présence de ce dernier sur ce côté-ci de la ville. Rien de bien étonnant, bien que la nouvelle puisse avoir l’effet d’une bombe. Les gardes le laissèrent pénétrer le tas de ruine qui se trouvait être le QG du parti, puis il continua jusqu’au bureau où elle se trouva. Du moins ce qu’il restait, aussi bien du bureau que de la représentante.

- L’Atout Ragnar va entrer, dit un homme à voix haute.
- Qu’il rentre, qu’il rentre, rétorqua une voix fatiguée.

Ragnar sentit de suite que l’atmosphère n’était pas des plus agréable.

- Bernadette, lança timidement le jeune homme.
- Tiens, Ragnar, la Cause se décide enfin de s’intéresser à notre sort… Tu comptes rester un peu ou repartir une nouvelle fois pour des raisons… Comment puis-je qualifier cela ? Des raisons futiles ? Il fallait en priorité sauver le soldat Jonas Mandrake des portes de la mort. Pourquoi ? Tu peux m’expliquer, Ragnar ? Pourquoi sauver un type qui, finalement, n’est même pas capable de reprendre son poste. Pire encore, son sauveur devient son successeur. Était-ce là tes desseins dès le départ ? Honnêtement, j’approuve ton génie. Je ne te croyais pas aussi malin. Bref, conclut-elle en reprenant une posture décontractée. Que viens-tu faire ici ? Si ta présence s’avère être aussi inutile que la dernière fois, tu peux repartir dès maintenant.

Le musicien laissa un moment avant de reprendre. La réaction de sa collègue pouvait sembler excessive mais légitime. Cette guerre l’épuisait et elle n’en voyait pas le bout.

- Bernadette, reprit l’Atout d’un air sérieux, je viens te libérer de ta souffrance. C’est terminé. Demande à tes hommes de l’annoncer partout autour d’eux. La République Patriotique de Parisse n’existe plus.
- Pardon ?

- Tu as très bien compris.
- Alors quoi ? On arrête tout à ton bon vouloir ? Tous ces sacrifices pour rien ?
- En quelque sorte, Nenette. Ou plus exactement pour éviter d’autres sacrifices inutiles. J’ai besoin d’hommes ailleurs, pas ici où la situation stagne depuis de très longs mois.
- Alors… Nous avons perdu ?


Le musicien esquissa un sourire.

- Hm… Pas exactement, non. Mais nous aurons le temps d’en reparler. Allez, reprends-toi ma vieille, on a une déclaration à faire.


•••

La nouvelle ne prit pas longtemps à se répandre dans la ville entière. Elle fut reçue comme une grande victoire pour certains, comme une triste défaite pour d’autres. Cependant, certains hommes sages s’interrogeaient suite à ces décisions inattendues de dissoudre ce parti aussi brutalement. Ces hommes sages, Ragnar leur laissait le temps de ruminer et de se torturer l’esprit avant de les rencontrer dans un cadre un peu plus apaisé. Pour l’heure, préparer la suite et accorder du repos à Bernadette et ses soldats semblaient être la meilleure chose à faire. Cette fois-ci, du temps, il en avait et il comptait bien s’en servir.

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Skela fait un bref signe de la main devant l'équipage de Ragnar et je tends la main devant moi, pour qu'elle bondisse dessus:

- Je vous présente Skela, navigatrice et seconde de mon équipage.

- Bonjour! Ravie de rencontrer enfin le capitaine de ma capitaine! Elle n'arrête pas de me parler de vous et ça me rendait d'avantage impatiente de vous rencontrer!

Je rougies doucement en détournant la tête; je parlais tellement de lui en privé? Je n'ai pas l'impression... ou alors si?

Je m'éclaircis la gorge:

- Très clairement, dans un chaos pareil, on ne peut pas se permettre d'en rajouter en échouant dans nos entreprises ou en semant d'avantage le chaos et la discorde. Nous devons nous coordonner au maximum avant d'entreprendre des actions d'envergure, pour limiter au maximum les retombées négatives.

Je tourne la tête vers les deux comparses de Ragnar, en haussant un sourcil. Je ne suis pas encore habituée au travail de groupe et j'essaie de minimiser la casse du mieux que je peux, mais là je pense qu'un peu de renfort, surtout connaissant la puissance de l'équipage de Ragnar, je ne vais pas non plus refuser ça.

- Hum...
La nouvelle de la reddition de Bernadette et son groupe va clairement faire réagir en face et on va devoir être attentifs aux mouvements ennemis, savoir s'ils vont se concentrer sur leur propre reconstruction ou au contraire enchaîner sur un assaut sur un groupe semblant désorganisé et en difficulté.
Déguisons-nous et fondons-nous dans la masse: les ombres risquent déjà d'être occupés par l'adversaire qui va surveiller d'avantage la population, pour guetter leur réaction suite à la nouvelle de l'abandon de l'ennemi.
Je ne dis pas que nous devons faire un maximum de raffut, mais que nous devons nous confondre avec la populace, comme si nous avions toujours été là, tout en guettant la moindre information. D'accord?


+++

Deux heures plus tard, en adéquation avec Ragnar et Bernadette, nous avons tous trois rejoint la foule ambiante, grimés pour l'occasion en simples badauds.
Terminé pour moi le costume et les cheveux blonds bien visibles; je me suis grimé en pêcheuse revenant du marché, avec un tablier empestant le poisson, un large chapeau de paille recouvrant mes cheveux attachés en chignon en dessous et des vêtements quelconques.
De son coté, Skela est sous sa forme animale, un chaton roux déambulant sur les toits environnants, observant les alentours et surtout les ruelles, pour détecter d'éventuels espions gouvernementaux.


Dernière édition par Kardelya Koshin le Mar 8 Déc 2020 - 21:41, édité 1 fois
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Dès le lendemain de l’annonce, tous le soldats envoyés au front, dans diverses missions de propagandes ou d’espionnage, rentrèrent épuisés au « bercail ». La nouvelle fit le tour de l’île, provoquant évidemment la joie du parti adverse qui organisa une sorte de « fête nationale » à l’annonce du retrait du parti révolutionnaire. Cela entraîna évidemment quelques mouvements dans les rangs révolutionnaires, mais Bernadette tempéra immédiatement les ardeurs de certains. La fin de la guerre fut annoncée et il fallait maintenant se diriger vers l’avenir. Tous attendirent là, regroupés dans ce qui, autrefois, devait être une grande, alors que Ragnar et Bernadette se présentèrent en hauteur sur des gravats entassés.

- Chers camarades, chers frères, chères soeurs, chers campagnards, je m’excuse, commença par dire l’Atout. Je m’excuse pour le temps que j’ai mis pour revenir. Je m’excuse de vous avoir laissé pendant tout ce temps à continuer cette guerre aussi meurtrière qu’inutile Je m’excuse d’avoir pris, ce jour, la décision de mettre fin à cette guerre. Notre guerre. Cette décision peut être un soulagement pour certains, une déception pour d’autres. Je comprends entièrement vos ressentis. Je les ressens même actuellement. Néanmoins, regardez maintenant vos frères, vos soeurs, vos femmes, vos enfants, et dites-moi si cela vaut encore la peine de se battre pour un parti que le pays ne souhaite pas. Nous ne sommes pas des dictateurs, nous n’imposerons pas nos idéaux.

Des chuchotements, puis des réclamations éclatèrent. La cheffe de la RPP voulut stopper les siens, mais Ragnar lui fit signe de laisser faire. Eux aussi étaient frustrés. Alors Bernadette se retourna vers l’Atout.

- Le Gouvernement Mondial a donc remporté cette bataille. C’est ce qu’ils pensent tous en ce moment. C’est de là que provient leur colère, insista discrètement la princesse en tirant le bras de Ragnar.

Tandis qu’il fut relativement apaisé et serein lors de sa première intervention, son visage changea et devint radicalement plus fermé.

- Si vous pensez que le Gouvernement Mondial a remporté cette guerre, camarades, c’est donc que vous n’avez rien compris, dit-il fermement. Rien du tout. Notre mission sur Parisse n’est pas terminée pour autant. Il va falloir reconstruire ce que nous avons détruit. Demain, à l’aube d’un nouveau jour, notre hargne sera dictée par les coups des pelles, des pioches et des marteaux. Ingénieurs, charpentiers, architectes, préparez-vous. De grosses journées nous attendent.

Il laissa ainsi la foule dans l’incompréhension générale. Les plus fervents d’entre eux croyaient éperdument en cet homme et rentrèrent se nourrir avant de dormir un nombre d’heures suffisant. Les autres, seuls, décidèrent de suivre le mouvement. Bernadette, sceptique, saisit Ragnar par l’épaule, mais n’attrapa finalement rien car ce dernier liquéfia la zone visée par la dame.

- Je t’écoute, dit-il.
- J’attends des explications. Ils méritent de savoir.
- Évidemment, Nenette. Ils attendront. Tout comme toi. Difficile de faire confiance à un homme qui t’a lâchement abandonné, hein ? Mais il va falloir.

Elle serra les poings et vit son corps entier trembler de colère. Elle lui en voulait et ne décolérait pas. La situation lui déplaisait tant elle ne savait rien.

- Va donc dormir, reprit le musicien. Les penseurs auront besoin de tes bras pour réaliser leurs desseins.

Elle changea ses talons de direction et s’en alla en direction opposée à celle de son allié.

- Je ne te décevrai pas une seconde fois, Nenette.

Elle s’arrêta un instant.

- Ils disent tous ça et finissent toujours par nous décevoir, dit-elle avant de reprendre la marche.

Les femmes, merde. Elles auront ma peau un jour, pensa Ragnar en se grattant la tête. Il pensa aussi aux remontrances de Maria quand il lui racontera cette scène. Ainsi s’acheva cette journée riche en émotion. Les rangs étaient plus fragiles que jamais, partagés, voire divisés si la situation perdurait. Mais le lendemain, à l’aube d’un renouveau, ce qu’ils virent tous les rapprocha un peu plus que la veille. Leur chef, l’Atout qui occupait actuellement le rôle de chef des armées, frappait et détruisait à grands coups de marteau tout ce qui n’était plus utile à la reconstruction. Bernadette suivit le mouvement, pelle à la main, en envoyant les débris dans une charrue qui transposera le tout un peu plus loin. Étonnés, il fallut quelques secondes aux personnes présentes pour se mettre au boulot.

Ils l’ignorèrent tous mais la première partie du plan commença.




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C'est toujours surprenant d'entendre Ragnar prendre ainsi la parole, avec autant de maîtrise, quand on le connaît aussi bagarreur et relâché la plupart du temps. Après, j'imagine que je n'ai juste pas appris à suffisamment le connaître...
Laissant la surveillance des environs à Skela, je me concentre sur la foule ambiante, essayant de détecter quelque chose qui sorte de l'ordinaire, durant le discours de Ragnar. Bien vite, les réactions se font savoir et il y a un gros mélange de frustration et de colère, quelques personnes qui expriment un semblant de soulagement... On sent bien que cette guerre pèse bien lourd sur les épaules de pas mal de monde et ça m'interroge d'avantage sur la raison de notre présence ici et surtout du fait que nous aurions pu peut-être intervenir plus rapidement? Est-ce que nous aurions eu droit au même accueil ou pas? Difficile à dire... mais à coté, je n'étais pas non plus la même il y a quelques semaines et ça n'aurait peut-être pas donné la même chose, concernant ma propre motivation ou confiance en moi-même.

