Les Ombres s'amusaient comme des petits n'enfants.
Entre ceux qui pourfendaient à tort et à travers d'innocents marchands, ceux qui volaient les sous vêtements, et ceux qui se contentaient de faire leur job (ce qui est honorable en soi, même si j'suis pas trop au courant de son sens, à honorable), bah v'là que moi, j'me sentais un peu hors de propos.
Enfin, nan, pas totalement. Y'a juste quand je voyais cette tache de Kusanagi, que j'me sentais pas une Ombre. D'autant plus que la cruche de cap'taine, elle disait rien, c'est limite si elle approuvait pas ça. Même si, j'me doutais bien qu'elle l'approuvait.
Mais pas moi. Et moi, j'suis une p'tite pute. Tôt ou tard, et plutôt tôt, bah le pauv' Kusanagi, personne il comprendra mais on va le retrouver crevé dans un endroit plus ou moins sordide / inattendu.
Les gens comme lui, ils méritent pas de vivre. Bon, m'okay, j'suis pas la mieux placée pour dire ça ! Moi qui prend un vil plaisir à subsister sur le malheur de son prochain ! Mais, ce mec là, il est mauvais. Vraiment mauvais, dans le sens littéral du terme. Un meurtre de temps en temps, ça allait. Après tout, y'a toujours une bonne raison pour en commettre un. Un viol aussi, même si de mon point de vue féminin, j'trouvais ça plus que limite ...
J'sais pas. C'est sûrement parce que je prends pas particulièrement plaisir à pourrir les gens jusqu'à ces extrêmes.
Je me sens un peu l'âme d'un Marine, tiens.
P't'être qu'au fond, c'est chez eux que j'aurai dû rester. Après tout, moi, j'avais des rêves d'enfant. Rêves de protéger le monde des gens comme lui.
Mais je suis plus une petite fille. Une petite fille ne s'amuserait pas à tuer pour arriver à la fin du mois. Une petite fille ne prendrait pas autant de plaisir à tromper ce bon samaritain prêt à tout pour elle, pour le laisser avec un goût de cendre sur les lèvres.
Est-ce que ça fait de moi un monstre ?
Trop pas, ça fait de moi une princesse !
J'ai le droit d'être une salope envers les petites gens, après tout, ils m'appartiennent. Par contre, pour cette même raison, j'peux pas laisser un tel connard faire ce qu'il veut d'eux. Ainsi dit, ainsi fait, c'est un peu plus sereine que j'envisageais la vie. Ma vie.
Noyé, ça sonnait bien comme mort pour une fripouille de son genre.
Mais voilà qu'un cri peu commun me sortait de mes sinistres lubies.
Le mécano nain venait de s'emparer de deux jumelles qui, semblait-il, n'était pas si d'accord que ça pour se séparer de leur ancienne maîtresse. Je les comprends, mais j'y peux rien. Y'a marqué "Services Sociaux" sur ma tronche ?! Bah nan ! Alors qu'elles se débrouillent toutes seules les morveuses namého ! Et là ensuite un PAM !
Yuan qui faisait mumuse avec un bourgeois, à en croire son intervention.
... 'fallait décidément que, moi aussi, j'tente de me mettre à leur niveau.
Alors, le pas traînant, le sourire en coin bien vicieux (qui faisait belle image à mon équipage de débiles), v'là que j'ramassais un pistolet d'un garde trompant dans son sang (un sang à la belle teinte vermeil), et que je me dirigeais en direction d'une marchande et de ses, je supposais, deux filles.
La mère et la gamine se sont recroquevillées sur elles-mêmes, alors que j'approchais. La grande perche, quand à elle, se contentait de me regarder avec une neutralité bien trop dérangeante. A garder à l’œil, c'tait le genre de catin à m'faire un coup tordu.
Un peu comme moi, en gros.
Désormais à quelques centimètres d'elles, voilà que, dans un geste qui se voulait maternel (mais bon, j'avais jamais eu cet instinct là, que voulez-vous qu'je vous dise ...), je caressais la chevelure d'une enfant qui tremblait comme une feuille.
Et bon, vous me connaissez. Vous savez très bien que je me suis sentie obligée de la rassurer.
- C'est le méchant Kusasa et Aoi qui te font peur, ma chérie ? Il faut paaas. Nan, ils sont trèèèès gentils quand on les connait. Enfin, parfois ça leur arrive de péter un plomb, tu sais ? Et ça leur arriver de violer des enfants, et juste après de les mutiler puis d'les tuer ! Enfin, j'suis pas trop sûre de l'ordre maintenant que j'y pense ... Et Nakano lui il est du genre à bouffer les marmots ...
