L'année de la Poudre

Rappel du premier message :

Le Conseil du Dragon a désigné Saint Uréa comme cible. Bien que Trisha soit attaché à la Mer de l’Ouest, la Révolution n’a pas de frontière. Prenant l'initiative d’amener quelques volontaires à bon port, il est temps de donner un nouvel élan à cette cité. Seul un code secret est communiqué aux volontaires pour que les appuis présents vérifient la fiabilité des alliés. On est jamais à l'abri de taupe lors d’opérations comme celle-ci.

Une fois identifié, cet afflux nouveau est géré par une habile employée du port du nom d’Elsa. Posant la première fois, le pied sur ce quai. La Cavalière, avec d’autres membres de l’Armée Révolutionnaire, est guidée par cette camarade prometteuse dans un lieu plus à l'abri des regards. Entre deux entrepôts, une trappe est camouflée par des caisses en état de pourrissement et un tapis de feuillage.

Le groupe entre ainsi dans la plaque la plus sûre qu’Elsa est sélectionnée pour les grands préparatifs. Les révolutionnaires descendent ainsi ce sous-sol avec comme seule source lumineuse une simple lampe. L’humidité suinte des murs et des couinements de rats se font entendre.

L’équipe de volontaires parvient enfin à une pièce plus éclairée. Une grande table est placée en son centre. On peut y voir un plan de toute la ville prenant la majorité de l’espace. Quelques papiers, notes et photos y sont disposés ça et là. La Révolution de Saint-Uréa ne chôme pas. La nouvelle d’un intérêt grandissant, à nouveau, pour leur condition sur cette cité les enivre d’une précaution plus grande. Un nouvel échec serait dévastateur pour le bas-peuple.

Trisha s’avance pour contempler tout ce travail préparatif. Son expression sérieuse ne montre aucune émotion, pourtant, elle n’est reste pas moins admirative. Autour de cette imposante table carré, les révolutionnaires sont à l’écoute des différents besoins nécessaires avant le coup d’éclat libérateur. Dans ce premier silence, la Cavalière prend la parole.

“Quels sont les besoins, Camarade Elsa?”

Droit au but, comme à son habitude. Tergiverser ne l'intéresse pas, seul le concret est utile.

Aux cris de "On tient le commandant !" les derniers révos quittent la caserne, d'ou, par peur de blesser l'officier prisonnier, les tirs se sont tues, et traversent la rue en courant avant de s'engouffrer dans la ruelle proche, puis de se jeter tête la première dans la bouche grand ouverte du réseau d'égout locaux, ou tout le monde s'empresse de commencer à disparaitre, courant et se dispersant par petits groupes dans les entrailles souterraines de la ville.

- Ahaha ! Alors c'est vrai on a eu le commandant ?
- Non pas du tout, mais ils y ont cru aussi !
- Dommage !

Profitant à la fois d'une excellente connaissance du terrain, d'un plan d'évacuation préparé et dans des tunnels balisés à l'avance, et surtout d'une bande de soldats n'ayant aucun envie de courser des révolutionnaires armés dans des égouts obscurs et puants, l'équipe de l'AR creuse l'écart, cornaquant les marines en fuite vers une dizaine d'abris relativement surs dans les profondeurs antiques de la ville. Et ou on peut enfin commencer à se reposer, compter les blessures, se mettre de grandes tapes de félicitations dans le dos, ou tendre l'oreille vers les rapports qui arrivent par den den de la surface.

Visiblement la haut, les marines sont encore sous le choc devant la vitesse et l'efficacité de l'assaut. Et le commandant Nœud Pap présentement plus occupé à soigner ses blessures et a fustiger ses soldats qu'a préparer une riposte ou une poursuite efficace. Ce qui laisse aux officiers de la révolution le temps de se réunir à nouveau pour discuter de la suite des opérations.

- Ce qu'il faut maintenant, c'est recruter les soldats ! Il faut les convaincre pendant qu'on vient de les sauver de la mort. Trisha, il nous faut un discours !

Les bras croisés, Trisha entend la sollicitation du cyborg. Celui-ci semble avoir des attentes envers elle. À cette heure de toutes les réjouissances, la Cavalière prend ainsi la parole.

“Nous avons tous persévéré pour faire valoir la voix et la justice du peuple. Peu importe leur propagande, aucun mot ne pourra mieux définir nos actes.”

Son regard déterminé fixe les marins sauvés de leur exécution. Les poings serrés, elle décrit ce qu'elle exercre.

“La noblesse a toujours piétiné toutes les volontés des opprimés. Quelle que soit sa forme, elle ne pronera que l'infamie et l'injustice. Ici, nous ne sommes les valets de personnes. Nous ne sommes les sujets d'aucun homme. Nos rêves d'avenir portent plus de dignité que n'importe quelle tête couronnée. Et cette lutte pour l'utopie ne s'épuisera jamais dans les méandres de l'éternité. Pendant que les privilégiés s'érodent dans leur propre corruption, nous nous maintiendrons comme nous l'avons toujours fait. Nos âmes continuerons de bruler pour nos valeurs.”

Ses yeux balayent son auditoire avec fierté. La posture droite malgré sa maladie noircissent son regard, sa voix exprime ,avec ferveur, l'espoir qui lui fait supporter encore sa cruelle existence.

“Car nous ne nous secourons pas pour le profit. Nous ne nous battons pas pour l'argent. Nous ne nous sacrifions pas pour les vices d'un autre. Nous sommes l'Armée des peuples, l'Armée du Monde et l'Armée des rêves. Nous sommes…”

Regardant un instant sa paume, elle la referme soudain. Il y jaillit quelques étincelles électriques avant quelle ne lève son poing vers le ciel. Une dernière exclamation résonne dans les égouts.

“La Révolution !”