Sortant de mes pensées et interrogations, je hausse un sourcil, remarquant un étrange décalage avec quelques badauds, qui réagissent avec deux trois secondes de retard sur les réactions majoritaires du public autour d'eux. Après, ça reste assez "flou" comme raison de les interpeller; ils sont peut-être juste lents à la détente ou épuisés par les combats récents... Mais ça ne m'empêche pas de les surveiller d'avantage, au cas où.

Au milieu du brouhaha suivant la fin du discours de Ragnar, j'entends un fracas dans un coin de la scène, suivi d'un miaulement que je reconnaitrai entre mille: Skela!?!
Je fends la foule et rejoins l'endroit d'où vient ce qui s'apparentait à une bagarre et je retrouve le chaton roux avec des lambeaux de vêtements légèrement sanguinolents autour d'elle, se léchant une plaie sur la patte avant droite.
Je la saisis et la serre doucement contre moi, m'enfonçant un peu dans la ruelle, pour éviter les oreilles indiscrètes des badauds environnants, qui s'éparpillent bien vite, en voyant juste une poissonnière avec un chat dans les bras.

- Skela, que s'est-il passé?

- Mya... Je... Il y avait deux types dans la ruelle, avec un qui prenait des photos avec un Escargophone photographique. Par réflexe, je leur ai sauté dessus et j'ai cherché à faire tomber l'appareil de la main du premier, mais le second a vite sorti une matraque et je me suis désengagé, me prenant un coup sur la patte.
Je ne voulais pas attirer d'avantage l'attention, mais ils ont tout deux pris leur jambes à leur cou et sont partis dans le dédale de ruelles.


Observant toujours les environs, alors que la Zoan m'avait livré son rapport à voix légère, je soupire longuement: ils n'auront pas mis longtemps à "prendre contact" avec nous.
Je n'ai pas de preuves concrètes de l'implication de la Marine jusqu'à présent, mais la coïncidence est trop grosse, seulement le lendemain de notre arrivée sur Parisse.
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Dans la journée, l’Atout reçut un rapport inquiétant mais prévisible de la part de Kardelya. Sa camarade Tonttata fut agressée au moment du discours de Ragnar. Cela aurait pu être pire mais rien de grave. Tout cela était prévisible. Des types tentant de prendre des photos d’un rassemblement ennemi, oui. C’était logique. Le contraire aurait même été étonnant. Il était temps de passer à la suite des opérations. Les troupes bossaient étonnamment bien. Cela couta à Ragnar une journée de labeur pour montrer la direction, mais ce fut nécessaire pour mobiliser l’ensemble des soldats. Il devra réitérer cet effort dans la durée.  

   - Nenette ! Il est temps de contacter notre ami, Bernado, le cuistot perché dans sa montgolfière, dit Ragnar en ouvrant la porte du bureau où se trouvait la princesse.  

   - Hubert, reprit-elle calmement. C’est Hubert Rabeau.  

   - Un détail d’une importance que je qualifierai de nulle.  

Elle plaqua désespérément la main sur son front. En réalité, ce genre de détail pouvait avoir son importance dans des discussions diplomatiques.  

   - J’aimerais m’entretenir avec lui. Enfin, non. Il ne m’intéresse pas des masses. Son rôle, par contre, oui.  
   - Mais encore, demanda Bernadette, cette fois-ci avec un regard un peu plus intéresse.  

   - Je souhaite m’entretenir avec les porte-paroles de la République Pacifiste : Louise Barnaud et Pierre Gabroche.  

  - Tu retiens les noms de ceux qui t’arrangent, dit-elle en marmonnant. T’es quand même au courant qu’on a enfermé l’un d’entre eux avant de le libérer ?  

  - Oui... Un détail assez compromettant qui fait tâche. Voyons déjà s’ils acceptent de nous rencontrer.  

Ainsi, Hubert Rabeau fut contacté pour organiser un entretien. Le contacter n’était en rien difficile étant donné que son rôle consistait justement à apaiser les partis. L’initiative de Ragnar devait presque le soulager. En attendant, l’Atout saisit la pelle qui était posée contre l’un des murs de la pièce et repartit bosser à l’extérieur. Il était encore tôt le matin et les premiers ouvriers arrivèrent également. Quelques serrages de main, des discussions diverses et variées, un café, une clope, et la machine se relança de plus belle.  


•••


Quelques heures plus tard, fin de journée, au chantier.  


  - L’Atout Ragnar Etzmurt est demandé au bureau de Bernadette Girac, hurla un émissaire.  

Ragnar annonça la fin de la journée de travail et partit aussi vite que possible rejoindre sa camarade. Il avalait les marches par quatre et puisait dans ses dernières forces pour y arriver le plus rapidement possible. Lorsqu’il ouvrit la porte, l’As l’attendit le bras tendu avec un papier au bout des doigts.  

   - Ne perds pas un instant, dit-elle en esquissant un léger sourire. Tu as quelques minutes pour te rendre à l’endroit indiqué.  

L’endroit n’était pas inconnu à l’Atout. Ce fut à ce lieu que la première réunion avec le parti ennemi, celui indirectement dirigé par le Gouvernement, eut lieu.  La discrétion était de mise, alors il chopa un drap et s’enroula dedans pour se dissimuler le plus possible. La Serre était évidemment un endroit privilégié pour s’entretenir. Situé au Nord de la capitale, la route n’était pas longue – du côté des révolutionnaires - pour y accéder. Certes, ces derniers ont baissé leurs armes, mais ce n’était pas forcément le cas de l’autre côté de la ligne de front, alors inutile de prendre des risques et Hubert Rabeau eut le mérite d’y penser. La vigilance était évidemment de mise. Ragnar se savait épié, harcelé par des espions envoyés par un inconnu, si bien sûr l’on ne voulait pas faire de suppositions hâtives. Il emprunta des chemins obscurs, étroits, au travers desquels il parvint à se repérer grâce à ses sens extrêmement fins et développés. Son empathie ne détecta plus personne. Cela ne l’épargnait pas pour autant, il le savait. A l’abri des regards, il put utiliser son fruit et se liquéfier pour suivre les canaux des égouts. Lorsqu’il lui sembla arriver à la Serre, il détacha son œil qu’il transforma en petite souris, afin de vérifier que l’entrée fut sûre et sans personne pour le voir user de ses pouvoirs. Un serpent sortit discrètement de la bouche, se dirigea vers les grands buissons de ce parc d’exposition, puis Ragnar en ressortit entièrement et normalement constitué.  

   - Ah ! Ragnar, fit Hubert. Nous arrivons tout juste également. Ravis de tous pouvoir vous retrouver en ce lieu si apaisant.  

La tension était tout sauf apaisante. Les révolutionnaires étaient clairement très mal vus et Ragnar le ressentait très bien dans les émotions émises par les deux représentants du parti pacifiste. L’entretien risquait d’être assez houleux mais l’Atout s’y attendait. Tout comme l’accueil précédemment accordé par sa camarade, Bernadette Girac. Il ne s’attendait pas être accueilli en héros, bien au contraire.


Dernière édition par Ragnar Etzmurt le Ven 15 Jan 2021 - 21:27, édité 1 fois
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La première journée de travail sur Parisse est assez intense. Mine de rien, la bousculade dont a été victime Skela m'a pas mal remonté et je me rends compte une fois de plus de la différence notable de travailler en équipe, avec le fait que je travaille d'habitude toute seule.
Même si la Tontatta n'a pas eu de grosses blessures, c'est surtout le principe de "laisser" un coéquipier se faire blesser qui me dérange... Certes, je ne peux pas avoir des yeux partout et ce serait contre-productif que de sans arrêter surveiller mes partenaires, comme si c'était des enfants sur le point de tomber d'une falaise... mais ça me stresse pas mal...

Finalement, j'essaie de me centrer sur autre chose et je profite d'une réunion en milieu de journée, pour informer Ragnar d'un détail.
Pour illustrer mes propos, je demande à Skela de se transformer en forme hybride, puis en forme animale, devant Ragnar et son équipage, la naine expliquant ses pouvoirs dans la foulée:

- Je possède le Zoan du chat, sachant maîtriser et ma forme hybride et ma forme animale, pour me faufiler partout où je veux.

De mon coté, je ne peux m'empêcher de grimacer et réajuster un peu le petit bandage autour de son bras, qui devrait disparaitre dès demain:

- Avec le gouvernement mondial présent sur l'île, je préfère limiter au maximum l'utilisation de l'Escargophone, au cas où ils auraient l'idée d'intercepter des communications.
Donc, je vais tâcher de faire mes rapports par le biais de Skela, en essayant de quand même lui faire faire le moins de trajets possibles.
Il faudra juste éviter que les gens entendent un chaton vous parler et qu'ils soient donc trop proches de vous.


+++


Quelques heures plus tard, j'apprends que Ragnar est parti pour un mystérieux rendez-vous.
Pour ma part, je suis déjà bien installée au milieu des quartiers "ennemis", au moment où je reçois ce message.

Je suis vêtu de la chemise grise cachée d'habitude sous ma veste de costume, d'une longue jupe noire aux motifs écossais, de mes bottes noires habituelles et d'un chapeau enfoncé sur ma tête, camouflant mes cheveux blonds relevés et attachés en chignon.
J'arpente les rues, en mode purement "badaud", m'arrêtant de temps à autre pour m'incruster dans une conversation, l'espace de quelques phrases, stoppant parfois devant une vitrine pour observer les produits mis en vente. Clairement, je veux jouer la civile de base, pour prendre la "température" auprès de cette population, qui parle évidemment beaucoup de la reddition de l'armée révolutionnaire.

Globalement, "l'autre coté" est partagée entre le soulagement de voir arriver la fin des combats, mais aussi et pas mal le mépris auprès de l'ennemi.
J'entends à deux reprises des histoires sur des familles fragmentées, des anciens voisins se retrouvant maintenant l'un contre l'autre sur le champ de bataille...
Il n'est pas rare que des disputes éclatent en ville, finissant à trois reprises en une grande cohue, rapidement dispersée par la garde locale... qui est bien nombreuse, je trouve. Il y a beaucoup de patrouilles à gauche à droite et ils sont chaque fois trois ou quatre, fusils en main et avec l'air bien nerveux.
Heureusement, la nuit commence à tomber et mon "déguisement" est suffisant, pour que je ne me fasse pas remarquer, en esquivant au bon moment les patrouilles, en entrant dans une boutique ou tournant la dos pour observer une vitrine.

J'ignore ce que fait Ragnar, avec son entretien, mais ça reste quand même préférable que l'on puisse prendre la température à gauche à droite, moi des populations et lui des grandes figures révolutionnaires. Après, je ne sais pas trop ce que ça va donner, de leur parler seulement quelques heures après l'annonce retentissante de l'arrêt des combats, alors que les esprits doivent encore être bien échauffés, mais bon, c'est l'opération de Ragnar, pas la mienne.
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Aucun des trois hommes, séparés par Hubert, ne voulut prendre la parole. L’ancien cuisinier, comme à son habitude, tenta d’apaiser les tensions avec quelques blagues plutôt mal tournées. Finalement lassé par ce silence, Ragnar mit fin à ce calvaire et entama les discussions.  

- Merci d’avoir accepté l’invitation. Vous n’étiez pas obligés et je vous en suis reconnaissant.  

Hubert, coupé dans son élan, fut néanmoins heureux que la situation se débloque.  

- Avec le retrait de vos armées et la suppression de votre parti, il nous semblait évident d’écouter ce que vous aviez à nous dire. Vous faites un grand pas, si ce n’est tous les pas, pour mettre fin à cette guerre, dit Pierre Gabroche en restant stoïque.  