Je faisais mine de me gratter la tête, en pleine réflexion.$
Et bien que ça avait l'air gros, j'crois bien que toutes trois m'ont bien cru.
Enfin, j'dis ça par rapport à la mine terrifiée que la mère et la gamine affichaient. Même que la gamine elle s'est mise à tracer comme une folle en poussant de cri de bébé hérisson cocaïnomane n'ayant pas eu sa dose ! Sauf qu'à un moment, elle a glissé sur une flaque de flotte / pisse / sang (d'où j'étais, j'arrivais pas à déterminer c'que ça pouvait être), et elle s'est empalée sur un truc pointu.
Merde, ça, c'était pas prévu.
J'suis restée figée un p'tit moment, comme ça, sachant pas comment réagir.
Faire peur à des gamins, c'était normal ! Un petit plaisir de la vie innocent ! Mais les tuer ! Les tuer ! Puis merde, c'pas moi qui l'ait tuée ! Je lui ai jamais demandée de courir comme une conne et de s'embrocher sur le premier truc qui dépasse du sol ! J'suis innocente !
Mais vu comment tout le monde me regardait. Vu comment sa mère me regardait. Et même, vu comment le regard mort de cette enfant me fixait ...
Bastion, Tao.
C'est pas ta faute. Tout le monde croit que ça l'est, mais toi tu sais clairement que nan !
T'y crois hein ?! Dis moi que t'y crois ?!
Puis merde ! Autant être un monstre jusqu'au bout !
- Bon, après ce p'tit interlude musicale, bah, toi la grande perche, tu vas me suivre et tu vas voir de plus près c'que j'viens de raconter. Et toi la grosse truie, bah, pas de chance. Enfin si, quand même : J't'ai pas saignée à blanc, et Nakano t'as pas bouffée.
Naturellement, avec le canon de mon arme en plein dans sa gueule.
Si bien que, malgré le fait que je venais de lui chopper ses deux enfants d'une traite, elle arrivait seulement à marmonner un vague "C'est trop aimable", avant que je m'éloigne avec sa fille aînée, que je tenais fermement par le bras.
- T'es pas très expressive, dis moi.
- Cette vie ou une autre, qu'importe. Rester dans une cage aux barreaux de fer noir ou d'or ne me rend pas moins captive.
... Il n'y a décidément plus d'enfance sur cette terre.
La grande perche devait pas avoir plus de seize, dix-sept ans, et v'là les discours qu'elle me clame. J'en suis blasée. Alors, histoire de, v'là que je lui balance un sac à la gueule, et que je lui dis de faire mon sale boulot : A savoir détrousser ses semblables.
Et pour m'assurer qu'elle coopère bien, malgré mon intime conviction qu'au fond, la vie de roublarde ne la dérangeait pas plus que ça, bah j'tenais mon arme en joue.
Bref, ça aurait pu mieux se passer. Comme ça aurait pu se passer de façon beaucoup moins agréable.
Note à moi-même : Ne plus regarder le coté gauche de la salle.
Et là, une bonne vingtaine de minutes après, v'là que des bruits qui n'avaient rien à faire là résonnaient. Et j'ai compris tout d'suite que ça sonnait le glas de la fuite.
Mais il était trop tard : Les ennemis se déversaient dans la salle tel un flot putride d'excréments !
L'action, même pour moi, était trop rapide ! Je vidais le chargeur de mon arme aussi vite que je le pouvais, mais à travers le chaos, j'avais aucune idée de qui j'avais touché, ou de tout simplement de si j'avais touché. J'sais juste que j'ai couru droit en direction de ma servante, que je l'ai chopée par le bras et que j'ai couru en direction de mon groupe "d'alliés", dans l'espoir qu'ils me protègent.
KABOUM !
V'là que le fracas d'acier contre mur avait résonné, levant un nuage de poussière et autres décombres.
Aucune idée de ce qu'il s'était passé, ni de comment ça l'était. Tout ce qu'je sais, c'est qu'à travers le nuage soulevé par l'explosion, j'voyais des silhouettes fugitives s'affronter et s'enfuir. M'a pas fallu une seconde pour voir le gros trou dans le mur et comprendre que c'était la voie royale par laquelle s'enfuir.
Même si, quand même, le cri de la cheftaine m'a un peu enlevé tous doutes.
- Allez grande perche, le conte de fées moderne nous attend là dehors !
- Si vous le dites, princesse.
Je crois que j'vais m'attacher à cette gamine, tiens.
Dernière édition par Tao Song le Sam 29 Déc 2012 - 23:37, édité 7 fois