Louise Barnaud acquiesça à son tour.  

- Néanmoins, je souhaitais discuter avec vous de nos idées communes, des perspectives d’avenir de l’île. Il reste actuellement votre parti et celui de la RIP, qui luttent encore pour le bien de ce pays. Des discussions ont-elles été amorcées ?

- Pas le moindre du monde, pesta Barnaud.  

- En ce qui me concerne, reprit Ragnar, je suis absolument pour l’égalité de la Ville et de la Campagne. J’estime que l’une ne peut pas vivre sans l’autre. D’autant plus qu’en développant la Campagne, les moyens agricoles, Parisse pourra vivre en autarcie sans avoir besoin de l’aide de personne, voire même, à long terme, de proposer de vendre à l’international. Fermer les frontières avec le monde extérieur et détruire les campagnes de l’île n’ont jamais été nos intentions.  

- Pourtant, reprit Gabroche, je crois avoir été enfermé par vos hommes. Heureusement que le peuple a réagi sans quoi j’y serais probablement encore.  

L’Atout se mordit les lèvres. Son interlocuteur visait juste.  

- Légère erreur de jugement, rétorqua Ragnar en esquissant un doux sourire. Ma camarade, Bernadette, a été un peu dépassée par la situation. Et j’en suis d’ailleurs entièrement responsable, je l’ai laissé gérer seule cette sombre affaire en connaissance de cause. Vous n’êtes évidemment pas considéré comme un danger et cela ne se reproduira pas, du moins, pas de notre côté.  

- Alors tout est merveilleux ? Vous êtes d’accord avec notre vision des choses et obtempérez sans problème. Qu’est-ce que tout cela cache, Ragnar ? Nous connaissons les rumeurs à ton sujet et tu es loin d’être un homme qui abandonne à la première difficulté.  

- On en dit des choses à mon sujet, mais la Révolution ne souhaite pas imposer un pouvoir par la force. Si un peuple ne veut pas de nous, on s’en va. Toutefois, je reste assez étonné de voir qu’un peuple aussi libre, qui prend les armes sans la moindre hésitation pour retrouver sa liberté, accepte sans broncher que le Gouvernement les soumette à lui. Vous voyez très bien où je veux en venir et je n’en dirai pas davantage sans vous fournir de preuve.  

- Concrètement, qu’attends-tu de cet entretien ? Nous avons vraisemblablement des décisions politiques communes, une vision commune pour cette ville et tu as prouvé ta bonne en te retirant complètement... Alors, dis-nous, Ragnar Etzmurt, que projettes-tu ?  

A cette question, les visages se durcissent et les tensions qui, jusqu’ici s’éapaisèrent, redevinrent tendues.  

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Après avoir exploré "l'autre coté", je suis rentré à la planque, histoire de me reposer un peu et d'échanger avec le reste de mon équipage.
En rentrant, je remarque bien vite Segawa et Mibu en train de manger autour d'une table, la femme-poisson et le jeune blondinet tournant tous deux la tête vers moi, lorsque je claque doucement la porte.

- Salut cap'taine! Alors, quoi de neuf?

- Pas grand chose Segawa. Globalement, c'est comme on pouvait s'y attendre, suite aux annonces faites cet après-midi: le peuple de l'autre camp est ravi de voir les armes se taire et l'ennemi se "rendre" et les autorités semblent plus prudentes qu'auparavant. Après, ce dernier point est plus une comparaison par rapport à l'ambiance dont je me souviens vaguement, lors de notre première enquête.

Le jeune musicien se tourne et acquiesce d'un signe de tête:

- C'est vrai qu'il y a une sécurité plus importante qu'auparavant.
J'ai fait quelques concerts à gauche à droite et j'ai remarqué énormément d'uniformes et d'après ce que j'ai pu entendre, ce n'était pas comme ça la veille ou plus tôt encore. Même pendant les premiers conflits, l'armée et la police étaient d'avantage regroupés près des lignes de front que maintenant, où ils sont d'avantage éparpillés.


Je croise les bras en levant les yeux au plafond, songeuse:

- Ils sont plus prudents que durant les conflits. Ils pensent peut-être que l'on veut endormir leur méfiance, en "prétendant" arrêter les combats, pour attaquer plus tard ou d'une manière différente.
Dès le début, je me doutais que la pilule serait difficile à avaler, d'un camp comme dans l'autre, surtout avec notre retour, si longtemps après notre premier passage et après une telle dégénérescence dans cette guerre. Ils n'ont clairement plus la même confiance en nous qu'avant.
Mais à coté, on ne peut pas les laisser tomber une nouvelle fois ou d'avantage laisser traîner les choses.


Je fais les cent pas machinalement, en essayant d'assembler les quelques pièces de puzzle qui jalonnent mon esprit, même si ça reste très mince et que je ne pense pas avoir de début de piste.
Chaque camp se regarde en chien de faïence et c'est peut-être trop tôt pour avoir une idée claire et précise de la réaction de chaque camp, suite à l'annonce de notre "reddition".
Dois-je continuer à me mêler à la population, d'un coté comme de l'autre, pour glaner des informations éparses? Dois-je prendre d'avantage de risques, en essayant d'infiltrer des places fortes ou des endroits susceptibles d'abriter de meilleurs informations, plus pertinentes que de simples conversations de badauds? Si je me faire repérer et reconnaître, ça risque de retomber sur Ragnar, qui veut clairement se mettre en avant dans les pourparlers et je voudrais éviter de faire capoter l'opération aussi bêtement que...

Une violente explosion fait trembler le bungalow dans lequel nous sommes, nous faisant sursauter tous les trois.
Mibu porte la main près du holster contenant son pistolet et Segawa tourne la tête à droite à gauche, sa main empoignant machinalement sa lance.

- Une attaque?!?

- Un accident de chantier peut-être? Ils font beaucoup de réparations dans les environs, suite à la guerre...

Je grince des dents, avant de me ruer vers la porte:

- Il n'y a qu'un moyen de le savoir!

J'ouvre la porte et sort rapidement en sautant les quelques marches, pour me retrouver en plein chaos.
Je remarque bien vite des flammes dévorer le coin d'un entrepôt, avec un gros trou dedans, des gens cavaler tout autour, criant à tue-tête, créant un brouhaha qui m'empêche d'entendre et comprendre ce qui se dit.
La nuit est déjà bien tombée et c'est compliqué de se repérer... mais je parviens finalement à repérer un groupe de sentinelles se diriger en courant vers le grillage entourant le périmètre.
J'utilise Cloche-Air pour m'élever de quelques mètres, tout en "courant" au plus vite, pour avaler les dizaines de mètres me séparant d'eux, atterrissant à leurs cotés.

- Où allez-vous!?! Qu'est-ce qu'il se...

- Miss Koshin! Quelqu'un a fait exploser une bombe dans l'entrepôt! On a vu quelqu'un se faufiler à travers ce trou, pour s'enfuir plus loin!

Tournant la tête vers l'endroit qui m'est indiqué du doigt, je remarque effectivement un trou dans le grillage, permettant à une personne de taille moyenne de s'infiltrer en rampant. De l'autre coté de la place séparant notre camp des autres habitations, je vois quelques badauds sortir de chez eux ou jeter un regard par leurs fenêtres... et je remarque finalement une silhouette sombre bousculer quelqu'un et s'engouffrer dans une rue adjacente:

- Là-bas! Il s'échappe!
SKELA! On a besoin d'aide ici!
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- Ce que j’attends ? Comment l’exprimer poliment ? Fit-il en se tenant le menton et en levant les yeux au ciel. C’est très simple. J’attends simplement que le peuple élise son président avec toutes les informations nécessaires en sa possession. Ce que j’attends, c’est que vous autres, qui avez maintenant un rôle bien plus important depuis notre retrait, prenez un peu les devants.  

Les deux représentants pacifistes baissèrent la tête. Ragnar ressentit la peur en eux.  

- C’est une blague que vous me faites ? Après tout ça, vous comptez rester les bras croisés à regarder la RIP s’imposer aisément. Votre Campagne, vos champs, vos terres agricoles et vos élevages n’existeront plus avec ces types. Ils vont développer l’industrie, comme ils ont commencé à le faire, exporter à fond dans le monde entier pour s’enrichir. Les esclaves vont commencer à venir par flottes entières pour faire marcher les machines à moindre coût. Eh oui, jeunes gens, va falloir songer à ouvrir les yeux. Enfin, que dis-je, vous êtes évidemment bien conscients de tout cela.

- Et comment veux-tu que l’on fasse ? Le peuple est manipulé par la RIP, plus encore depuis votre départ et, en ce qui nous concerne, nous ne sommes pas assez puissants et nous ne voulons pas user de la violence pour renverser la situation.  

-Gabroche, dis-moi simplement une chose, quel peuple serait assez fou pour accepter que des marchands d’esclaves, des assassins, des manipulateurs, des types capables de s’allier aux pires criminels pour éradiquer les révolutionnaires, puissent un jour les diriger ? Je ne vous demande qu’une seule chose : continuer de vous opposer à la RIP, de prêcher la bonne parole, de soutenir les agriculteurs. Vous avez le soutien de la révolution entière présente sur l’île. Retenez bien cela, Barnaud, Gabroche, nous sommes dans le même camp. Cette merveilleuse cité qui alliait les plus grands intellectuels, artistes, ingénieurs, agriculteurs va renaître de ses cendres. Ce ne sont pas ces riches entrepreneurs qui doivent reprendre les rênes !  

Les discussions prenaient en longueur et la nuit tombait sur ce merveilleux jardin resté intact malgré la guerre. Néanmoins, un élément vint soudainement mettre un terme à cette entrevue. Une énorme explosion fit vibrer les murs en verre de la serre. L’Atout vit la terreur dans l’expression des visages de ses deux interlocuteurs. Seul Hubert resta relativement calme malgré son regard inquisiteur en direction de Ragnar.

- Qu’avez-vous fait Ragnar ?! Questionna Gabroche, tétanisé.

- Salopard ! Truand ! Tu nous as trahi ! Hurla Barnaud sans relâche.

Ragnar questionna ses sens et son empathie pour détecter d’éventuelles intrusions. Rien. Il ne sentit rien.  

- Le timing est trop bien trouvé pour être un hasard, dit l’Atout en esquissant un vilain sourire. Madame, Monsieur, bien qu’il soit facile de m’accuser et de m’insulter, je crois pouvoir affirmer que vous avez soit été suivis, soit que l’un d’entre vous est une taupe.  

- Comment oses-tu !?  

Le révolutionnaire ignora cette dernière intervention. De toute évidence, il fallait laisser le temps à chacun de se remettre de ses émotions. Il localisa également le lieu de l’explosion.  

- Hubert, je te laisse te charger du rester, l’attentat a lieu dans nos quartiers. Je dois m’assurer qu’il n’y ait pas de victime.

A cette annonce, chacun se calma mais personne ne put dire quoi que ce soit, revenir sur sa parole, car l’Atout se dirigea d’un pas rapide vers la sortie. Il comprit évidemment les vives réactions des deux représentants. C'était la réaction recherchée par l'ennemi et il eut la patience de ne pas rentrer dans ce jeu. Les convives étaient donc ramenés dans leur quartier par le cuistot. Placé sous une bouche d’égout, l’Atout se liquéfia et disparut sur le champ.  

•••


Un grand serpent fait d'encre apparut à la sortie un tuyau de canalisation, tout juste à côté de l'As, qui ne fut pas spécialement surprise. Le dit serpent se matérialisa de nouveau en forme humaine, prenant naturellement l'apparence de Ragnar.

- Bernadette ! Quelle est la situation ?  

- L’un de nos entrepôts situés au sud du quartier, rétorqua Bernadette. Fort heureusement pour nous, aucune perte. Quelques blessés mais aucun pronostic vital est engagé.  

- Qu'est-ce qu'il y a dans cet entrepôt ?

- Rien d'indispensable à présent. Simplement notre réserve d'armes, mais comme nous ne sommes plus en guerre. On ne savait justement pas quoi en faire, alors ça tombe bien.

Ragnar fut assez étonné par la réaction extrêmement calme de sa camarade. L'ironie de sa réponse l'interpella.  

- Ne me regarde pas comme ça, fit-elle agacée. Ce n’est ni la première fois ni la dernière fois que nous sommes attaqués alors que nous n’agissons pas. Depuis que tu es partie, la situation s’est dégradée. Les attaques sont incessantes, on s’essouffle.

Il se contenta de tapoter son épaule pour lui signifier son soutien. Des gestes valaient parfois mieux que des mots. Quand Bernadette, les yeux fermés, apaisée par le geste de son camarade, les rouvrit finalement et constata que ce dernier n’était plus là. L’Atout se rendit à l’endroit de l’attentat. Sur place, il y retrouva Suelto qui coordonna les opérations de sauvetage des victimes et celle pour éteindre le feu. Yumi, lui, se contentait de fumer sa clope en observant le tout.  

- Chef ! Dit Yami en l’apercevant. Kardelya est partie à la poursuite des suspects. Suis-je autorisé à la rejoindre et détruire tout ce qui est suspect ?  

- Encore mieux, on va y aller ensemble.  

Un frisson parcourut le corps entier de Yami qui ne put s’empêcher de sourire.  Suelto était consigné à remettre de l’ordre dans le quartier, tandis que Ragnar et son fidèle compagnon partaient rejoindre Kardelya dans son entreprise. Grâce à ses sens développés, à l’instar d’un chien, Ragnar flairait l’odeur de son Excuse pour la rejoindre. Sans un mot, il pointa du doigt une cible à Yami, qui accéléra le rythme aussitôt. Il s’agissait de Kardelya qu’il rejoignit, non sans effort, après une longue course. L’Atout s’était dissimulé dans l’obscurité profonde, quelque part, en hauteur ou dans les tréfonds de la rue, à observer patiemment la situation. Il était prêt à intervenir à la moindre occasion.



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Quelques secondes après mon cri, je remarque un éclair roux sur ma droite, le chaton roux me dépassant bien vite et pourchassant également le suspect. Cependant, la foule commence à s'agglutiner et on peine à transpercer cette dernière, pour rejoindre le dédale de ruelles. J'ignore complètement l'incendie derrière moi, me disant que le reste de mon équipage, celui de Ragnar et le reste des gens présents dans la zone devrait réussir à gérer la situation. Pour ma part, je dois me concentrer pleinement sur la capture de ce type!

Un peu perdue dans l'obscurité et le chaos ambiant que je peine à distancer, j'essaie surtout de repérer le Zoan naine, qui cherche aussi son chemin dans le dédale de ruelles, avant de... filer dans un coin en feulant férocement!
Je la rejoint bien vite et je remarque plus loin un homme tournant dans une autre ruelle, Skela lui bondissant dessus et j'entends crier ce qui me semble être l'inconnu quelques secondes plus tard. Je tourne à l'angle et trouve l'homme à terre, Skela plantant fortement ses griffes dans sa jambe gauche et le tirant vers elle avec ses pattes avant... Bon, très clairement, ça va questionner que de voir un chaton avoir la force de tirer un homme adulte, mais qu'importe sur l'instant.

Je me penche et empoigne le col de l'inconnu pour le relever:

- Eh! Pourquoi tu t'enfuies comme ça de l'entrepôt? Tu ne pouvais pas aider les autres?

- Ah! Je... Je... Je voulais chercher de l'aide au fait et...

Un sifflement se fait entendre et une seconde plus tard... une giclure de sang sort de la bouche de l'inconnu et sa tête est pris d'un soubresaut, avant de s'immobiliser, le regard soudainement vitreux.
Bondissant en arrière, je vois son corps s'effondrer sur le coté, du sang s'écoulant peu à peu autour de sa tête... Que... Que s'est-il passé?!?
Tournant la tête à gauche à droite, je remarque bien vite qu'il y a qu'une sortie à la ruelle en face de moi et... là-bas! Une silhouette sur les toits et... qui s'est enfuie!

J'utilise Cloche-Air pour rejoindre les toits, mais le temps que j'arrive, je ne vois personne aux alentours... La coïncidence est trop flagrante, pour qu'une personne se trouve sur un endroit aussi inhabituel qu'un toit en pleine nuit, pour ensuite prendre la fuite, après qu'un type s'effondre raide mort juste à coté de lui... même si j'ignore comment il a fait pour le tuer...

+++


Skela, de son coté, fouille le corps de l'inconnu, remarquant bien vite une étrange plaie: un trou dans le sommet de son crâne.
Elle trouve également une plaque dorée dans sa poche, une sorte d'insigne, avec quelques chiffres dessus, au moment où Yami arrive près d'elle. Par réflexe et reconnaissant une des personnes qui accompagne Ragnar, la Tontatta tend la plaque à Yami:

- Il avait ça dans sa poche et il s'est effondré, quelques secondes après que Kardelya l'aie intercepté, avec un trou dans la tête.

+++


À l'entrepôt, Gaho, qui faisait des réparations plus loin, a rejoint les gens s'agglutinant autour du bâtiment, pour essayer d'éteindre l'incendie et il rejoint bien vite trois types forçant une porte adjacente, pour entrer à l'intérieur.

Dans l'entrepôt, l'œil affuté du charpentier balaye la pièce, surtout du coté du coin en train de brûler, son teint devenant plus blême en quelques secondes, en levant les yeux le long de la colonne de bois... qui s'est embrasé tellement vite?!? Ca monte déjà jusqu'au toit et...

- SORTEZ TOUS ET ÉCARTEZ-VOUS DE L'INCENDIE!

Il sort pour hurler tout ça aux types commençant à peine à rassembler des seaux d'eau, alors qu'un craquement sinistre commence à résonner de plus en plus fort... et tout s'effondre.
Le coin incendié s'écroule, entraînant une partie de l'entrepôt dans sa chute, s'écrasant vers l'intérieur, avec un grand fracas métallique.
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L’équipe de Kardelya put se saisir du suspect. Ce fut du moins ce qu’ils crurent quand un sifflement vint les surprendre et que le crâne de ce dernier fut perforé. Tapis dans l’ombre, Ragnar se dirigea furtivement et à toute vitesse dans cette direction, au niveau des toits du quartier. L’Excuse put voler jusqu’aux toits à l’aide des pouvoirs de son fruit, tentant de poursuivre la cible qui le sema assez rapidement. L’Atout, lui, arriva d’en-dessous, perforant le toute la toiture et stoppant la course de l’ennemi. Il était là, juste en-face de lui. Il n’avait plus qu’à tendre les bras pour s’en saisir. C’est ce qu’il fit. Néanmoins, alors que ses doigts frôlèrent la combinaison de l’individu, il disparut. Grâce à ses sens, il sentit la possibilité de le suivre mais constata en se retournant qu’il était à la limite. Un peu plus loin se trouvait la ligne de front, encore fragile d’accès, risquant de provoquer le réveil d’une armée endormie. Et, au-delà, il n’était évidemment pas le bienvenu. Kardelya le retrouva assez rapidement.

- Il m’a échappé. Vois-tu, malgré mon statut, j’ai encore bien des choses à apprendre. Néanmoins, je peux t’assurer une chose : ce déplacement n’est en rien quelque chose que le premier loustique peut apprendre. Le “soru” est une technique utilisé par les agents spéciaux du gouvernement, et ce, après un entraînement poussif.

- Pourquoi te dévaloriser ainsi, capitaine ? Et puis, on ne connait pas tellement cette ville, il s’est peut-être simplement volatilisé en prenant des chemins cachés de nous autres.

L’Atout tenta de ressentir jusqu’où l’ennemi se retirait, mais il allait bien au-delà de son champ. Il retourna ses talons et se dirigea vers l’entrepôt d’une marche plutôt stricte, les mains dans les poches et le regard sombre. Et le Soru ? Ça ne me dit rien du tout.


•••



Un craquement retentit. L’oreille avertie de Suelto le fit réagir instantanément. La sortie du charpentier, alarmé, confirma la crainte. Hurler fut la seule chose à faire avant l’inévitable. Une immense partie de l’entrepôt s’écroula, écrasant l’ensemble des armes que l’on entendait s’entrechoquer à l’intérieur. Les armes en question n’étaient pas uniquement des épées, des pistolets ou fusils de précision, mais aussi de nombreux explosifs. Il ne fut pas longtemps pour que l’un des fidèles hommes de Ragnar eut de grandes sueurs froides. La première explosion, d’une violence inouïe, propulsa de nombreuses personnes sur quelques mètres et en avala d’autres sans crier gare. Suelto dégaina sa faux et tenta d’envoyer en vain des lames d’air. Il fut méchamment repoussé, brûlé à certains endroits. Impuissant, il se releva et courut pour secourir les blessés qui, sans son aide, se ferait manger par ses flammes de l’enfer.  


•••


De leur côté, l’équipe de l’Atout et de l’Excuse se chargèrent de récupérer la dépouille de l’individu qu’ils traquèrent quelques temps auparavant. Ragnar pressa le pas.  

- Accélérons, dit-il avec impatience sans pour autant manifester son inquiétude.

En effet, il eut comme un mauvais pressentiment.


•••


Les explosions s’enchainèrent à intervalles irréguliers. Tantôt quelques secondes tantôt quelques minutes. Essoufflé, au moment de se saisir d’un enfant légèrement brûlé, l’héroïque révolutionnaire trébucha. Les crépitements de plus en plus rythmés lui indiquèrent l’explosion. En sachant cette action vaine, mais agissant simplement par instinct protecteur, il protégea l’enfant de son corps. Enième explosion. Pas des moindre quand l’on voyait la puissance de celle-ci. Suelto ne regarda même pas les flammes s’approcher de lui. Il se contenta de fermer les yeux et serrer fermement l’enfant contre lui. Il s’imaginait déjà calciné, Yami pleurer sa mort le jour de ses obsèques, mais c’était sans compter sur l’intervention de celui qui le rallia à sa cause. L’Atout stoppa la propagation des flammes avec des mouvements amples de ses bras qui envoyèrent de puissantes lames d’air.  

- Kard’ ! Eteins-nous cette merde ! Balança-t-il à la hâte avant de se retourner vers son camarade. Quant à toi, abruti, va falloir m’expliquer comment un type supposé être brillant puisse être inquiété par des flammes !

La blonde lui passa devant, Ragnar saisit Suelto d’un bras, l’enfant de l’autre, et s’éclipsa de la zone vive impulsion.

- Emmenez-les à l’infirmerie. Maintenant. Robert Oswald vous y attendra. Vite !

Les personnes ayant commis ce crime étaient de toute évidence bien au courant de ce que contenait cet entrepôt. Ragnar serra le poing et son regard franchit un nouveau palier dans la terreur. Des images de haine où il attrapait les coupables, les torturait, puis finissait par leur faire subir les pires atrocités. Des images où il relançait la guerre et faisait pleuvoir des coups meurtriers sur une multitude de personnes lui passaient par la tête. Le temps d’un instant, il n’était plus dans l’instant présent. Les rares personnes qui purent l’observer à cet instant, notamment Yami, eurent la sensation de voir un autre homme. Ragnar sentit une épaule se poser sur lui. Une main qui lui était chère et familière. Celle-ci lui murmura simplement : “Imbécile. Que croyais-tu ? Que ce serait si simple ? Reprends-toi, bon dieu !”.  

- Jonas, lâcha-t-il en se retournant. Mais rien. Personne n’était là. Simplement des hommes, des femmes et des enfants qui couraient partout.  

La nuit entière fut destinée à éteindre cet incendie. Dans les sous-sols du quartier général, Bernadette, Yami, Suelto pensé de ses plaies, Kardelya et Skela étaient regroupés tout autour du cadavre récolté. Les vêtements retirés, aucune démarcation était visible sur le corps. Suelto retira une plaque dorée d’une des poches de l’homme.  

- Quelqu’un a-t-il une idée de ce que ça peut être ?

Bernadette, tétanisée, les yeux larmoyants, se laissa tomber sur les genoux en se tenant la tête.

- Ceci, camarades, c’est notre fin à tous.



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Ragnar m'a rapidement devancé, pour poursuivre ce type, mais il parvient apparemment à s'échapper, parce que je finis par retrouver le capitaine bredouille.
Que... Le Soru? Cela ne me dit absolument rien sur l'instant, mais apprendre que c'est une technique utilisée par le gouvernement mondial, ça ne me rassure vraiment pas:

- Ils n'auront pas perdu de temps à réagir à nos actions; il est clair qu'on les dérange, d'une manière ou d'une autre. C'est évident que ta présence et ta réputation vont pas mal chambouler les choses...
Mais je n'aurai jamais pensé qu'ils attaqueraient aussi brutalement si peu de temps après notre arrivée... L'entrepôt!


Me rappelant soudainement qu'une partie de mon équipage est resté sur place, je tourne les talons et file vers la planque à coup de Cloche-Air.
Sur place, je remarque bien vite la destruction ambiante, l'entrepôt semblant sacrément endommagé, par rapport à ce que j'avais laissé derrière moi.

J'ai à peine le temps de constater les dégâts que Ragnar hurle quelque chose, me faisant rapidement acquiescer, en générant des tourbillons d'air autour de mes avant-bras:

- Compris, capitaine!

Je projette de larges souffles d'air autour de l'entrepôt, créant une sorte de dôme autour de ce dernier. J'essaie d'affaiblir les flammes en les privant d'oxygène, comme les fois où j'avais pu éteindre des flammes de torche avec mes pouvoirs, en infiltration... même si c'est à une autre échelle ici.
Je peine à contrôler mes pouvoirs et quelques bourrasques tordent légèrement le hangar, me faisant stopper quelques secondes, pour essayer de reprendre mes esprits et me concentrer sur un autre endroit.

Peu à peu, l'incendie s'éteint et les gens s'agglutinent bien vite autour de nous, alors que je recule de quelques pas, en soupirant longuement de fatigue, épongeant la sueur dégoulinant de mon front.

Haussant un sourcil devant la mention de ce "Jonas" par Ragnar, je mets deux trois secondes à capter de qui il parlait... mais ce n'est pas le moment de se concentrer sur des personnes brisées après des semaines de torture...

Intriguée, je vois aussi la réaction de Bernadette, semblant effondrée sur l'instant, devant cette plaque dorée... C'est si grave que ça?

Je me penche vers ce bout de métal, l'observant plus attentivement... et mon visage devient blême une dizaine de secondes plus tard. Cette forme, ce symbole central, cette série de chiffres en bas...

- Un insigne de police...

Un homme beugle dans notre dos:

- Alors ça y est?!? Les chiens du gouvernement commencent dans la fourberie, à nous attaquer quelques heures après notre cessez-le-feu?!?
Heureusement que vous vous êtes débarrassé de lui, même s'il a eu le temps d'attaquer l'entrepôt!


Je grince des dents en secouant la tête négativement:

- Calmez-vous, nous n'y sommes pour rien... et je ne pense pas que se retrouver avec le corps d'un policier dans le climat actuel soit une bonne chose...
Hachiro?


Perçant la foule d'un pas lent et détaché, le médecin de mon équipage m'adresse un bref signe de salut de l'index et du majeur:

- Je suis là chef, c'est à quel sujet?

- Tu peux ausculter le corps de ce type? Je n'arrive pas à déterminer de quelle façon il a été tué...

Haussant les épaules d'un air nonchalant, l'ancien médecin de guerre se penche sur la plaie de l'inconnu, réfléchissant un temps, avant de demander de l'aide pour transporter le corps dans un bungalow.
Pendant ce temps, je remarque que Gaho tourne autour de l'entrepôt, s'attardant pas mal sur le coin détruit et affaissé vers l'intérieur. D'habitude fanfaron, je remarque alors son regard sérieux, comme lorsqu'il fait des réparations ou travaux importants sur quelque chose...

Je soupire longuement, en baissant les yeux vers la plaque dorée que j'avais ramassé machinalement:

- En attendant d'en savoir plus sur cette histoire, nous allons devoir calmer les tensions. Si on part dans une vendetta vengeresse aussitôt après ce cessez-le-feu, cette île risque gros et pourrait bien sombrer dans un nouveau conflit dont elle ne se relèverait pas.
Ragnar a soulevé un problème qui mérite réflexion de notre coté et je vais voir ce que je peux faire avec mon équipe, autour de l'attaque de l'entrepôt et de cette personne abattue plus tôt.
Je suis supposé protéger Ragnar et je considère que la révolution de Parisse est aussi incluse dedans et je promets que je vais tout faire pour que cette histoire soit réglée, sans d'avantage de destruction ou de sang coulé.


Je frappe doucement du poing sur mon cœur, avant de rejoindre Gaho, demandant à Skela de surveiller Hachiro, alors que Mibu et Segawa semblent absents, étant sans doute retournés dans notre bungalow.
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Le camp révolutionnaire reçut un grand coup ce soir. Bernadette fut la plus impactée par cette trouvaille qui annonçait de lourdes représailles. Tandis que l’Atout restait silencieux, Kardelya prit la parole pour tenter d’apaiser les choses. C’était pour ces raisons que Ragnar la choisit elle et personne d’autre. Elle prit les devants et demanda une auscultation.  

- Nous dormirons peu pendant quelques jours. Kardelya, je te retire de la mission qui consistait à me protéger. Nous avons besoin de toi et ton équipe pour d’autres choses. Suelto et Yami, vous serez maintenant avec moi pour assurer mes arrières. Quand le vieil Oswald aura terminé avec les blessés, il rejoindra Hachira. Deux experts en valent mieux qu’un.  

Son regard se dirigea ensuite en direction de la plaque recueillie sur le cadavre.  

- Avant que la nouvelle se répande partout, il nous faut trouver l’identité de cet homme et vérifier si cette plaque lui appartenait réellement. Le numéro inscrit dessus devrait nous aider. Kardelya, je te laisse collaborer avec les hommes de Bernadette, certains sont infiltrés de l’autre côté de la ligne de front.  

Ragnar gardait en tête le fait que des infiltrés ennemis pouvaient également se trouver dans son camp. Il releva la tête en direction de toute l’assemblée.

- Vous avez un tous un rôle essentiel pour notre entreprise. Cette nuit, nous avons probablement perdu gros et, croyez-moi, je ne parle pas de pertes matérielles. Nous devons remobiliser les hommes, continuer les chantiers et les rénovations. C’est épuisant. C’est long. On a la nette impression de ne pas avancer, mais nos efforts payeront, croyez-le et soyez-en convaincus.  

Les regards déterminés, l’Atout put voir en chacun la flamme de la détermination s’embraser. Son Excuse prit congé pour débriefer son équipe et se remettre en selle, tandis qu’il consigna Suelto et Yami à la protection des deux médecins. Il quitta cette salle éclairée par de gros projecteurs installés pour l’occasion, les lumières étant détruites par les nombreux bombardements. Bernadette le suivit d’un pas un peu plus lent. Non pas qu’elle perdait la foi, bien que peut-être un peu, mais plutôt qu’elle réfléchissait sur la situation.  

- Que tu vas-tu faire maintenant ? Demanda-t-elle.  

-  Je dois écrire une lettre à nos amis du parti pacifiste. Pour cela, j’ai besoin d’un papier, d’un stylo et, pour ce dernier, ne t’emmerde pas s’il n’y a pas d’encre, j’ai ce qu’il faut, fit-il en esquissant un sourire. Par mesure de sécurité, je resterai à cet étage. Suelto est convalescent, Yumi épuisé et sobre depuis trop longtemps, alors je vais m’assurer que les deux toubibs puissent bosser en toute sécurité.  

- Bien. Je vais réorganiser la sécurité de nos quartiers et relancer la reconstruction. On ne doit pas nous penser abattu par cette attaque. Tiens, prends cette porte, c’est un ancien bureau et des feuilles doivent encore y traîner.  

Le chef des armées acquiesça d’un signe de tête et ouvrit la porte. Il trouva effectivement un bureau fait d’un bois de chêne et un magnifique fauteuil matelassé. Tout était évidemment poussiéreux, mais après une petite remise à neuf, le résultat en vaudra le détour. Il passa un coup de main sur l’ensemble pour dégager le gros de la poussière, s’installa confortablement sur le fauteuil, tira l’un des tiroirs du bureau dans lequel il trouva une pile de feuilles non usagées. Il y avait un joli pot contenant plusieurs élégants stylos, où l’encre avait séché depuis le temps, mais cela ne posait aucun problème au manipulateur de l’encre. Il saisit l’un d’entre eux, se laissa quelques instants sans rien faire, puis il commença enfin la rédaction de sa lettre. Loin d’être un rédacteur, il se contenta de l’essentiel.

Code:
Madame Banarud, Monsieur Graboche,  

Je vous écris ce jour, tôt le matin, le lendemain de notre rencontre, pour que nous puissions organiser une nouvelle rencontre. L’attentat qui nous coupé dans notre élan a eu lieu dans nos quartiers, dans un entrepôt. Il me semble normal de vous indiquer ce détail, vous savez incontestablement que nous avons été victimes de cette attaque. Nous déplorons de nombreuses victimes, autant morts que blessés, dès le lendemain de l’annonce de notre reddition de la politique. Pour l’heure, nous n’avons évidemment aucun suspect, aucun indice nous indiquant quoi que ce soit. Nous épluchons le moindre élément pouvant nous mener à la vérité.  

Pour des raisons évidentes, je vous invite à me rejoindre, ici, dans nos quartiers pour reprendre nos discussions. Vous serez évidemment bien reçus. Si vous craignez quoi que ce soit, n’hésitez pas à venir accompagnés. Monsieur Rabaud, qui vous remettra cette lettre, sera également le bienvenu et vous accompagnera.  

Dans l’attente de votre réponse, je reste évidemment disponible. J’éviterai les appels téléphoniques, les lignes ont des oreilles.  

Au plaisir de vous revoir.  

Ragnar.



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La soirée semble loin d'être terminée, avec les récents événements, mais très clairement, on joue contre la montre. Cet homme abattu par un inconnu qui a réussi même à échapper à Ragnar... cet entrepôt attaqué... cette plaque dorée... En se basant sur ça, on dirait vraiment que quelqu'un d'autre "pilotait" cet homme, envoyé en mission de sabotage sur la zone. Vus les dégâts sur l'entrepôt, il n'est clairement pas venu les mains vides et était venu là pour détruire et pas pour espionner. Ou bien il aurait bricolé quelque chose sur place, avec les munitions et barils de poudre?

Pour tâcher d'y voir plus clair, j'accompagne Gaho à l'entrepôt, parlant avec l'équipe chargée de l'inventaire des stocks.
Clairement, il y a avait assez de poudre dans l'entrepôt pour raser tout le bâtiment et expédier pas mal de gravats partout autour, endommageant l'ensemble du secteur. Une bombe de faible à moyenne puissance, placée au bon endroit, pourrait suffire à créer une réaction en chaîne et à tout faire sauter.
Mais là, c'est la structure de toute une partie de l'entrepôt qui a été sapée et affaiblie en peu de temps, faisant s'effondrer le bâtiment sur trois quarts du stock, détruisant et endommageant nombre d'armes.
Ils ont à peine entamé l'inventaire, mais il risque clairement d'y avoir pas mal de destruction et d'endommagement de matériel.

Occupée à discuter avec l'équipe logistique, mon regard dérive sur mon charpentier, retirant des gravats à gauche à droite, avant de s'accroupir devant une grosse poutre. Le connaissant d'habitude bavard et avec une tendance à jacasser partout, dès qu'il y a un peu de monde autour de lui, je le trouve étrangement calme... et le voir aussi sérieux m'intrigue fortement.

- Gaho? Qu'est-ce que tu as trouvé?

Je me rapproche, alors qu'il reste silencieux quelques secondes, avant de pointer du doigt quelque chose sur la poutre:

Capitaine... Vous voyez ces tâches sombres ici? Et là? Bon, c'est un peu galère à voir, je me doute... mais ça indique des zones où le bois a plus brûlé qu'ailleurs.
Ok, la poutre et une bonne partie de la structure ont flambées, mais ça a brûlé aussi bien trop vite, par rapport au délai entre l'explosion et l'effondrement de la structure.


- Tu... Tu crois que le feu a débuté avant qu'on s'en rende compte? Que la bombe était plus puissante que l'on pouvait penser de prime abord?

- Hum... Nan je crois pas que ce soit ça. Un feu normal aurait mit presque trente minutes à embraser toute la partie du bâtiment, qui a mit à peine dix à s'effondrer ce soir. Et une bombe plus puissante aurait fait d'avantage de dégâts dès le début, mais là, de ce que j'ai pu voir en arrivant sur les lieux, ça devait être quelque chose de taille assez moyenne...
Et cette odeur... hormis le brûlé, je sens autre chose d'assez fort, surtout sur ces tâches plus sombres... On dirait bien de l'essence, comme ce que l'on met dans certaines machines de chantier, style grues ou poulies.


Je penche la tête sur le coté, en approchant doucement ma main du bois, encore assez chaud, ne prenant pas non plus le risque de me brûler:

- Donc... ce type aurait projeté de l'essence enflammée sur le pilier soutenant le coin de l'entrepôt, avant de prendre la fuite, peut-être en faisant exploser une partie du mur, pour s'échapper dans la panique?

- Peut-être... mais je préfère attendre que le ménage et l'inventaire soient faits, avant d'en tirer des conclusions. Après tout, c'est bien après deux semaines d'intense et perpétuelle réflexion que j'ai pu construire ce cuirassé en Granit marin à 308 canons, pour protéger Erbaf et...

Je roule des yeux en pouffant de rire nerveusement; le voilà reparti dans ses histoires, signe qu'il avait perdu de sa concentration, après m'avoir déballé toutes ses observations.

Je tapote doucement son épaule en me relevant:

- Je croyais qu'il y avait 306 canons sur ton cuirassé?
Allez, je vais voir ce que fabriquent les autres, bonne chance.


Il grimace et rougit légèrement:

- Euh... Ah oui, c'est vrai que j'avais oublié les deux canons à la proue du navire! Pourtant ce sont les plus importants, parce qu'ils tiraient des grappins à plus de 600 mètres de distance et pouvant[...]

Je rigole de plus belle, alors que sa voix s'atténue peu à peu, me doutant qu'il allait bien vite trouver un nouveau public pour ses histoires.

Bon... Hachiro vient d'à-peine commencé à travailler et je commence à savoir qu'une autopsie prend pas mal de temps.
Je passe par les gardes, qui ont renforcés les patrouilles environnantes, tâchant d'écarter les badauds un peu trop curieux. Je prends un peu de temps pour les aider à rassurer et faire partir la foule s’agglutinant petit à petit.

Je vais finalement faire un tour vers le bungalow de Ragnar, levant un sourcil, en le voyant écrire une lettre, m'accoudant contre l'encadrement de la porte:

- Cela fait vraiment bizarre de te voir manipuler autre chose qu'une guitare ou encore les poings, capitaine.
Enfin bref... J'ai discuté un peu avec les gardes, tout en éloignant les badauds trop curieux. Pour l'instant, personne ne semble connaître l'homme abattu, ce qui exclut, pour le moment, l’hypothèse d'un infiltré attendant son heure pour saboter, espionner ou je ne sais quoi d'autre encore.
Il y a quelques détails intrigants aussi au sujet de l'incendie de l'entrepôt, comme quoi on aurait utilisé de l'essence ou quelque chose de ce style, mais Gaho préfère donner ses conclusions après que tout l'entrepôt ait été vérifié.
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Interrompu par l’apparition de Kardelya, alors qu’il peaufiner certains détails de sa lettre, ce dernier continua et fit comme s’il n’y avait personne. La jeune As eu la meilleure des réactions en ne réagissant pas. Elle savait pertinemment que Ragnar l’avait aperçu ou au moins senti, alors elle attendait patiemment. Quand enfin il finit sa relecture, il plia la feuille avant de l’insérer élégamment dans une enveloppe, puis il leva la tête vers son Excuse.  

- Pardonne-moi, Kard’. Comme tu l’as si bien dit en arrivant, il n’est chose courante que de me voir manipuler autre chose que ma guitare. Cette tâche me demande un trop grand effort cognitif et je ne peux me déconcentrer, dit-il en se grattant l’arrière de la tête, embarrassé par sa propre incompétence.

Il scruta la blonde pour tenter de deviner s’il s’agit de bonnes ou mauvaises nouvelles. Ni l’un ni l’autre et elle confirma cette supposition en faisant son rapport.  

- Bien. Je vais envoyer cette invitation à nos camarades de la RPP. J’attends évidemment leur réponse. Pendant ce temps, je compte sur toi pour recueillir le maximum d’élément. De mon côté...  

L’empereur se perdit dans les ténèbres, le regard plongé dans cette plaque avec l’immatriculation d’un agent. On pouvait lire dans son regard qu’une mauvaise idée murissait dans sa tête.  

- De mon côté, ma chère, je vais casser de la pierre, dit-il finalement avec un large sourire aux lèvres.  


•••



La nuit tombée, alors beaucoup rentrèrent immédiatement pour rattraper les quelques de sommeil perdues la nuit précédente. Le chantier vide, l’Atout observa cette plaque et lança son regard en direction de l’autre côté de la ligne de Front.  

- Tu n’y songes tout de même pas ? Questionna Suelto, sortant son camarade de ses songes.

- Il le faut, mon ami. Je vais même te demander de me couvrir.  

- Je ne couvre un type aux tendances suicidaires, tu le sais.  

- Te souviens-tu de François De Goal ?  

- Ouais, le type qui gère les forces armées de la RIP, qui est resté en retrait tout le long notre échange la dernière fois. Et donc ?  

- Vois-tu, autrefois déjà, je sentais en lui un doute qui le tuait à petit feu. Qui mieux que lui peut nous renseigner sur l’identité du type qu’on a retrouvé ?

- Tu ne voudrais pas plutôt dire : qui peut mieux que lui peut nous causer des ennuis ? De toute façon, quand t’as une idée en tête, pas possible de te la faire sortir. File ! Et reviens surtout.


•••


François De Goal. Un homme méticuleux, un acharné du travail bien fait et qui ne comptait pas ses heures passées à enquêter et à organiser. Les enquête, plus tellement à vrai dire, et c’était probablement l’une des choses qui lui manquait le plus. Des enquêtes, il y en avait bien quelques-unes qu’il aurait mené pour répondre à quelques questions existentielles, mais ses supérieurs faisaient en sorte de le couler sous une masse de tâche pour qu’il n’ait rien d’autre à faire que cela. Lorsqu’il rentra chez lui, à une heure tardive, François jeta son sac sur le comptoir de son mini-bar, posa sa chaise sur un tabouret et cherche un verre. Il chercha ensuite sa bouteille de scotch préférée. Il la chercha de longs instants.  La lumière de la lampe installée sur une table à côté de son fauteuil s’alluma. Aussitôt, il dégaina son arme et mis en joue l’individu assit sur ce fauteuil en cuir.  

- Ce n’est que moi, François, ce n’est que moi, dit l’homme en se servant un verre du scotch que cherchait l’ancien détective.  

- Qui es-tu ??  

- Il est vrai que j’ai changé d’apparence depuis notre dernière rencontre. Fais comme chez toi. Installe-toi. Sers-toi un verre. Je t’expliquerai tout.  

Il s’écoula bien quelques minutes avant que le type aux lunettes se décida enfin à ranger son arme. Une de plus et Ragnar lui sautait à la gorge. Jugeant que l’homme en face de lui ne voulait aucun mal, qu’il aimait le scotch et, surtout, qu’il avait des choses à lui dire, François se laissa tenter. Ainsi, après lui avoir servi un bon verre, l’Atout lui raconta tout ce qui nécessaire de savoir. Sa nouvelle place dans la révolution, sa décision de mettre fin à cette guerre, l’attentat qui a eu lieu la nuit dernière... Il ne jugea pas utile de lui dire vers qui sont orientés ses doutes. Néanmoins, il sortit la plaque appartenant à l’agent décédé dans leur camp et la tendit à François.

- Reconnais-tu cette plaque ?

- Elle appartient effectivement à notre police... Ne me dis pas que...

- Je ne dis rien. Nous avons retrouvé cette plaque sur le cadavre d’un type que nous poursuivions, aperçu à côté de notre entrepôt enflammé, puis abattu par un autre type que nous n’avons pu suivre. Je peux néanmoins affirmer qu’il nous a semé avec une technique du Rokushiki. Es-tu au courant de quelque chose ?  

- Aucunement, dit-il totalement démuni. Comment aurais-je pu ordonner une telle chose alors que vous aviez baissé les armes ?...

Pis l’enquêteur eut un sursaut.

- Des représailles sont à prévoir ??

- Nos soldats en meurent d’envie, vois-tu, mais nous tentons de les retenir. Il ne faudrait qu’une telle chose ait lieu une seconde fois. Je n’ai pas besoin de te le dire et, sans même te connaître, je crois quand même voir en toi un homme juste. Je n’ai pas le droit d’être ici et je ne compte pas spécialement revenir te faire une visite surprise. Fais-en sorte que cela ne reproduise plus. C’est tout.

Ragnar termina son verre d’un cul-sec et éteignit la lumière aussitôt. François la ralluma assez rapidement mais le révolutionnaire n’était plus là.  


•••


De retour du bon côté de la ligne de Front, usé et puant, Ragnar se dirigea vers ses quartiers où il se lava à l’aide d’un seau d’eau - à défaut de mieux – et s’installa tranquillement sur son lit. Bras derrière la tête, les yeux rivés vers le plafond fissuré, il songea quelques instants avant de complètement s’endormir.

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Suis-je vraiment étonné de voir Ragnar prendre la plume? Pas vraiment, parce que je l'ai entendu à quelques reprises déjà prendre la parole en public et il sait bien manier les mots. J'imagine qu'il n'y a pas de grandes différences entre l'écrit et l'oral, même si j'avoue ne pas être une grande écrivaine de mon coté et mes "grands discours" sont assez rares.

Je soupire doucement secouant la tête, voyant une expression bien familière sur le visage de Ragnar, un air qui veut dire "je vais faire un truc qui peut être aussi bien qualifié de génial comme de complètement cinglé".

- Sois prudent capitaine. On a déjà pas mal empiété sur les plates-bandes du Gouvernement Mondial et ils sont bien installés sur la zone; on doit s'attendre à tout, quelque soient notre influence ou notre puissance.
Quoiqu'il puisse se passer et quoique tu décides, ne prends rien à la légère, d'accord?


Cela peut semble bien maternel de parler à mon supérieur comme un enfant, mais qu'importe, je ne vais pas m'empêcher de dire ce que je pense, surtout si ça peut permettre de survivre à cette opération.

- Les directives sont données et mon groupe est éparpillé dans la zone, avec chacun leurs missions; pour ma part, j'ai déjà quelques pistes en tête, mais j'attends de pouvoir coupler ça avec les données recueillies sur le terrain et tu seras le premier à qui je ferai part de mes hypothèses.

Je prends finalement congé de Ragnar, le laissant se préparer pour sa mission, que je devine bien culottée.
Pour ma part, je dois me concentrer sur notre camp, avant de penser de nouveau au camp adverse, parce qu'une attaque sur notre sol n'est clairement pas à prendre à la légère.

***

Le lendemain matin, je me réveille un peu vaseuse, après avoir très peu dormi. J'ai donné des directives tout au long de la nuit, surtout auprès de Gaho et Hachiro, le charpentier et le médecin étant tous deux pleinement investis dans leurs missions.
J'avale trois cafés à la suite, pour tâcher de pleinement me réveiller et je pars de suite aux nouvelles de l'entrepôt.

Gaho est absent, s'étant apparemment écroulé vers les six heures du matin, après avoir étudié chaque gravât du bâtiment et on l'a porté dans un bungalow. Bon, j'imagine que je vais devoir attendre son réveil pour savoir ce qu'il a découvert.

Du coté de Hachiro, même s'il a toujours l'air endormi et lent à la détente, il est étonnamment débout lorsque j'arrive dans la grande tente qui sert "d'hôpital de campagne" à la zone, même s'il est un peu somnolent. Cependant, il s'avance bien vite vers moi, en me voyant arriver:

- Salut capitaine. J'ai passé une partie de la nuit à ausculter et autopsier le corps de haut en bas... mais je suis toujours aussi perdu.

- Que veux tu dire par-là?

- Eh bien... Ce type a clairement été abattu d'un tir en pleine tête, la ba... enfin le projectile ayant pulvérisé sa cervelle, pour ensuite frapper et charcuter sa colonne vertébrale. S'il avait survécu à la plaie à la tête, il aurait au minimum été paralysé et en proie à une souffrance horrible et permanente.
De ce que vous m'avez dit, capitaine, celui qui a tiré se trouvait sur un toit, à près d'une cinquantaine de mètres?


- Hum... Oui c'est bien ça, il était de l'autre coté du carrefour de ruelles, sur un toit plus élevé que la moyenne... mais ils nous a repérés dans une nuit à peine éclairée par la lune, dans des ruelles étroites et il...

- Et il a exécuté un tir parfait à longue distance en plein dans le crâne de cet homme.
Le problème... c'est que je n'ai trouvé aucune trace de projectile, ni de traces de son passage dans son organisme.


- Comment ça... pas de traces de passage? Tu veux dire que tu n'as pas trouvé la balle dans la ruelle? Peut-être que quelqu'un l'a récupérée et...

- Non, non je ne parle pas du projectile mais de traces indiquant le passage de ce dernier dans le corps de la victime.
La ruelle a été surveillée du début à la fin et apparemment, personne n'a rien bougé et rien trouvé de particulier.
Et moi... je n'ai trouvé aucune trace, aucun résidu, aucune brûlure dans son corps... Il a juste... un trou dans sa tête et la profondeur de la plaie indique que ça a été tiré avec une grande puissance.
Mais... je n'arrive pas à comprendre ce qui l'a tué.


Je grimace en posant les mains sur mes hanches; ce n'est clairement pas ce à quoi je m'attendais comme rapport... Mais si Hachiro, un médecin de guerre habitué aux morts par balles, n'a absolument rien trouvé sur cette personne... je vois difficilement qui pourrait trouver...

Mais pour moi, une chose semble assez certaine:

- On le visait clairement... Le tir est tellement précis, unique et dans un endroit tellement exigu qu'une ruelle... Et j'étais sur lui, en train de le maintenir par le col; je le couvrais en partie et j'étais une cible plus facile.
Il était tellement en panique... on aurait voulu l'empêcher de craquer trop vite et divulguer d'éventuelles informations?


Parlant un peu pour moi-même, Hachiro semble aussi perplexe que moi, se grattant distraitement la tête.

Je suis brusquement interrompue par des cris dans la cour, me faisant m'avancer vers une fenêtre de l'hôpital... pour voir apparaitre François de Goal?!?
Pour l'avoir vu qu'une seule fois, lors de notre première visite à Parisse, lors de notre entretien avec le président de la République Patriote de Parisse, je reconnais bien vite cette figure du mouvement, commissaire en charge des forces de police républicaine. Et... je vois bien vite qu'il est furieux, haranguant un garde qui se fait petit et nerveux, alors que des gardes révolutionnaires s'approchent, de suite tenus en joue par des policiers accompagnant François!

Je sors en trombe de l'hôpital, prenant une grande inspiration, quitte à utiliser mon pouvoir pour amplifier ma voix:

- STOP!!!

Une puissante bourrasque sort de mes lèvres, balayant l'air au-dessus de tout ce petit monde, qui sursaute et se bloque de suite, alors que je m'avance vers eux, mains en l'air, à hauteur de tête:

- Baissez vos armes, tout de suite! Je ne sais pas pourquoi vous êtes là, commissaire de Goal, mais vous êtes priés de respecter notre cessez-le-feu entamé il y a peu et annoncé par Ragnar Etzmurt!
Et c'est pareil pour vous, gardes! Nous sommes là pour faire cesser ce bain de sang dans lequel vous baignez depuis trop longtemps, alors cessez d'agiter les armes à la moindre déconvenue!


Bloquant un moment, peut-être sur mes mots, le commissaire serre fermement le poing... avant de balancer rageusement quelque chose à mes pieds, chose qui rebondit avec un tintement métallique.
C'est...

- Une plaque de police?

- Pas n'importe quelle "plaque de police", miss Koshin!
Ragnar a osé se pointer chez moi avec cette breloque, pour me menacer à demi-mot, en disant qu'un de mes hommes avait saboté votre entrepôt!
Sauf que... il n'avait comme preuve que ce bout de ferraille sans aucune valeur! Une vulgaire contrefaçon!


Je me baisse pour ramasser cette plaque, l'observant en haussant un sourcil... Que... De quoi il parle à la fin?

- Ce n'est que du bronze saupoudré de paillettes d'or! Même le numéro est un faux! J'ai passé la nuit à consulter les registres et jamais aucun agent n'a ou n'avait eu ce numéro!
Si vous tenez tellement à nous embrouiller avec vos magouilles, TÂCHEZ AU MOINS DE LE FAIRE BIEN!
C'est quoi cette stratégie pitoyable que celle de vous faire passer pour des victimes, après votre simulacre de cessez-le-feu!?!


Je reste silencieuse, observant la plaque dans mes mains, avant de regarder celle sur la chemise du commissaire... C'est difficile de dire si c'est vraiment une contrefaçon... mais à coté, le voir débarquer comme ça aussi furieux, alors que je l'avais vu plus calme lors de mon premier passage à Parisse... Je n'ai vraiment pas l'impression qu'il mente...

Cependant...
Je balaie l'air du bras gauche, pointant l'hôpital de campagne, d'où nous voyons dépasser quelques lits, dont nous voyons deux blessés allongés.

- "Se faire passer pour des victimes?!?"
Rien qu'hier soir, nous avons eu 22 blessés! 5 bras cassés! 6 jambes fracturées! 15 brûlés à des degrés divers! 4 commotions cérébrales! Un homme qui a de graves lésions oculaires, après avoir eu la rétine fortement endommagé par l'éclat de l'explosion, risquant de devenir aveugle!
Ce n'est certes rien, par rapport aux centaines de morts qu'il y a eu dans cette foutue guerre, mais c'est pour éviter de nouveau ce genre de carnage qu'on a voulu tout stopper, d'un coté comme de l'autre!
Hachiro! Ramènes le corps de l'inconnu, s'il-te-plaît!


le médecin bloque un temps, avant de s'engouffrer dans la tente, revenant peu après avec un brancard et le corps du "terroriste" de la veille:

- Nous ignorons complètement qui est cette personne, mais il a fait exploser l'entrepôt, avant de s'enfuir, pour être abattu par un mystérieux tireur et il avait cette plaque sur lui.
Si vous ne nous croyez pas, interrogez les badauds qui s'étaient regroupés, suite à l'explosion, les gardes autour de nous.
Vous pouvez nous critiquer pour nos "méthodes", notre manière de négocier, de s'infiltrer chez vous pour dire notre façon de penser... mais ne vous avisez plus de dire que nous sommes prêts à jouer avec la vie de dizaines d'innocents, pour relancer une guerre aussi absurde que la votre!


Le commissaire serre le poing en faisant un pas vers moi:

- "Ma guerre"!?! Parce que vous croyez que ces montagnes de cadavres et ses rivières de sang dans les rues, se déversant dans nos canaux, ça nous fait plaisir et que c'est ce que l'on voulait!?!

Des fusils se lèvent autour de nous, révolutionnaires comme policiers et les gens commencent à s'agiter, alors que je grimace en baissant la tête...

- Attendez... Non, arrêtez! Non, arrêtons-nous tous tout de suite!

- Et pourquoi on devrait s'arrêter?

- Parce que ça fera l'affaire de la tierce faction qui veut nous faire nous entretuer, en envoyant un sous-fifre dans une mission-suicide juste après que nous ayons tenté d'arrêter cette guerre!


Le commissaire bloque un temps, en croisant les bras et penchant la tête sur le coté:

- Encore cette histoire de tierce faction... comme la dernière fois...
Attendez... quoi, vous ressortez votre théorie fumeuse de la poche? Celle où le gouvernement mondial piloterait la guerre de l'intérieur, pour je ne sais quelle raison?
Et elles seraient où vos preuves? Vous avez un cadavre sorti de nulle part, une grossière plaque contrefaite, vos soldats qui semblent bien prêts à en découdre, pour des personnes qui en ont apparemment "assez de la guerre"... Je ne vois rien qui ressemble de près ou de loin à une implication gouvernementale!


Je grimace, tournant la tête à gauche à droite, pour espérer trouver une bonne idée ou du renfort sur l'instant, parce que je ne trouve clairement rien...
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Dans un sommeil profond, rêvant d’un avenir un peu plus radieux pour ce royaume, où Ville et Campagne vivaient en harmonie, de ce rêve, Ragnar en fut arraché par des braillements venant de l’extérieur. Il se leva la hâte, chose qui provoqua une perte d’équilibre et un mal de crâne assuré. Il passa sa lourde tête au travers de la fenêtre et aperçut François, lourdement accompagné, avec une Kardelya remontée pour lui tenir tête. Pour que l’enquêteur soit dans cet état, lui qui était habituellement calme, c’était certainement que la plaque n’annonçait rien de bon. En écoutant un peu leur conversation, l’Atout comprit qu’il s’agissait d’une contrefaçon. Il frappe du poing contre le rebord de la fenêtre. Enfilant son pantalon et sa chemise de la veille, sans prendre la peine de la boutonner, il descendit les escaliers par sauts, se cognant avec les murs d’en-face pour se réceptionner.

La porte d’entrée et de sortie du bâtiment s’ouvrit violemment. Une aura en sortit. Cette aura, au départ anodine, devint de plus en plus oppressante. Cette aura inspira le désespoir, inspira la terreur et la mort. Les soldats des deux camps, armés et prêts à tirer, baissèrent les bras avant de littéralement s’écrouler face à cette pression écrasante. Seuls Kardelya et François tenaient debout, ressentant malgré tout cette pression. L’Atout, pieds nus et moitié torse nu, sortit enfin du bâtiment en marchant les mains dans les poches, prenant soin d’éviter les corps inertes à ses pieds. Les deux gradés encore en place eurent l’impression que le ciel s’était assombri, qu’ils allaient y passer eux aussi face à cette force écrasante. Ils eurent l’impression que les murs se fissuraient autour d’eux. Ils eurent que leur cœur allait exploser. Ils eurent l’impression de tomber à leur tour, mais ce fut justement à cet instant que Ragnar leva cette pression. Le ciel bleu et le soleil battant revint aussitôt éclairer leurs esprits.

- On va s’arrêter ici, François, car il y aura une nouvelle fois des morts inutiles. Il serait dommage que je te tue de mes mains alors que, dans le fond, je t’estime.

Il vit le regard de l’enquêteur regarder les corps inertes qui gisaient au sol.

- Ils sont seulement dans les vapes. Ils vont se réveiller d’ici peu. Toute cette pagaille est entièrement de ma faute. Kardelya, j’aurais dû te prévenir de ma visite nocturne de la veille. François, pardonne-moi pour ce malentendu. Comme je te l’ai dit dans la nuit, je n’accuse personne. Je souhaitais simplement savoir s’il s’agissait de l’un de tes hommes, ce n’est manifestement pas le cas, alors l’enquête se poursuit. Si par hasard, tu as des nouvelles à ce sujet, tu es évidemment le bienvenu. La guerre est finie pour nous. Comme tu peux le constater derrière moi, l’heure est à la reconstruction et non à la destruction. Cette explosion nous a ralenti et nous ralenti toujours quand on fait le compte de nos pertes humaines.

L’Empereur se gratta l’arrière de la tête.

- Par contre, la prochaine fois, inutile de venir avec autant de monde. Tu n’es pas en danger en ces lieux. Partir avec autant d’hommes n’a certainement pas échappé à tes chefs et je n’aimerais pas qu’ils s’imaginent des choses. Bref. Un simple malentendu. Je n’accuse ni votre parti ni qui que ce soit. On se mange un bout tous les trois un bout avant que ces fainéants se remettent de leur sieste ? J’ai la dalle.


•••


Ils étaient au réfectoire, à la cantine où tous les ouvriers mangeaient le midi. L’heure était effectivement à la reconstruction et chacun y mettait du sien, chacun à son domaine. La Révolution ne manquait pas de cuisinier. Mokthar, le cuisinier de Ragnar intégra le service et fut assez utile. Ainsi, les trois individus furent installés au bout d’une tablée. L’endroit était bruyant mais ce n’était pas plus mal pour discuter de choses sérieuses. Même si en réalité, l’Atout ne comptait pas en rajouter davantage.

- Vois-tu, François, même si l’on m’a conseillé de ne pas le faire, j’ai décidé de te faire confiance. Ta droiture sera peut-être l’une des clés de ce bourbier dans lequel nous sommes.

- C’est bien aimable à toi, Ragnar, mais je ne serai pas l’un de tes hommes.

- Hùhù... Ils disent tout ça au début, dit-il discrètement en pouffant de rire. Bref. Revenons-en à nous mouton, je te prie. Les enquêtes, très franchement, ce n’est pas pour moi. Ça m’emmerde plus qu’autre chose. Kardelya, ici présente, par exemple, est bien plus expérimentée que moi dans le domaine. Néanmoins, même un type comme moi peut commencer à faire un bilan de la situation. Nous avons clairement été attaqué par une organisation. Ce n’est pas l’un d’entre nous. Personne n’a reconnu le visage du cadavre et la personne qui l’a tuée utilisait des capacités propres à un certain groupuscule. Ce n’est pas non plus un membre de ton armée. Alors que nous reste-t-il ? La RPP ? Ils n’ont d’armé et, de nous tous, ce sont peut-être ceux qui militent pour la cause la plus noble. Alors, dis-moi, qui tente de semer le doute dans nos rangs ? Qui tente de remettre de l’huile dans un feu pas complètement éteint ? Nous-mêmes ? Regarde toutes ces femmes et tous ces hommes autour de toi.

Le repas terminé, François repartit sans rien dire avec ses hommes. L'Atout a simplement planté une graine dont il espérait qu’elle germe le plus rapidement possible. Cette graine n’était pas un mensonge. L’heure des comptes approchait à grands pas. D’ailleurs, une missive de la RIP arriva. Ils acceptaient l’invitation et viendraient la semaine suivante. Le soleil se couchait après une brave journée. L’Empereur se trouvait au sommet d’un immeuble accompagné de son Excuse.

- Serons-nous prêts à leur balancer la sauce la semaine prochaine ? Si nous obtenons les preuves nécessaires pour les disculper, la RPP n’hésitera plus. Quant à François, avec des preuves accablantes entre les mains, je pense qu’il saura quoi faire.

Ragnar sentait que cet entretien serait le dernier, sous peine de ne plus être écouté à l'avenir. Sa présence dérangeait. Sa présence nuisait. Il fallait agir rapidement.



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Alors que je bloque sur cette situation fortement tendue, ne sachant pas du tout quoi faire sur l'instant, ayant vraiment l'impression de m'empêtrer dans mes explications et celles de l'enquêteur.
D'ordinaire, je gère mieux les conversations, parce que je connais mieux le contexte, j'ai des infos pour "faire pression" sur la partie adverse... mais là tout me tombe sur la figure, alors que j'apprends que Ragnar a effectivement fait des folies hier et que ça me retombe dessus, d'une façon ou d'une autre.

Subitement, une déferlante d'air balaie la zone, me faisant sursauter, alors que je sens une pression m'écraser brièvement, me faisant grimacer.
J'ai à peine le temps de sentir cette bourrasque s'estomper que tous les soldats s'effondrent autour du commissaire et moi.
Dans le silence assourdissant suivant ce souffle, des bruits de pas me font tourner la tête, pour remarquer Ragnar arriver vers nous, semblant bien nonchalant, par rapport à ce qui vient d'arriver il y a quelques secondes à peine.

- Ra... Ragnar? C'es toi qui a...

Déglutissant nerveusement, je repense à ma manière désastreuse de gérer la dispute avec le commissaire et je recule de quelques pas, pour laisser le capitaine prendre la relève.
Il apaise les tensions à sa façon, alors que je choisis finalement de m'effacer complètement et d'assister de loin à leur conversation, tout en m'occupant de gérer la zone comme je peux.

***


Les deux hommes parlent longuement, Ragnar reprenant quelques-uns de mes arguments, mais de manière plus sereine et convaincante, ce qui semble calmer pas mal le commissaire de Goal.
Effectivement, la piste d'une troisième faction pilotant et alimentant le conflit dans l'ombre semble être la théorie la plus possible dans tout ce bourbier, même si nous manquons de preuves matérielles.
Or, pour un policier, les preuves sont essentielles pour constituer un dossier solide, afin d'éviter l'erreur judiciaire et de créer un scandale en arrêtant la mauvaise personne. Et ici, dans le cadre d'un conflit impactant toute une île, je me doute aussi qu'il se refuse à foncer tête baissée dans une piste hasardeuse et peu justifiée.

Finalement, une heure après le départ du commissaire, c'est Gaho qui donne d'avantage d'informations, après s'être réveillé de sa nuit de recherches:

- Capitaine, il y a un truc vraiment bizarre avec la bombe.
Pour résumer au plus simple: c'est plus un gros baril rempli aux trois-quarts d'explosifs et à un quart de pétrole.
Les explosifs étaient de faible puissance, mais ça a permis d'enflammer et projeter le pétrole tout du long de la poutre supportant le coin de l'entrepôt et ça a rapidement créé un immense incendie.
Les dégâts auraient pu être pires, dans une immense armurerie et poudrière comme cet entrepôt, mais heureusement que tout s'est effondré rapidement, étouffant les flammes par l'appel d'air, les gravats et la poussière. Sinon, tout aurait brûlé la nuit complète et on aurait pu se retrouver avec un immense cratère à la place de l'entrepôt.


Je cogite un temps sur les informations de Gaho, celles de Hachiro, celles fournies par le commissaire et le soir venu, je fais part de ma théorie principale à Ragnar:

- Capitaine, il y a un truc qui cloche dans cette histoire. La bombe est vraiment ingénieuse, une sorte de... "canon à pétrole", permettant d'enflammer à grande vitesse le support principal soutenant tout un coté de l'entrepôt. Clairement, on voulait s'assurer que nous n'aurions jamais le temps de sauver l'entrepôt, qu'importe notre vitesse de réaction.
Mais... à coté de ça, on a un terroriste qui se fait capturer avec un signe d'identité flagrant sur lui, avec cet insigne, même si c'est un faux? C'est un plan qui semble à la fois subtil mais aussi incroyablement incompétent...

À coté, mon médecin dit ne pas comprendre ce qui a pu abattre cet homme, alors que c'est un médecin de guerre, habitué aux plaies par balles...
Clairement, quelqu'un a voulu nous faire trouver un corps "apparemment" républicain, pour relancer les conflits entre les deux factions... mais à coté, le commissaire de la république a grillé la supercherie en à peine une soirée...
Peut-être que c'était même voulu par cette personne qui a abattu le terroriste? Il cherchait à faire croire à de Goal que c'est nous qui essayions de le berner et de bénéficier d'un casus beli, pour relancer la guerre?


Tirant longuement une taffe sur ma cigarette, battant nerveusement du pied par terre, je tremblote légèrement, le regard perdu au loin:

- Une semaine...
C'est difficile à dire, capitaine, mais à coté, nous pourrions nous arranger pour pousser l'ennemi à la faute d'ici-là.
Si on se montre particulièrement sur la place publique, parvenant à convaincre d'avantage les grandes figures révolutionnaires et républicaines, ainsi que la population, on se montera d'avantage dérangeants pour eux.
Qu'importent leurs plans, le fait que l'on parvienne à étendre notre influence du jour au lendemain les poussera à agir, peut-être même de manière précipitée et possiblement visible.
Multiplions les chances de les faire trébucher et assurons-nous d'être là pour le voir, afin de communiquer le maximum de preuves à de Goal. Si nous parvenons à convaincre la République de la présence d'une tierce faction cherchant à nuire aux deux camps et donc à l'île toute entière, on se retrouvera à deux contre ils seront coincés, peut-être obligés de jouer le tout pour le tout.
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